SOC.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
M. FROUIN, président
Décision n° 10523 F
Pourvoi n° T 17-15.218
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Nathalie X..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 25 janvier 2017 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale), dans le litige l'opposant à l'association La Ligue de l'enseignement fédération de l'Aisne, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2018, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Y..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Leprieur, conseiller, Mme Z..., avocat général, Mme Lavigne, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me A..., avocat de Mme X..., de la SCP Lesourd, avocat de l'association La Ligue de l'enseignement fédération de l'Aisne ;
Sur le rapport de Mme Y..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par Me Balat , avocat aux Conseils, pour Mme X...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit bien fondé le licenciement pour faute grave de Mme X... et d'avoir débouté celle-ci de l'ensemble de ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE, sur le grief de harcèlement moral évoqué, il résulte de l'article L.1152 du code du travail qu'aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu'une situation de harcèlement moral se déduit ainsi essentiellement de la constatation d'une dégradation préjudiciable au salarié de ses conditions de travail consécutive à des agissements répétés de l'employeur révélateurs d'un exercice anormal et abusif par celui-ci de ses pouvoirs d'autorité, de direction, de contrôle et de sanction ; que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité de résultat à l'égard de ses salariés ; qu'ayant connaissance d'une souffrance au travail, l'employeur ne peut, sans engager sa responsabilité, laisser cette situation perdurer ; qu'il a l'obligation de trouver une solution pour y remédier ; qu'en l'espèce, l'employeur a été saisi le 9 septembre 2013 par un courrier émanant de plusieurs salariés sollicitant une audience afin d'évoquer les difficultés de fonctionnement rencontrées au sein des différents services de la Ligue ; que l'employeur a diligenté une enquête au sein de l'association et a recueilli les témoignages de nombreux salariés ; que si comme le relève Mme X..., l'employeur ne produit pas le compte rendu d'audition des salariés, il produit un grand nombre d'attestations ainsi que le compte rendu de ces investigations effectué au conseil d'administration le 8 novembre 2013 ; qu'il ressort de ces témoignages que depuis l'arrivée de Mme X... au sein de l'association, l'ambiance de travail s'est fortement dégradée, les Jean-Christophe BALAT Avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation [...] 75012 PARIS différents témoins évoquant les nombreuses critiques de la salariée à leur égard, son éternelle insatisfaction, ses propos outranciers voire insultants ; qu'ainsi, Mme B... atteste avoir régulièrement vu des personnes sortir en pleurs du bureau de Mme X..., avoir assisté à de fréquentes altercations ; que Mme C... indique que Mme X... pouvait traiter les jeunes employés en service civique de « connard », « pétasse » et relate un épisode au cours duquel, en juin 2013, à l'occasion d'un déplacement à Nantes, Mme X... a adopté une attitude odieuse à son égard, moqueuse, cynique, vulgaire, lui intimant l'ordre de ne plus jamais lui adresser la parole ; que M. D... évoque des remarques désobligeantes faites sur son physique, témoigne avoir entendu Mme X... indiquer qu'« il lui restait deux brebis galeuses à éjecter » ; qu'il ressort des éléments produits par l'employeur que les salariés, à plusieurs reprises, avaient fait part de leur mal être à Mme X... ; qu'ainsi, par mail du 5 novembre 2012, Mme E... relatait à cette dernière l'ensemble des difficultés relationnelles ressenties et le stress vécu ; que si Mme X... affirme avoir été recrutée au sein de l'association pour redresser la situation financière de celle-ci, réorganiser les effectifs de personnel notamment en procédant à des licenciements économiques dans un contexte difficile pour la structure, ces éléments ne justifient pas des propos outranciers ou dévalorisants tenus, une attitude méprisante et déstabilisante, des agissements excessifs et outranciers qui ont contribué à la mise en place d'un climat de travail délétère et qui ont généré une situation de stress et de souffrance au travail subie par le personnel ; que si la salariée affirme en outre avoir été victime de parti pris de la part de son employeur en indiquant que son licenciement avait été décidé avant la tenue de l'entretien préalable, produisant à cette fin un compte rendu du conseil d'administration du 8 novembre 2013 proposant de débuter une procédure de licenciement à son encontre, il y a lieu de constater que ce premier compte rendu, non signé par les parties, apparaît avoir constitué un projet, le second compte rendu validé par les parties mentionnant uniquement à ce stade l'organisation d'une audition de Mme X... ; qu'au vu de ces éléments, par infirmation du jugement entrepris, il sera désormais jugé que le grief de harcèlement moral reproché à Mme X... est constitué ; qu'en conséquence et par application des principes rappelés, sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres griefs reprochés au sein de la lettre de licenciement, le licenciement pour faute grave de la salariée doit être déclaré légitime, avec toutes conséquences de droit ; que la salariée doit par conséquent être déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour licenciement illégitime ainsi que de ses prétentions relatives aux indemnités de rupture, indemnité compensatrice de préavis et indemnité conventionnelle de licenciement ;
ET AUX MOTIFS PAR AILLEURS QUE, sur le caractère abusif et vexatoire du licenciement, une salariée licenciée dans des conditions brutales et vexatoires peut prétendre à des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi et distinct de celui résultant de la perte de son emploi ; qu'a l'appui de sa demande, Mme X... indique avoir subi une vexation liée au retrait des moyens de paiement de l'association dont elle avait la gestion exclusive et, ce dès le 20 novembre 2013, avant l'entretien préalable au licenciement ; que le salarié qui sollicite la réparation d'un préjudice particulier lié au caractère abusif et vexatoire de la procédure doit établir à cet égard un comportement fautif de l'employeur ; qu'il ne résulte pas des pièces versées aux débats des éléments établissant des circonstances particulières de mise en oeuvre de la procédure de licenciement de manière brutale ou vexatoire ; que si la salariée produit un mail faisant état de difficultés d'utilisation de la carte bleue de l'association le 20 novembre 2013, elle n'établit pas que cet incident ait résulté d'une volonté propre de l'employeur ; qu'elle évoque en outre au sein de son mail avoir contacté le conseiller bancaire pour résoudre ce problème ; qu'elle n'établit pas davantage ne plus avoir eu accès à la trésorerie de l'association avant la date de sa mise à pied conservatoire ; que la demande d'indemnité présentée à ce titre ne peut par conséquent être accueillie ;
ALORS, D'UNE PART, QUE les juges du fond doivent se prononcer sur l'ensemble des pièces versées aux débats ; que Mme X... produisait devant les juges du fond plusieurs documents, notamment une attestation de M. Daniel F..., président de la Fédération de l'Aisne de la Ligue de l'Enseignement, qui témoignait du fait qu'elle se trouvait pleinement impliquée dans la gestion de l'association, confrontée à des difficultés importantes de trésorerie, et qu'elle n'avait jamais manqué de respect envers les salariés de l'association, ainsi qu'une attestation de M. Emmanuel G..., président de l'association de 2004 à 2012, qui allait dans le même sens ; qu'en ne se prononçant pas sur ces attestations qui étaient de nature à exclure que Mme X... ait commis les fautes qui lui étaient reprochées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE la faute grave est celle qui empêche le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la période de préavis ; qu'elle doit être prouvée par l'employeur ; qu'en se fondant, pour dire fondé le licenciement de Mme X... pour faute grave, sur quatre attestations faisant état de prétendues difficultés relationnelles entre Mme X... et certains salariés de l'association, sans qu'il soit constaté que ces dissensions, à les supposées avérées, rendaient impossible la poursuite du contrat de travail durant la période du préavis, la cour d'appel a violé les articles L.1234-1, L.1234-5 et L.1234-9 du code du travail.