LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 4 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant fait droit à la demande d'allocations chômage de M. Y... en février 2008, Pôle emploi lui a demandé de restituer les sommes perçues de janvier 2008 à décembre 2009 en invoquant la connaissance postérieure de l'existence d'une activité non déclarée de gérant d'une société depuis septembre 2007 ;
Attendu que pour déclarer la demande de Pôle emploi irrecevable comme étant prescrite, l'arrêt retient que celui-ci qui, exposant que l'action en répétition de l'indû engagée à l'encontre de M. Y... se prescrivait par l'écoulement d'un délai de 3 ans sauf cas de fraude, estimait ne pas avoir à démontrer l'existence d'une telle fraude, ne pouvait pas à titre subsidiaire revendiquer ensuite l'application du délai de prescription de 10 ans applicable dans cette hypothèse ;
Qu'en statuant ainsi, alors que Pôle emploi avait, d'abord, soutenu l'interruption de la prescription triennale en raison d'une reconnaissance de dette, puis, à titre subsidiaire, invoqué la fausse déclaration du bénéficiaire des allocations en soulignant que, par application de l'article L. 5422-5, alinéa 2, du code du travail, celle-ci suffisait à se prévaloir de la prescription décennale, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Boullez, avocat aux Conseils, pour Pôle emploi.
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR déclaré irrecevable comme étant prescrite la demande formée par POLE EMPLOI à l'encontre de M. Y... afin qu'il soit condamné à rembourser les allocations indûment versées de février 2008 à décembre 2009 ;
AUX MOTIFS QUE POLE EMPLOI rappelle à juste titre qu'il n'est pas contestable qu'en application de l'article L.5422-5 du Code du travail, l'action en remboursement des allocations indûment versées se prescrit par trois ans à compter du versement des sommes ; que, par ailleurs POLE EMPLOI exposant que son action est une action en répétition de l'indu et qu'il n'a « nullement à démontrer l'existence d'une intention de fraude de la part de M. Y... » ne peut, de manière subsidiaire, invoquer l'existence d'une prescription décennale qui supposerait précisément que soit évoquée l'existence d'une fraude, ce que POLE EMPLOI se refuse à faire ; que seule la prescription triennale étant donc applicable et les sommes ayant été versées jusqu'au 31 décembre 2009 au plus tard, l'action en remboursement était donc prescrite au premier janvier 2013 ;
1. ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les documents de la cause ; que POLE EMPLOI a soutenu que l'action en remboursement des allocations servies à M. Y... se prescrit par dix ans, dès lors qu'il en avait obtenu le paiement par fraude, en s'abstenant de déclarer l'exercice d'une activité professionnelle pour le compte de la société « ELLE ET LUI » dont il était à la fois le gérant et l'associé majoritaire (conclusions, p. 5, antépénultième alinéa) ; qu'en affirmant que POLE EMPLOI refuse d'évoquer l'existence d'une fraude, après avoir affirmé qu'elle n'était pas une condition de son action en répétition de l'indu, la Cour d'appel a dénaturé les conclusions précitées, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile et du principe précité ;
2. ALORS si tel n'est pas le cas QUE l'objet du litige est déterminé par les parties qui sont en mesure d'introduire une hiérarchie entre leurs diverses prétentions ; qu'en interdisant à POLE EMPLOI d'invoquer, à titre subsidiaire, l'existence d'une prescription décennale qui suppose l'existence d'une fraude, après avoir soutenu, dans un premier temps, que l'exercice d'une action en répétition de l'indu n'est pas subordonné à la démonstration de l'existence d'une fraude, la Cour d'appel a donc méconnu que les parties déterminent elles-mêmes l'objet du litige, en introduisant une hiérarchie dans leurs prétentions ; qu'ainsi, elle a subsidiairement méconnu l'objet du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ;
3. ALORS QUE l'article L. 5422-5, alinéa 2, du Code du travail porte à dix ans, le délai de prescription, en cas de fraude ou de fausse déclaration ; qu'en subordonnant la prescription décennale à la seule existence d'une fraude, sans tenir compte de la fausse déclaration de l'allocataire, la Cour d'appel a violé la disposition précitée.