COMM.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10352 F
Pourvoi n° B 17-17.618
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Menuiserie Grégoire, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 23 février 2017 par la cour d'appel de Bordeaux (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Quasaris, société civile, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme X..., conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Y..., avocat général référendaire, Mme Labat, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Menuiserie Grégoire, de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Quasaris ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller référendaire, l'avis de Mme Y..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Menuiserie Grégoire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Quasaris la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Menuiserie Grégoire
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le contrat signé le 23 avril 2013 régit les relations entre les parties ; déclaré la société Menuiseries Grégoire responsable des désordres survenus à la livraison ainsi que du retard de livraison, et ce jusqu'à la date du procès-verbal de réception ; d'avoir en conséquence condamné la société Menuiseries Grégoire à payer à la société Quasaris la somme de 800,98 €, toute compensation faite, notamment d'une somme de 4 814,82 € à titre de pénalités de retard, outre intérêts au taux légal à compter du 24 juillet 2014, date de l'assignation ; d'avoir débouté la société Menuiseries Grégoire de sa demande de condamnation de la société Quasaris au paiement de la somme de 4 028,01 € en règlement du solde de contrat de vente du matériel avec intérêt au taux légal à compter de la demande ; et de l'avoir déboutée de sa demande de restitution de toutes les sommes payées à la société Quasaris en exécution du jugement, soit 3 092,32 € ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'il résulte des pièces du dossier que le 15 avril 2013, la SCI Quasaris a accepté un devis présenté par la société Menuiseries Grégoire portant sur la fourniture de menuiseries moyennant le prix de 37 000 euros TTC payable par un acompte de 30 % à la commande, le solde étant payable par chèque à la livraison ; qu'un chèque d'un montant de 11 100 euros correspondant aux 30 % a été remis ce même jour et la livraison était mentionnée comme « souhaitée par le client première semaine de juillet 2013 » ; que le 22 avril 2013, un document intitulé Marché de Travaux Publics (en réalité : « privés ») a été signé entre la SCI Quasaris et la société Menuiseries Grégoire portant la « Fourniture menuiseries extérieures » ; que la société Menuiseries Grégoire soutient que seul le contrat signé le 15 avril doit être pris en compte alors que la SCI Quasaris affirme que leurs relations contractuelles sont liées par le contrat du 22 avril 2013 qui constitue selon elle un contrat d'entreprise ; qu'or il convient de relever que le procès-verbal de réception en date du 5 décembre 2013 signé par la société Menuiseries Grégoire et par la SCI Quasaris fait effectivement expressément référence à ce contrat du 22 avril 2013 ; que néanmoins ce procès-verbal indique tout aussi clairement qu'il s'agit de la réception du lot n° 4 lequel consistait en la « Fourniture menuiseries extérieures » ; qu'il apparaît ainsi clairement que le contrat liant les parties ne portait que sur la fourniture et la livraison de menuiseries, et ce sans aucune pose et que dans ces conditions, il a été improprement qualifié de contrat d'entreprise, le seul fait que le commercial de la société Menuiseries Grégoire ait indiqué le nom d'un poseur à la SCI ne pouvant suffire à établir la qualité de Marché de travaux ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a dit que le contrat du 22 avril 2013 était celui liant les parties, mais qu'il avait été improprement qualifié de contrat de travaux ; que le premier juge a justement retenu que les parties en signant ce contrat dont il n'est pas démontré que le commercial n'avait pas qualité pour engager la société Menuiseries Grégoire, étant rappelé que cette dernière a signé le procès-verbal de réception qui ne fait référence qu'à ce second document, ont accepté les conditions y figurant ; qu'il convient de relever que la clause Délai et retard d'exécution contenue dans le contrat du 22 avril 2013 dispose : « délai contractuel, 12 mois tous corps d'état ; délai d'exécution : démarrage VRD/Terrassement définitif plate-forme en parallèle du Gros oeuvre : septembre 2012 ; pénalités de retard : sans mise en demeure, il pourra être appliqué une pénalité de 1/1000e du montant des travaux du marché du lot par jour calendaire, les pénalités seront appliquées sur situations mensuelles, elles auront cependant un caractère provisoire si la date de livraison est respectée, elles seront alors annulées, dans le cas contraire, elles seront acquises au maître de l'ouvrage » ; qu'il convient de relever que la date de livraison mentionnée sur le devis du 15 avril 2013 comme devant intervenir la 1ère semaine de juillet 2013 n'a pas été reprise dans le contrat signé le 22 avril 2013 dont la SCI Quasaris soutient qu'il est le seul contrat liant les parties ; que de même elle ne verse aux débats aucun élément tel un calendrier de chantier prévoyant une telle livraison ni des comptes rendus de chantier faisant état d'un retard de livraison de la part de la société Menuiseries Grégoire ; que néanmoins, il n'est pas contesté que la livraison qui était intervenue le 15 juillet 2013 avec de nombreuses réserves (éléments dégradés ou absents), n'a finalement été conforme à la commande qu'à la date du 5 décembre 2013, date du procès-verbal de réception à l'exception de deux portes non livrées ; que dans ces conditions, c'est par une exacte analyse des faits que la cour adopte que le premier juge a dit y avoir lieu à application des pénalités de retard contractuelles et a fixé le montant de celles-ci à la somme de 4 814,82 euros ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement sur ce point ; que la cour relève que la SCI Quasaris ne conteste pas devoir à la société Menuiseries Grégoire une somme de 4 178,79 euros ; qu'il y a lieu de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Menuiseries Grégoire à payer à la SCI Quasaris la somme de 800,98 euros compte tenu de la compensation entre les sommes dues par chacune de ces sociétés et les sommes déjà versées ; qu'en ce qui concerne les deux portes manquantes, la cour relève qu'à la date du jugement déféré, ces portes n'avaient pas été livrées, cette livraison ayant été ordonnée par ce jugement du 12 mai 2015 ; qu'il ressort des pièces produites que lors de la tentative de livraison de ces portes après cette décision, les portes présentaient des désordres, ce que la société Menuiseries Grégoire reconnaît dans un courrier en date du 15 juin 2015 ; qu'il n'est plus contesté que l'une des portes a finalement été livrée conforme le 6 juillet 2015, mais que la livraison de la seconde porte a été refusée par la SCI ; que la SCI Quasaris sollicite la liquidation de l'astreinte prononcée par le premier juge soit 10 000 euros et demande le prononcé d'une nouvelle astreinte ; que quand une obligation de faire a été ordonnée par un juge, sous astreinte, c'est le juge de l'exécution qui est seul compétent pour liquider l'astreinte si le juge l'ayant prononcée ne s'en est pas réservé le pouvoir conformément aux dispositions de l'article L 131-3 du code des procédures civiles d'exécution ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance de Bergerac ne s'étant pas réservé la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel de Bordeaux n'est pas compétente pour statuer sur la demande de liquidation de l'astreinte réclamée ; que d'autre part, en l'état du dossier, il n'apparaît pas opportun d'ordonner le prononcé d'une nouvelle mesure d'astreinte ;
ET AUX MOTIFS RÉPUTÉS ADOPTÉS QU'il ressort des pièces qu'un premier devis adressé par la SAS Menuiseries Grégoire a été accepté par la SCI Quasaris le 15/04/2013, devis portant sur la fabrication et la livraison de menuiseries extérieures, avec un délai de livraison fixé la première semaine de juillet 2013 ; qu'un second document, en date du 22/04/2013, intitulé « marché de travaux privés », a été signé par la SCI Quasaris, document comportant une clause pénale (pénalités en cas de retard) ; que sur ce document, est apposé le tampon de la SAS Menuiseries Grégoire, suivi d'une signature à en-tête de la société défenderesse ; qu'à ce document est annexée l'attestation d'assurance décennale de la SAS Menuiseries Grégoire ; que la SCI Quasaris verse aux débats la carte de visite du commercial ayant participé à la conclusion du contrat, M. Z..., carte de visite à en-tête des menuiseries Grégoire ; qu'il importe en conséquence peu que M. Z... soit salarié de la SARL Grégoire Distribution, entreprise en charge de la distribution des produits de la SAS Menuiseries Grégoire, cette dernière étant engagée par le contrat signé le 22/04/2013 sinon directement du moins par le mandat apparent que détenait le commercial ; que la première livraison des éléments, dont certains étaient abîmés, est intervenue le 15 juillet 2013 ; que le maître de l'ouvrage a signalé, dès réception, à la SAS Menuiseries Grégoire les éléments dégradés ; qu'à la suite de l'intervention de la SAS Menuiseries Grégoire, un procès-verbal de réception sans réserve a été signé le 05/12/2013, à l'exception de deux portes en acier non encore livrées, motif pris par la société défenderesse d'une absence d'engagement par la demanderesse d'un paiement au comptant et à la livraison ; qu'un commandement interpellatif d'huissier a été délivré à la SAS Menuiseries Grégoire le 20/12/2013, pour paiement après compensation par la société défenderesse de la somme de 1 427,68 euros, correspondant à la différence entre pénalités de retard et trop-perçu d'une part et solde de facture représentant les éléments non encore livrés ; que le marché signé le 22/04/2013 est improprement qualifié de marché de travaux dans la mesure où il s'agissait d'une vente et non d'un contrat d'entreprise, la pose des menuiseries n'étant pas à la charge de la SAS Menuiseries Grégoire ; que pour autant, il engage la société défenderesse, notamment quant aux pénalités de retard qui y sont mentionnées (1/1000e du montant du marché par jour calendaire de retard) ; que la SAS Menuiseries Grégoire fait valoir le mail adressé le 16 juillet 2013 par la SCI Quasaris, arguant de refus de réceptionner les éléments non encore livrés, compte tenu des premiers désordres constatés, pour prétendre à un retard qui ne lui est pas imputable ; que pour autant, il est constant : qu'entre la date de livraison prévue initialement (1re semaine de juillet 2013) et la réception sans réserve des premiers éléments (5 décembre 2013), près de cinq mois se sont écoulés ; que ce retard est exclusivement le fait de la société défenderesse qui a livré des éléments dégradés puis a pris du retard dans la constatation des désordres et la réparation ; qu'il y a lieu en conséquence d'appliquer les pénalités prévues, sur cette période ; que le décompte fourni par le maître d'oeuvre (Forma 3+) fait donc apparaître, au 5 décembre 2013, une pénalité de 4 814,82 euros ; qu'il ne sera, en revanche, pas appliqué de pénalités de retard pour la période subséquente, dans la mesure où : la SCI Quasaris a refusé d'en prendre livraison en juillet 2013 ; que, surtout, les relations contractuelles, aux termes des mails échangés, se sont très rapidement dégradées, au point d'empêcher toute réception des éléments non encore livrés ; que les comptes entre parties s'établissent en conséquence comme suit : pénalités de retard, 4 814,82 euros – trop-perçu par la société 164,65 euros, à déduire : solde des travaux à la charge du demandeur 4 178,49 euros, solde à la charge de la société défenderesse 800,98 euros ; que concernant la livraison des éléments restants, la SAS Menuiseries Grégoire ne justifie par aucune pièce de la date de fabrication de ces éléments et de la date où ils étaient disponibles ; qu'il y a donc lieu de la condamner à livrer, dans les quinze jours de la signification de la présente décision, les deux portes manquantes, sous astreinte, comme exposé dans le dispositif de la décision ;
1°) ALORS QU'en l'état d'une contestation relative à l'existence d'un mandat apparent, en jugeant qu'« il n'est pas démontré que le commercial n'avait pas qualité pour engager la société Menuiseries Grégoire », la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, et violé l'article 1315 (désormais 1353) du code civil ;
2°) ALORS EN TOUT CAS QU'ayant constaté que seul le contrat signé le 22 avril 2013 liait les parties, en condamnant la société Menuiseries Grégoire au paiement de pénalités de retard au visa de la norme Afnor P 03-001 relative aux « Marchés privés des travaux de bâtiment » tout en qualifiant le contrat de vente et sans dire en quoi le retard aurait causé un préjudice, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé l'article 1147 (désormais 1231-1) du code civil ;
3°) ALORS ENFIN qu'en condamnant le vendeur à des pénalités de retard sans répondre à ses conclusions soutenant que la date de livraison n'était qu'indicative, et rappelant à titre subsidiaire que la pénalité était limitée par la norme à 5 % du montant du marché, et que le retard s'appréciait au jour de la livraison, non de la levée des réserves, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Menuiseries Grégoire à livrer la porte restante dans les quinze jours de la signification de la décision et, passé ce délai, sous astreinte de 50 € par jour de retard, et ce pendant 200 jours ;
AUX MOTIFS QU'en ce qui concerne les deux portes manquantes, la cour relève qu'à la date du jugement déféré, ces portes n'avaient pas été livrées, cette livraison ayant été ordonnée par ce jugement du 12 mai 2015 ; qu'il ressort des pièces produites que lors de la tentative de livraison de ces portes après cette décision, les portes présentaient des désordres, ce que la société Menuiseries Grégoire reconnaît dans un courrier en date du 15 juin 2015 ; qu'il n'est plus contesté que l'une des portes a finalement été livrée conforme le 6 juillet 2015, mais que la livraison de la seconde porte a été refusée par la SCI ; que la SCI Quasaris sollicite la liquidation de l'astreinte prononcée par le premier juge soit 10 000 euros et demande le prononcé d'une nouvelle astreinte ; que quand une obligation de faire a été ordonnée par un juge, sous astreinte, c'est le juge de l'exécution qui est seul compétent pour liquider l'astreinte si le juge l'ayant prononcée ne s'en est pas réservé le pouvoir conformément aux dispositions de l'article L 131-3 du code des procédures civiles d'exécution ; qu'en l'espèce, le tribunal d'instance de Bergerac ne s'étant pas réservé la liquidation de l'astreinte, la cour d'appel de Bordeaux n'est pas compétente pour statuer sur la demande de liquidation de l'astreinte réclamée ; que d'autre part, en l'état du dossier, il n'apparaît pas opportun d'ordonner le prononcé d'une nouvelle mesure d'astreinte ;
ALORS QU'en confirmant la condamnation sous astreinte à livrer une porte, sans répondre aux conclusions de la société Menuiseries Grégoire faisant valoir que le motif de refus de réception de cette porte n'était pas justifié au regard des spécifications du devis, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.