COMM.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10334 F
Pourvoi n° T 17-10.112
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Crédit du Nord, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Banque Courtois, société anonyme, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt n° RG : 16/01291 rendu le 2 novembre 2016 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige les opposant :
1°/ à M. Christian X..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire liquidateur de la SARL Omnium textile F. Boudou et compagnie,
2°/ à la société Omnium textile, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme A..., avocat général référendaire, Mme Labat, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP François-Henri Briard, avocat de la société Crédit du Nord et de la société Banque Courtois, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. X... et de la société Omnium textile ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, l'avis de Mme A..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Crédit du Nord et la société Banque Courtois aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à M. X..., en qualité de mandataire liquidateur de la société Omnium textile F. Boudou et compagnie et la société Omnium textile F. Boudou et compagnie la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP François-Henri Briard, avocat aux Conseils, pour la société Crédit du Nord et la société Banque Courtois.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions et rejeté la créance n° 82 déclarée par le Crédit du Nord du passif de la société Omnium Textile F. Boudou et Compagnie,
Aux motifs qu'en application de l'article L. 622-24, alinéa 2, du code de commerce, la déclaration des créances peut être faite par le créancier ou tout préposé ou mandataire de son choix; que si la Banque Courtois a intégré le groupe Crédit du Nord au mois de février 1992, devenant ainsi l'une de ses filiales, elle a conservé une personnalité juridique distincte; qu'ainsi, si la Banque Courtois avait la faculté de ne pas déclarer personnellement sa créance et de faire déclarer ses créances au passif de la société par l'entremise de la société Crédit du Nord, c'était à la condition de conférer à celle-ci un pouvoir spécial de déclarer ses créances; qu'il ressort de la décision du 22 octobre 2012 émanant du président du directoire que M. Julien B... fait partie, au sein de la Banque Courtois, des mandataires de la catégorie 1; qu'en application de la décision du président du directoire de la banque Courtois du 1er mars 2005, ces personnes sont habilitées pour "produire et déclarer toute créance au passif de toute procédure collective de tout débiteur"; que cette même décision permet à M. B... "de conférer à tout mandataire tous pouvoirs à l'effet d'accomplir auprès des greffes des tribunaux de commerce toutes déclarations requises pour inscriptions ou modifications au registre du commerce concernant la banque Courtois" sans qu'on puisse élargir cette hypothèse au pouvoir de déclarer les créances; que cette même décision ne confère pas à M. B... le pouvoir de désigner un mandataire spécial à l'effet de déclarer les créances; qu'en effet, le paragraphe dénommé "définition des pouvoirs" des mandataires de catégorie 1, invoqué par les banques appelantes, ne revêt pas la portée qu'elles leur attribue; que sous la rubrique "clauses d'ordre général", il est précisé que les mandataires de la catégorie 1 disposent des pouvoirs suivants : "représentation délégation; Représenter la banque Courtois à l'égard des tiers, notamment de toutes administrations publiques; signer toute correspondance. Représenter la banque Courtois dans les négociations avec toute organisation professionnelle ou syndicale. Substituer tout mandataire pour une durée limitée et pour un objet déterminé dans n'importe lequel de ses pouvoirs. Conférer pour une durée limitée à tout agent de la banque placé sous sa responsabilité, tout ou partie de ses pouvoirs"; que cette clause, qui est propre à l'organisation interne de la banque Courtois, permet à M. B... de déléguer ses pouvoirs à un préposé de la banque placé sous son autorité ou de remplacer tout autre mandataire de la banque Courtois mais ne lui confère pas le pouvoir de donner à un mandataire spécial, extérieur à la banque Courtois, le pouvoir de déclarer les créances au nom de la banque Courtois; qu'à cet égard, la clause litigieuse emploie la forme transitive du verbe substituer et non la forme intransitive "se substituer tout mandataire" de son choix à l'effet d'exercer ses pouvoirs; qu' il en résulte que le pouvoir spécial donné par courrier du 2 octobre 2013 par M. B... à la banque Crédit du Nord pour déclarer les créances de la banque Courtois est nul; que, par voie de conséquence, la déclaration de créance effectuée le 21 novembre 2013 par Mme C..., préposée de la banque Crédit du Nord, laquelle n'était pas habilitée régulièrement pour déclarer les créances de la banque Courtois est privé de tout effet; que par ailleurs, en application de l'article L. 622-26 du code de commerce, à défaut de déclaration dans les délais prévus à l'article L. 622-24, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions et dividendes à moins que le juge-commissaire ne les relève de leur forclusion s'ils établissent que leur défaillance n'est pas due de leur fait ou qu'elle est due à une omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de la liste prévue au deuxième alinéa de l'article L. 622-6; que le délai pour déclarer les créances est fixé à deux mois à compter de la publication du jugement d'ouverture ainsi que le prévoit l'article R.622-24 du code de commerce; que ce délai préfix court contre le créancier déclarant qui dispose seulement de deux options : soit corriger sa première déclaration de créance entachée d'irrégularité en lui substituant une nouvelle mais à la condition d'effectuer cette seconde déclaration dans le délai ouvert par l'article R. 622-24, soit, en cas d'absence de toute déclaration, saisir le juge-commissaire d'une requête en relevé de forclusion; qu'en aucun cas, le créancier ne peut régulariser la situation en effectuant une nouvelle déclaration de créance postérieurement à l'expiration du délai de forclusion de deux mois; qu'il en résulte que la déclaration de créance effectuée le 2 septembre 2016 par M. B..., soit trois ans après le jugement d'ouverture et postérieurement à l'expiration du délai de déclaration de créance, n'est pas susceptible de couvrir l'irrégularité dont est attachée la première déclaration de créance et est dénuée de tout effet,
1° Alors en premier lieu qu'aux termes de la décision du président du directoire de la Banque Courtois en date du 1er mars 2005, les pouvoirs dont disposait M. Julien B..., mandataire de catégorie 1, étaient, entre autres, les suivants : « Produire et déclarer toute créance au passif de toute procédure collective de tout débiteur; prendre part à toutes délibérations et assemblées de créanciers; remettre tous titres et pièces; faire admettre la créance de la Banque Courtois au besoin par voie de réclamation; contester au besoin les autres créances par voie de contredit (
) »; qu'au titre des « Clauses d'ordre général. Représentation, délégation », M. Julien B... pouvait « Substituer tout mandataire pour une durée limitée et pour un objet déterminé dans n'importe lequel de ses pouvoirs »; qu'il en résultait que M. Julien B..., qui fait partie, au sein de la Banque Courtois, des mandataires de la catégorie 1, était titulaire d'une délégation régulière du pouvoir de déclarer les créances de la Banque Courtois et de substituer en outre « tout mandataire », y compris un tiers, dans l'exercice des pouvoirs dont il disposait; qu'en énonçant que cette « cette même décision permet à M. B... "de conférer à tout mandataire tous pouvoirs à l'effet d'accomplir auprès des greffes des tribunaux de commerce toutes déclarations requises pour inscriptions ou modifications au registre du commerce concernant la banque Courtois" sans qu'on puisse élargir cette hypothèse au pouvoir de déclarer les créances », que « cette même décision ne confère pas à M. B... le pouvoir de désigner un mandataire spécial à l'effet de déclarer les créances », que la clause précitée « qui est propre à l'organisation interne de la banque, permet à M. B... de déléguer ses pouvoirs à un préposé de la banque placé sous son autorité ou de remplacer tout autre mandataire de la banque Courtois mais ne lui confère pas le pouvoir de déclarer les créances au nom de la banque Courtois » et « qu'à cet égard, la clause litigieuse emploie la forme transitive du verbe substituer et non la forme intransitive "se substituer tout mandataire" de son choix à l'effet d'exercer ses pouvoirs », la cour d'appel a dénaturé la décision du président du directoire de la Banque Courtois du 1er mars 2005 concernant les pouvoirs des agents de la Banque Courtois et a violé l'article 1103 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016,
2° Alors en deuxième lieu que la déclaration des créances peut être faite par le créancier ou par tout préposé ou mandataire de son choix; qu'il suffit dans ce dernier cas que le tiers soit doté d'un pouvoir spécial pour déclarer la créance; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt que M. Julien B..., mandataire de catégorie 1, avait reçu pouvoir de « produire et déclarer toute créance au passif de toute procédure collective de tout débiteur » et de « substituer tout mandataire pour une durée limitée et pour un objet déterminé dans n'importe lequel de ses pouvoirs; qu'en décidant néanmoins que le pouvoir spécial donné par courrier du 2 octobre 2013 par M. B... à Madame C..., préposée de la banque Crédit du Nord, pour déclarer les créances de la Banque Courtois était nul, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article L. 622-24 du code de commerce,
3° Alors en troisième lieu et à titre subsidiaire que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations; qu'en énonçant que le délai préfix court contre le créancier qui dispose seulement de deux options : soit corriger sa première déclaration de créance entachée d'irrégularité en lui substituant une nouvelle mais à la condition d'effectuer cette seconde déclaration dans le délai ouvert par l'article R. 622-24, soit, en cas d'absence de toute déclaration, saisir le juge-commissaire d'une requête en relevé de forclusion pour en déduire qu'en aucun cas, le créancier ne peut régulariser la situation en effectuant une nouvelle déclaration de créance postérieurement à l'expiration du délai de forclusion de deux mois, la cour d'appel a relevé d'office un moyen de droit sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations et a violé l'article 16 du code de procédure civile,
4° Alors en quatrième lieu et à titre subsidiaire que la déclaration de créance produit un effet interruptif de prescription qui se prolonge jusqu'à la clôture de la procédure collective; que la nullité engendrée par le défaut de pouvoir de l'auteur de la déclaration de créance peut donner lieu à régularisation dès lors que celle-ci intervient avant toute forclusion; qu'en déniant tout effet interruptif à la déclaration de créance effectuée le 21 novembre 2013 par Mme C..., préposée de la banque Crédit du Nord, qui avait ensuite donné lieu à régularisation par déclaration effectuée le 2 septembre 2016 entre les mains de Maître X..., ès qualités, par M. B... en sa qualité de responsable des affaires juridiques et contentieuses de la Banque Courtois, la cour d'appel a violé les articles L. 622-24 et L. 622-26 du code de commerce.