CIV.3
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10252 F
Pourvoi n° V 17-20.717
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par le département de la Marne, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 4 avril 2017 par la cour d'appel de Reims (chambre civile,1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Semcha, société d'économie mixte, dont le siège est [...] ,
2°/ à Mme Christine X..., domiciliée [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 5 avril 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Y..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat du département de la Marne, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Semcha et de Mme X... ;
Sur le rapport de M. Y..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le département de la Marne aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du département de la Marne ; le condamne à payer à la société Semcha la somme de 3 000 euros et à Mme X... la somme de 1 500 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour le département de la Marne.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré le Département de la Marne irrecevable en son action en répétition de l'indu, ordonné la mainlevée de l'opposition formée le 10 août 2004 entre les mains du notaire instrumentaire de la vente en date du 29 juillet 2004, pour le paiement de la somme de 99.390,89 €, et ordonné à Maître X..., notaire, de libérer la somme de 99.390,89 € au profit de la société Semcha ;
AUX MOTIFS QUE, aux termes de l'article 1376 du code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu. En l'espèce, la Semcha lors de l'acte de vente du 29 juillet 2004, en faisant l'acquisition de tous les lots de la copropriété, est devenue l'unique propriétaire de l'ensemble immobilier et est donc venue aux droits du syndicat des copropriétaires. C'est à ce titre que le département de la Marne engage son action en répétition de l'indu s'agissant des charges impayées de copropriété des années 1999 à 2002, pour lesquelles une opposition au paiement du prix de la cession du 29 juillet 2004 a été réalisée le 10 août 2004, par le syndicat de copropriété du CHV pour un montant de 99.390,80 euros. La somme litigieuse est actuellement détenue par Maître X..., notaire instrumentaire de la vente, qui occupe ainsi la fonction de séquestre. Aussi l'article L. 518-24 du code monétaire et financier lequel énonce que « (...) les sommes déposées à quelque titre que ce soit à la Caisse des Dépôts et Consignations sont acquises à l'Etat lorsqu'il s'est écoulé un délai de 30 ans, sans que le compte auquel ces sommes ont été portées ait donné lieu à une opération de versement ou de remboursement (...) » invoqué par le département pour contrecarrer la prescription soutenue par la Semcha n'est pas applicable en l'espèce, puisque le délai de 30 ans prévu par cet article ne concerne que les sommes déposées à la Caisse des Dépôts et des Consignations, et ne constitue pas un délai de prescription contrairement ce qu'invoque le département. Le département à l'occasion de la vente litigieuse était soumis au statut de la copropriété et c'est dans ces conditions que le syndicat de copropriété du CHV a formé opposition entre les mains du notaire instrumentaire pour le paiement de charges de copropriété impayées. Ainsi, l'action du département agissant en qualité de copropriétaire en restitution de sommes indûment versées au titre des charges de copropriété est soumise à la prescription quinquennale. Il résulte des pièces versées aux débats que le département: - n'a engagé aucune action aux fins d'obtenir le recouvrement des sommes détenues par le notaire depuis le jugement du 23 juillet 2008, aux termes duquel le tribunal de grande instance de Chalons en Champagne a débouté le payeur départemental de la Marne de son action aux fins de nullité de l'opposition au paiement du prix de cession des lots de copropriété du 10 août 2004 ainsi qu'aux fins d'obtention à son profit de la somme détenue par le notaire; dans cette décision, le tribunal a notamment indiqué « Il appartient aux parties contestant le montant de cette créance de diligenter les procédures utiles pour en fixer le montant exact », - reconnaît lui-même son inertie, dans un courrier daté du 11 mars 2009 adressé au notaire en réponse à une interrogation de ce dernier sur le sort de la somme de 99.390,89 euros consignée en son étude, en écrivant: « A ce jour, Maître Z... n'a pas répondu à mes demandes d'éclaircissements réitérées sur ces charges prétendument dues, faisant obstacle à la clôture de cet ancien dossier. J'estime donc pour ma part qu'il appartient à Madame Z... qui est à l'origine de cette situation litigieuse de saisir la justice pour obtenir le transfert des fonds en cause ; étant précisé si besoin est que je ferai alors valoir mes arguments au nom du département ». Aussi, force est de constater que l'assignation du département dans la présente instance ayant été délivrée par acte d'huissier en date du 25 août 2014, le département est irrecevable à agir en paiement, son action étant prescrite. Par conséquent, il convient d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté le département de ses demandes en paiement formées à l'encontre de la Semcha. Le département étant irrecevable en son action en restitution de l'indu, la somme séquestrée entre les mains du notaire correspond aux charges impayées dues à l'ancien syndicat de copropriété, auquel s'est désormais substituée la Semcha ; dans ces conditions, la prescription de l'action du département ci-dessus motivée a pour conséquence de mettre un terme aux effets de l'opposition réalisée le 10 août 2004 et de rendre à nouveau la somme séquestrée disponible au profit de la Semcha qui s'est substituée de facto à l'ancienne copropriété et est fondée à obtenir le paiement des charges impayées à son profit. Par conséquent, il convient d'ordonner la mainlevée de l'opposition formée le 10 août 2004 au profit de la Semcha et d'ordonner â Maître X..., en sa qualité de séquestre, de se libérer de la somme de 99.717,83 euros au profit de la Semcha ;
1) ALORS QUE lorsque le prix de vente de lots de copropriété a fait l'objet d'une opposition du syndicat des copropriétaire, le délai de prescription de l'action du vendeur, aux fins de recouvrement des sommes retenues par le notaire, ne peut commencer à courir tant qu'une décision de justice n'a pas tranché le fond du litige sur la créance invoquée par le syndicat ; qu'en l'espèce, dans son jugement du 23 juillet 2008, le tribunal de grande instance de Chalons en Champagne a dit que Maître X..., notaire, devait conserver la somme de 99.717,83 €, qu'elle détenait au titre du prix de cession, jusqu'à complet règlement du litige opposant le Département de la Marne à la copropriété du « Centre Hôtel de Ville » de Chalons en Champagne, ce dont il résulte que ce jugement n'ayant pas tranché le fond du litige, le délai de prescription de l'action du département de la Marne n'avait pu commencer à courir à compter de la date de ce jugement ; qu'en décidant le contraire, pour déclarer le Département de la Marne irrecevable à agir en paiement, son action étant prescrite, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil ;
2) ALORS QU' en tout état de cause, l'article 20 de la loi n° 2000-1208 du 3 décembre 2000, dans sa rédaction applicable au litige, n'impose pas au vendeur de prendre l'initiative de saisir le juge, suite à l'opposition au versement du prix de vente formée par le syndicat des copropriétaires ; qu'en l'espèce, il n'incombait pas plus au Département de la Marne qu'à la société Semcha de saisir le tribunal de grande instance aux fins qu'il tranche la question de savoir si la somme de de 99.717,83 € correspondait à une créance liquide et exigible du syndicat des copropriétaires, au moment où la vente avait été signifiée au syndic ; qu'en se fondant pourtant sur l'inertie du Département de la Marne suite au jugement rendu le 23 juillet 2008 par le tribunal de grande instance de Chalons en Champagne, pour déclarer son action prescrite, la cour d'appel a violé l'article susvisé ;
3) ALORS QUE le syndic de copropriété ne peut obtenir le versement des sommes retenues par le notaire que si ces sommes correspondent à des créances du syndicat liquides et exigibles au moment où la vente a été signifiée au syndic ; qu'en l'espèce, pour ordonner la mainlevée de l'opposition formée le 10 août 2004 au profit de la société Semcha et à Maître X..., en sa qualité de séquestre, de se libérer de la somme de 99.717,83 euros au profit de cette société, la cour d'appel s'est bornée à retenir que le département étant irrecevable en son action en restitution de l'indu, la somme séquestrée entre les mains du notaire correspondait aux charges impayées dues à l'ancien syndicat de copropriété ; qu'en statuant de la sorte, sans constater que les sommes visées par l'opposition correspondaient à des créances du syndicat liquides et exigibles au moment où la vente avait été notifiée au syndic, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 20 de la loi du 10 juillet 1965 et 5-1 du décret du 17 mars 1967.