SOC.
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 3 mai 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme E..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10581 F
Pourvoi n° D 17-11.295
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Alquier, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                                        ,
contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2016 par la cour d'appel d'[...]             chambre A), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Giovanni X..., domicilié [...]                                                      ,
2°/ à Pôle emploi Provence-Alpes-Côte d'Azur, dont le siège est [...]                            10e,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mars 2018, où étaient présents : Mme E..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. Y..., conseiller rapporteur, Mme Capitaine, conseiller, Mme Z..., avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Alquier, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. X... ;
Sur le rapport de M. Y..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Alquier aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alquier à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois mai deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Alquier
Il est fait grief à l'arrêt partiellement confirmatif d'avoir dit que le licenciement pour inaptitude de Monsieur X..., consécutif à ces manquements prononcé à l'encontre de celui-ci était sans cause réelle et sérieuse et d'avoir condamné la SAS ALQUIER à lui payer les sommes de 40 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 4 146,60 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 414,60 € à titre de congés payés afférents et 1 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE Sur le reclassement : Monsieur X... soutient que son reclassement a été envisagé par son employeur dès la visite médicale de pré-reprise du 28 novembre 2011 et critique le sérieux et la loyauté des recherches de reclassement de son employeur qui, d'une part dans le cadre du Contrat de Rééducation Professionnelle, n'a pas aménagé son poste, ni pourvu à sa formation pour qu'il occupe le poste de magasinier et devienne ensuite responsable logistique et qui, d'autre part après avoir mis fin au CRE, ne lui a proposé que deux postes à temps partiel. La société ALQUIER fait valoir que le CRE a été signé sur deux postes qui, même à temps partiel, nécessitaient en réalité de la manutention et qu'elle a été contrainte d'alléger les horaires du salarié et de rompre le contrat. Relativement à ses recherches de reclassement, elle rappelle avoir proposé deux postes mais non le poste de responsable logistique, complètement différent du poste de magasinier et pour lequel l'appelant n'aurait pu recevoir de formation puisqu'il n'avait pas les compétences de base nécessaires. L'article R. 4624-31 du code du travail n'impose pas que la constatation de l'inaptitude soit faite lors d'un examen médical de reprise consécutif à une suspension du contrat de travail, le médecin du travail pouvant la constater après tout examen médical qu'il pratique au cours de l'exécution du contrat de travail et notamment lors d'une visite médicale périodique prévue par l'article R4624-16 du Code du travail. Le médecin du travail est alors habilité par l'article L4624-1 du Code du travail dans sa version applicable au litige, [...]" à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l'âge, à la résistance physique ou à l'état de santé physique et mentale des travailleurs. L'employeur est tenu de prendre en considération ces propositions et, en cas de refus, de faire connaître les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. En cas de difficulté ou de désaccord, l'employeur ou le salarié peut exercer un recours devant l'inspecteur du travail. Ce dernier prend sa décision après avis du médecin inspecteur du travail." La recherche de reclassement du salarié doit s'apprécier à l'intérieur du groupe auquel appartient l'employeur concerné, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation lui permettent la permutation de tout ou partie du personnel. Il appartient à l'employeur d'apporter la preuve de la réalité de ses recherches de reclassement et de son impossibilité à reclasser le salarié. L'employeur ne peut restreindre ses recherches en fonction delà mobilité géographique déclarée par le salarié. Pour justifier de ses efforts sérieux et loyaux de reclassement, la société intimée produit le CRE qu' elle a accepté de signer avec le salarié et la CPAM, sa lettre du 30 mai 2013 proposant au salarié deux postes de reclassement (au sein de la société ALQUIER à Aubagne: opérateur sur machine à commande numérique sans manipulation de tôles à raison d'un quart de temps au taux horaire de 106 et au sein de la société AM Rhône Alpes à [...] dans le Rhône ( même Groupe):poste de magasinier à mi-temps au taux horaire de 10 €). Elle verse aussi au débat le refus écrit du salarié en date du 5 mai suivant, la fiche de poste de responsable logistique et le curriculum vitae de Monsieur A..., recruté sur ce poste. Il est établi, au vu des pièces produites, qu'en les deux propositions de reclassement faites à Giovanni X... l'ont été trois jours seulement après l'avis définitif d'inaptitude, et sans qu'il soit démontré que l'employeur ait sollicité le médecin du travail pour étudier des solutions de reclassement compatibles avec ses préconisations, ait sollicité toutes les sociétés du Groupe auquel elle appartient, ait analysé la faisabilité d'un reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. En effet, aucune pièce, hormis le courrier de proposition du 30 mai 2013 n'est produite sur les efforts de recherches allégués. Par conséquent, sans même analyser la bonne exécution du CRE et ses éventuelles incidences, il y a lieu de dire le licenciement de G. X... dépourvu de cause réelle et sérieuse. Soulignant son ancienneté et la perte de revenus induite par ce licenciement, sa situation de demandeur d'emploi d'août 2013 à juillet 2015 ( date d'un emploi à GSF), puis de septembre à mars 2016 (date de signature d'un contrat de travail à durée déterminée ) et ses répercussions familiales, G. X... réclame réparation à hauteur de 84 168 € Par application de l'article L 1235-3 du code du travail, au regard de l'âge, de la qualification, de la rémunération moyenne (2 073€), de l'ancienneté de Giovanni X..., des circonstances de la rupture et des justificatifs produits de sa situation de demandeur d'emploi, il convient d'évaluer à la somme de 40 000 euros la juste indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse, et d'infirmer ainsi la décision du conseil de prud'hommes de Marseille En revanche, les dispositions du jugement relatives à l'indemnité compensatrice de préavis due nonobstant l'inaptitude en raison de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, et aux congés payés y afférents doivent être confirmées en ce que les sommes allouées sont conformes à ses droits.
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE Sur la légitimité du licenciement: En application de l'article L1235-1 du Code du Travail, lorsqu'il est saisi du bien fondé d'une mesure de licenciement, le juge se détermine au vu des éléments qui lui sont fournis par les parties, le doute devant profiter au salarié. Il est bien établi en Droit, que les motifs allégués dans la lettre de licenciement fixent le cadre mais aussi les limites du litige. La lettre de licenciement du 2 juillet 2013 fait état des motifs suivants : L'inaptitude constatée les 29 avril et 27 mai 2013 par le Docteur B... Médecin du Travail, le déclarant inapte définitivement au poste de serrurier métallier poseur et à tous travaux de force et de manutention ;Mais constatant cependant l'aptitude à un poste de magasinier et d'opérateur sur machines numériques sans manutention de tôles ; La proposition de reclassement du 30 mai 2013, sur Aubagne, au poste d'opérateur sur machine à commande numérique sans manipulation de tôles à raison d'un quart de temps au taux horaire de 10 € ; Et au sein de la Sté AM Rhône Alpes à [...] dans le Rhône, société du même groupe, au poste d'aide magasinier à mi-temps au taux horaire de 10 €.Le refus par le salarié, de ces deux postes, en date du 5 juin 2013 ;Aucune autre possibilité de reclassement n'a été trouvée par l'entreprise. L'article L 1226-2 du Code du Travail précise : « Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu 'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail, et les indications qu 'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagements du temps de travail ». Conformément aux articles 6 et 9 du Code de Procédure Civile il appartient donc à la Sté ALQUIER de démontrer, par des éléments probants et objectivement vérifïables, qu'elle a pleinement satisfait à son obligation de recherche de reclassement vis-à -vis de Monsieur X.... Les éléments versés aux débats : Le contrat de rééducation professionnelle daté du 6 juin 2012, qui a pour objet la réadaptation professionnelle de Monsieur X..., est conclu pour une durée de 12 mois, du 1° septembre 2012 jusqu'au 31 août 2013, entre la Sté ALQUIER, la CPAM et le salarié. La rémunération de Monsieur X... (soit 2338,00 €) est financée à 70% par la CPAM. Il prévoit dans son article 7 qu'il pourra être rompu, soit par l'entreprise, soit par le bénéficiaire sans autre formalité, à la charge pour l'entreprise d'en aviser la Direction départementale du Travail et de l'Emploi et l'organisme de prise en charge. Le courrier du 17 octobre 2012 adressé à l'employeur par Monsieur C..., Inspecteur du Travail, constate que suite à sa visite du 11 octobre dans l'entreprise, avoir constaté que le poste sur lequel travaillait Monsieur X... ne fait l'objet d'aucun aménagement technique particulier permettant de limiter la manutention ou les gestes pouvant s'avérer incompatibles avec l'état de handicap du salarié. Seul un aménagement d'horaires a été instauré (du lundi au vendredi de 7 h à 11 h et de 13h à 16 h au lieu de travailler du lundi au jeudi de 7 h à 12 h et de 13 h à 17 h). Et rappelle à la Sté ALQUIER les dispositions des articles R 5213-23 et R 5213-26 du Code du Travail. Aucune réponse de l'employeur ne figure au dossier. Le courrier du 10 décembre 2012 adressé à l'employeur par Monsieur C..., Inspecteur du Travail, où il l'interroge sur le constat effectué par le Docteur B... surpris de voir se présenter dans son cabinet, un autre salarié que Monsieur X..., pour une visite médicale d'embauche, au poste de Responsable Logistique, poste qui aurait dû à terme être proposé à ce dernier. Et indique que dans ces conditions, avoir été réduit à se prononcer par défaut, sur 2 postes (magasinier et opérateur sur machines numériques/plieuse) pour lesquels il considère Monsieur X... comme partiellement apte dans le cadre d'une visite médicale de reprise du 5 septembre 2012. Reprenant les termes du courrier échangé le 2 novembre 2012 avec Monsieur D..., chargé de mission maintien au sein de la SAMETH qui avait participé à cette recherche sur demande du Médecin du Travail, il en conclut que les promesses formulées par l'employeur à l'occasion de la négociation du CRE n'auraient pas été suivies d'effet. Lui rappelant les dispositions des articles L 5213-3 et suivants du Code du Travail relatifs au Contrat de Rééducation professionnelle chez l'employeur, il demande à la Sté ALQUIER de lui préciser les modalités de formation prévue pour Monsieur X.... Aucune réponse de l'employeur à ce courrier ne figure au dossier. Le licenciement prononcé le 2 juillet 2013 prononcé à l'encontre de Monsieur X... pour inaptitude et impossibilité de reclassement, est donc dénué de cause réelle et sérieuse.
ALORS TOUT D'ABORD QUE si le point de départ de l'obligation de reclassement est fixé à compter de la seconde visite de reprise, l'employeur peut entamer ses recherches de reclassement dès qu'il a connaissance de l'inaptitude probable du salarié ; qu'en reprochant à la SAS ALQUIER d'avoir proposé à Monsieur X... un poste en reclassement trois jours après la seconde visite d'inaptitude alors que l'employeur avait préalablement mis en place un contrat de rééducation professionnelle qui avait déterminé les possibilités de reclassement du salarié, de sorte qu'elles étaient parfaitement connues des parties le jour de la seconde visite, la cour d'appel a ajouté aux conditions posées par les articles L 1226-2 et L 1226-4 du code du travail des exigences qui n'y figurent pas et a violé les dits articles ;
ALORS ENSUITE QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties telles qu'elles sont fixées par l'acte introductif d'instance et les conclusions en défense ; que la cour d'appel qui a dit que la société ALQUIER avait manqué à son obligation de reclassement parce qu'elle n'avait pas sollicité toutes les sociétés du groupe auquel elle appartient alors que ce moyen n'avait pas été invoqué par Monsieur X... a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE si l'emploi proposé doit être aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagements du temps de travail, il ressort des propres énonciations de l'arrêt attaqué que la SAS ALQUIER a adapté le poste de Monsieur X... à son handicap en lui proposant un poste à temps partiel sans manipulation de tôles, conformément aux préconisations du médecin du travail ; qu'en reprochant à la SAS ALQUIER de n'avoir pas recherché à adapter le poste de travail du salarié à son handicap la cour d'appel n'a pas tiré de ses constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient et a violé l'article L 1226-2 du code du travail ;