LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé, le 1er juillet 2011, en qualité d'agent des services hospitaliers, par le Centre hospitalier de [...] ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes ;
Sur le second moyen :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le premier moyen :
Vu l'article L. 1235-2 du code du travail et l'article L. 1235-5 du même code dans sa version alors applicable ;
Attendu que pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt retient que, lorsque le licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté ou opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le salarié ne peut obtenir, en plus des dommages-intérêts pour licenciement abusif, une indemnité distincte pour irrégularité de la procédure, y compris en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en vertu de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version applicable au litige, en cas de méconnaissance des dispositions des articles L. 1232-4 et L. 1233-13 du même code, relatives à l'assistance du salarié par un conseiller, les dispositions relatives aux irrégularités de procédure prévues à l'article L. 1235-2 s'appliquent même au licenciement d'un salarié ayant moins de deux ans d'ancienneté, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, l'arrêt rendu le 19 janvier 2016, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ;
Condamne le Centre hospitalier de [...] aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Nabil Y... de sa demande en paiement d'une indemnité pour non- respect de la procédure de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE le contrat a pris fin sans procédure et sans lettre de licenciement et donc sans motif, ce qui ouvre droit aux dommages et intérêts pour rupture abusive prévus par l'article L. 1235-5 du code du travail , étant rappelé qu'il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 1235-2 et L. 1235-5 du code du travail avec celles de l'article L. 1235-3 que, lorsque le licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté ou opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le salarié ne peut obtenir, en plus des dommages et intérêts pour licenciement abusif, une indemnité distincte pour irrégularité de la procédure, y compris en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller ;
ALORS QUE, le salarié, qui a moins de deux ans d'ancienneté, est en droit de prétendre, en cas de licenciement abusif et de défaut de convocation à un entretien préalable, à des dommages-intérêts pour rupture abusive ainsi qu'à une indemnité pour non- respect de la procédure de licenciement ; que le juge est tenu d'allouer au salarié l'indemnité spécifique prévue par l'article L. 1235-2 lorsque la procédure relative à l'assistance du salarié par un conseiller de son choix n'a pas été respectée ; qu'en l'espèce, il est constant que le contrat de travail du salarié a été rompu sans qu'il ait bénéficié de l'assistance d'un conseiller de son choix, la cour d'appel ayant constaté que « le contrat a pris fin sans procédure et sans lettre de licenciement » ; qu'en considérant pourtant, pour débouter le salarié de sa demande d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, que lorsque le licenciement d'un salarié de moins de deux ans d'ancienneté ou opéré dans une entreprise employant habituellement moins de onze salariés survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le salarié ne peut obtenir, en plus des dommages et intérêts pour licenciement abusif, une indemnité distincte pour irrégularité de la procédure, y compris en cas de méconnaissance des dispositions relatives à l'assistance du salarié par un conseiller, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-5 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. Nabil Y... de sa demande en paiement d'un rappel de salaire et de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité ;
AUX MOTIFS QUE, sur le rappel de salaire, M. Y... sollicite un rappel de salaire de 20,82 €, outre congés payés afférents, en faisant valoir qu'il a effectué des tâches relevant de la qualification d'aide-soignant, tout en étant rémunéré comme agent des services hospitaliers. Il fonde sa demande sur le principe d'égalité, selon lequel l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre les salariés placés dans des conditions identiques et effectuant un même travail. L'employeur s'y oppose en soutenant que M. Y... n'a pas la compétence ni l'expérience d'un aide-soignant et que les tâches invoquées relevant de cette fonction étaient encadrées par un aide soignant ou d'un infirmier, conformément à la fiche de poste d'agent des services hospitaliers et ainsi que le confirment les attestations versées aux débats, de sorte que l'intéressé n'était pas placé dans la même situation qu'un aide-soignant. Il convient de relever, d'abord, que le manquement invoqué par M. Y... à l'obligation d'égalité de traitement n'apparaît pas pertinent en l'espèce, dès lors qu'il ne se compare pas concrètement à d'autres salariés du Centre hospitalier de [...], qui auraient bénéficié de la rémunération supérieure qu'il revendique, tout en effectuant les mêmes tâches. Il ressort en effet de ses pièces et conclusions qu'il calcule le rappel de salaire ci-dessus par différence entre le salaire minimum conventionnel de l'aide soignant de base et le sien, sans soumettre au juge d'élément de fait susceptible de caractériser une inégalité effective de rémunération avec tel ou tel aide-soignant employé par le Centre hospitalier de [...]. Il apparaît alors que la demande doit être exactement rapportée à celle d'une classification professionnelle supérieure au regard de la grille des emplois applicable, laquelle classification dépend des caractéristiques de l'emploi effectivement occupé et de la qualification qu'il requiert. A cet égard, M. Y... n'établit pas, par la seule affirmation qu'il en fait, avoir effectivement exercé des fonctions relevant de la classification d'aide-soignant et non d'agent des services hospitaliers. Le dossier montre qu'il dispose d'un certificat de compétences en qualité d'agent des services hospitaliers, attestant de ses capacités à assurer la sécurité, le maintien de l'autonomie et le confort de la personne confiée et à effectuer, avec encadrement, un certain nombre de tâches, et qu'il a été recruté en cette même qualité pour effectuer lesdites tâches, notamment la participation aux soins de propreté. Par ailleurs, M. Y... n'apporte aucun élément de fait duquel déduire qu'il aurait effectivement exercé seul, sans encadrement ni accompagnement, les tâches évoquées, alors que les attestations versées par le Centre hospitalier de [...], régulières et non arguées de faux, témoignent du contraire. Il ne contredit pas non plus les plannings, qui montrent qu'il était placé constamment en binôme avec au moins un(e) aide-soignant(e) diplômé(e) et sous la responsabilité d'un(e) infirmier(e), conformément à la description des fonctions de sa fiche de poste, qui prévoit qu'il participe aux tâches permettant d'assurer le confort des malades, et non qu'il en a la charge. Enfin, ni le tract du syndicat Sud du 4 juillet 2011, concomitamment à l'embauche de M. Y..., critiquant une réorganisation du travail au sein de l'EPHAD de [...] et demandant d'augmenter le nombre de postes d'aides-soignants, ni les articles de presse d'octobre 2015, près de quatre ans après les faits, se faisant l'écho d'un mouvement de grève à l'hôpital de [...] dénonçant le recours massif aux agents contractuels, ne sauraient valoir preuve de la situation personnelle d'emploi de M. Y... au cours de l'exécution de son contrat de travail. L'appelant ne justifie donc pas avoir effectivement occupé un poste d'aide-soignant et, par voie de conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de rappel de salaire. Sur l'obligation de sécurité, Selon l'article L.4121-1 du code du travail, l'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° des actions de prévention des risques professionnels ; 2° des actions d'information et de formation ; 3° mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. En l'espèce, M. Y... soutient que le Centre hospitalier de [...] a méconnu l'obligation ci-dessus, en lui confiant des tâches relevant de la qualification d'aide-soignant. Son argumentation s'appuie essentiellement sur un jugement du tribunal des affaires de Sécurité sociale de Saint-Gaudens, reconnaissant la faute inexcusable du Centre hospitalier de [..], à l'origine d'un accident de travail subi par un agent des services hospitaliers, ayant ressenti des douleurs lombaires après avoir procédé au déshabillage d'une patiente, tâche relevant des missions de l'aide-soignant. Sans avoir à observer que le droit applicable ne connaît pas les arrêts de règlement, il convient de rappeler, d'abord, qu'il ressort de ce qui précède que M. Y... n'occupait pas un poste d'aide-soignant, ensuite, qu'il échoue à démontrer qu'il aurait effectué seul, même ponctuellement, telle ou telle tâche dévolue à un(e) aide-soignant(e), notamment le déshabillage d'un(e) résident(e), le plaçant en situation de risque professionnel. Il sera souligné ici que l'allégation évoquée à plusieurs reprises par M. Y... d'avoir laissé choir une résidente, d'une part, d'avoir arraché la peau d'une autre, d'autre part, faisant ainsi des victimes plutôt que ne l'étant lui-même, n'est assortie d'aucun commencement de preuve, alors que de tels accidents ont nécessairement eu des témoins et n'ont pas pu manquer d'être consignés. Il résulte de ces constatations que le Centre hospitalier de [...] n'a pas manqué à son obligation de sécurité à l'égard de M. Y... et le jugement sera donc confirmé en ce qu'il l'a débouté de sa demande en dommages et intérêts sur ce point ;
ALORS QU'en considérant, pour débouter le salarié de ses demandes de rappel de salaire et de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité, que M. Nabil Y... n'apportait aucun élément de fait duquel déduire qu'il aurait effectivement exercé seul, sans encadrement ni accompagnement, les tâches dévolues à un aide-soignant, sans rechercher, ainsi qu'il lui était demandé, si l'effectif restreint, soit seulement deux aides-soignants et deux agents de service hospitaliers le matin et un seul aide-soignant et deux agents de service hospitaliers le soir, dans des unités de vie de 30 lits, n'impliquait pas nécessairement que le salarié ait été amené à effectuer seul de tels actes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 du code civil et L. 4121-1 du code du travail.