CIV. 2
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 17 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BROUARD-GALLET, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10363 F
Pourvoi n° M 17-13.740
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ Mme Nadine X..., épouse Y...,
2°/ M. Didier Y...,
tous deux domiciliés [...] ,
contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige les opposant à la société Archibald, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , représentée par Mme Virginie Z..., prise en qualité de mandataire liquidateur de la société Les Jardins des marques, société à responsabilité limitée,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 avril 2018, où étaient présentes : MmeBrouard-Gallet, conseiller doyen faisant fonction de président, MmeMartinel, conseiller rapporteur, Mme Maunand, conseiller, Mme Parchemal, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. et Mme Y..., de la SCP Gaschignard, avocat de société Archibald, représentée par Mme Z..., ès qualités ;
Sur le rapport de Mme Martinel, conseiller, l'avis de M. Girard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Archibald, représentée par Mme Z..., ès qualités, la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mai deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. et Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
(sur la recevabilité de la demande de nullité du jugement du 25 novembre 2008)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué infirmatif sur ce point d'avoir déclaré irrecevable la demande tendant à voir prononcer la nullité du jugement du 25 novembre 2008, titre exécutoire sur lequel est fondée la saisie.
AUX MOTIFS QUE, sur la demande d'annulation du jugement du 25 novembre 2008, c'est à tort que le premier juge a cru devoir « examiner l'exception de nullité affectant le jugement en tant que titre fondant la saisie » ; qu'en effet, il résulte de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution que le juge de l'exécution « ne peut ni modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites ni en suspendre l'exécution » ; qu'a fortiori ne peut-il en prononcer la nullité ; que cette demande qui excède les pouvoirs du juge de l'exécution comme ceux de la cour statuant en la matière avec les mêmes pouvoirs sera déclarée irrecevable, le jugement étant infirmé de ce chef ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable la demande d'annulation du jugement du 25 novembre 2008, la cour d'appel a énoncé que cette demande excédait les pouvoirs du juge de l'exécution qui, aux termes de l'article R. 121-1 du code des procédures civiles d'exécution, ne peut ni modifier le dispositif de la décision qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution et a fortiori en prononcer la nullité ; qu'en relevant ainsi d'office ce moyen, qui n'avait pas été invoqué par la société Archibald (Prod.8) sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel, qui a méconnu le principe de la contradiction, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(sur la nullité de la signification du jugement du 25 novembre 2008)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme Y... de toutes leurs demandes visant à constater la nullité de la procédure de saisie immobilière ;
AUX MOTIFS QUE, sur la demande d'annulation de la signification dudit jugement, le jugement du 25 novembre 2008 a été signifié à Mme Y... le 17 juillet 2009, [...] , adresse figurant au jugement signifié et dont il n'est pas contesté qu'elle était toujours celle de Mme Y... à l'époque de la signification, étant observé que c'est également cette adresse qui figure tant aux conclusions qu'à la déclaration d'appel de Mme Y... ; que l'huissier expose qu'arrivé à cette adresse, personne ne répondant à ses appels, le domicile étant confirmé par le voisinage, « l'assignation à personne et à domicile étant impossible » ; la copie de l'acte a été déposée en son étude et un avis de passage laissé sur place, la lettre prévue à l'article 658 du Code de procédure civile étant adressée « ce jour ou le premier jour ouvrable suivant » au domicile du destinataire avec copie de l'acte ; que Madame Y... reproche à l'huissier de n'avoir pas relaté les diligences accomplies pour tenter de délivrer l'acte à personne ni dit pourquoi la chose aurait été impossible, d'avoir signifié en période de vacances, ajoutant que la mention « personne ne répondant à mes appels » est sujette à caution dès lors qu'il n'y avait pas de sonnette à son domicile. Selon elle, ces manquements lui auraient causé grief dès lors qu'elle n'a « jamais été en mesure de faire appel du jugement » ; que cependant quelque gravité que puisse présenter l'irrégularité alléguée, elle n'est de nature à entraîner la nullité de l'acte que si celui qui s'en prévaut prouve le grief que lui a causé l'irrégularité, or en l'espèce, si Mme Y... laisse entendre qu'elle pouvait être absente eu égard à la période estivale, elle ne conteste ni la réception du courrier mentionné par l'huissier, ni le dépôt de l'avis de passage, n'indique pas la date laquelle a pris connaissance de ces éléments ni celle de son éventuel passage chez l'huissier, ni avoir tenté d'interjeter appel ; force est donc de constater qu'elle ne démontre pas en quoi elle a été empêchée d'interjeter appel et donc avoir subi du fait des irrégularités alléguées le grief dont elle fait état ; qu'ainsi le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE l'article 503, alinéa 1 du code de procédure civile dispose que « les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire » ; que l'article 654 alinéa 1er du code de procédure civile énonce notamment que « la signification doit être faite à personne » ; que toutefois, l'article 656 du même code prévoit que « si personne ne peut ou ne veut recevoir la copie de l'acte et s'il résulte des vérifications faites par l'huissier de justice, dont il sera fait mention dans l'acte de signification, que le destinataire demeure bien à l'adresse indiquée, la signification est faite à domicile. Dans ce cas, l'huissier de justice laisse au domicile ou à la résidence de celui-ci un avis de passage conforme aux prescriptions du dernier alinéa de l'article 655. Cet avis mentionne, en outre, que la copie de l'acte doit être retirée dans le plus bref délai à l'étude de l'huissier de justice, contre récépissé ou émargement, par l'intéressé ou par toute autre personne spécialement mandatée. La copie de l'acte est conservée à l'étude pendant trois mois. Passé ce délai, l'huissier de justice en est déchargé. L'huissier de justice peut, à la demande du destinataire, transmettre la copie de l'acte à une autre étude où celui-ci pourra le retirer dans les mêmes conditions. » ; qu'en l'espèce, le jugement rendu par le tribunal de commerce de Montereau Fault Yonne le 25 novembre 2008 a été signifié à Mme Nadine Christine X..., épouse Y... par acte d'huissier en date du 17 juillet 2009 ; que par procès-verbal de remise à l'étude de la même date, l'huissier instrumentaire expose qu'à son domicile, « personne ne répondant à (ses) appels » et après avoir vérifié la certitude du domicile par la « confirmation du domicile par le voisinage », il a été laissé un avis de passage et adressée lettre simple comportant les mêmes mentions que l'avis de passage à Mme Nadine Christine X... épouse Y... ; que ces diligences répondent aux exigences des articles 656 et suivants du code de procédure civile ; que par ailleurs, selon l'article 664 du code de procédure civile : « Aucune signification ne peut être faite avant six heures et après vingt heures, non plus que les dimanches, les jours fériés ou chômés, si ce n'est en vertu de la permission du juge en cas de nécessité » ; que la signification pouvant valablement être faite en dehors de ces périodes, il ne peut être reproché à l'huissier instrumentaire d'avoir manqué à son obligation de diligence en vue de la remise à personne du simple fait d'une signification estivale ; que la demande de ce chef doit être rejetée ;
ALORS QUE, D'UNE PART, dans leurs conclusions du 27 juillet 2016 (Prod. 7, p. 9), M. et Mme Y... faisaient valoir au soutien de leur demande de nullité de la signification du jugement du 25 novembre 2008, que les diligences accomplies par l'huissier, qui s'était contenté de constater que personne n'avait répondu à ses appels et de vérifier auprès du voisinage l'exactitude du domicile de Mme Y..., n'étaient pas suffisantes au regard d'une part de la brièveté du délai d'appel, qui est de dix jours seulement et d'autre part, la période estivale qui imposait à l'huissier de se renseigner sur la durée de l'absence de l'intéressée ; qu'en omettant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a privé sa décision de motifs et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, D'AUTRE PART, la nullité sanctionnant l'irrégularité de l'acte de signification d'un jugement est une nullité de forme qui peut être prononcée à charge pour celui qui l'invoque de prouver le grief qu'elle lui cause ; qu'en l'espèce, pour débouter M. et Mme Y... de leur demande tendant à voir constater la nullité de la signification du jugement du 25 novembre 2008 à Mme Y..., la cour a énoncé que si Mme Y... laisse entendre qu'elle pouvait être absente eu égard à la période estivale, elle ne conteste ni la réception du courrier mentionné par l'huissier, ni le dépôt de l'avis de passage, n'indique pas la date à laquelle elle a pris connaissance de ces éléments, ni celle de son éventuel passage chez l'huissier, ni avoir tenté d'interjeter appel ; qu'en statuant de la sorte, sans répondre aux conclusions de Mme Y... qui faisait valoir dans ses écritures n'avoir jamais été en mesure de faire appel du jugement du 25 novembre 2008 et justifiait ainsi d'un « préjudice irréversible » (prod.7 p.10), la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
(sur la recevabilité de la demande de nullité du commandement dénoncé à M. Y...)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable le moyen tiré du non-respect des dispositions de l'article L. 311-7 du code des procédures civiles d'exécution ;
AUX MOTIFS QUE, sur les irrégularités alléguées à l'encontre du commandement, [...] les appelants font par ailleurs valoir que, alors que la saisie porte sur un bien qui leur est commun, M. Y... n'a pas été destinataire d'un commandement ni d'une assignation, le commandement lui ayant seulement été dénoncé contrairement aux dispositions de l'article L. 311-7 du code des procédures civiles d'exécution ; que cependant, il ressort des écritures de première instance déposées à la demande de la cour que ce moyen n'a pas été soulevé à l'audience d'orientation ; qu'il est donc irrecevable en application de l'article R. 311-5 du même code ;
ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, pour valider la saisie, la cour d'appel a relevé qu'il ressortait des écritures de première instance déposées à sa demande, que le moyen tiré de l'irrégularité du commandement de payer valant saisie immobilière du bien commun, seulement dénoncé à M. Y..., n'avait pas été soulevé à l'audience d'orientation et était irrecevable ; qu'en relevant ainsi d'office l'irrecevabilité d'une contestation non présentée à l'audience d'orientation, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel, qui a méconnu le principe de la contradiction, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(sur la nullité du commandement de payer valant saisie)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. et Mme Y... de leur demande visant à faire constater la nullité du commandement de payer signifié le 10 février 2014 à Mme Y... et celui signifié le 11 février 2014 à M. Y...
AUX MOTIFS QUE, sur les irrégularités alléguées à l'encontre du commandement, M. et Mme Y... font valoir que le commandement n'était pas accompagné du titre exécutoire, alors que selon eux il aurait dû l'être eu égard à l'irrégularité de la signification ; que ce dernier moyen étant rejeté, et le titre ayant été signifié antérieurement, il était inutile de le joindre au commandement ; qu'ils soutiennent également que le commandement serait nul pour ne pas comporter le décompte de la créance, celui-ci se bornant à la somme en principal, ce qui ne leur permettrait pas de connaître le détail de la dette pour pouvoir éventuellement s'en acquitter afin d'éviter la vente ; que c'est cependant par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge a retenu que le commandement respectait les dispositions légales dès lors qu'il indiquait le montant de la créance en principal et ajoutait : « intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2008 et jusqu'à parfait paiement : mémoire », ce dernier terme ne faisant pas grief aux débiteurs puisqu'il n'est pas susceptible d'interprétation et leur permet par un calcul simple de connaître le montant de la somme due, étant ajouté qu'aucun versement n'a jamais été effectué sur cette somme ni même proposé par Mme Y... ; que le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE selon l'article R. 321-3 du code des procédures civiles d'exécution : « Outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice, le commandement de payer valant saisie comporte : (notamment) 2° L'indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré ; 3° Le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires. » ; que le commandement de payer valant saisie immobilière en date du 10 février 2014 indique être dressé en vertu du jugement rendu par le tribunal de commerce de Montereau Fault Yonne le 25 novembre 2008 et présente la créance comme suit : - principal : 562.741,29 €, - intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2008 jusqu'à parfait paiement : mémoire ; - frais et accessoires : mémoire ; que le commandement de payer susmentionné respecte en cela les prévisions légales ; que la créance étant constituée d'une somme fixée et d'intérêts à taux légal, le renvoi à mémoire aux fins de quantifier les intérêts ne fait pas grief aux débiteurs saisis ;
ALORS QUE, à peine de nullité, le commandement de payer valant saisie doit comporter le décompte des sommes réclamées en principal, frais et intérêts échus, ainsi que l'indication du taux des intérêts moratoires ; qu'en l'espèce la cour a énoncé que le commandement de payer valant saisie indiquait le montant de la créance en principal et ajoutait : « intérêts au taux légal à compter du 25 novembre 2008 et jusqu'à parfait paiement : mémoire », ce qui permettait par un calcul simple de connaître le montant de la somme due ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était invitée (Prod. 7, p. 14), si la mention du commandement : « frais et accessoires : mémoire » ne rendait pas impossible le calcul des sommes dues à ce titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 321-3, 3° du code des procédures civiles d'exécution ;