SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 24 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVET, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10720 F
Pourvoi n° G 16-24.198
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Barbara Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 21 juillet 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (17e chambre B), dans le litige l'opposant à M. Bernard Z..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 10 avril 2018, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Barbé, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Rémy-Corlay , avocat de Mme Y..., de Me Balat, avocat de M. Z... ;
Sur le rapport de Mme Barbé, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
L'exposante fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR réformé le jugement en toutes ses dispositions et statuant à nouveau dit le licenciement fondé sur une faute grave et débouté Madame Y... de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE : « Il convient, à titre liminaire, de préciser que pendant l'exécution de son contrat de travail à temps partiel du 1er juin 2006, qui la liait à Maître Bernard Z... ,avocat, Madame Y... était liée en qualité de secrétaire à un autre avocat , Maître Sylvie C..., par un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 8 décembre 2008. Dans le dernier état des relations contractuelles et à la date de son licenciement, Madame Barbara Y... travaillait pour le compte de ses deux employeurs distincts mais dans les mêmes locaux professionnels situes [...]à Nice. (
)H - Sur la rupture ; La lettre de licenciement pour faute grave vise les faits suivants: - négligences et maladresses dans les dossiers; -le refus de dire bonjour et au revoir à l'employeur, refus de toute communication verbale avec son employeur; - des consultations sans rapport avec l'activité professionnelle, dont certaines "inappropriées ", de multiples sites sur l'ordinateur du poste de secrétariat au cours des trois dernières semaines pendant les heures de travail y compris après la convocation à l'entretien préalable, enregistrement dans les favoris des sites concernés et effacement de tout l'historique rendant impossible le contrôle de l'activité du cabinet. Sur la consultation des sites internet et l'effacement de l'historique Pour faire écarter ce grief, la salariée fait valoir qu'elle contestait avoir consulté les sites internet visés dans la lettre de licenciement, à l'exception toutefois d'une consultation sporadique et en dehors des heures de travail du site de sa banque, la Société Générale et des journaux d'annonces légales, que l'employeur ne rapportait pas la preuve de la consultation par la salariée des sites allégués ni de l'usage abusif d'internet à des fins personnelles, qu'il existait une tolérance, que l'ordinateur du secrétariat était accessible à tous, qu'elle contestait avoir supprimé tout l'historique, que les copies d'écran produites étaient peu lisibles. Pour faire juger le licenciement fondé sur une faute grave, l'employeur réplique qu'il était démontré par les pièces produites que la salariée, qui était à temps partiel, avait passé une partie de son temps de travail à consulter des sites sans rapport avec son activité, qu'ils avaient été enregistrés par elle en favoris, que certains des sites étaient pour le moins inappropriés et qu'elle avait procédé à l'effacement de l'historique de l'ordinateur. Il convient tout d'abord de préciser que les pièces produites par l'employeur, sur lequel pèse la charge de la preuve de la faute grave, sont toutes lisibles et présentent, notamment au regard de leurs dates respectives, une parfaite cohérence entre elles. Ainsi, l'employeur produit de nombreuses captures d'écran prises à partir de l'historique de l'ordinateur professionnel mis à la disposition de Madame Y... étant précisé que pour y parvenir l'employeur n'avait dû accéder à aucun fichier personnel de Madame Y... laquelle d'ailleurs ne le soutient même pas. Ces captures d'écran démontrent qu'au cours des semaines précédant la découverte des faits, le 15 juin 2013, Madame Y... avait consulté pendant ses heures de travail plus d'une quarantaine de sites qu'elle avait enregistrés dans les favoris. La quasi-totalité de ces sites n'avait strictement aucun rapport avec l'activité professionnelle de Madame Y... puisqu'il s'agissait soit de sites de vente en ligne (lingerie féminine, bijoux, chaussures pour femme, maroquinerie, accessoires, strings pour hommes (« strings mesure pénis " etc.) soit des sites tels que "Sophie libertine ", 'Mari Prédateur". En outre, il est démontré, comme l'énonce la lettre de licenciement, que la salariée avait continué à consulter des sites sans rapport avec son activité et ce, postérieurement à la réception de la convocation à un entretien préalable .Contrairement à ce qui est invoqué par Madame Y..., il n'existe aucun doute sur le fait qu'elle était l'auteur de ces consultations dans la mesure où son nom y avait été enregistré lors de la consultation et que d'ailleurs parmi les sites consultés figuraient des sites qu'elle reconnaît avoir consultés comme par exemple sa propre banque ou encore les sites Tribucca ou Urbandressing. Le nombre de sites consultés, la fréquence de leur consultation sur la période concernée et la nature de certains des sites consultés démontrent le caractère abusif de l'usage à des fins privées de l'ordinateur professionnel pendant les heures de travail sans que ne puisse être invoquée ou établie la moindre tolérance de l'employeur. Ces faits présentent à eux seuls un caractère gravement fautif. En outre, il est démontré que, postérieurement au 17 juin 2013 soit la date de la convocation à l'entretien préalable, l'historique de l'ordinateur professionnel mis à la disposition de la salariée avait été effacé entraînant la suppression de tous les fichiers des dossiers traités précédemment. C'est à raison de ces faits nouveaux que l'employeur avait alors notifié à la salariée, par lettre du 21 juin 2013, sa mise à pied conservatoire en lui indiquant très clairement dans cette lettre " nous avons découvert que vous aviez pris l'initiative , hier , entre 13h30 et 17h30, d'effacer, sans aucune instruction en ce sens, l'ensemble de l'historique de toutes opérations réalisées sur l'ordinateur du secrétariat à usage strictement professionnel dont vous êtes la seule utilisatrice, et de supprimer une grande partie des favoris qui y avaient été enregistrés. Vous avez reconnu le "nettoyage " des favoris " Or, si en réponse à cette lettre Madame Y... avait indiqué par écrit le 21 juin 2013: « je ne comprends pas la raison et les motifs de cette mise à pied » force est cependant de constater que dans cette réponse, elle n'avait pas contesté pour autant avoir reconnu avoir pris l'initiative d'effacer l'ensemble de l'historique de son ordinateur professionnel. Il sera d'ailleurs relevé que dans ses conclusions déposées et reprises oralement à l'audience, Madame Y..., tout en niant avoir effacé "l'ensemble" de l'historique, admet néanmoins avoir effacé certains sites dans les favoris. La consultation abusive de sites internet pendant les heures de travail payées par l'employeur et l'effacement, fut-il partiel; de l'historique de l'ordinateur professionnel sur lequel les sites avaient été consultés sont des faits qui, pris ensemble ou séparément, sont d'une gravité telle qu'ils rendaient impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise y compris pendant le préavis. Le jugement qui a écarté la faute grave pour ne retenir que la cause réelle et sérieuse sera réformé et la salariée déboutée de toutes ses demandes liées à la rupture. »
ALORS QUE 1°) la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié pendant la période de préavis ; que seul l'abus de connexion Internet conduisant à perturber le fonctionnement de l'entreprise peut justifier un licenciement pour faute grave ; qu'il appartient à l'employeur de démontrer tout à la fois la fréquence et le temps de connexion du salarié à des sites n'ayant pas de liens avec son travail pour démontrer son caractère abusif ; qu'en l'espèce, les captures d'écran (reproduisant plusieurs fois les mêmes sites) ne permettaient d'établir ni la fréquence, ni le temps de connexion ; qu'en disant le licenciement pour faute grave bien-fondé sans rechercher si l'usage qu'avait fait la salariée, Madame Y..., de la connexion Internet mise à sa disposition avait perturbé le fonctionnement de l'entreprise, la Cour d'appel a manqué de base légale au regard des articles 1121-1, 1232-1 et 1234-1 du Code du travail ;
ALORS QUE 2°) la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié pendant la période de préavis ; que seul l'abus de connexion Internet peut conduire à un licenciement pour faute grave ; que lorsque le salarié conteste être l'auteur des connexions qui lui sont reprochées, il appartient à l'employeur de prouver que l'ordinateur est sécurisé empêchant ainsi toute intervention autre que celle de l'utilisateur attitré ; qu'en disant le licenciement pour faute grave bienfondé quand il était établi que l'ordinateur en cause était librement accessible, la Cour d'appel a violé les articles 1121-1, 1232-1 et 1234-1 du Code du travail ;
ALORS QUE 3°) la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié pendant la période de préavis ; que si l'employeur peut contrôler l'usage fait par le salarié de son ordinateur, le seul fait pour un employé d'effacer l'historique Internet de son ordinateur ne constitue pas une faute grave ; qu'en disant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1121-1, 1232-1 et 1234-1 du Code du travail ;
ALORS QUE 4°) la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié pendant la période de préavis ; que si l'employeur peut contrôler l'usage fait par le salarié de son ordinateur, notamment en vérifiant l'historique Internet des consultations, il lui appartient d'établir que le salarié a effacé ce contenu dans le but d'échapper à une sanction ; qu'une telle preuve n'est pas établie dès lors qu'il est constant que l'ordinateur n'était pas protégé pour un usage par le seul salarié ; qu'en considérant que Mme Y... en était l'auteur puisqu'elle ne l'avait pas nié formellement lors de l'entretien, la Cour d'appel a renversé la charge de la preuve en violation des articles 1121-1, 1232-1 et 1234-1 du Code du travail et 1315 (ancien) du Code civil.