COMM.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 6 juin 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10298 F
Pourvoi n° Q 16-23.744
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 7 juillet 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (8e chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Sifas, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à M. Didier Y..., domicilié [...] , pris en qualité de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde de la société Sifas,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 10 avril 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Sifas et de M. Y..., ès qualités ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Sifas et à M. Y..., ès qualités, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six juin deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Yves et Blaise Capron, avocat aux Conseils, pour la Caisse régionale de crédit agricole mutuel Provence Côte d'Azur.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR :
.déclaré irrecevable comme se heurtant à la forclusion prévue par l'article 107, alinéa 1er, du décret n° 2005-847 du 28 décembre 2005, l'action par laquelle la Crcam Provence Côte d'Azur demande d'admission de la créance qu'elle a déclarée au passif de la société Sifas,
. déclaré irrecevable l'action de la Crcam Provence Côte d'Azur en ce qu'elle vise subsidiairement à valider la stipulation d'intérêt et la clause pénale que prévoit le prêt qu'elle a consenti le 10 novembre 2005 à la société Sifas ;
AUX MOTIFS QU'« en vertu de l'article R. 624-5 du code de commerce, dans sa rédaction applicable en la cause, antérieure à l'entrée en vigueur du décret n° 2014-736 du 30 juin 2014, la décision d'incompétence ouvre aux parties un délai d'un mois à compter de la notification ou de la réception de l'avis délivré pour saisir la juridiction compétente à peine de forclusion, à moins de contredit » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 1er alinéa) ; que, « disposant d'une compétence exclusive pour admettre ou rejeter une créance, par un principe d'ordre public dont les exceptions ne sont pas en cause, le juge-commissaire doit lorsqu'il est saisi d'une contestation qui échappe à son pouvoir juridictionnel, surseoir à statuer et inviter les parties à saisir le juge compétent dans le délai prévu à l'article précité » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 2e alinéa) ; que, « par ordonnance du 20 septembre 2012, le juge-commissaire de la procédure de sauvegarde ouverte à l'égard de la société Sifas a constaté que la contestation de la validité de la stipulation de l'intérêt conventionnel ne relève pas de sa compétence et a condamné le Crédit agricole aux dépens » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 3e alinéa) ; qu'« en se déclarant incompétent sans surseoir à statuer, le juge-commissaire a investi le juge compétent du pouvoir de statuer non seulement sur la contestation mais aussi sur la demande en admission de la créance » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 4e alinéa) ; que, « fût-elle erronée, cette ordonnance, devenue irrévocable, a autorité de la chose jugée » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 5e alinéa) ;
qu'« il en résulte, dès lors qu'aucune partie n'a saisi le tribunal compétent dans le délai imparti, que le Crédit agricole est forclos à demander, à titre principal, qu'il soit statué sur la créance, comme à titre subsidiaire, que la contestation soit tranchée » (cf. arrêt attaqué, p. 5, 6e alinéa) ;
1. ALORS QUE l'objet de la chose jugée par un jugement définitif se ramasse dans le dispositif de ce jugement ; que le dispositif de l'ordonnance rendue, le 20 septembre 2012, par la juridiction du juge-commissaire de la procédure de sauvegarde ouverte au profit de la société Sifas, « constat[e] que la contestation [soulevée à l'encontre de la créance déclarée par la Crcam Provence Côte d'Azur] ne relève pas de [la] compétence » de cette juridiction étant précisé que la motivation de la même ordonnance vise, d'une part, la déclaration de la créance de la Crcam Provence Côte d'Azur, et, d'autre part, « la contestation de ladite créance » ; qu'en étendant la chose qui a été ainsi jugée sur la contestation que la société Sifas et son mandataire judiciaire ont formée contre la créance déclarée par la Crcam Provence Côte d'Azur à la question distincte de l'admission de la créance de la Crcam Provence Côte d'Azur au passif de la société Sifas, la cour d'appel a violé l'article 480 du code de procédure civile, ensemble les articles 1351 ancien et 1355 actuel du code civil ;
2. ALORS QUE la forclusion prévue par l'article 107, alinéa 1er, du décret n° 2005-847 du 28 décembre 2005 dans le cas où, le juge-commissaire s'étant déclaré incompétent pour connaître de la contestation qui lui était soumise, la juridiction compétente n'est pas saisie dans le mois, emporte extinction de la contestation formée contre la déclaration de créance, et non pas rejet de la déclaration de créance elle-même ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 107, alinéa 1er, du décret n° 2005-847 du 28 décembre 2005 ;
3. ALORS QUE la Crcam Provence Côte d'Azur faisait valoir, dans ses écritures d'appel, n° 18, pp. 10, 11 et 12, « que la contestation [soumise à la juridiction du juge-commissaire de la procédure de sauvegarde ouverte au profit de la société Sifas] était élevée par le mandataire judiciaire et par le débiteur, et nullement, bien entendu, par le Crédit agricole », qu'« il est également constant qu'en statuant comme il l'a fait, le juge-commissaire ne s'est pas prononcé et n'a pas statué sur l'admission de la créance », qu'il « s'est borné à relever son incompétence pour connaître de la contestation élevée par le mandataire judiciaire et par le débiteur », qu'« il était donc parfaitement logique de considérer que la forclusion de l'article R. 624-5 [du code de commerce : lire : article 107 du décret n° 2005-1677 du 28 décembre 2005] n'avait d'effet qu'à l'égard de la contestation élevée par le mandataire judiciaire et le débiteur, et non pas à l'égard de la créance elle-même », et que, « dès lors, en s'étant abstenu de saisir le juge du fond dans le délai d'un mois de la notification de l'ordonnance du juge-commissaire, la contestation se trouvait nécessairement purgée puisqu'atteinte de la forclusion réglementaire, sur quoi le Crédit agricole a ultérieurement assigné devant le juge du fond pour faire constater la forclusion de la contestation de manière à pouvoir solliciter, conséquemment, que soit prononcée l'admission de la créance déclarée et désormais purgée de toute contestation forclose, à l'état du passif » ; qu'en s'abstenant de s'expliquer sur ces conclusions, la cour d'appel a violé l'article 455 code de procédure civile.