CIV.3
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10290 F
Pourvoi n° A 17-21.251
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ M. Robert X...,
2°/ Mme Milka Y..., épouse X...,
tous deux domiciliés [...] ,
contre l'arrêt rendu le 11 mai 2017 par la cour d'appel d'[...] chambre A), dans le litige les opposant :
1°/ à M. Abdelmalek Z...,
2°/ à Mme D... B... ,
tous domiciliés [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 mai 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme A..., conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme X..., de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. Z... et Mme B... ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. et Mme X... ; les condamne in solidum à payer la somme globale de 2 000 euros à M. Z... et Mme B... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Il est reproché à la décision attaquée d'avoir rejeté la demande des époux X... tendant à voir constater que l'abri du jardin empiétait sur le mur appartenant aux époux X..., à voir constater que les époux X... bénéficiant d'une servitude de vue acquise par prescription trentenaire sur la cour des époux Z..., de dire et juger que les époux Z... ne peuvent obstruer les fenêtre des époux X... du fait de cette servitude et de voir constater que M. et Mme Z... créaient un trouble anormal du voisinage aux époux X... par l'édification de mur de leur abri de jardin devant leur fenêtre et d'avoir ordonné le remplacement des deux fenêtres en PVC telles que visées dans le procès-verbal de constat du 29 octobre 2010 par des jours dormants et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement ;
Aux motifs qu'il est de droit que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en application de l'article 678 du code civil, on ne peut avoir de vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies sur l'héritage clos ou non clos de son voisin s'il n'y a 19 dm de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage, à moins que le fonds ou la partie du fonds sur lequel s'exerce la vue ne soit déjà grevé, au profit du fonds qui en bénéficie, d'une servitude de passage faisant obstacle à l'édification de constructions ; que l'article 690 du code civil dispose que les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de 30 ans ; qu'ainsi une servitude de vue peut s'acquérir par prescription dans un délai de 30 ans ; qu'aux termes de l'article 702 du code civil, celui qui a un droit de servitude ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir faire ni dans le fonds qui doit la servitude, ni dans le fonds à qui elle est due, de changement qui aggrave la condition du premier ; qu'en l'espèce, il est constant que les époux X... sont propriétaires d'une résidence secondaire située à [...] dont l'une des façades donne sur la propriété de M. Z...
anciennement propriété commune des époux Z... B..., et comporte plusieurs fenêtres ; que les époux X... demandent d'ordonner la démolition sous astreinte du mur litigieux et de l'abri de jardin construit par M. Z..., et de condamner les consorts Z... B... au paiement de la somme de 25 000 euros de dommages-intérêts, au motif que ces derniers créent un trouble anormal de voisinage par l'édification du mur de leur abri de jardin devant leur fenêtre, à l'origine d'une perte de luminosité et de vue, d'une impossibilité d'aérer la pièce, d'une perte de valeur vénale et d'un préjudice moral ; qu'ainsi que l'a relevé le premier juge, l'édification de l'abri de jardin par les consorts Z... B... a pour effet d'obstruer presque intégralement l'une des fenêtres appartenant aux époux X... ; que cependant, la circonstance selon laquelle la fenêtre obstruée constitue une ouverture irrégulière sur la propriété des consorts Z... B... conduit à écarter le trouble anormal de voisinage invoqué ; qu'en effet, les époux X... qui bénéficiaient initialement d'une servitude de vue du fait de l'existence d'une cour sur l'arrière, ont aggravé cette servitude de vue en remplaçant la cour par un bâtiment comportant deux fenêtres, dont celle aujourd'hui obstruée, et quatre rangées de pavés ; que ce bâtiment qualifié par les époux X... tantôt de buanderie, tantôt de véranda, constitue en tout état de cause une pièce fermée qui n'a pas le même usage qu'une cour intérieure ; que l'usage de buanderie n'apparaît pas au demeurant crédible, les époux X... se plaignant d'une perte de luminosité, d'une privation de vue, d'une impossibilité d'aérer la pièce, d'une perte de valeur vénale et d'un préjudice moral, qu'ils chiffrent à 25 000 euros ; que de plus, contrairement à ce que soutiennent les époux X..., les ouvertures ainsi créées sont récentes ; il n'est pas démontré qu'elles ont plus de 30 ans ; ainsi sur la déclaration modèle H1 intitulée « locaux d'habitation et à usage professionnel ‘ maisons individuelles », il est seulement mentionné une surface totale de 48 m² dont 8 m² de cour, à la date du 19 septembre 1970 ; l'acte d'acquisition des époux X... en date du 12 mai 1998 ne fait pas figurer au titre de la désignation des biens une quelconque véranda mais simplement une maison d'habitation comprenant une cour sur le derrière ; qu'il est fait état d'une véranda pour la première fois dans un document daté du 4 novembre 1999 consistant en une attestation d'une agence immobilière ; que les fenêtres créées, pour leur part, sont mentionnées pour la première fois dans un procès-verbal de constat dressé le 29 octobre 2010 ; qu'il s'ensuit que les époux X... ne rapportent pas la preuve de l'existence d'une servitude de vue acquise par prescription de 30 ans ; que par ailleurs, en cause d'appel, les époux X... se prévalent d'un rapport d'expertise dressé à leur demande par le dénommé Michel C... le 13 août 2015 ; qu'ils estiment au vu de ce rapport que l'abri de jardin des époux Z... empiète sur le mur leur appartenant ; ce rapport, établi non contradictoirement, après une simple visite sur les parties accessibles et visibles de la propriété des époux X... et en leur seule présence ne se trouve pas corroboré par le procès-verbal de constat du 29 octobre 2010, celui du 10 octobre 2011 et les photographies qui y sont annexées, lesquels montrent une distance certaine entre le mur X... et le mur de l'abri de jardin ; que par conséquent, le jugement sera confirmé en ce qu'il déboute les consorts X... de leurs demandes de démolition et de dommages-intérêts ;
Alors que les servitudes de vues, continues ou apparentes s'acquièrent par titre ou possession trentenaire ; que la servitude de vue par une cour n'est pas aggravée par la construction fermée à la place de cette cour, même pourvue de deux fenêtres, dès lors qu'elles n'augmentent pas l'étendue du champ visuel sur l'immeuble voisin ; qu'en retenant que les époux X... bénéficiaient d'une servitude de vue par l'ancienne cour arrière, mais qu'ils l'avaient perdue par aggravation du fait de son remplacement par une construction comportant deux fenêtres, sans caractériser en quoi la servitude de vue avait été aggravé par rapport à la situation précédente, notamment sur le champ de vision sur l'immeuble voisin, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard articles 678 et 702 du code civil.