CIV.3
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 avril 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10222 F
Pourvoi n° J 17-19.764
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Marie-Thérèse X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 26 janvier 2017 par la cour d'appel de Metz (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Michel Z..., domicilié [...] ,
2°/ à M. Jérémy A...,
3°/ à Mme Julie B...,
domiciliés [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mars 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme E..., conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme Y... ;
Sur le rapport de Mme E..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mme Y... de sa demande en élargissement de la servitude de passage à 4 mètres, d'avoir fixé en conséquence l'assiette de cette servitude à un passage permettant de rejoindre la rue des Coquelicots sur une bande de terrain d'une largeur de 1,50 mètres seulement depuis la limite séparative de la propriété voisine de celle de M. Z..., condamné en conséquence ce dernier à permettre l'accès à la parcelle n° [...] par sa parcelle n° [...] sur cette largeur de 1,50 mètres seulement sous peine d'astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 15 jours à compter de la signification du jugement ;
Aux motifs qu'outre que nombre des attestations produites par l'appelante se bornent à émettre des avis et des commentaires sur le comportement selon leurs auteurs inacceptables de Michel Z... et à commenter les conclusions de Michel Z... et la motivation du jugement rendu le 4 octobre 2010, il faut constater que comme l'a déjà relevé le tribunal, ces témoignages sont imprécis quant à la période durant laquelle le passage ici en litige se serait exercé sur une largeur de plus de 2 mètres (mais non précisément 4 mètres comme réclamé par l'appelante) et quant aux modalités d'exercice de ce droit de passage et d'exploitation de la parcelle de Marie-Thérèse Y... avec cette conséquence que ces documents ne suffisent pas à faire la preuve d'un exercice plus que trentenaire d'un droit de passage sur une largeur excédant la largeur mentionnée dans l'acte d'acquisition de la parcelle de Michel Z... et accordée par le juge des référés dans son ordonnance du 29 mai 2007 et par le tribunal de grande instance de Thionville dans le jugement entrepris. Ces témoignages sont d'ailleurs contredits par ceux, certes moins nombreux fournis par Michel Z... et dont les auteurs affirment que la parcelle de Marie-Thérèse Y... pouvait être normalement exploitée puisque des personnes travaillaient sur ce terrain avec un motoculteur et des appareils d'élagage et ce malgré le muret édifié par l'intimé. Il s'en déduit que le jugement du tribunal de grande instance de Thionville doit être confirmé en ses dispositions fixant à 1m50 depuis la limite séparative de la propriété voisine de celle de Michel Z... à présent propriété des consorts A... B... ,
l'assiette de la servitude de passage au profit de la parcelle cadastrée section [...] n° [...]/[...] de Marie-Thérèse Y....
Et aux motifs adoptés du jugement que alors que Maître C... qui dans son constat du 28 janvier 2008 a mesuré des largeurs de passage de 1,51 m à l'entrée, 1,53 et 1,52 m dans sa longueur et enfin 1,72 m à l'entrée de la parcelle, a pu constater à cette date que la parcelle avait pu être labourée, force est de constater que Mme Y... n'a donné aucune précision sur la façon dont cette parcelle avait été jusque-là exploitée par le seul passage existant et qu'il n'a été produit aucune pièce de nature à démontrer que la largeur de 1,50m n'est pas suffisante. Si dans une attestation du maire de Thionville établie le 13 octobre 2006, il a été confirmé que Mme Y... occupait un emplacement sur le marché depuis de nombreuses années, il n'a pour autant été produit aucune pièce de nature à préciser ce qui était cultivé sur cette parcelle et ce qui était vendu sur le marché ou à permettre au tribunal d'apprécier la nature et l'importance de son exploitation qu'elle affirme être faite tant à titre familial qu'à titre professionnel, l'existence et le montant de revenus agricoles qui auraient été déclarés à ce titre n'étant pas plus justifiés. De même alors que les attestations produites par Mme Y... ne précisent aucunement que le passage autorisé par les précédents propriétaires permettait le passage d'un tracteur ni que l'exploitation de la parcelle, manifestement déjà cultivée en jardinage, nécessiterait de pouvoir y accéder avec un véhicule ou un tracteur, il sera relevé que Mme Y... qui était déjà âgée de 74 ans lors de l'introduction de la présente procédure, ne semble pas l'exploiter elle-même. En effet alors qu'il ressort d'une attestation de Mme D... qu'au cours de l'été 2006 c'est une entreprise qui est venue faire des travaux sur cette parcelle au moyen d'un motoculteur et d'appareils d'élagage et ceci sans que cela ait nécessité que sa camionnette aille jusque dans cette parcelle, il sera relevé que c'est cette même entreprise « La vie des jardins » qui a fait à Mme Y... un devis en date du 18 juillet 2007 pour des travaux de remise en état de son jardin. Or alors que cette entreprise a décrit dans ce devis des travaux comprenant le débroussaillage, l'enlèvement des déchets et le labour, force est de constater qu'il n'a été donné aucune restriction à l'exécution de ces travaux tenant à la nécessité d'utiliser un tracteur pour ce faire ni même à la possibilité de pouvoir accéder avec sa camionnette jusqu'au terrain alors que cette entreprise connait manifestement la configuration des lieux. Enfin si en principe une évolution de la technologie peut le cas échéant justifier qu'un passage soit adapté, il s'avère en l'espèce, que Mme Y... ne justifie pas pour autant que l'élargissement du passage pour permettre le passage d'un tracteur soit nécessaire à l'exploitation de sa parcelle qui reste un jardin potager ;
1°- Alors que le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue, ou qu'une issue insuffisante, soit pour l'exploitation agricole, industrielle ou commerciale de sa propriété, soit pour la réalisation d'opérations de construction ou de lotissement, est fondé à réclamer sur les fonds de ses voisins un passage suffisant pour assurer la desserte complète de ses fonds, à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner ; que l'accès par un engin agricole et une camionnette permettant le transport des récoltes et du fumier constitue l'usage normal d'un fonds destiné à l'exploitation agricole à titre professionnel, quand bien-même il s'agirait d'un potager ; qu'en refusant de faire droit à la demande d'élargissement de la servitude pour permettre cet accès, la Cour d'appel a violé l'article 682 du code civil ;
2°- Alors qu'en statuant comme elle l'a fait sans même répondre aux conclusions de Mme Y... qui faisait valoir que sa parcelle agricole cultivée à titre professionnel est d'une superficie non négligeable de 5,09 ares et que le chemin de 1,50 m qui ne permet que l'accès d'une simple brouette n'est pas suffisant pour sortir les récoltes et épandre le fumier et que ce passage réduit lui impose de cultiver son terrain sans pouvoir bénéficier de l'utilisation d'une camionnette notamment pour transporter ses récoltes ni d'un engin agricole permettant l'épandage, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°-Alors que le juge ne peut accueillir ou rejeter les prétentions des parties sans examiner les éléments de preuve versés aux débats à l'appui de leurs prétentions ; qu'en se bornant à énoncer que comme l'a déjà relevé le tribunal, les témoignages sont imprécis quant à la période durant laquelle le passage ici en litige se serait exercé sur une largeur de plus de 2 mètres (mais non précisément 4 mètres comme réclamé par l'appelante) et quant aux modalités d'exercice de ce droit de passage et d'exploitation de la parcelle de Marie-Thérèse Y... avec cette conséquence que ces documents ne suffisent pas à faire la preuve d'un exercice plus que trentenaire d'un droit de passage sur une largeur excédant la largeur d'1,50 m mentionnée dans l'acte d'acquisition de la parcelle de Michel Z..., sans examiner les attestations établies postérieurement au jugement, versées aux débats, précisant que la parcelle de Mme Y... est exploitée depuis plus de trente ans avec un tracteur, indispensable notamment pour transporter le fumier et qui sont de nature à démontrer que l'utilisation d'un tracteur constitue bien en l'espèce un usage normal de l'exploitation agricole de Mme Y... et l'usage trentenaire par Mme Y... d'une largeur permettant le passage d'un tracteur, la Cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à 3.153,59 € la condamnation de M. Z... envers Mme Y... à titre de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter du 2 janvier 2008 ;
Aux motifs que de l'examen des pièces fournies par Marie-Thérèse X... épouse Y... il résulte qu'elle ne verse toujours pas aux débats les documents pouvant justifier des revenus tirés par elle de la vente des légumes qu'elle cultiverait sur sa parcelle et pouvant par suite permettre d'évaluer au montant qu'elle met en compte la perte d'exploitation découlant de l'impossibilité de l'exploiter normalement, quand bien même le maire de Thionville a pu attester que cette personne avait un stand sur le marché pour écouler sa marchandise, compte tenu de ce que cette attestation n'apporte aucune précision quant à la nature des marchandises vendues dans ces conditions ; c'est pourquoi et alors qu'il ne peut être discuté que Marie-Thérèse Y... a été privée de la jouissance de son terrain en raison du refus de Michel Z... de la laisser exercer un droit de passage sur son propre fonds au cours de l'année 2006, il convient de confirmer le jugement dont appel en ce que le tribunal de grande instance de Thionville a évalué à la somme forfaitaire de 1200 euros l'indemnité réparant la privation de jouissance faisant suite à l'acquisition des parcelles [...] et [...]. Le jugement doit également être confirmé en ses dispositions ayant alloué à Mme Y... à titre de dommages et intérêts les sommes correspondant au coût des procès-verbaux de constat, aux honoraires du géomètre et aux travaux de jardinage réalisés par une entreprise pour remettre en état sa parcelle demeurée inexploitée à la suite de l'obstruction de son voisin au libre accès de son bien ;
Alors que la réparation du préjudice soumis à réparation doit correspondre à ce dernier et ne saurait être appréciée de manière forfaitaire ; qu'en évaluant le préjudice résultant de la privation de la jouissance de sa parcelle par Mme Y..., dont elle admet l'existence, à une somme forfaitaire de 1200 euros, la Cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ensemble le principe de réparation intégrale du préjudice.