CIV. 2
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. Prétot, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10323 F
Pourvoi n° P 17-17.813
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. Y... X....
Admission du bureau d'aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 23 février 2017.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Z... Y... X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2016 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section SB), dans le litige l'opposant à la Caisse des dépôts et consignations, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 mars 2018, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vieillard, conseiller rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. Y... X..., de la SCP Odent et Poulet, avocat de la Caisse des dépôts et consignations ;
Sur le rapport de Mme Vieillard, conseiller, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. Y... X...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur Y... X... de sa demande de versement de l'allocation de solidarité aux personnes âgées ;
Aux motifs propres que, conformément à l'article L.816-l du code de la sécurité sociale, les dispositions de ce code relatives notamment à l'allocation de solidarité aux personnes âgées sont applicables aux personnes de nationalité étrangère remplissant l'une des trois conditions énumérées par cet article ; que le fait d'opérer des distinctions entre des personnes se trouvant dans des situations différentes n'est pas discriminatoire par lui-même ; que la condition posée par l'article L.816-l 1° du code de la sécurité sociale, applicable aux étrangers ne relevant ni du 2° ni du 3° de cet article et tenant à la possession depuis dix ans au moins d'un titre de séjour autorisant à travailler, est distincte de celle tenant à l'existence d'une résidence stable et régulière à la date de la demande, prévue par l'article L.815-1 du code de la sécurité sociale, et qui s'applique à toute personne ; que cette condition de durée de possession d'un titre de séjour autorisant à travailler est en rapport direct avec l'objet et les finalités des dispositions qui instituent une allocation de solidarité aux personnes âgées, en ce qu'elle tend à caractériser l'existence d'un lien préalable suffisant avec le système de sécurité sociale national pour ouvrir un droit au bénéfice de cette forme de solidarité lorsque l'intéressé n'est plus en mesure d'occuper un emploi ; que la modification de la durée exigée de détention d'un titre de séjour autorisant à travailler, portée à dix années par la loi n° 2011-1906 du 21 décembre 2011, ne suffit pas à caractériser une disproportion manifeste entre la nouvelle durée et les buts poursuivis par la loi ; que Z... Y... X... soutient dès lors à tort que cette condition de durée est discriminatoire ; qu'en conséquence, Z... Y... X..., qui ne remplit pas la condition précitée, est mal fondé à solliciter le bénéfice de l'allocation de solidarité aux personnes âgées ;
Et aux motifs, le cas échéant, repris des premiers juges que selon l'article L.815-1 du code de la sécurité sociale, le bénéfice de l'allocation de solidarité aux personnes âgées est accordé, sous conditions, aux personnes justifiant d'une résidence stable et régulière en France ; que selon l'article L.816-1 du même code, les personnes de nationalité étrangères non ressortissantes de l'Union européenne doivent être titulaires depuis au moins dix ans d'un titre de séjour autorisant à travailler pour pouvoir y prétendre ; que Monsieur Z... Y... X..., de nationalité arménienne, et arrivé en France le 19/03/2005, ne remplit manifestement pas cette condition à la date de sa demande, le 16/10/2013 ; que pour prétendre malgré tout au bénéfice de l'ASPA, il invoque le caractère discriminatoire que revêt selon lui l'exigence pour les ressortissants étrangers d'une durée de résidence de dix ans en France ; qu'il convient de rappeler que relève de la discrimination, en droit, et notamment selon la Cour européenne des droits de l'homme, le traitement inégal de situations semblables non justifié par des motifs objectifs, raisonnables et proportionnés lesquels sont d'interprétation stricte ; que le Conseil constitutionnel et la Cour de cassation considèrent que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des motifs d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qu'il établit ; que l'ASPA a pour but de garantir un minimum de ressources aux personnes âgées justifiant d'une résidence stable et régulière en France ; que cette condition de stabilité et de régularité de la résidence en France est objective dans la mesure où elle s'impose à tous les requérants, qu'ils soient de nationalité française, européenne ou étrangère ; que seuls les critères relatifs à l'appréciation de cette condition diffèrent selon la nationalité, et que cette différence de traitement est justifiée par le but poursuivi par la loi qui est d'accorder une aide aux personnes ayant fait le choix d'une résidence stable en France ; que l'exigence d'une durée de résidence plus longue pour les ressortissants étrangers, afin de s'assurer de la stabilité de leur séjour, s'explique par le risque plus important de mobilité géographique les concernant ; que cette distinction relative à la durée de la stabilité de résidence caractérise donc un traitement différent mais pas inégal de situations semblables justifiées [sic] en droit par des motifs raisonnables et proportionnés au but poursuivi par la loi ; qu'en outre, la condition relative à la durée de résidence répond à une cause d'intérêt général ; qu'en effet, s'agissant d'une prestation non contributive, l'ASPA repose sur la solidarité nationale et le législateur a donc voulu s'assurer de la participation des requérants à l'effort de solidarité nationale, laquelle se manifeste par la volonté réitérée de choisir la France en tant que lieu de résidence pérenne et non simplement temporaire ; qu'en conséquence, Monsieur Z... Y...
X..., qui ne peut justifier d'une durée de séjour en France au moins égale à dix ans, sera débouté de sa demande ;
Alors que, quelle que soit la légitimité du but poursuivi par la condition posée par l'article L.816-1 du code de la sécurité sociale, le fait de subordonner le bénéfice de l'allocation de solidarité aux personnes âgée au fait d'être titulaire depuis au moins dix ans d'un titre de séjour autorisant à travailler, est disproportionné au regard du but poursuivi, introduit une discrimination injustifiée par rapport aux nationaux et porte atteinte à la dignité des intéressés ; qu'en estimant le contraire la cour d'appel a méconnu les articles 14 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, combiné avec l'article 1er du protocole n°1, l'article 1er du protocole n° 12, et les articles 1 et 25 de la charte des drotis fondamentaux de l'Union européenne.