CIV. 2
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme B..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10352 F
Pourvoi n° E 17-14.125
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Sylvie X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre le jugement rendu le 3 janvier 2017 par le juge du tribunal d'instance de Digne-les-Bains, dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes, dont le siège est [...] , service prévention grand public, CS 80043, [...] , venant aux droits de la société Banque populaire des Alpes,
2°/ à la société BNP Paribas personal finance, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 avril 2018, où étaient présents : Mme Brouard-Gallet, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Sommer, conseiller rapporteur, Mme Maunand, conseiller, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me Carbonnier, avocat de Mme X..., de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Auvergne Rhône Alpes ;
Sur le rapport de M. Sommer, conseiller, l'avis de M. Girard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Carbonnier, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit recevable le recours formé par la Banque populaire des Alpes à l'encontre de la décision de recevabilité prononcée le 31 août 2016 par la commission de surendettement des particuliers des Alpes de Haute-Provence,
AU MOTIF QUE "il y a lieu de considérer que le recours de la société Banque populaire des Alpes est recevable, en l'absence de tout élément de preuve sur la date à laquelle ce recours a été formé" (jugement, p. 3, in fine),
ALORS QUE la décision de recevabilité de la demande visant au traitement d'une situation de surendettement est notifiée au débiteur, aux créanciers, aux établissements de paiement et aux établissements de crédit teneurs de comptes du déposant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ; que cette décision peut faire l'objet d'un recours dans un délai de quinze jours à compter de sa notification par déclaration remise ou adressée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception au secrétariat de la commission ; qu'il appartient à l'auteur du recours de justifier de la recevabilité de celui-ci ; que la date de la notification par voie postale est, à l'égard de celui-ci qui y procède, celle de l'expédition, c'est-à-dire celle qui figure sur le cachet du bureau d'émission ;
Que, pour déclarer recevable le recours formé par la Banque populaire des Alpes à l'encontre de la décision de recevabilité prononcée le 31 août 2016 par la commission de surendettement des particuliers des Alpes de Haute-Provence, le tribunal d'instance se borne à relever que « le recours de la société Banque populaire des Alpes est recevable, en l'absence de tout élément de preuve sur la date à laquelle ce recours a été formé » ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à la Banque populaire des Alpes de justifier de la recevabilité de son recours, notamment en produisant le récépissé de remise de la lettre recommandée ou l'avis de réception, le tribunal d'instance a violé l'article R. 722-1 du code de la consommation, ensemble les articles 668 et 669 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit recevable et bien fondé le recours formé par la Banque populaire des Alpes à l'encontre de la décision de recevabilité prononcée le 31 août 2016 par la commission de surendettement des particuliers des Alpes de Haute-Provence, et d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de Mme Sylvie X..., épouse Y..., en ouverture d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement,
AUX MOTIFS QUE "par courrier recommandé expédié à une date illisible, la société Banque populaire des Alpes a contesté la décision de recevabilité ; elle fait valoir dans son courrier que Mme X..., épouse Y..., n'est pas admissible au bénéfice de traitement de sa situation de surendettement [
] ; [elle] se réfère oralement aux demandes et moyens compris dans ses conclusions écrites, déposées lors de l'audience, visées par le magistrat" (jugement, p. 2 et 3),
ALORS QUE le juge d'instance qui est saisi d'un recours contre une décision de la commission de surendettement, doit vérifier que les recours et conclusions écrites des créanciers ont été communiqués au débiteur avant l'audience et qu'il a été à même d'y répondre ;
Qu'en se bornant à énoncer que Madame X..., épouse Y... avait comparu à l'audience à laquelle elle avait été convoquée, sans constater qu'elle avait reçu communication du recours et des conclusions écrites de la Banque populaire des Alpes avant l'audience pour être à même d'y répondre, le tribunal a violé l'article R. 722-1 du code de la consommation, l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief au jugement attaqué d'AVOIR dit bien fondé le recours formé par la Banque populaire des Alpes à l'encontre de la décision de recevabilité prononcée le 31 août 2016 par la commission de surendettement des particuliers des Alpes de Haute-Provence, et d'AVOIR déclaré irrecevable la demande de Mme Sylvie X..., épouse Y..., en ouverture d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement,
AUX MOTIFS QUE "la situation de surendettement s'apprécie au regard de l'ensemble des ressources du débiteur, quelle qu'en soit l'origine. La procédure de désendettement est ouverte si le débiteur se trouve en situation de surendettement au regard de ses obligations non professionnelles, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon qu'elles peuvent ou non faire l'objet de remise, rééchelonnement ou effacement La situation de surendettement du débiteur s'apprécie en comparant ses ressources actuelles ou futures et ses dettes exigibles. Si le paiement par le débiteur de ses dettes entame ses ressources vitales, c'est qu'il est dans l'impossibilité manifeste de régler son passif.
Les dettes ayant une origine prétendument professionnelles sont deux dettes à l'égard de la société Banque populaire des Alpes dont les montants sont de 9 408,86 euros et 149 157,88 euros, soit un montant total de 158 566, 74 euros.
Ces dettes correspondent à l'engagement de Mme X... épouse Y... en qualité de caution solidaire de son mari, pour des emprunts professionnels consentis par la société Banque populaire des Alpes à ce dernier.
Toutefois, ne peut prétendre au bénéfice de la procédure de surendettement des particuliers le débiteur dont le passif est inclus dans la procédure collective de son conjoint.
Mme Sylvie X... épouse Y... ne conteste pas que la procédure collective dont son mari a bénéficié n'est pas terminée. Elle ne conteste pas davantage que son passif à elle est inclus dans la procédure collective de son conjoint.
En effet, le passif comprend soit des dettes communes la concernant ainsi que son mari, soit des dettes personnelles mais résultant de cautionnement solidaires consentis par elle au titre des emprunts souscrits par son mari dans un but professionnel.
Ainsi, cette procédure collective fait obstacle à la recevabilité du dossier de surendettement de Mme X... épouse Y....
De plus, la bonne foi de Mme X... épouse Y... pose problème.
D'abord, lors de l'audience, celle-ci a indiqué qu'elle ne souhaitait pas vendre le bien immobilier d'une valeur de 370 000 euros. Dans un courrier envoyé à la commission de surendettement le 23 mai 2016, elle avait déjà indiqué qu'elle ne souhaitait pas vendre le bien immobilier, mais plutôt « trouver un arrangement ». Compte tenu du montant du surendettement de Mme X... épouse Y..., à hauteur de 300 747,80 euros, la vente de la maison est la principale mesure permettant d'espérer un paiement des créanciers.
Par ailleurs, alors que Mme X... épouse Y... était jusqu'alors salariée, celle-ci a tout récemment décidé de changer de profession. Elle a conclu un contrat de travail le 5 décembre 2016, avec le président du Conseil départemental, pour devenir assistante familial et pour accueillir des mineurs ou jeunes majeurs confiés par le service de l'aide sociale à l'enfance, à son domicile. Celle-ci tente donc de trouver des moyens pour parvenir à faire obstacle à la vente du bien immobilier.
Enfin, Mme X... épouse Y... ne conteste pas que la Banque populaire des Alpes avait accepté, le 19 février 2009, de leur octroyer des délais de paiement pour rééchelonner plusieurs de leurs prêts immobiliers dans l'attente de la vente de leur parcelle située-à [...] sur laquelle ils ont édifié leur maison neuve. Pour autant, depuis 2009, les époux Y... ne justifient d'aucune démarche sérieuse de vente de leur bien immobilier. Alors que Mme X... épouse Y... et son mari affrontent des difficultés financières réelles depuis maintenant quelques années, ils ne justifient d'aucun effort sérieux pour tenter de vendre leur maison et ainsi réduire leur endettement.
Mme Y... Sylvie née X... n'est pas admissible à la procédure de traitement de sa situation de surendettement et de plus, sa bonne foi pose problème" (jugement, p. 4 et 5),
1°) ALORS QUE le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi ; que la situation de surendettement est caractérisée par l'impossibilité manifeste de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ; que l'impossibilité de faire face à un engagement de cautionner ou d'acquitter solidairement la dette d'un entrepreneur individuel ou d'une société caractérise également une situation de surendettement ;
Qu'il résulte des constatations du jugement attaqué que le passif de Mme X..., épouse Y..., comprend « des dettes personnelles résultant de cautionnements solidaires consentis par elle au titre des emprunts souscrits par son mari dans un but professionnel » ; que le tribunal a néanmoins déclaré irrecevable sa demande en ouverture d'une procédure de traitement de sa situation de surendettement au prétexte que son mari ferait l'objet d'une procédure collective ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal d'instance a violé l'article L. 711-1 du code de la consommation ;
2°) ALORS QUE la bonne foi se présumant, la charge de la preuve de la mauvaise foi du débiteur incombe aux créanciers ou à la commission ;
Que, pour considérer que « la bonne foi de Mme X..., épouse Y..., pose problème », le tribunal d'instance se borne à relever que celle-ci « ne souhaite pas vendre le bien immobilier d'une valeur de 370 000 € [
] mais plutôt trouver un arrangement », alors que la vente de la maison permettrait d'espérer un paiement des créanciers, qu'elle « a tout récemment décidé de changer de profession » et qu'elle ne justifie pas avoir entrepris une démarche sérieuse pour vendre le bien immobilier et réduire ainsi son endettement, alors que la banque lui avait proposé un rééchelonnement des prêts immobiliers dans l'attente de la vente de ce bien ;
Qu'en statuant ainsi, le tribunal d'instance n'a pas caractérisé la mauvaise foi de Mme X..., épouse Y..., et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation.