COMM.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 24 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10261 F
Pourvoi n° X 16-28.006
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Philippe X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 6 octobre 2016 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 2), dans le litige l'opposant à M. Emmanuel Y..., domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur de la sociétéSAI Développement,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 mars 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Vaissette, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. X..., de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. Y..., ès qualités ;
Sur le rapport de MmeVaissette, conseiller, l'avis de Mme Henry, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Y..., ès qualités, la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné M. X... à payer à M. Y... en sa qualité de liquidateur de la société SAI X... la somme de 200 000 € au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif, et prononcé à son encontre une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler toute entreprise ou personne morale pour une durée de cinq années ;
AUX MOTIFS QUE, sur l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, s'agissant d'une action en responsabilité délictuelle, à caractère indemnitaire, ayant pour objet la réparation du préjudice subi par la collectivité des créanciers, doivent être prouvés l'existence d'une faute de gestion, celle d'un préjudice consistant en une insuffisance d'actif et un lien de causalité entre eux ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces et explications des parties que l'actif recouvré à l'occasion des opérations de liquidation s'élève à 195 433 € 87 (réalisation du mobilier, comptes bancaires, recouvrement de créances) ; que la valeur du bail des locaux a été « mise en mémoire » par le mandataire judiciaire mais que M. X... ne fait état d'aucune valeur de ce chef ; que le passif (vérifié et admis pièce 3) est de 1 019 336 €, (490 702 € pour le passif super privilégié et privilégié, 528 633 € pour le passif chirographaire) ; qu'il en ressort une insuffisance d'actif de 823 902 € ; que l'état des créances vérifiées a été déposé le 18 octobre 2012 et notifié ; que ces montants ne sont pas critiqués par M. X... ; que les fautes reprochées par Me Y... à M. X... sont les suivantes : « l'abandon pur et simple de la direction personnelle de l'entreprise, sa délégation à des personnes incompétentes dont l'activité et les compétences n'étaient pas contrôlées, leur renvoi dans des conditions maladroites et lourdement onéreuses », « l'omission de demander l'ouverture du redressement judiciaire ou de la liquidation judiciaire dans les 45 jours à compter de la date de cessation des paiements sans avoir par ailleurs demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation » ; « la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements » ; que sur le défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai légal, que la date de cessation es paiements a été fixée au 1er juin 2011, par le jugement de liquidation judiciaire du 7 novembre 2011 ; aucune demande de report de cette date n'a été formulée ; que le tribunal de commerce a été saisi le 21 octobre 2011, par le débiteur ; qu'en conséquence, il convient de constater que le délai légal de 45 jours de l'article L. 631-4 du code de commerce n'a pas été respecté ; que sur l'abandon de la direction personnelle de l'entreprise, que Me Y... soutient que jusqu'en 2007, la société SAI a fonctionné de manière satisfaisante avant de se lancer dans un projet de développement à cinq ans, prévoyant une croissance externe et une évolution des prestations ; qu'elle a obtenu début 2008, un prêt de 500 000 € sans garantie, pour développer ce projet ; qu'elle a recruté un ingénieur, et une assistante de direction ; qu'à cette période, M. X... a décidé de se lancer dans un programme de formation professionnelle « aux techniques du coaching », et d'intelligence artificielle basées sur l' « hyper conscience » dont il semble avoir voulu faire profiter l'entreprise, alors que celle-ci commençait à rencontrer des difficultés ; qu'en juin 2010, il a délégué la direction à M. B... directeur général délégué, et à Mme C..., directrice administrative et financière sans vérifier leurs compétences en la matière ; que consacrant un temps important à sa nouvelle discipline et ses recherches, M. X... a déposé auprès des services fiscaux une demande tendant à obtenir la prise en charge des dépenses exposées à ces fins ; que de son propre aveu, ce dirigeant a consacré à ses « recherches » en 2008, 62 % de son temps, en 2009, 59 % et en 2010, 32 % ; que pourtant des décisions urgentes s'imposaient pour assurer la pérennité de l'entreprise, alors que le personnel se démobilisait et que plusieurs salariés très qualifiés démissionnaient ; qu'il expose que « l'abandon du système de pilotage » ne permettait plus la moindre visibilité, et que des carences apparaissaient tant au niveau commercial que pour le suivi de chantiers ; que la décision de mise en place d'un plan de réduction des frais généraux, prise en 2009 par le conseil d'administration n'a pas été suivie d'effet ; que ce n'est qu'en octobre 2010 que M. X... s'‘est rendu compte de l'incapacité de M. B... et a repris momentanément la gestion de la société ; qu'il a procédé à la rupture des contrats de travail de M. B... et Mme C..., salariés disposant d'une ancienneté importante, dans des conditions calamiteuses pour l'entreprise ; qu'il les a en effet licenciés pour faute grave, et que le conseil des prud'hommes allait les qualifier de licenciements économiques, ce qui allait entraîner des indemnités de 352 951 € au total, soit près de 43 % du montant de l'insuffisance d'actif ; que les procès verbaux des conseils d'administration de septembre et octobre 2010, février 2011 sont éloquents sur le comportement de M. X... ; qu'il va ensuite engager M. D... qui va « achever » l'entreprise, par son incompétence voire des malversations ; que c'est la procédure d'alerte initiée par le commissaire aux comptes qui va inciter M. X... à faire sa déclaration de l' état de cessation des paiements ; que M. X... fait valoir que, président directeur général, il avait pour fonction principale le pilotage général de l'entreprise, son développement commercial et politique, le lobbying et le développement des prestations ; que le management était dévolu à M. B..., par ailleurs directeur général adjoint, et que Mme C... s'occupait seule de « la finance, la trésorerie, des ressources humaines, des tableaux de bord, de la comptabilité » ; que la crise économique de 2008 a eu des répercussions sur la société, qui a connu son premier déficit en 2009 ; qu'en 2011, il a pris conscience que des courriers avaient été interceptés et ne lui étaient jamais parvenus, que des factures n'étaient pas arrivées chez des clients, ou avaient été émises par les services comptables en dehors de toute validation, avec les services techniques, que sa propre signature avait été imitée sur une facture ; que dans le même temps, la société d'expertise comptable lui faisait part d'anomalies dans la saisie comptable, réalisées par Mme E... et J... ; que la plainte qu'il a déposée est toujours en cours chez un juge d'instruction à Valenciennes ; qu'il approuve le tribunal pour avoir considéré que, au vu des pièces communiquées, la faute ayant consisté à avoir abandonné la gestion de l'entreprise n'était pas caractérisée, pas plus que celle afférente à la poursuite d'une exploitation déficitaire dans un intérêt personnel ; qu'il estime que « le montant important des sommes recouvrées par le liquidateur laisse à penser que plusieurs d'entre elles résultent de créances nées pendant la période séparant la date de cessation des paiements retenue par le tribunal et la date du jugement d'ouverture, de sorte que l'accroissement du passif pendant cette période n'est pas égal à celui de l'insuffisance d'actif » ; que Me Y... ne présente pas de critique sérieuse de la motivation du jugement ; qu'il convient d'abord de rappeler que, selon ses propres écritures, M. X... avait pour fonction principale « le pilotage général de l'entreprise, le développement commercial et politique, le lobbying et le développement des prestations » ; que le fait d'avoir embauché M. D... dans les derniers mois en vue d'assurer le sauvetage de la société ne peut au regard des éléments fournis à la cour être reproché à M. X... comme une faute de gestion au seul motif que celui-ci allait s'avérer être un incapable, voire même un escroc, selon la plainte déposée par M. X... auprès d'un juge d'instruction de Valenciennes dès lors qu'il n'est pas établi que M. X... savait avant son embauche les insuffisances de l'intéressé, et que les circonstances de cette embauche ou la personnalité de M. D... ne sont pas précisées, étant au demeurant souligné qu'il n'a pas été justifié de l'état actuel de l'information ; qu'en revanche, c'est de manière pertinente que M. Y... reproche à M. X... les circonstances du licenciement de Mme C... et M. B... ; qu'en effet, le conseil de prud'hommes a jugé sans cause réelle et sérieuse ces mesures décidées les 31 janvier et 15 février 2011, pour faute grave, étant souligné que la première avait été embauchée le 5 septembre 1986, qu'elle était directrice administrative et financière depuis 2009, que les courriels échangés entre eux prouvent qu'il accordait une grande importance à ses idées et conseils et lui confiait de multiples tâches, que par ailleurs M. B... avait été embauché en mai 2006, avec apport à la SAI des parts de la société qu'il exploitait auparavant ; que par ailleurs, des négligences dans la gestion de la société sont encore établies, dès lors qu'il ressort des différents procès verbaux de conseil d'administration des 11 et 25 septembre 2010, 22 octobre 2010, 24 février et 10 octobre 2011 que : M. X... ne maîtrisait pas les informations nécessaires pour assurer une direction sérieuse et efficace, qu'il n'était pas capable de prendre en temps utile les décisions adaptées aux circonstances (ainsi PV du 11 septembre 2010) : M. X... demandant que s'est il passé entre janvier 2010 et juin 2010, dans le but de réduire les charges ? quelles sont les actions à mener pour la rentabilité de l'entreprise ? » Mme C... : « il y a avant tout un manque de décision », M. X... indiquant lui-même : il n'y a pas de stratégie de cohésion », et « la société est incapable à ce jour d'avoir un réseau et une politique commerciale » ; « M. X... veut connaître la stratégie concrète pour réaliser le chiffre d'affaires annoncé de 1,5 million d'euros » ; M. F... : « il y a un manque de suivi, de responsabilité, il faut prendre des décisions et s'y tenir » ; PV du 25 septembre 2010 : M. G... : « il manque un outil de planification ou de suivi dans l'entreprise ; il y a une gestion budgétaire à construire, « ; PV du 22 octobre 2010 : M. H... « le principe de fonctionnement d'une entreprise c'est d'avoir une politique et un plan d'action, ce n'est pas le cas dans le pilotage de SAI aujourd'hui, le pilotage est aujourd'hui fondé sur du feeling » ; que ces réunions étaient manifestement l'occasion pour lui de se renseigner sur les données économiques et financières comme sur la vie interne de l'entreprise alors que la taille de celle-ci, 15 salariés seulement et les difficultés rencontrées exigeaient de sa part une présence et un investissement personnel bien plus significatifs ; que M. X... invoque les difficultés et la crise économique de 2008, mais a pourtant selon ses propres dires à l'administration fiscale (réponse aux observations du contribuable du 22 mai 2012) consacré 51 % de son activité professionnelle sur les trois années 2008 à 2010 à sa formation et son développement personnel (progression dans les technologies d'intelligence collective par l'hyper conscience) nécessairement au détriment de son implication et sa présence au sein de l'entreprise ; qu'il n'était manifestement pas à même de mettre en pratique les principes et outils enseignés lors de ses formations personnelles en coaching et ne cessait de déléguer à Mme C... certaines tâches qui lui incombaient, telles que la remobilisation des troupes (pièce n°13 de Mme C... courriel du 12 septembre 2010) ; que face aux difficultés et pertes rencontrées par la société, la seule réponse proposée et réitérée par M. X... consistait à supprimer les tickets restaurant, et à envisager de passer aux 35 H sans soumettre à l'appui une analyse comptable et financière ; que la baisse de 30 % de sa rémunération était un geste symbolique mais n'était pas de nature à permettre de résoudre les difficultés ; que les mails échangés entre M. X... et Mme C... (communiqués par elle) sont à cet égard significatifs quant aux qualités et idées de la seconde et au maniement par lui de concepts parfois flous sans l'autorité ni le sens de la décision attendus de la part d'un dirigeant dans la situation qui était alors celle de la SAI ; que sur la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire, que Me Y... soutient que la société a enregistré une exploitation déficitaire au cours de l'année 2009, pour un montant de 199 005 €, qui s'est aggravé en 2010, (331 991 €) ; que M. X... a pourtant poursuivi cette exploitation jusqu'en octobre 2011 sans avoir d'instrument fiable de gestion ; que son intérêt personnel est caractérisé puisqu'il a continué à percevoir sa rémunération de 119 684 € tout en ne consacrant à la société qu'une partie limitée de son temps ; qu'il bénéficiait en outre de la mise à disposition d'un véhicule Porsche ; que le tribunal a admis que les chiffres caractérisaient une poursuite déficitaire ; qu'il reproche en revanche aux premiers juges d'avoir estimé qu'il n'était pas établi qu'elle ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements, au motif que les capitaux propres à la clôture de l'exercice 2010 étaient encore « largement positifs et en tout état de cause bien supérieurs au montant du capital social » et d'avoir ainsi comparé des pertes consommant la substance de l'entreprise et réduisant ses capitaux propres à des postes du passif n'ayant aucune importance pour la question ; que les moyens et arguments de M. X... ont été précédemment résumés à l'occasion de l'étude de la faute « ayant contribué à abandonner la gestion de la société » ; que le caractère déficitaire de l'exploitation de la société en 2009, 2010 et 2011 est établi et n'est pas sérieusement contesté par M. X... puisque lors du conseil d'administration du 22 octobre 2010, il admettait déjà que : « la société a perdu 100 000 € et perdra 300 000 € cette année ; qu'ainsi, il ressort du rapport de gestion du CA présenté à l'assemblée générale ordinaire et extraordinaire du 30 juin 2010 que pour l'exercice 2009 le résultat d'exploitation était négatif de 178 312 € alors qu'il était positif de 217 274 € l'exercice antérieur ; que le résultat net comptable engendrait un déficit de 136 544 € ; que le chiffre d'affaires avait baissé de manière significative de 38 % (1 465 153 € au lieu de 2 375 984 €) ; quant à la lettre d'alerte du commissaire aux comptes du 17 octobre 2011, elle établit que le CA réuni le 10 octobre 2011 a approuvé les comptes clos au 31 décembre 2010, et faisant ressortir une perte de 237 K€, et une baisse de production de 27 %, une dégradation considérable de la situation de trésorerie sur l'exercice 2010 et le premier semestre 2011 avec une position globale de trésorerie sur les trois banques de -42 K€, montant supérieur au découvert autorisé, malgré l'obtention de financement complémentaire ; une demande d'échéancier sur une partie des charges sociales ; que la dégradation constante de toutes les données financières et comptables de la société était telle depuis 2009 qu'elle ne pouvait conduire qu'à l'état de cessation des paiements et en outre, était connue de M. X... lequel expliquait lui-même lors du conseil d'administration du 10 octobre 2011 qu' « en juillet 2010, le prévisionnel à fin 2010 était très compromettant pour l'entreprise » ; que dès octobre 2016, (pièce n° 6), la perte était estimée entre 300 000 € et 350 000 € et Mme C... précisait que la trésorerie était tendue ; que sur le lien de causalité entre ces fautes et tout ou partie de l'insuffisance d'actif, la cour retient que d'abord que, en se séparant dans les circonstances évoquées précédemment, de Mme C... et de M. B..., M. X... a commis une faute de gestion qui a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif, au moins à hauteur des dommages intérêts qui leur ont été alloués, par le conseil des prud'hommes, à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, (50 000 € pour l'un et 70 000 pour l'autre, jugements rendus en 2012 et fixant les créances au passif de la société) ; que les autres éléments fournis par le demandeur (état du passif vérifié, ordonnance du juge commissaire, bilan clos au 31 décembre 2010, et ses annexes notamment, bordereaux de déclaration de créance) permettent en outre à la cour de constater qu'une première créance de l'Urssaf a été admise pour un montant de 59 467 € somme correspondant aux cotisations impayées de juillet à novembre 2011 ; qu'une des créances de Novalis retraite Arrco admise pour un montant de 25 490 € englobait les soldes de cotisations pour 2010 et le 1er trimestre 2011, ainsi que les cotisations des 2ème trimestre 2011, 11560 €, et 3ème trimestre, 10 598 € ; qu'une des créances de Novalis retraite Agirc a été admise pour 16 900 € et englobait les soldes de cotisations pour 2010, et le 1er trimestre 2011, ainsi que les cotisations pour 2010, et le premier trimestre 2011, ainsi que les cotisations des 2ème et 2011, 6906 €, et 3ème trimestre (6507 €) ; qu'enfin M. X... ne saurait s'exonérer de toute responsabilité en invoquant les prétendues fautes d'anciens salariés au mépris des jugements rendus par les conseils des prud'hommes, ou de M. D... intervenu dans les seuls derniers mois de l'activité, alors même qu'il n'a pas été en mesure de s'expliquer sur le sort donné à sa plainte déposée le 3 juin 2014 ; que ces éléments permettent à la cour de fixer à 200 000 € le montant de la somme que M. X... devra payer à M. Y... ;
1) ALORS QU'en cas d'insuffisance d'actif, le tribunal dispose de la faculté de décider que celle-ci sera, en tout ou partie, supportée par le dirigeant qui, par sa faute de gestion, y aura contribué, la condamnation éventuellement prononcée devant préciser le lien de causalité entre la faute retenue et l'insuffisance d'actif ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, pour condamner M. X... au paiement de la somme de 200 000 € au titre de l'insuffisance d'actif, a retenu qu'il avait commis une faute de gestion ayant « nécessairement » contribué à l'insuffisance d'actif en licenciant pour un motif erroné deux salariés, à hauteur des dommages intérêts versés par l'entreprise, soit au total 120 000 €, mais n'a pas déduit de cette somme le montant des rémunérations de ces deux salariés, puis a énuméré des créances de cotisations sociales qui, à hauteur de plus de 95 000 €, ne sont devenues exigibles qu'après le 1er juin 2011, date de la cessation des paiements, le défaut de paiement ne pouvant pas être lié à une faute du dirigeant ; qu'en statuant ainsi, pour condamner M. X... au paiement de la somme de 200 000 € au titre de l'insuffisance d'actif, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ;
2) ALORS QUE subsidiairement, dans ses conclusions, (page 4 à page 6), M. X... faisait valoir que, dès la survenance des premières difficultés en 2010, il avait eu recours à une évaluation du personnel par un spécialiste, celui-ci révélant outre l'immobilisme des membres de l'équipe et leur résistance aux changements, l'« épuisement » de M. X..., puis qu'il avait repris seul la direction générale de la société, pour tenter de la redresser, que d'octobre à décembre 2010, un plan de pilotage de l'entreprise avait été mis en place, qu'il avait élaboré un plan de relance et de redressement adopté en février 2011 par le conseil d'administration, et qu'il s'était chargé de consulter les partenaires financiers et commerciaux, ajoutant que les fonds propres de la société permettaient de continuer l'exploitation, sans déficit ; qu'en se bornant à relever que M. X... maniait des « concepts flous », sans autorité ni sens de la décision, en considérant que les questions posées par M. X... lors des conseils d'administration n'étaient que des demandes d'information d'un dirigeant trop absent, quand elles étaient la preuve, comme le tribunal l'avait relevé, qu'il était « un homme présent dans son entreprise », « lors des réunions de l'organe de direction », sollicitant « de ses collaborateurs des explications et des outils de reporting », la cour d'appel n'a pas caractérisé les fautes retenues pour n'avoir pas examiné la réalité des actions entreprises par M. X... afin de redresser l'entreprise; et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à la cour d'appel d'avoir prononcé à l'égard de M. X... la peine de d'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise et toute personne morale pour la durée de cinq ans,
AUX MOTIFS QUE les fautes reprochées par le mandataire liquidateur sont les suivantes : défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai légal, la poursuite abusive de l'exploitation déficitaire, deux griefs déjà analysés à l'occasion de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ; qu'au visa de l'article L.653-4 du code de commerce, M. Y... soutient que ces faits, et « l'intérêt personnel du dirigeant » ont été caractérisés pour sa demande en comblement du passif ; que M. X... quant à lui approuve le tribunal pour avoir repris « la seule faute qui pourrait lui être reprochée soit l'absence de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours » et avoir estimé que cela ne justifiait pas de prononcer une sanction personnelle ; que sur le grief tenant à la poursuite abusive, dans un intérêt personnel, d'une exploitation déficitaire qui ne pouvait conduire qu'à la cessation des paiements de la personne morale, si les autres critères de cette infraction ont été précédemment été caractérisés à l'occasion de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, reste à rechercher si M. Y... établit l'existence d'un intérêt personnel de la part de M. X... ; qu'or, même si celui-ci a fait voter une baisse de sa rémunération, de 20 puis 30 %, durant la période critique, il n'en demeure pas moins qu'il a continué à la percevoir, 119 684 €, tout en consacrant une bonne partie de son temps, à son développement personnel, ainsi qu'en atteste le refus de l'administration fiscale d'en tenir compte pour accorder un « crédit recherche » mais aussi son incapacité manifeste de gérer les tensions au sein de la société ; qu'enfin, la faute tenant à l'absence de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours a déjà été caractérisée ; que dès lors, l'une comme l'autre de ces deux fautes, séparément comme combinées, justifient le prononcé d'une interdiction de gérer pour une période de cinq années ;
ALORS QUE la censure à intervenir sur le premier moyen entraînera, sur le fondement de l'article 625 du code de procédure civile, celle du chef du dispositif ayant prononcé, à l'égard de M. X..., la peine d'interdiction de diriger pendant une durée de cinq ans, la cour d'appel n'ayant justifié cette peine qu'en se référant aux motifs énoncés à l'appui de la condamnation de M. X... à payer la somme de 200 000 € au titre de l'insuffisance d'actif.