La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/05/2018 | FRANCE | N°17-16.654

France | France, Cour de cassation, Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 09 mai 2018, 17-16.654


CIV. 2

MY1



COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 9 mai 2018




Rejet non spécialement motivé


M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président



Décision n° 10335 F

Pourvoi n° D 17-16.654









R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi for

mé par M. Abdelkader Y..., domicilié [...]                                                               ,

contre l'arrêt rendu le 15 février 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e ch...

CIV. 2

MY1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 mai 2018

Rejet non spécialement motivé

M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 10335 F

Pourvoi n° D 17-16.654

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par M. Abdelkader Y..., domicilié [...]                                                               ,

contre l'arrêt rendu le 15 février 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (14e chambre), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Prezioso Linjebygg, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                     ,

2°/ à la caisse primaire centrale d'assurance maladie des Bouches-du-Rhône, dont le siège est [...]                                                 ,

3°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...]                           07 SP,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l'audience publique du 28 mars 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de M. Y..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Prezioso Linjebygg ;

Sur le rapport de Mme Z..., conseiller référendaire, l'avis de M. de Monteynard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Y... et le condamne à payer à la société Prezioso Linjebygg la somme de 1 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour M. Y....

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté M. Abdelkader Y... de son action aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur à l'origine de son accident du travail du 19 septembre 2013 et rejeté toutes ses demandes ;

AUX MOTIFS QUE M. Y... a été embauché le 1er septembre 2006 en qualité d'ouvrier échafaudeur-calorifugeur par l'agence de la société Prezioso de Châteauneuf-les-Martigues et affecté sur le site pétrochimique de Berre ; qu'il a considéré que son employeur avait commis une faute inexcusable en le faisant travailler alors que la veille de l'accident le médecin du travail l'avait déclaré inapte à son poste de travail, en lui demandant de consulter son médecin traitant ; qu'il a déclaré que son employeur lui avait demandé de transporter des meubles lourds dans le bungalow servant de « base de vie » au personnel de l'entreprise sur le site pétrochimique, et que c'était en transportant une table qu'il avait trébuché et était tombé à la renverse, se blessant au dos et à l'omoplate ; qu'il a reproché à l'employeur d'avoir tardé à envoyer la déclaration d'accident du travail à l'organisme social ; que la société Prezioso a contesté ces faits en indiquant que M. Y... s'était présenté à son poste de travail le 19 septembre 2013 sans être allé consulter son médecin traitant, qu'il avait refusé de quitter les lieux et que les circonstances de ce prétendu accident étaient indéterminée ; qu'il a rappelé qu'il avait émis des réserves en déclarant l'accident du travail (lettre non communiquée) mais que la caisse n'en n'avait pas tenu compte ; que la cour rappelle que la faute inexcusable de l'employeur ne se présume pas, et que, dans le cadre de l'application de l'article L 452-l du code de la sécurité sociale, lorsque le salarié, victime d'un accident du travail (ou d'une maladie professionnelle) entend mettre en cause la faute inexcusable de l'employeur, il doit rapporter la preuve de l'existence de cette faute ; qu'en l'espèce, le 18 septembre 2013, lors de la visite médicale annuelle, le médecin du travail avait remis à M. Y... un bulletin mentionnant « inaptitude au poste soins nécessaires » ; que cette visite avait duré de 10h30 à 11h05 ; que le médecin a déclaré avoir omis de préciser « inapte temporaire » et il a faxé à l'employeur un bulletin rectifié ainsi qu'en témoigne son courrier électronique du 18 septembre à 16h38 ; que dans sa télécopie du 20 septembre, M. A..., chef de l'agence Prezioso, a demandé au médecin du travail de lui confirmer le teneur de l'entretien du 18 septembre concernant la nécessité pour le salarié de consulter son médecin traitant ; que le docteur B... a répondu de manière très précise : « Je vous confirme que le salarié a eu l'information nécessaire et complète sur son inaptitude et a bien été orienté vers son médecin traitant pour se faire prescrire les soins nécessaires ainsi que l'arrêt maladie à vous faire parvenir » ; que ce document permet de dire que M. Y... savait non seulement que son état de santé nécessitait des soins au point qu'un arrêt de travail était indispensable ; qu'il ne justifie d'aucun motif pouvant expliquer pour quelle raison, quittant le médecin du travail à 11h05, il ne serait pas allé consulter son médecin traitant immédiatement en vue de se faire prescrire les « soins nécessaires » et l'arrêt de travail qui lui étaient recommandés ; que le 27 octobre 2013, devant l'inspecteur du travail, M. Y... a confirmé qu'il avait refusé de quitter le lieu de travail le 19 septembre, car il craignait de perdre des salaires et de se voir reprocher un abandon de poste d'autant que A... refusait de lui donner un écrit « lui enjoignant de rester à son domicile dans attente de la recherche d'un poste adapté ou de l'aménagement du poste de travail » ; que le bien-fondé de la demande du salarié concernant un changement de poste ou un poste aménagé à la première visite médicale ne peut être apprécié que par la juridiction prud'homale ; qu'il n'en demeure pas moins qu'aucune infraction ne semble avoir fait l'objet de poursuites pénales, y compris concernant le caractère allégué comme tardif de la transmission de la déclaration d'accident du travail à l'organisme social ce dernier reproche fait à l'employeur par l'intimé porte sur un fait postérieur à l'accident et n'a donc eu aucun rôle causal dans la survenance de cet accident ; que par ailleurs, selon l'inspecteur du travai1 M. A... aurait déclaré avoir finalement accepté la présence de M. Y... sur le lieu de travail, dans l'attente de la position de la direction du personnel situé au siège social à Vienne (Isère) sur le poste à attribuer au salarié, à condition de « limiter ses activités de manutention manuelle et sans intervenir sur le montage des échafaudages » (lettre du 15 novembre 2013) ; que par lettre du 18 décembre 2013, M. A... a immédiatement contesté cette enquête, et notamment sur ce prétendu « accord », en soulignant qu'il avait demandé à M. Y... de rentrer chez lui, ce qu'il avait refusé, et qu'il ne pouvait pas « contraindre un salarié par la force à rentrer chez lui » ; que ce refus du salarié avait été acté par l'inspecteur du travail et il ne le remet pas en cause dans la présente procédure ; que la cour considère que la décision du salarié de se rendre sur le lieu du travail contre l'avis clair et précis du médecin du travail en refusant sciemment et sans motif de se rendre chez son médecin traitant alors que son état de santé nécessitait des soins et probablement un arrêt de travail et de s'y maintenir en dépit du refus clairement exprimé de l'employeur qui ne dispose d'aucun moyen de faire expulser un salarié qui se maintient de force sur un lieu de travail, ne permet pas de dire que l'employeur a commis une faute consistant à faire travailler son salarié en dépit d'un avis d'inaptitude du médecin du travail ; que dès lors, ce premier point présenté par M. Y... comme constituant une éventuelle faute inexcusable de l'employeur n'est donc pas fondé ; que par ailleurs, l'employeur a contesté les circonstances de l'accident puisque M. en transportant un meuble très lourd mais qu'aucun témoignage ne vient conforter ses dires et qu'il ne justifie pas davantage avoir agi sur ordre de son employeur auquel il reproche de l'avoir exposé à un danger en toute connaissance de cause ; que sur le premier point, l'employeur ne peut pas prétendre que les circonstances de l'accident sont indéterminées puisque, dans sa lettre du 18 décembre 2003, M. A... admet que la chute s'est produite pendant le transport d'une table et qu'il ne remet donc pas en cause les circonstances de 1a chute ; qu'en revanche, l'inspecteur du travail qui a entendu les deux parties note à ce propos « M. Y... (...) a entrepris de participer au déménagement du mobilier de la base de vie » ; qu'il a reproché à l'employeur de ne pas avoir suivi la procédure de changement de poste, ce que l'employeur a contesté ce point est de la compétence de la juridiction prud'homale dont la décision déboutant la salarié n'est pas définitive ; que dans sa lettre du 18 décembre 2013, M. A... ne mentionne pas qu'il aurait donné l'ordre au salarié de participer au déménagement de la base de vie puisque l'inspecteur du travail ne lui en avait pas imputé l'initiative dans sa lettre du 15 novembre 2013 ; que l'initiative a donc été, le fait de M. Y... et de lui seul, et ne résulte pas d'un ordre de son employeur ; que l'intimé ne peut pas soutenir que son employeur lui aurait demandé d'effectuer un travail l'exposant à un danger pour sa santé, étant rappelé que le salarié était sur le lieu du travail en dépit d'un avis médical et que les motifs médicaux qui avaient pu justifier l'inaptitude au travail, des soins et un éventuel arrêt de travail n'étaient pas connus de l'employeur ; qu'aucune faute inexcusable ne peut donc être reprochée à l'employeur ; que la cour infirme le jugement déféré ;

1°) ALORS QU'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; que caractérise un tel manquement la méconnaissance par l'employeur des préconisations du médecin du travail ; qu'en l'espèce, en écartant la faute inexcusable de l'employeur quand elle avait constaté que l'employeur avait été alerté par le médecin du travail de ce que les conditions de travail de M. Y... étaient susceptibles de nuire à sa santé au point que le médecin du travail avait confirmé que M. Y... avait été déclaré inapte temporaire, mais que pour autant l'employeur avait laissé M. Y... participer au déménagement de la « base de vie » sur le lieu de travail, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, desquelles elle aurait dû évincer que l'employeur avait, ou aurait dû avoir conscience du danger, et qu'il n'avait pas pris les mesures nécessaires pour préserver le salarié, et a violé les articles L. 4121-1 du code du travail et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

2°) ALORS QU'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers celui-ci d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail, et que le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; qu'en énonçant que « l'intimé ne pouvait pas soutenir que son employeur lui aurait demandé d'effectuer un travail l'exposant à un danger pour sa santé, étant rappelé que le salarié était sur le lieu du travail en dépit d'un avis médical et que les motifs médicaux qui avaient pu justifier l'inaptitude au travail, des soins et un éventuel arrêt de travail n'étaient pas connus de l'employeur », quand elle avait pourtant constaté que le médecin du travail avait faxé à l'employeur le 18 septembre 2013, soit la veille de l'accident du travail de M. Y..., un bulletin rectifié énonçant qu'il avait déclaré le salarié inapte temporaire à son poste, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 du code du travail et L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

3°) ALORS QUE l'éventuelle imprudence du salarié est sans incidence sur l'existence de la faute inexcusable de l'employeur, sauf à ce que soit caractérisée dans le chef du salarié une véritable faute inexcusable ; que l'employeur, au titre du lien de subordination l'unissant au salarié dans le cadre du contrat de travail, détient les pouvoirs de direction, de contrôle et de sanction ; qu'en l'espèce, en déboutant M. Y... de son action tendant à faire reconnaître l'existence d'une faute inexcusable, au motif inopérant que « la décision du salarié de se rendre sur le lieu du travail contre l'avis clair et précis du médecin du travail en refusant sciemment et sans motif de se rendre chez son médecin traitant alors que son état de santé nécessitait des soins et probablement un arrêt de travail et de s'y maintenir en dépit du refus clairement exprimé de l'employeur qui ne dispose d'aucun moyen de faire expulser une salarié qui se maintient de force sur un lieu de travail, ne permet pas de dire que l'employeur a commis une faute consistant à faire travailler son salarié en dépit d'un avis d'inaptitude du médecin du travail », tandis que l'employeur, détenteur des pouvoirs de direction, de contrôle et de sanction, ne pouvait se retrancher derrière une prétendue impossibilité d'empêcher le salarié de rester au travail alors qu'il nécessitait des soins, et sans caractériser, ce faisant, une faute inexcusable du salarié, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

4°) ALORS QUE seul le médecin du travail est qualifié pour déterminer si le salarié doit être, compte tenu des conditions d'exécution de son travail et des possibilités ou impossibilités d'aménagement de son poste, considéré comme définitivement inapte à son emploi ou à tout autre poste dans l'entreprise ; qu'en écartant l'existence d'une faute inexcusable, quand elle avait constaté que le salarié avait été affecté par l'employeur sur un poste à la base de vie du site de Lyondell Basell sans s'être assuré au préalable auprès du médecin du travail de l'aptitude du salarié à être affecté à ce poste, la cour d'appel a violé l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

5°) ALORS QUE le fait que le salarié ait agi de sa propre initiative en dépit des préoccupations de son employeur sur la sécurité, ne suffit pas à écarter la faute inexcusable de ce dernier lorsque l'employeur n'a effectué aucune vérification sur la conformité aux règles de sécurité des actions entreprises par le salarié victime de l'accident du travail ; qu'en écartant l'existence d'un faute inexcusable de l'employeur, au motif que le salarié aurait agi de son propre chef, sans que l'employeur ne lui ait intimé l'ordre de porter la table, sans rechercher si l'employeur avait effectué une vérification sur la conformité aux règles de sécurité des actions entreprises par le salarié victime, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na
Numéro d'arrêt : 17-16.654
Date de la décision : 09/05/2018
Sens de l'arrêt : Rejet

Références :

Décision attaquée : cour d'appel d'Aix en Provence 14e Chambre


Publications
Proposition de citation : Cass. Deuxième chambre civile - formation restreinte rnsm/na, 09 mai. 2018, pourvoi n°17-16.654, Bull. civ.Non publié
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Non publié

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:17.16.654
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award