N° G 17-83.565 F-D
N° 1170
VD1
24 MAI 2018
CASSATION
M. SOULARD président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Pierre X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, 13e chambre, en date du 28 avril 2017, qui, pour dégradation d'un bien appartenant à autrui, l'a condamné à 5 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 avril 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Y..., conseiller rapporteur, Mme Drai, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Bray ;
Sur le rapport de M. le conseiller Y..., les observations de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général Z... ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-2 et 322-1 du code pénal, 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. Pierre X... coupable du délit de destruction, dégradation ou de détérioration d'un bien appartenant à autrui pour avoir, le 7 novembre 2012, coupé l'alimentation électrique et tous les fils électriques de l'enseigne du magasin exploité par la société Pageli et l'a condamné à payer à cette société la somme de 2 128,88 euros en réparation de son préjudice matériel ;
"aux motifs qu'il résulte des déclarations de M. X... qu'il a volontairement dégradé les câbles alimentant l'enseigne du magasin loué à la société Pageli ; que son avocat ne saurait raisonnablement soutenir que lesdits câbles appartiennent à M. X... personne physique dès lors que le bail commercial avait été conclu entre la société BG et la société Pageli ; que c'est justement que les premiers juges l'ont déclaré coupable de ce chef de prévention ; [ ] que la cour dispose d'éléments suffisants pour confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré la société Pageli prise en la personne de son représentant légal recevable en sa constitution de partie civile, condamné M. X... à payer à la partie civile la somme de 2 128,88 euros pour réparation du préjudice matériel consécutif aux faits de dégradation volontaire en date du 7 novembre 2012 ;
"1°) alors que pour démontrer qu'il n'avait pas porté atteinte à la propriété d'autrui en coupant les câbles électriques litigieux, M. X... faisait valoir dans ses conclusions d'appel qu'il les avait coupés en sa qualité de gérant de la société bailleresse, laquelle devait être regardée comme en étant la propriétaire en vertu de la clause d'accession stipulée dans le contrat de bail ; qu'en retenant qu'il ne pouvait être soutenu que les câbles alimentant l'enseigne du magasin loué à la société Pageli appartiennent à M. X... personne physique dès lors que le bail avait été consenti par la société BG, au lieu de rechercher, ainsi que les conclusions du prévenu l'obligeaient à le faire, si ces câbles n'étaient pas la propriété de la société bailleresse et n'avaient pas été coupés par M. X... en sa qualité de représentant légal de cette société, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
"2°) alors en tout état de cause qu'en condamnant M. X... à verser à la société Pageli des dommages-intérêts en réparation de son préjudice matériel consécutif à la dégradation des câbles électriques litigieux sans constater que ceux-ci étaient bien la propriété de cette société et non celle de la société bailleresse, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ;
Attendu que la société BG, gérée par M. Pierre X..., a consenti un bail commercial à la société Pageli sur un ensemble immobilier situé à Antibes, dans lequel celle-ci exploite un magasin de jouets ; que, par citation directe en date du 3 septembre 2015, la société Pageli a fait citer M. X... devant le tribunal correctionnel de Grasse pour, notamment, dégradations de biens appartenant à autrui, cette société reprochant à M. X... d'avoir coupé les fils électriques alimentant l'enseigne du magasin, passant sous le toit et dans l'immeuble privatif ; que le tribunal correctionnel de Grasse a déclaré M. X... coupable des faits commis le 7 novembre 2012 ; que le prévenu, le ministère public et la partie civile ont interjeté appel de cette décision ;
Attendu que, pour répondre aux conclusions de M. X..., qui soutenait avoir agi en sa qualité de gérant de la SCI, laquelle, en application des clauses du bail, était propriétaire des câbles litigieux, et confirmer sa culpabilité, l'arrêt attaqué prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, sans autrement rechercher, comme les conclusions l'y invitaient, si la société bailleresse n'était pas devenue, par la conclusion du contrat de bail, la propriétaire des fils électriques litigieux, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 28 avril 2017, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-quatre mai deux mille dix-huit ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.