CIV.3
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 12 avril 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10221 F
Pourvoi n° C 17-19.275
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Simon, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 29 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 2), dans le litige l'opposant au syndicat des copropriétaires du [...] , représenté par son syndic en exercice, la société André Griffaton, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 mars 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. X..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat de la société Simon, de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat du syndicat des copropriétaires du [...] ;
Sur le rapport de M. X..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Simon aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Simon ; la condamne à payer au syndicat des copropriétaires du [...] la somme de 3 500 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour la société Simon.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande reconventionnelle formulée par la SCI Simon tendant à voir le syndicat des copropriétaires condamné à lui payer à titre de dommages intérêts les sommes, indûment appelées au prorata de ses tantièmes de copropriété, de 2 798,18 euros au titre de travaux de toiture, 1 500 euros au titre de travaux dans les escaliers et de 3 000 euros au titre de l'insuffisance du prix de cession des combles et d'avoir rejeté la demande de compensation formulée par la SCI Simon avec les sommes mises à sa charge au titre des charges de copropriété ;
AUX MOTIFS QUE « Sur la demande du syndicat en paiement des charges ;
qu'aux termes de l'article 10 de la loi du 10 juillet 1965, les copropriétaires sont tenus de participer aux charges entraînées par les services collectifs et les éléments d'équipements communs en fonction de l'utilité que ces services et éléments présentent à l'égard de chaque lot, ils sont tenus de participer aux charges relatives à la conservation, à l'entretien et à l'administration des parties communes proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, l'approbation des comptes du syndic par l'assemblée générale rend certaine, liquide et exigible la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges, les provisions pour charges sont exigibles le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour fixé par l'assemblée générale et les sommes afférentes aux dépenses pour travaux sont exigibles selon les modalités votées en assemblée générale ;
que selon l'article 14-1 de la même loi, pour faire face aux dépenses courantes de maintenance, de fonctionnement et d'administration des parties communes et des équipements communs de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires vote, chaque année, un budget prévisionnel et les copropriétaires paient au syndicat des provisions égales au quart du budget voté sauf modalités différentes adoptées par l'assemblée générale ; cette provision est exigible le premier jour de chaque trimestre ou le premier jour de la période fixée par l'assemblée générale ;
qu'en vertu des dispositions conjuguées des articles 1353 du code civil et 9 du code de procédure civile, il appartient au syndicat des copropriétaires de prouver que le copropriétaire est redevable de la somme réclamée dans sa totalité ;
que le syndicat des copropriétaires produit au soutien de sa demande notamment :
- la matrice cadastrale,
- les procès-verbaux des assemblées générales des 1er avril 2003, 31 janvier 2007, 6 février 2008, 20 mars 2009, 10 mars 2010, 7 mars 2011, 29 mars 2012, 21 février 2013, 4 février 2004, 24 avril 2014, 16 avril 2015, 23 avril 2015, 22 octobre 2015, 7 mars 2016 au cours desquelles l'assemblée générale valide notamment les comptes de l'exercice précédent et approuve le budget prévisionnel de l'exercice suivant,
- les décomptes,
- les appels de charges ;
que pour contester le paiement des charges sollicitées par le syndicat des copropriétaires, la SCI Simon invoque l'abus de droit du syndicat des copropriétaires, considérant que l'abus de droit ne remet pas en cause le défaut d'action en nullité des assemblée générales ; elle considère que certains appels à cotisation sont abusifs comme étant fondés sur des résolutions constituant un abus de droit ;
que toutefois, il est de principe absolu en matière de copropriété que les procès-verbaux des assemblées générales de copropriété non contestés donnent un titre au syndicat des copropriétaires pour solliciter le paiement de charges sur la base de ces résolutions ; ainsi, celles-ci pouvant être contestées selon les règles posées par l'article 42 de la loi précitée, notamment sur le fondement de l'abus de certains copropriétaires dans le vote des résolutions d'assemblée générale, une fois passé le délai d'action en nullité, le titre ne peut plus être remis en cause et l'abus de droit ne peut plus être opposé au syndicat des copropriétaires, étant précisé que la SCI Simon a été valablement convoquée aux assemblées générales dont il est question ;
que dans ces conditions, la vente des combles autorisée par l'assemblée générale, non contestée, du 7 mars 2011, moyennant une somme de 5.000 €, et la vente du lot 96 pour un euro symbolique ne peut être invoquée par la SCI Simon pour justifier un abus de droit et caractériser un préjudice correspondant aux charges payées à ce titre ;
que de même, l'autorisation des travaux de toiture donnée par cette assemblée générale, non contestée, du 7 mars 2011, et consistant notamment en la mise en place de Velux, ayant emprise sur les parties communes ne peut là encore être invoquée par la SCI Simon comme constituant un abus de droit, obtenir réparation d'un préjudice pour avoir payé les charges appelées sur ce poste ;
que là encore, la délibération, non contestée, de l'assemblée générale du 29 mars 2012 qui consiste à mettre à la charge de la copropriété une somme de 13.670,01 € qui correspond aux sommes qui auraient été avancées par les copropriétaires Barthe (lesquels ont acquis des combles des consorts Y...) pour réaliser en urgence des travaux de la couverture du bâtiment C ne peut être invoquée par la SCI Simon comme constituant un abus de droit et caractériser un préjudice correspondant aux charges payées à ce titre ;
qu'en outre, les délibérations des assemblées générales, non contestées, du 6 février 2008 et 20 mars 2009 validant des appels de charges pour des travaux dans l'escalier C ne peuvent plus être remises en cause dans leur principe par la SCI Simon pour se faire rembourser les charges afférentes à ces résolutions ;
que dans ces conditions, la SCI Simon ne peut solliciter à titre reconventionnel la condamnation du syndicat des copropriétaires à titre de dommages et intérêts à lui créditer les charges versées au titre des résolutions litigieuses » ;
ALORS QUE les actions personnelles nées de l'application de la loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat se prescrivent par un délai de dix ans ; que l'action en restitution de charges indûment payées, qui n'a pas pour objet de contester les décisions d'assemblée générale, est soumise à la prescription qui régit les actions personnelles ou mobilières ; qu'en rejetant la demande reconventionnelle formée par la SCI Simon, en indemnisation du préjudice causé par le paiement de charges indûment appelées au terme d'abus de droits commis par le syndicat des copropriétaires, en retenant que ces charges avaient été appelées en conséquence d'assemblées générales qui n'avaient pas été contestées dans le délai d'action en nullité de ces assemblées prévu à l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965, la Cour d'appel a statué en violation de ce texte.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la SCI Simon tendant à voir ordonner à la copropriété la production des articles du compte courant entre la SCI Simon et le syndicat des copropriétaires, notamment à compter du versement de la somme de 18 585,99 euros, et à voir dire qu'à défaut de production, la SCI Simon est bien fondée à agir en répétition de l'indu à l'encontre du syndicat des copropriétaires à hauteur de cette somme et d'avoir rejeté la demande de compensation formulée par la SCI Simon avec les sommes mises à sa charge au titre des charges de copropriété ;
AUX MOTIFS QUE « s'agissant de la somme de 18 585,99 € [versée] par le notaire au syndic le 10 juin 1997, qui aurait été versée dans le cadre de la vente de l'appartement, il ressort de l'analyse des documents produits (lettre du notaire et extrait de l'acte de vente) que le montant versé correspond à la somme due au syndicat des copropriétaires dans le cadre de la vente immobilière ; qu'il convient tout d'abord de relever que la SCI Simon ne peut donc valablement invoquer cette créance à son bénéfice, cette demande étant formulée pour la première fois le 21 octobre 2015 ; que cette demande est prescrite, le délai pour agir étant de 10 ans en l'espèce à compter du fait générateur, à savoir le versement de la somme ;
qu'au surplus, il doit être rappelé que la charge de la preuve pèse sur celui qui invoque une obligation à l'égard d'autrui ; qu'en l'espèce il appartient à la SCI Simon de démontrer que cette somme est due par le syndicat des copropriétaires ; que les seuls documents produits ne démontrent aucunement la réalité d'une créance, ni qu'elle doit apparaître sur un compte particulier » ;
1°/ ALORS QUE les actions personnelles nées de l'application de la loi fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis entre des copropriétaires ou entre un copropriétaire et le syndicat se prescrivent par un délai de dix ans ; qu'en raison de l'existence d'un compte courant entre chaque copropriétaire et le syndicat des copropriétaires, le point de départ de l'action en restitution des sommes dont un copropriétaire est créancier est la clôture de son compte courant ; qu'en retenant que la SCI Simon ne pourrait invoquer une créance issue du versement d'une somme de 18 585,99 € par le notaire entre les mains du syndic le 10 juin 1997 car le délai pour agir aurait commencé à courir au jour du versement de cette somme, sans rechercher, comme elle y était invitée par les écritures de la SCI Simon, si cette somme n'avait pas été versée en compte courant, de sorte que la demande de cette dernière ne pouvait être déclarée prescrite tant que ce compte n'était pas clôturé, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965 ;
2°/ ALORS QU'une cour d'appel qui décide qu'une demande dont elle est saisie est irrecevable, excède ses pouvoirs en statuant ensuite au fond de ce chef ; qu'en examinant au fond la demande de la SCI Simon après l'avoir déclaré prescrite, la Cour d'appel a excédé ses pouvoirs, et violé l'article 122 du Code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la SCI Simon à payer au syndicat des copropriétaires du [...] la somme de 3 000 € à titre de dommages intérêts ;
AUX MOTIFS QUE « la SCI Simon s'abstient de payer régulièrement les charges de copropriété ; que les manquements systématiques et répétés de la SCI Simon à son obligation essentielle à l'égard du syndicat des copropriétaires de régler les charges de copropriété sont constitutifs d'une faute qui cause à la collectivité des copropriétaires, privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l'entretien de l'immeuble, un préjudice financier, direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires ; que compte tenu de l'ancienneté de la dette et de l'absence de règlements depuis plusieurs années, il y a lieu de fixer le préjudice subi par le syndicat des copropriétaires à la somme de 3.000 € ; que le jugement doit donc être réformé en ce qu'il a condamné la SCI Simon à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 500 € de dommages-intérêts ; qu'il y a lieu de condamner la SCI Simon à verser au syndicat des copropriétaires la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts » ;
ALORS QUE le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ; qu'en accueillant la demande de dommages intérêts formée par le syndicat des copropriétaires en se bornant à retenir que la SCI Simon se serait abstenue depuis plusieurs années de payer régulièrement les charges de la copropriété, que ces manquements systématiques seraient constitutifs d'une faute et que cette faute causerait à la collectivité des copropriétaires « privée de sommes importantes nécessaires à la gestion et à l'entretien de l'immeuble, un préjudice financier direct et certain, distinct de celui compensé par les intérêts moratoires », sans caractériser la mauvaise foi de la SCI Simon et l'existence pour le syndicat d'un préjudice indépendant de celui résultant du retard dans l'exécution de l'obligation, la Cour d'appel a violé l'article 1153, aliéna 4, du Code civil, devenu l'article 1231-6 du même Code.