CIV.3
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10292 F
Pourvoi n° P 17-22.735
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Michel X..., domicilié [...] ,
2°/ M. Daniel X..., domicilié [...] ,
3°/ M. Patrick X..., domicilié [...] ,
tous deux agissant en qualité d'héritiers de Violette Valero, décédée le [...] ,
contre l'arrêt rendu le 4 mai 2017 par la cour d'appel d'[...] chambre A), dans le litige les opposant :
1°/ à M. Paul Y...,
2°/ à Mme Dominique Z..., épouse Y...,
tous deux domiciliés [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Echappé, conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Didier et Pinet, avocat des consorts X..., de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. et Mme Y... ;
Sur le rapport de M. Echappé conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour les consorts X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande tendant à voir qualifier de chemins d'exploitation les deux tracés figurés d'une part par les lettres B-C-D d'une part et B-C-H-I d'autre part dans le rapport d'expertise de M. B... du 12 novembre 2013 et d'AVOIR condamné les époux X... à cesser d'emprunter le chemin correspondant au tracé CD de l'expertise, sous astreinte de 200 € par infraction constatée;
AUX MOTIFS QUE, sur l'existence de chemins d'exploitation, aux termes de l'article L 162-1 du code rural, « les chemins et sentiers d'exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l'absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l'usage en est commun à tous les intéressés. L'usage de ces chemins peut être interdit au public »
Qu'en l'espèce, les chemins revendiqués comme chemins d'exploitation sont matérialisés par l'expert suivant :
- les points BCD à l'ouest de la propriété Y..., avec une bifurcation vers l'est au dessus de leur habitation,
- les points BCHI qui traversent la parcelle [...] puis coupent à son extrémité nord ouest la parcelle [...] .
Qu'il n'est pas discuté qu'un chemin d'exploitation existe du point A au point B et sert d'accès aux époux Y...; qu'il se prolonge en chemin carrossable jusqu'au point C;
Que les titres des parties au litige ne comportent aucune mention d'un quelconque chemin;
Que le plan cadastral napoléonien fait apparaître :
- au nord, un chemin dénommé « [...] » dont l'extrémité sud se situe approximativement au milieu de la limite ouest de la parcelle [...] , et qui donc ne traverse pas l'actuelle propriété Y...,
- au sud, un chemin correspondant au tracé A-C de l'expert.
Que la jonction entre ces deux chemins figurée par les lettres C-H-I-J n'y apparaît pas; Que cette jonction apparaît plus tard sur la carte du service géographique de l'armée de 1936, sur les photographies aériennes de 1932,1949, 1960 et 1969, puis n'apparaît plus sur les clichés postérieurs de 1971, 1980 et 1992, pas plus que sur la carte l'institut géographique national de 1970; Que la situation actuelle décrite par l'expert est la suivante :
« il est impossible d'être précis sur l'assiette exacte de ces cheminements... en secteur rural à faible potentiel agricole. Les chemins, à partir du point C, desservent que des parcelles boisées à faible potentiel ou pour le cheminement (CF) une petite carrière.
Le secteur a subi plusieurs modifications (incendie, terrassements et implantation maison Y..., terrassement et implantation maison X..., création de voies nouvelles, désintéressement des zones boisées ou pâturables....). Dans un secteur rural à faible pression foncière les assiettes des chemins peuvent se déplacer dans le temps par simple commodité parfois...
Les parties semblent être d'accord sur les points suivants :
- Le chemin passant par le point A est un chemin d'exploitation au moins jusqu'au point B
- Les cheminements (DG) et (HJ) (et au-delà de J) sont visiblement des chemins anciens dont l'assiette est bien définie, d'une largeur comprise entre 2,00 et 2,50 en moyenne.
Pour savoir si au-delà du point B vers le nord on peut considérer qu'il y a un prolongement (BCH) d'une part (BCD) d'autre part, je réponds par l'affirmative eu égard à l'analyse des éléments photographiques cartographiques d'une part. D'autre part, parce que j'ai constaté que le chemin est soutenu par des pierres dont l'empilement est visiblement ancien du point Q au point D, ce qui laisse supposer que le chemin se prolonge à l'Ouest au-delà du point D. C... le tronçon (CH) n'est pas plus pentu que d'autre tronçon sur une même longueur et à des endroits où l'existence du chemin est indéniable (traces visibles de son assiette et de son ancienneté). Je détermine l'assiette en utilisant le plan de M D...... »
Que le plan D... a été établi les 22 et 27 octobre 2008 à l'occasion d'un bornage et se réfère à des termes mentionnés dans l'acte de partage de la succession A... du 6 novembre 1910 évoquant un chemin charretier;
Qu'il ressort de ces éléments qu'au delà du point C, le chemin qui a existé selon le tracé C-H-I-J comme figuré sur la carte du service géographique de l'armée de 1936 a progressivement disparu pour ne plus apparaître sur les clichés photographiques depuis 1971 et n'a pas été revendiqué entre 1996, date à laquelle les époux Y... ont acquis les parcelles [...] et [...] et 2010, date de l'assignation devant le tribunal d'instance d'Aubagne; Que le chemin qui a existé selon le tracé C-D a également progressivement disparu pour ne plus apparaître sur les clichés photographiques depuis 1971, l'expert indiquant supposer que le chemin existant sur le fonds X... D-G se prolongeait à l'ouest au-delà du point D, mais ne pouvant rien constater eu égard aux récents travaux réalisés par les époux Y...; Qu'il n'est aucunement démontré que les chemins revendiqués ont servi à la communication entre les fonds ou à leur exploitation alors qu'ils ont été laissés à l'état d'abandon depuis plusieurs décennies, au point que l'expert indique qu'il est impossible d'être précis sur leur assiette exacte, qu'ils ont disparu des clichés photographiques depuis 1971, et alors que le fonds X... est desservi par d'autres chemins; Que les attestations produites par les époux X... mentionnent l'utilisation du chemin litigieux par les propriétaires des parcelles [...] , [...] (non présents à l'instance) ou par l'ancien propriétaire de la parcelle [...] pour accéder à leurs fonds, ou par des familles pour se promener, ce qui ne caractérise pas le chemin d'exploitation qui doit servir à la communication entre des fonds ou à leur exploitation;
1°) ALORS QUE l'existence d'un chemin d'exploitation ne disparaît pas par non usage et ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires qui en bénéficient; qu'en constatant l'existence d'un chemin d'exploitation du point A au point C, et en refusant de prolonger ledit chemin selon le tracé C-H-I-J établi par l'expert, aux motifs que, sur ce tronçon, le chemin aurait «progressivement disparu pour ne plus apparaître sur les clichés depuis 1971» et que ledit chemin n'avait pas été revendiqué entre 1996 et 2010, la cour d'appel a violé les articles L. 162-1 et L. 162-3 du code ruralet de la pêche maritime ;
2°) ALORS QUE l'existence d'un chemin d'exploitation ne disparaît pas par non usage et ne peut être supprimé que du consentement de tous les propriétaires qui en bénéficient; qu'en constatant l'existence d'un chemin d'exploitation du point A au point C, et en refusant de prolonger ledit chemin selon le tracé C-D établi par l'expert, aux motifs que, sur ce tronçon, le chemin aurait «progressivement disparu pour ne plus apparaître sur les clichés depuis 1971» et que les travaux réalisés par les époux Y... empêchaient de constater l'existence du chemin, la cour d'appel a violé les articles L. 162-1 et L. 162-3 du code ruralet de la pêche maritime;
3°) ALORS QUE, l'ouverture d'un chemin au public ne suffit pas à exclure la qualification de chemin d'exploitation; qu'en déboutant les exposants de leurs demandes tendant à voir qualifier de chemins d'exploitation les tracés C-H-I-J et C-D établis par l'expert, au motif inopérant que les attestations des époux X... mentionnaient l'utilisation de ces chemins «par des familles pour se promener, ce qui ne caractérise pas le chemin d'exploitation qui doit servir à la communication entre des fonds ou à leur exploitation», la cour a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, tiré de l'absence d'ouverture du chemin au public, et violé l'article L. 162-1 du code ruralet de la pêche maritime;
4°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'examiner l'ensemble des pièces versées aux débats; qu'en énonçant qu'il n'était «aucunement démontré que les chemins revendiqués ont servi à la communication entre les fonds ou à leur exploitation» , ou encore que les attestations produites par les époux X... mentionneraient l'utilisation du chemin par les bénéficiaires pour accéder à leur fonds, «ce qui ne caractérise pas le chemin d'exploitation qui doit servir à la communication entre des fonds ou à leur exploitation», quand l'attestation de M. E... exposait «cette unique chemin (
) traverse sur le haut les parcelles [...] et [...] ancienne propriété des frères H... actuellement Y... et continue à desservir la 19-21-8-22-23-7 etc
», que celle de M. F... exposait «j'ai toujours vu les deux chemins montant au Nord qui servaient à exploiter la colline», et que celle de Mme G..., qui avait vendu aux exposants une partie de leurs terrains, énonçait: «les collines et les charbonnières n'étant plus exploitées, personne ne fait plus descendre des charrettes de bois et de «feicines» par ce chemin-là», tous éléments de preuve démontrant que les chemins litigieux servaient ou avaient servi à la communication entre les fonds ou à leur exploitation que la cour n'a pas examinés, violant de la sorte l'article 455 du code de procédure civile.