SOC.
MY1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 16 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme B..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10669 F
Pourvoi n° C 16-26.079
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Espace Davis, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 20 septembre 2016 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale et des affaires de sécurité sociale), dans le litige l'opposant à M. Bruno X..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 avril 2018, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon , conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Valéry , conseiller référendaire rapporteur, M. Pion, conseiller, Mme Grivel , avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de la société Espace Davis, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. X... ;
Sur le rapport de Mme Valéry , conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Espace Davis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Espace Davis à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Espace Davis.
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la fin du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné, en conséquence, la société Espace Davis à payer à M. X... les sommes de 13 668 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de 700 € et de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Aux motifs que M. X... a été engagé à compter du 6 décembre 2012 avec une période d'essai de trois mois pouvant être prolongée de trois mois ; que le 28 février 2013, l'employeur a prolongé cette période d'essai du 6 mars 2013 au 5 juin 2013 ; que cependant, la période d'essai initiale de trois mois convenue lors de l'embauche est venue à expiration le 5 mars 2013 à minuit, en sorte que le contrat de travail étant devenu définitif, les parties ne pouvaient valablement stipuler la prolongation de cette période d'essai à compter du 6 mars 2013 et peu important que le salarié ait donné son accord à ce renouvellement le 28 février 2013 ; qu'il s'ensuit que l'employeur n'a pu valablement mettre fin à la période d'essai au 5 juin 2013 et que la rupture du contrat de travail est abusive ; qu'en tout état de cause, l'employeur a rompu la période d'essai avec une légèreté blâmable ; qu'en effet, selon la convention collective du commerce et de la réparation de l'automobile, article 4.3, la période d'essai doit permettre « à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de l'expérience » ; que M. X... avait une expérience certaine dans le métier puisque il avait été employé par la société Autopassion, du 8 octobre 2007 au 31 août 2010, en qualité de technicien confirmé mécanique, et par la société Volkswagen Barbier automobile, du 24 août 2010 au 5 décembre 2012, en qualité de technicien confirmé ; qu'après la rupture de sa période d'essai par la société Espace Davis, il a été engagé par la société MJM, le 1er octobre 2013, en qualité de technicien confirmé mécanique, échelon 20, soit le même échelon qu'il possédait au sein de la société Espace Davis ; qu'il produit ses bulletins de salaire d'août à octobre 2014 inclus et de décembre 2014 à août 2015 inclus ; qu'en outre, M. A..., embauché à la même date que M. X... et qui a travaillé pour la société Espace Davis jusqu'au 15 octobre 2013, atteste que M. X... n'était toujours pas remplacé à cette date ; qu'il indique également que « la société Espace Davis était pressée de trouver du personnel compétent connaissant les marques du groupe Volkswagen pour pouvoir ouvrir au plus vite son service après-vente. Nous sommes arrivés le 6 décembre 2012 à l'ouverture et nous avons découvert un atelier et un magasin de pièces détachées vide. De ce fait nous avons tout fait pour ouvrir en deux jours le service après-vente. Nous avons même réussi l'audit du groupe VAG en deux mois et demi seulement alors que nous n'avions aucune aide de la direction. Et voyant comment M. R. a été remercié 24 heures avant la fin de sa période d'essai qui a quand même duré six mois et voyant la politique de cette entreprise, j'ai moi-même décidé de démissionner le 30 octobre dernier » ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré abusive la rupture de la période d'essai et sur le montant des dommages et intérêts correspondant à une juste appréciation du préjudice du salarié compte tenu des circonstances de la cause ;
Alors 1°) que les parties au contrat de travail peuvent, par un accord exprès intervenu au cours de la période d'essai, la prolonger ; qu'après avoir constaté que le salarié avait été engagé le 6 décembre 2012 avec une période d'essai de trois mois pouvant être prolongée de trois mois, que le 28 février, le salarié avait donné son accord au renouvellement et que l'employeur l'avait prolongé du 6 mars 2013 au 5 juin 2013, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que l'essai avait été régulièrement prorogé avant son expiration et que l'employeur y avait valablement mis fin le 5 juin 2013, a violé les articles L. 1221-21 et L. 1221-25 du code du travail ;
Alors 2°) que le droit de l'employeur de rompre la période d'essai a un caractère discrétionnaire, sous réserve de ne pas faire dégénérer ce droit en abus ; que ne suffisent pas à caractériser l'abus du droit de l'employeur de mettre fin à l'essai l'expérience du salarié dans le métier et le fait qu'il a retrouvé un emploi après la rupture ; qu'en se fondant sur les circonstances inopérantes selon lesquelles M. X... avait une expérience certaine dans le métier et qu'après la rupture, une autre société l'avait engagé comme technicien confirmé mécanique, sans avoir constaté que la période d'essai avait été rompue pour un motif sans rapport avec l'appréciation des qualités et compétences professionnelles du salarié, et non inhérent à la personne du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1220-20, L. 1221-21 et L. 1221-25 du code du travail ;
Alors 3°) que le fait de ne pas avoir remplacé un salarié dont l'employeur a mis fin à la période d'essai n'est pas à lui seul constitutif d'un abus de l'exercice du droit de tout employeur de mettre fin à l'essai ; que pour décider que l'employeur avait rompu la période d'essai avec une légèreté blâmable le 5 juin 2013, la cour d'appel, qui s'est fondée sur la circonstance que M. X... n'était toujours pas remplacé au 15 octobre 2013, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1220-20, L. 1221-21 et L. 1221-25 du code du travail ;
Alors 4°) et en tout état de cause, que la rupture d'un contrat de travail en cours de période d'essai ne peut jamais produire les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et qu'il appartient seulement au juge d'indemniser le préjudice résultant de la rupture abusive de la période d'essai ; qu'après avoir retenu que l'employeur avait rompu la période d'essai avec une légèreté blâmable, la cour d'appel, qui a dit que la fin du contrat de travail s'analysait en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a condamné la société Espace Davis à payer à M. X... la somme de 13 668 € « à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse », a violé les articles L. 1221-25 et L. 1231-1 du code du travail.