COMM.
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 13 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme RIFFAULT-SILK, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10318 F
Pourvoi n° N 17-18.387
Q 17-18.550 JONCTION
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Statuant sur les pourvois n° N 17-18.387 et Q 17-18.550 formés par la société MAD Editions, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
contre un arrêt rendu le 23 février 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (2e chambre), dans le litige l'opposant à la Société d'agences et de diffusion, société anonyme, dont le siège est [...] , ayant un établissement secondaire [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2018, où étaient présents : Mme Y..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z... , conseiller référendaire rapporteur, Mme Orsini, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société MAD Editions, de Me A..., avocat de la Société d'agences et de diffusion ;
Sur le rapport de Mme Z... , conseiller référendaire, l'avis de M. X..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Joint les pourvois n° N 17-18.387 et Q 17-18.550 qui attaquent le même arrêt ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société MAD Editions aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la Société d'agences et de diffusion la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du treize juin deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société MAD Editions
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a déclaré la société M.A.D. ÉDITIONS mal fondée en ses demandes en paiement des factures correspondant au prix des invendus conservés par la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la phrase de l'article 6 alinéa 1 de la convention de distribution conclue le 14 octobre 2010 entre la société M.A.D. EDITIONS EDITEUR$gt; et la SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION DÉPOSITAIRE$gt; précise : "Les invendus seront conservés par le Dépositaire et récupérés par l'Editeur sous un mois après règlement du numéro considéré, délai au-delà duquel le Dépositaire sera en droit de les détruire" ; qu'en application de l'alinéa 1 de l'ancien article 1134 du Code civil, le mot RÉCUPÉRÉS$gt; implique une initiative et une action positive de la part de la société M.A.D. EDITIONS, et toute la phrase précitée ne permet pas à cette dernière de préférer être payée des numéros invendus ; que les lettres envoyées par cette société à la SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION le 14 décembre 2010 pour les numéros 32, 33 et 34, le 12 mars 2012 pour les numéros 38, 39 et 40, le 7 juin 2012 pour les numéros 38, 39 et 40, et le 1er août 2012 pour le numéros 41 et 42, qui réclament le retour des invendus par la SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION, sont ainsi contraires à l'article 6 du contrat ; qu'il en résulte que la société M.A.D. EDITIONS n'est pas fondée à facturer à la SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION, qui n'a pas à lui réexpédier les invendus, les impayés qu'elle a choisis de ne pas venir récupérer elle-même ; que sur ce point le jugement est confirmé ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE sur le paiement des factures, l'article 6 du contrat signé par les parties stipule que « les invendus seront conservés par le dépositaire et récupérés par l'Editeur sous un mois après le règlement du numéro considéré, délai au-delà duquel le Dépositaire sera en droit de les détruire. Les invendus n'entraîneront aucun frais, hors ceux éventuels d'expédition de retour qui seraient à la charge du vendeur » ; que MAD EDITIONS aurait dû prendre ses dispositions pour aller retirer les invendus et que les frais de retour seraient à sa charge ; que la facture du mois de mars 2012 concernait les invendus du magazine n° 38 et 39 distribués aux 3e et 4e trimestres 2011 ; que la société MAD EDITIONS a émis les factures n° 2113853 en date du 2 janvier 2011 et 2113902 en date du 30 décembre 2011 uniquement sur les invendus et la SAD a réglé ces deux factures ; que le 12 mars 2012, MAD EDITIONS reproche à la SAD de ne pas lui avoir restitué les invendus et de ce fait facture à la SAD la valeur faciale des magazines soit la somme de 2.587,50 euros qui correspond à la facturation de 550 magazines pour le n° 38 et 600 magazines pour le n° 39 ; que le Tribunal considérera que cette facture est indue puisqu'elle ne se conforme pas aux accords signés entre les parties qui sont très clairs en matière sur la façon et le délai des invendus ; que la société SAD est bien fondée de s'opposer au paiement de cette facture ; que pour le magazine n° 40 la société MAD a émis une facture n° 2124036 pour 503 magazines alors que seuls 12 numéros ont été vendus et que la société MAD ne s'est pas manifestée pour récupérer les 503 magazines restants ; que le Tribunal considérera que cette facture est indue et que la société SAD est bien fondée de s'opposer à son règlement ; que pour le magazine n° 41 la société MAD a distribué à la société SAD 502 magazines et que seuls 10 se sont vendus ; que la société MAD ne s'est pas manifestée pour venir récupérer ces magazines et ce malgré la relance faite par la société SAD . ; que la société MAD a émis une nouvelle facture concernant les invendus pour une montant de 1.500 € qui correspond à 500 unités ; que le Tribunal considérera que cette facture est indue et que la société SAD est bien fondée de s'opposer à son règlement ; que la société MAD a émis une nouvelle facture concernant les invendus du magazine n° 42 pour un montant de 1.125 € qui correspond à 500 unités ; que Le Tribunal considérera que cette facture est indue et que la société SAD est bien fondée de s'opposer à son règlement ;
ALORS QUE, premièrement, les juges du fond sont tenus de ne pas dénaturer la convention des parties ; qu'en bornant en l'espèce leur analyse à la circonstance qu'il était fait emploi du mot « récupéré » dans la première phrase de l'article 6 de la convention du 14 octobre 2010, pour en déduire que la société M.A.D. ÉDITIONS ne pouvait pas réclamer que lui soient restitués les invendus, quand la phrase suivante, délaissée par les juges, précisait que les invendus pourraient faire l'objet d'une réexpédition de la part de la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION aux frais de la société M.A.D. ÉDITIONS, les juges du fond ont dénaturé par omission l'article 6 de la convention du 14 octobre 2010, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, et subsidiairement, les juges sont tenus d'interpréter la convention des parties en fonction de l'ensemble des stipulations qui la composent ; qu'en cantonnant en l'espèce l'analyse de l'article 6 de la convention à son premier alinéa pour en déduire que la société M.A.D. ÉDITIONS ne pouvait pas réclamer la restitution des invendus, sans s'expliquer sur le second alinéa dont il s'inférait que la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION pouvait être amenée à réexpédier ces invendus, les juges du fond ont de toute façon privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil dans leur rédaction applicable en l'espèce ;
ALORS QUE, troisièmement, les conventions obligent non seulement à ce qui y est exprimé, mais encore à toutes les suites que l'équité, l'usage ou la loi donnent à l'obligation d'après sa nature ; qu'en l'espèce, la société M.A.D. ÉDITIONS soulignait que les usages de la profession prévoyaient que les invendus restaient la propriété de l'éditeur et devaient lui être restitués, et que la convention du 14 octobre 2010 ne dérogeait pas à ce principe ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur l'existence de cet usage, qui était de nature à modifier la portée conférée par les juges à l'article 6 de la convention des parties, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du Code civil dans leur rédaction applicable en l'espèce ;
ET ALORS QUE, quatrièmement, le mandataire auquel sont remis des biens en dépôt est tenu de les restituer à son mandant ; qu'en l'espèce, l'article 6 de la convention du 14 octobre 2010 précisait que la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION pourrait être amenée à réexpédier les invendus à la société M.A.D. ÉDITIONS aux frais de cette dernière ; que sur la base de cette prévision contractuelle, la société M.A.D. ÉDITIONS reprochait à la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION de ne pas lui avoir permis de récupérer ses invendus lorsqu'elle l'a sollicitée à cet effet ; qu'en se bornant à opposer que la convention des parties ne faisait pas l'obligation à la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION de réexpédier les invendus, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la société M.A.D. ÉDITIONS n'avait pas indiqué à son mandataire, dans le délai contractuel d'un mois prévu à cet effet, vouloir récupérer ses invendus, et si cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION décide de leur destruction, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du Code civil dans leur rédaction applicable en l'espèce, et des articles 1932 et 1991 du même Code.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a jugé que la résiliation notifiée par la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION était conforme à la convention du 14 octobre 2010, et en ce qu'il a débouté la société M.A.D. ÉDITIONS de sa demande de dommages-intérêts pour résiliation abusive ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article 2/ de la convention du 14 octobre 2010 permettait à l'une ou l'autre des parties de résilier celle-ci moyennant un préavis de 3 mois ; que la SOCIETE D'AGENCES ET DE DIFFUSION a notifié le 11 avril 2012 à la société M.A.D. EDITIONS la résiliation de leur contrat à cette échéance trimestrielle soit au 15 juillet ; que l'impossibilité pour un contractant de s'engager à durée indéterminée justifie cette résiliation avec préavis, et c'est donc à tort que la société M.A.D. EDITIONS critique la rupture des relations contractuelles par la SOCIETE d'AGENCES et de DIFFUSION ; que là aussi le jugement est confirmé ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE sur la résiliation du contrat, le contrat dans son article n° 2 prévoit que la résiliation peut se faire en respectant un préavis de trois mois et par lettre motivée recommandée avec accusé de réception ; que la société SAD a formalisé la rupture du contrat par un courrier motivé du 11 avril 2012 en accusé réception avec une échéance à la date du 15 juillet 2012 ; que la société SAD a respecté les termes de l'article n° 2 dudit contrat ; que le Tribunal validera la résiliation du contrat qui lie la Société MAD EDITIONS et la société SAD et déboutera la société MAD EDITIONS en ses demandes à titre principal et subsidiaires ;
ALORS QUE, premièrement, en l'absence de motif légitime, la résiliation unilatérale d'un mandat d'intérêt commun donne lieu à indemnisation au profit du cocontractant ; qu'en l'espèce, la société M.A.D. ÉDITIONS soutenait à titre subsidiaire que la convention du 14 octobre 2010 constituait un mandat d'intérêt commun et qu'il s'en évinçait que, en l'absence de motif légitime, la résiliation notifiée par la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION donnait droit à indemnité au profit de la société M.A.D. ÉDITIONS ; qu'en s'abstenant de rechercher, comme il lui était demandé, si la convention de distribution de presse du 14 octobre 2010 ne devait pas s'analyser comme un mandat d'intérêt commun, et si le motif financier invoqué par la SOCIÉTÉ D'AGENCES ET DE DIFFUSION justifiait une résiliation sans indemnisation de la société M.A.D. ÉDITIONS, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 2003, 2004 et 2007 du Code civil ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, la résiliation unilatérale d'un mandat d'intérêt commun, même stipulé à durée indéterminée, donne lieu à indemnisation au profit du cocontractant ; qu'à cet égard, le seul respect des formes prévues au contrat pour sa résiliation ne suffit pas à priver le cocontractant de son droit à indemnité ; qu'en retenant en l'espèce, pour écarter toute indemnisation de la société M.A.D. ÉDITIONS, que le contrat avait été conclu à durée indéterminée et que le préavis convenu entre les parties avait été respecté, les juges du fond ont statué par des motifs inopérants, privant encore leur décision de base légale au regard des articles 2003, 2004 et 2007 du Code civil./RÉCUPÉRÉS$gt;/DÉPOSITAIRE$gt;/EDITEUR$gt;