SOC.
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 20 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10877 F
Pourvoi n° E 16-28.657
Aide juridictionnelle partielle en défense
au profit de M. Y....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 3 juillet 2017.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Restovranches, à l'enseigne La Boucherie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
En présence de :
La société B... Z... , société d'exercice libéral à responsabilité limitée, [...] , prise en la personne de M. B... Z... , agissant en qualité de mandataire judiciaire de la société Restovranches,
contre l'arrêt rendu le 28 octobre 2016 par la cour d'appel de Caen (2e chambre sociale), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Jérémy Y..., domicilié [...] ,
2°/ à Pôle emploi d'Avranches, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 mai 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme C..., conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme D..., avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société Restovranches et de M. Z..., ès qualités, de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme C..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la Selarl B... Z... de son intervention en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société Restovranches ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Restovranches aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Restovranches à payer à la SCP Hémery la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société Restovranches et M. Z..., ès qualités.
L'arrêt infirmatif attaqué encourt la censure
EN CE QU'IL a prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail liant M. Y... à la société RESTOVRANCHES, condamné l'employeur à lui verser les sommes de 1.710 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, de 1.140 euros à titre d'indemnité de congés payés outre 114 euros au titre des congés payés y afférents, de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné l'employeur aux dépens de première instance et d'appel, disant en outre que les sommes à caractère salarial devait produire intérêts au taux légal à compter de la convocation de l'employeur en conciliation et que les sommes à caractère indemnitaire devait produire intérêts au taux légal à compter de la date de l'arrêt ;
AUX MOTIFS QU'aux termes de l'article L. 1152-1 du Code du Travail, dans sa rédaction antérieure à la loi N° 2012-954 du 6 août 2012, sont interdits les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers ; que ce même article prévoit désormais qu'aucun salarié ne doit subir des faits - soit de harcèlement sexuel constitué par des propos ou des comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante hostile ou offensante, - soit assimilés au harcèlement sexuel consistant en toute forme de pression grave même non répétée exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers ; que l'article L. 1154-1 dispose quant à lui que lorsque survient un litige relatif à l'application de l'article L. 1152-1 du code du travail, le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, le juge formant sa conviction après avoir ordonné en tant que de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que pour établir les faits M. Y... fait référence à des messages adressés par M. A..., dirigeant de l'établissement, sur son téléphone portable dont le caractère sexuel est sans équivoque ; qu'ainsi M. A... admet-il devant les services de gendarmerie qu'en mars et avril 2012, avoir envoyé à M. Y..., des messages de type SMS, tels que « on en reparle ce soir, je t'aime bisous » le 15 mars 2012, « je suis prêt à payer tes dettes si tu me laisses profiter de ton corps » le 6 avril 2012, « je te suce la bite » le 19 avril 2012 ou encore « tu profites de mon argent je peux profiter de ta bite » le 19 avril 2012 ; que compte tenu du lien professionnel existant entre les deux protagonistes les éléments de fait présentés sont de nature à laisser présumer l'existence d'un harcèlement sexuel tel que ci-dessus défini, s'agissant de faits répétés ; que l'arrêt de travail délivré à compter du 23 mai 2012 pour asthénie tend à établir l'existence d'un état de santé altéré par les faits ci-dessus établis ; que l'employeur ne justifie d'aucun élément objectif étranger à tout harcèlement alors que l'existence d'une relation intime entretenue de part et d'autre et indépendamment de la relation de travail n'est pas démontrée, le fait que M. A..., dirigeant de l'entreprise ait assumé des dépenses personnelles de son salarié étant inopérant sur ce point ; que, dès lors, la résiliation du contrat de travail doit être prononcée aux torts de l'employeur ;
ALORS QUE, premièrement, le harcèlement sexuel, qui se caractérisait, à l'époque des faits, par des agissements de harcèlement de toute personne dans le but d'obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d'un tiers, se distinguait de l'expression du sentiment et/ou du désir amoureux dans le cadre d'une relation intime relevant de la sphère privée des intéressés ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que Monsieur Y... avait été victime de harcèlement sexuel de la part de Monsieur Bruno A..., lequel lui avait adressé, aux mois de mars et avril 2012, des SMS de nature sexuelle ou à connotation sexuelle, en se bornant à affirmer que l'existence d'une relation intime n'était pas démontrée, sans rechercher, comme elle y était invitée par l'employeur, si la contestation, par Monsieur Y..., de l'existence d'une relation intime n'avait pas été la conséquence directe de ce que Monsieur Bruno A... avait refusé, le 18 mai 2012, de contribuer à nouveau au paiement des dettes de ce dernier, après l'avoir aidé financièrement à de nombreuses reprises, alors qu'il n'était pas contesté que Monsieur Y... avait été absent sans justification entre le 20 et le 22 mai 2012 et qu'il avait, presque aussitôt après, soit dès le 23 mai 2012, déposé plainte pour harcèlement sexuel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions de l'article L. 1153-1 du code du travail ;
ALORS QUE, deuxièmement, la société RESTOVRANCHES faisait valoir dans ses conclusions (p. 5 et 6) que si Monsieur Bruno A... avait imposé ou tenté d'imposer des relations sexuelles à Monsieur Y..., la procédure pénale n'aurait pas été classée sans suite ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que Monsieur Y... avait été victime de harcèlement sexuel de la part de Monsieur Bruno A... aux mois de mars et avril 2012, concrétisé par l'envoi de SMS de nature sexuelle ou à connotation sexuelle, sans répondre au moyen tiré de ce que la procédure pénale engagée par Monsieur Y... avait été classée sans suite dans la mesure où il avait été constaté, sans aucune ambiguité, que Monsieur Y... entretenait des relations intimes avec Monsieur Bruno A... au moment des faits, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, violant, par conséquent, les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile
ALORS QUE, troisièmement, la société RESTOVRANCHES faisait valoir dans ses conclusions (p. 7) que les SMS de nature sexuelle ou à connotation sexuelle des mois de mars et avril 2012 avait été tronqués et sortis totalement de leur contexte et que Monsieur Y... l'avait reconnu ; de sorte qu'en décidant, en l'espèce, que Monsieur Y... avait été victime de harcèlement sexuel de la part de Monsieur Bruno A... concrétisé par l'envoi, aux mois de mars et avril 2012, de SMS de nature sexuelle ou à connotation sexuelle, sans répondre au moyen tiré de ce que ces SMS avaient été tronqués et sortis totalement de leur contexte et que Monsieur Y... l'avait reconnu, la cour d'appel a, de nouveau, entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, violant, par conséquent, les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.