SOC. / ELECT
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
M. Huglo, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10792 F
Pourvoi n° X 17-31.000
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la fédération CGT des personnels du commerce et de la distribution et des services, dont le siège est [...] ,
contre le jugement rendu le 30 novembre 2017 par le tribunal d'instance de [...] (contentieux des élections professionnelles), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Mcdonald's Paris Nord, dont le siège est [...] ,
2°/ à la fédération générale des travailleurs (FGT) de l'agriculture de l'alimentation des tabacs et des activités annexes Force ouvrière, dont le siège est [...] ,
3°/ à la fédération UNSA des commerces et services, dont le siège est [...] ,
4°/ à la fédération des services CFDT, dont le siège est [...] ,
5°/ à la fédération CFTC commerce, services et force de vente, dont le siège est [...] ,
6°/ à Mme Chantal Y..., domiciliée [...] ,
7°/ à Mme Sylvie Z..., domiciliée [...] ,
8°/ à Mme Lila A..., domiciliée [...] ,
9°/ au syndicat Sud solidaires, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, Mme Basset, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Didier et Pinet, avocat de la fédération CGT des personnels du commerce et de la distribution et des services, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Mcdonald's Paris Nord, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la fédération générale des travailleurs de l'agriculture, de l'alimentation, des tabacs et des activités annexes Force ouvrière ;
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la fédération CGT des personnels du commerce et de la distribution et des services.
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR débouté la Fédération CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services de sa demande d'annulation de l'élection au premier tour de Mme Y... comme délégué du personnel titulaire de l'établissement « Champs-Elysées Galerie » de la SAS McDonald's et de sa demande d'organiser un nouveau scrutin et d'AVOIR confirmé la validité du 1er tour de l'élection qui s'est tenu le 7 juin 2017.
AUX MOTIFS QUE la Fédération CGT soutient que l'élection du 7 juin 2017 serait entachée de plusieurs irrégularités et produit à l'appui de sa requête l'attestation de Mme Sylvie Z..., qui s'est présentée sur la liste CFTD. Cette dernière fait état dans son attestation de l'intervention de Mmes Laila S... et Q... B... qui seraient passées derrière l'isoloir lors du vote de Mme C... R..., alors que sur la feuille d'émargement cette dernière apparaît come non votante. Elle mentionne que Mme T... J... qui ne travaillait pas n'avait pas reçu ses codes. Elle ajoute que Mme X... D... s'est mise à parler en arabe alors que M. Mohamed U... était dans l'isoloir, puis que Mme D... s'est mise à communiquer en langue des signes lors du passage de M. Christian E... dans l'isoloir. Enfin elle a ajouté Mme Latifa F..., candidate FO, a donné à 3 salariés (Mme G..., H..., et I...) des chèques vacances, alors que cette information n'était pas passée au comité d'entreprise ; que toutefois Mme Sylvie Z... a annulé par écrit le 31 août 2017 et le 4 septembre 2017 son attestation pour raisons personnelles, en précisant qu'elle ne comptait pas se présenter au tribunal ; que la Fédération CGT a produit également les attestations de Mme J..., qui précise ne pas avoir reçu son identifiant et son mot de passe pour voter sur internet, de M. K..., délégué syndical UNSA, qui indique que Mme Laila S... est passée derrière l'ordinateur pour un électeur qui n'arrivait pas à comprendre le fonctionnement du vote. Elle a produit également l'attestation de M. L... qui indique un écart entre le nombre de personnes ayant récupéré leur code pour voter et le même total sur le procès-verbal informatique, et de M. U... , qui indique qu'il voulait revenir sur la lettre qu'il avait remise le 20 septembre 2017 au directeur de restaurant M. M..., après avoir été informé par une assistante de direction qu'une plainte avait été déposée par Mme Linda N... contre lui et Mme D..., après s'être rendu compte que la plainte ne le visait pas ; que la Fédération CGT soulève plusieurs moyens susceptibles de justifier l'annulation des élections ;
Sur la présence d'un huissier au sein du bureau de vote. La Fédération CGT soutient que la présence d'un huissier durant l'élection ne serait pas conforme aux dispositions du Protocole signé et aurait constitué une forme d'intimidation pour certains électeurs ; que le protocole signé le 5 avril 2017 par les organisations syndicales CGT, CFDT, Sud Solidaires, UNSA, CFTC et FGTA-FO prévoit en son point 8.7, qu'une organisation syndicale ou la Direction pouvait solliciter la présence d'un huissier. Il n'est précisé nulle part que cette présence n'est limitée à la survenance d'un incident. Il a été jugé que les organisations syndicales signataires du protocole préélectoral ne sont pas recevables à en contester l'application ; qu'il a été par ailleurs jugé qu'un protocole signé conformément aux exigences légales ne peut être remis en cause que s'il contient des dispositions contraires à l'ordre public. Or, par sa présence, l'huissier était garant du bon déroulement du scrutin, et la Fédération CGT ne démontre pas en quoi la présence de l'huissier serait contraire à l'ordre public ; que la Fédération CGT soutient par ailleurs que l'huissier a aidé une personne dans son vote lors des manipulations électroniques. Or, il résulte du procès-verbal de l'huissier versé au débat, que ce dernier est intervenu en soutien d'un électeur qui rencontrait des difficultés pour saisir ses codes de connexion et procéder à son vote. Dans ses conclusions, la société McDonald's explique que l'huissier a laissé la personne seule dans l'isoloir pour procéder à son vote, et il ressort de son procès-verbal qu'aucun incident de nature à influencer les votes n'a été relevé. En outre, il ressort des pièces versées au débat qu'aucune des personnes présentes n'a formulé de protestation quant à l'intervention de l'huissier auprès de ce salarié ; que dès lors, il sera dit que la Fédération CGT n'est pas recevable à contester la présence d'un huissier lors de l'élection, et qu'en tout état de cause, cette présence n'a eu aucune influence sur le résultat du vote ;
Sur le défaut d'acheminement des codes confidentiels. La Fédération CGT soutient que Mme V... J... n'a pas reçu son code et son identifiant pour voter, en méconnaissance de l'article 6.1 du protocole préélectoral ; que toutefois, il résulte de l'article 6.1.2 du protocole préélectoral que les salariés votant à distance le jour du scrutin aux horaires d'ouverture des bureaux de vote conservent la possibilité de voter dans leur site d'affectation. D'autre part, il résulte de l'article 6.1.3 du protocole préélectoral qu'en cas de perte de l'un des identifiants, l'électeur concerné devra se présenter physiquement au sein du bureau du restaurant auquel il est rattaché afin de se voir délivrer un nouveau code et mode de passe. M. Mehdi O... s'est d'ailleurs vu remettre ses codes et a pu voter ; qu'il n'est donc pas démontré que Mme V... J... a été privée de son droit de vote, et ce moyen écarté ;
Sur la distribution de chèques vacances. La Fédération CGT soutient que Mme Latifa F... représentante syndicale de FO a distribué 3 chèques vacances à 3 salariées le 26 mai 2017 ; qu'or, il s'avère que les chèques remis aux 3 salariées Mme I..., Mme G... et Mme H... correspondent à une demande des salariées formulées début avril ; que les conditions d'attribution des chèques vacances sont communes à tous les salariés, et la Fédération CGT ne démontre pas en quoi ces 3 salariées ne rempliraient pas les conditions d'attribution ; qu'il résulte par ailleurs de la note en délibéré transmise par la société McDonald's que la distribution des chèques vacances a eu lieu en mai 2017 comme l'année précédente ; qu'en l'espèce, il ne s'agit pas d'une remise gratuite ni d'un traitement de faveur, et la Fédération CGT ne démontre pas en quoi cette remise aurait eu une incidence sur le vote ; que dès lors ce moyen d'annulation sera écarté ;
Sur les échanges entre Mme D..., membre du bureau de vote, et des électeurs. La Fédération CGT soutient que, selon l'attestation établie par Mme Z..., Mme D... membre du bureau du 2ème collège, aurait parlé en arabe avec M. U... , alors qu'il était dans l'isoloir, et que Mme D... aurait parlé en langue des signes avec M. E... ; que l'attestation de Mme Z..., sur laquelle cette dernière est revenue, se trouve contredite par celle de M. U... , qui nie avoir parlé en arabe. Le contenu de l'attestation de M. U... se trouve corroboré par celle de Mme Amina P... W..., qui indique ne pas avoir entendu M. U... parler en arabe, et précise ne pas avoir eu à lui dire qu'il ne fallait pas parler en arabe. Mme D... dans son attestation nie quant à elle avoir parlé en arabe ou en langue des signes, qu'elle dit ne pas maîtriser, et M. E... atteste également ne pas avoir eu d'échange en langue de signes avec Mme D... ; qu'enfin l'huissier dans son procès-verbal ne relève aucun incident de cette nature ; que dès lors ce moyen d'annulation sera écarté ;
Sur l'intervention de Mmes S... et B..., susceptible d'avoir influencé le vote de Mme C..., et sur l'absence de vote de cette salariée sur la feuille d'émargement. L'attestation de M. K... datée du 17 septembre 2017, soit plusieurs mois après les faits, n'a pas en sa qualité de délégué syndical, signalé les faits qu'il allègue. En outre il ressort de la fiche d'émargement électronique du vote, que Mme C... s'est présentée à 11 h 54, tandis que la feuille d'émargement du temps de présence au bureau de vote des délégués syndicaux fait ressortir que M. K... est arrivé au bureau de vote à 13 h 15, et n'a donc pas pu assister à l'incident qu'il relate dans son attestation. En outre l'évènement relaté par M. K... n'est pas mentionné sur le procès-verbal de l'huissier, et aucun des délégués syndicaux présents n'a mentionné la présence de deux personnes en même temps dans l'isoloir ; que par ailleurs, le responsable du prestataire, la société Election Europe, a indiqué que Mme C... s'est connectée pour voter pour l'élection du CE à 11 h 54, et le fait qu'elle n'ait pas voté pour les délégués du personnel n'invalide pas pour autant son vote ; qu'en conséquence, ce moyen d'annulation sera écarté.
1°) ALORS QUE le juge ne peut méconnaître les termes du litige ; que pour débouter la Fédération CGT de sa demande d'annulation de l'élection, le tribunal a énoncé que les organisations syndicales signataires du protocole d'accord préélectoral ne sont pas recevables à en contester l'application ; qu'en statuant ainsi quand le syndicat ne contestait pas le principe de la présence d'un huissier mais son intervention en l'absence d'anomalie et sans avoir été requis par la direction ou une organisation syndicale, en violation des dispositions du protocole électoral, le tribunal a modifié les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile
2°) ALORS QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'aux termes de l'article 8 alinéas 2 et 3 du protocole d'accord préélectoral du 5 avril 2017 « afin de s'assurer de la disponibilité d'huissiers assermentés, dans l'hypothèse où leur présence s'avèrerait nécessaire afin de constater des anomalies dans le déroulement du processus électoral, la Direction de McDonald's Paris Nord veillera à la mise sous astreinte de plusieurs huissiers choisis au regard de leur compétence territoriale ; qu'il est rappelé qu'un huissier pourra intervenir lors des opérations électorales sur demande de la Direction ou sur demande des organisations syndicales (
) » ; qu'il en résulte que l'huissier est simplement mis d'astreinte et n'a vocation à intervenir qu'en cas d'anomalie et à la demande d'une organisation syndicale ou de la direction ; qu'en retenant au contraire que la présence de l'huissier n'est pas limitée à la survenance d'un incident, le tribunal a dénaturé les termes clairs et précis du protocole en violation du principe susvisé ;
3°) ALORS QUE les irrégularités de nature à porter atteinte au secret ou à la sincérité du vote entrainent l'annulation de l'élection ; qu'en écartant le moyen tiré de la présence d'un huissier lors de l'élection quand il constatait « qu'il résulte du procès-verbal de l'huissier versé au débat, que ce dernier est intervenu en soutien d'un électeur qui rencontrait des difficultés pour saisir ses codes de connexion et procéder à son vote », le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L.2314-21 du code du travail, dans sa rédaction applicable, ensemble les principes généraux du droit électoral ;
4°) ALORS QUE le traitement de faveur accordé par un syndicat à des électeurs constitue une atteinte à la sincérité du vote contraire aux principes généraux du droit électoral ; que pour écarter le grief tiré de la distribution de chèques vacances à trois salariées par la représentante syndicale FO, le tribunal a considéré que ces chèques avaient été remis aux salariées à leur demande et que cette distribution au eu lieu en mai, comme l'année précédente ; qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de la Fédération CGT soutenant, d'une part d'aucune information officielle n'ayant été diffusée sur la période d'ouverture des chèques vacances, les salariées n'avaient pu en faire la demande en avril, sauf à en avoir été informées par la représentante syndicale, d'autre part qu'en tant que représentante syndicale au comité d'entreprise, Mme F... n'avait pas qualité pour distribuer ces chèques, le tribunal a violé l'article 455 du code de procédure civile.