SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10835 F
Pourvois n° E 17-17.782
et H 17-17.784
à M 17-17.788 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu les pourvois n° E 17-17.782, H 17-17.784, G 17-17.785, J 17-17.786, K 17-17.787 et M 17-17.788 formés par :
1°/ M. Jean-Pierre Y..., domicilié [...] ,
2°/ Mme Eve E... , domiciliée [...] ,
3°/ Mme Aurélie Z..., domiciliée [...] ,
4°/ Mme Sandrine A..., domiciliée [...] ,
5°/ M. Géraud B..., domicilié [...] ,
6°/ Mme Imane F... , domiciliée [...] ,
7°/ l'union départementale CGT du Puys-de-Dôme, dont le siège est [...] ,
8°/ le syndicat CGT 63 de la Fédération des activités postales, dont le siège est [...] ,
contre huit arrêts rendus le 7 mars 2017 par la cour d'appel de Riom (4e chambre civile), dans les litiges les opposant à la société La Poste DTELP, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 mai 2018, où étaient présents : Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme C..., conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de MM. Y... et B..., de Mmes E... , Z..., A..., F... , de l'union départementale CGT du Puys-de-Dôme et du syndicat CGT 63 de la Fédération des activités postales, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société La Poste DTELP ;
Sur le rapport de Mme C..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu la connexité, joint les pourvois n° E 17-17.782, H 17-17.784, G 17-17.785, J 17-17.786, K 17-17.787 et M 17-17.788 ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation communs annexés, qui sont invoqués à l'encontre des décisions attaquées, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE les pourvois ;
Condamne MM. Y... et B..., Mmes E... , Z..., A..., F... , l'union départementale CGT du Puys-de-Dôme et le syndicat CGT 63 de la Fédération des activités postales aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze juin deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens communs produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. Y... et les cinq autres salariés, l'union départementale C.G.T. du Puys-de-Dôme et le syndicat CGT 63 de la Fédération des activités postales, demandeurs aux pourvois n° E 17-17.782, H 17-17.784, G 17-17.785, J 17-17.786, K 17-17.787 et M 17-17.788
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief aux arrêts attaqués d'avoir débouté chacun des salariés de sa demande tendant à la condamnation de La Poste au paiement d'une certaine somme à titre de rappel de salaire au titre du "Complément Poste" ;
Aux motifs propres qu'en vertu du principe général du droit : "à travail égal, salaire égal" l'employeur est tenu d'assurer une égalité de rémunération aux salariés effectuant le même travail ou un travail de valeur égale c'est-à-dire qu'ils soient dans une situation comparable au regard de la nature de travail et de leurs conditions de formation et de travail ; que le principe de l'égalité salariale suppose donc que les salariés soient placés dans une situation identique ; que selon l'article L. 3221-4 du code du travail sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charges physique ou nerveuse ; que le fait que des salariés appartiennent à une même catégorie professionnelle ne suffit pas, en soi, à permettre de considérer qu'ils accomplissent un travail de valeur égale ; qu'en cas de litige il appartient aux juges de se livrer à une analyse comparée des missions, tâches et responsabilités des salariés ; que toutefois ce principe n'interdit pas toute différence de rémunération ; que la différence de rémunération entre salariés exerçant un travail égal est licite dès lors qu'elle est justifiée par des critères objectifs pertinents et véritables ; qu'en l'espèce il est constant que La Poste emploie deux catégories de personnels : des agents fonctionnaires relevant du statut général de la fonction publique et des agents contractuels de droit privé soumis au régime des conventions collectives ; qu'il est également constant que les agents de la poste perçoivent mensuellement un montant fixe appelé "rémunération de référence" composé d'une part d'un traitement indiciaire pour les fonctionnaires ou le salaire de base pour les agents contractuels, lié au grade et rémunérant l'ancienneté et l'expérience, et d'autre part le complément Poste perçu par l'ensemble des agents qui rétribue le niveau de fonction et tient compte de la maîtrise du poste et qui a été institué pour remplacer les multiples primes et indemnités versées auparavant aux agents de La Poste ; que le salarié arguant de la méconnaissance du principe précédemment édicté "à travail égal, salaire égal" considère avoir fait l'objet d'une discrimination salariale dans la mesure où il ne toucherait pas le même complément de salaire que d'autres salariés ; qu'il fait également valoir que s'il y a une différence, celle-ci doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence ; qu'or si effectivement la prime complément poste n'englobe pas la prime d'ancienneté et est déterminée par le niveau de fonction mais également par la maîtrise du poste, en revanche chacun des salariés n'établit pas au regard des éléments de comparaison qu'il produit qu'il effectuait le même travail que les fonctionnaires de même niveau auxquels il se compare pour revendiquer une égalité de traitement ; qu'en effet Monsieur Y... est chargé d'affaires et se compare à un fonctionnaire "développeur-concepteur" puis "responsable SOF" et enfin "chargé d'études et de projet" ou à un "responsable ORSEP CF" ; Mme F... est gestionnaire Grands comptes et se compare à deux fonctionnaires "développeur-concepteur" et "analyste programmeur" ; Monsieur B... est guichetier confirmé et se compare à un fonctionnaire "encadrant courrier distribution" ; Mme Z... est conseiller financier et se compare à un fonctionnaire "encadrant courrier distribution" ; Mme A... est chef d'établissement remplaçant et se compare à un fonctionnaire "encadrant courrier distribution" ; Mme E... est guichetière réfèrent confirmée et se compare à un fonctionnaire "encadrant courrier distribution" ; qu'ainsi, si chacun des salariés et les salariés auxquels il se compare occupent éventuellement un emploi correspondant au même niveau de classification, il ne saurait être considéré qu'ils se trouvent placés dans une situation identique alors qu'ils n'effectuent pas le même travail ; qu'en conséquence chacun des salariés ne démontre pas l'existence d'une différence de traitement quant à l'attribution du complément Poste et n'est pas fondé à solliciter un rappel de salaire sur le fondement du principe "à travail égal, salaire
Et aux motifs adoptés des premiers juges, que le "complément poste" a été instauré en 1993,1994 et 1995 dans un objectif de simplification pour remplacer plusieurs dizaines de primes et indemnités perçues jusqu'alors par les fonctionnaires ; que c'est en pleine connaissance du régime applicable aux fonctionnaires que les organisations syndicales représentatives fixent chaque année le montant du "complément poste" des salariés ; que le Conseil d'Etat, le 4 juillet 2012, a jugé que le mécanisme destiné à assurer la convergence des rémunérations d'agents publics autrefois très hétérogènes était conforme au principe "à travail égal, salaire égal", la différence de montant du "complément poste" versé aux uns et aux autres étant "fondée sur des raisons objectives" ; que les raisons objectives et pertinentes justifiant des niveaux de "complément poste" différents sont multiples et répondent parfaitement aux exigences de la Cour de Cassation en ce que ce complément : maintient la rémunération acquise dans les fonctions antérieures, s'inscrit dans un processus de restructuration du système de rémunération visant à le simplifier et à l'unifier par la suppression de primes et indemnités, compense, au bénéfice des agents en place entre 1993 et 1995, la perte d'un régime de primes et indemnités auxquelles ils ont dû renoncer, prend en compte l'historique de carrière du fonctionnaire et la maîtrise du poste ; que les comparaisons faites avec certains fonctionnaires, recrutés avant 1995, négligent l'origine de la création du "complément poste" qui intègre pour ces salariés l'ensemble des primes qu'ils avaient acquises auparavant ; que les quelques bulletins de paye communiqués par chaque demandeur de manière anonyme ont pu être individualisés par la poste et montrent qu'il existe une différence de plusieurs années d'ancienneté entre ce demandeur et les fonctionnaires servant de comparaison ; que si cette prime "complément poste" n'englobe pas une prime d'ancienneté, la différence du nombre d'années de service montre un parcours professionnel sans comparaison possible avec celui de l'intéressé, il en résulte : une différence d'expérience tenant à un écart d'ancienneté de plusieurs années, lequel influe sur la maîtrise du poste ; une différence de situation tenant à la présence des fonctionnaires et non du demandeur avant 1995 ; que chacun des salariés qui n'a pas assumé les mêmes responsabilités lors de sa carrière (notamment avant 1995) présente nécessairement une différence d'expérience avec ces fonctionnaires ; qu'en produisant des éléments de comparaison qui compte tenu de la différence de fonctions ou de grades qu'ils mettent en évidence, outre une différence significative d'ancienneté de nature à constituer un critère objectif et pertinent permettent de justifier de l'acquisition d'un degré plus élevé de maîtrise du poste occupé, il convient de constater que chacun des salariés n'apporte pas la preuve d'une atteinte portée par LA POSTE au principe "à travail égal, salaire égal" ; qu'en conséquence le Conseil considérant que chacun des salariés n'apporte pas la preuve d'une atteinte portée par LA POSTE au principe "à travail égal, salaire égal", dit que ses demandes doivent être rejetées ;
Alors que, de première part, les salariés ont soutenu qu'à la différence des primes ou des indemnités, dont les montants peuvent varier en fonction de critères spécifiques comme le mérite, l'assiduité, le rendement, etc., le montant du Complément Poste ne peut varier, La Poste elle-même l'ayant spécifié dans sa décision n° 717 du 4 mai 1995, en s'appuyant sur le critère du niveau de fonction et de la maîtrise du poste ; que le niveau de fonction, c'est le niveau d'emploi occupé, correspondant non pas à un métier spécifique, mais à un niveau de qualification et à une grille de rémunération RH 49 ; qu'il existe une dizaine de niveaux de fonction à La Poste mais que la demande ne concerne que la catégorie de la classe n° 3 ; niveau 3.1 : conseiller financier, guichetier confirmé, chef d'établissement remplaçant, etc. ; niveau 3.2 : conseiller clientèle, Gestionnaire G.C., etc. ; niveau 3.3 : organisateur courrier, chargé d'affaires, etc. ; qu'il en résulte que dans tous les services de La Poste, cohabitent des employés qui effectuent le même travail ou un travail de même valeur (que ce soit sur des postes de facteurs, de guichetiers ou de conseillers, etc. au même niveau de fonction, et qui ne perçoivent pas le même complément de poste, quelles que soient leur ancienneté ou s'ils occupent un travail de même valeur (Conclusions d'appel, p. 7-8) ; qu'en s'abstenant de rechercher si le critère de l'identité de travail requis pour le versement du « Complément Poste » ne correspondait pas au niveau de fonction retenu par la classification de La Poste, la Cour d'appel a privé sa décision légale au regard du principe d'égalité de traitement, ensemble la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste et la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste ;
Alors que, de deuxième part, et à titre subsidiaire, que dans leurs conclusions d'appel, les salariés avaient soutenu que le montant du "Complément Poste" était fixé sur le critère du niveau de fonction et de la maîtrise du poste ; qu'ils avaient présenté un tableau comparatif dont il résultait que le montant du "Complément Poste" perçu par Madame Sandrine A..., exerçant les fonctions de chef d'établissement remplaçant était égal à celui perçu par Madame Aurélie Z..., exerçant les fonctions de conseiller financier, étant précisé que les deux salariées sont classées au niveau 3-1 (Conclusions d'appel, p. 18) ; qu'en rejetant la demande de versement de "Complément Poste" parce que les fonctionnaires auxquels chacun des salariés se compare occupent éventuellement un emploi correspondant au même niveau de classification mais ne se trouveraient pas dans une situation identique parce qu'ils n'effectuent pas le même travail sans préciser les motifs pour lesquels ces salariées eux-mêmes percevaient un "Complément Poste" de même montant alors qu'elles n'exerçaient pas le même emploi, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement, ensemble la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste et la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste ;
Alors, enfin, que sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse ; qu'en rejetant la demande de versement de « Complément Poste » parce que les fonctionnaires auxquels chacun des salariés se compare occupent éventuellement un emploi correspondant au même niveau de classification mais ne se trouveraient pas dans une situation identique parce qu'ils n'effectuent pas le même travail sans préciser s'ils effectuaient un travail de valeur égale, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe d'égalité de traitement, ensemble la délibération du 25 janvier 1995 du conseil d'administration de La Poste et la décision n° 717 du 4 mai 1995 du président du conseil d'administration de La Poste.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts attaqués d'avoir débouté chacun des salariés de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour discrimination ou pour discrimination syndicale ;
Aux motifs adoptés des premiers juges que le Conseil n'ayant prononcé aucune condamnation à l'encontre de La Société La Poste, les salariés n'ont subi aucun préjudice ;
Alors que, la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation de ces chefs des arrêts attaqués.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief aux arrêts confirmatifs attaqués d'avoir débouté de l'Union départementale CGT et le Syndicat CGT 63 de la Fédération des activités postales de leurs demandes respectives en paiement de dommages et intérêts pour manquement par La Poste à l'intérêt collectif des travailleurs ;
Au motif adopté des premiers juges que La Poste n'ayant pas été condamnée dans les instances évoquées, le Conseil dit que cette demande n'a aucun fondement ;
Alors que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation entraînera, par voie de conséquence, la cassation de ces chefs des arrêts attaqués.