CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 11 avril 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10257 F
Pourvoi n° X 17-17.545
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Marie-Claude X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 2 mars 2017 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 4), dans le litige l'opposant à M. Z... Y..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 mars 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme Bozzi, conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme X..., de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de Mme Bozzi, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir prononcé le divorce entre M. Z... Y... et Mme Marie-Claude X... pour altération définitive du lien conjugal et d'Avoir ordonné la publication du dispositif du jugement en marge de l'acte de mariage du 30 mai 1969 et des actes de naissance de chacun des époux;
Aux motifs que, sur la cause du divorce, Mme X... conclut à l'infirmation du jugement et demande de voir prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. Y... lequel a quitté lâchement le domicile conjugal le 27 juillet 2006 après trente-neuf ans de mariage ce qui constitue selon elle une violation grave des obligations du mariage, sachant qu'elle tient à préciser que M. Y... dans ses écritures n'a cessé par la suite de la harceler et de tenir des propos désobligeants à son égard ; que selon les dispositions de l'article 242 du code civil, il appartient à Mme X... de prouver les faits imputables à son époux qui constituent une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage et rendent intolérables le maintien de la vie commune ; que la Cour relève que Mme X... n'établit pas la preuve de la matérialité du départ du domicile conjugal de M. Y... et surtout les conditions dans lesquelles il est intervenu ; qu'elle ne verse aucune pièce à cet effet et notamment elle ne produit pas le mot que M. Y... lui aurait laissé à son adresse, évoqué dans ses conclusions ; que dès lors, la Cour n'est pas en mesure d'apprécier si le départ du domicile conjugal de M. Y... est un fait suffisant qui constitue à lui seul une violation grave des devoirs et obligations du mariage qui lui serait imputable au regard des dispositions de l'article 242 du code civil ; que par ailleurs, les faits d'harcèlement et les propos injurieux à son égard qui seraient tenus par M. Y... dans ses écritures lesquelles ont été déclarés irrecevables sont très largement postérieurs à la séparation du couple et à la date de l'ordonnance de non-conciliation et ne peuvent caractériser des faits rendant intolérable le maintien de la vie commune laquelle a cessé depuis plusieurs années ; qu'en conséquence, c'est à juste titre que le premier juge qui n'a pas retenu l'existence de faits constitutifs d'une violation grave ou renouvelée des obligations du mariage imputable à M. Y... a prononcé le divorce pour altération du lien conjugal en application de l'article 237 du code civil, un délai de plus de deux ans s'étant écoulé entre la cessation de communauté de vie entre les époux et l'assignation en divorce ; que le jugement est confirmé sur ce point ;
1°) Alors qu'en relevant, pour refuser de prononcer le divorce des époux Y... aux torts du mari, que Mme Y... n'établissait pas la matérialité du départ de M. Y... le 27 juillet 2006, quand ce dernier reconnaissait avoir quitté le domicile conjugal à cette date, la cour, qui a dénaturé les termes du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile ;
2°) Alors que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'en considérant que Mme Y... n'établissait pas la matérialité du départ de M. Y... le 27 juillet 2006, tout en retenant, pour dire que les conditions de la rupture de la vie commune au sens de l'article 237 du code civil étaient caractérisées, que plus de deux années s'étaient écoulées depuis cette date, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir limité la condamnation à paiement de M. Y... au titre de la prestation compensatoire à une rente viagère de 2 500 € par mois ;
Aux motifs que, sur la prestation compensatoire, le divorce met fin au devoir de secours entre époux mais l'un des conjoints peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation, qui a un caractère forfaitaire, est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; que la prestation compensatoire n'est pas destinée à égaliser les fortunes, ni à corriger les conséquences du régime matrimonial adopté par les conjoints, elle doit seulement permettre d'éviter que l'un des époux soit plus atteint que l'autre par le divorce ; qu'ainsi, dans la détermination des besoins et des ressources, le juge a notamment égard en application de l'article 271 du code civil, à la durée du mariage, l'âge et l'état de santé des époux, leur qualification et leur situation professionnelles, aux conséquences des choix professionnels fait par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faut encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, au patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du/ régime matrimonial, à leurs droits existants et prévisibles, à leur situation respective en matière de pension de retraite ; que cette prestation prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge qui décide des modalités selon lesquelles elle s'exécutera : versement d'une somme en argent, attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit ; que Mme X... conclut à l'infirmation du jugement qui a fixé le versement de la prestation compensatoire sous forme de rente viagère de 2100 € par mois ; qu'elle demande à la Cour comme devant le premier juge de condamner M. Y... à lui verser à titre de prestation compensatoire, sous la forme d'une rente viagère mensuelle de 3.000 € indexée, outre un capital de 200.000 € dont l'usufruit de la part de l'époux sur le domicile conjugal évalué à la somme de 80.000 € ; qu'il convient de rappeler que la prestation compensatoire en application de l'article 274 du code civil doit s'exécuter -par le versement d'une somme d'argent pouvant être assorti de garanties -par l'attribution de biens en propriété ou d'un droit temporaire ou viager d'usage, d'habitation ou d'usufruit ; que la disparité des situations entre les époux est établie, Mme X... n'ayant pas travaillé après son mariage, ayant été dépendante sa vie durant de son époux, s'agissant d'un choix fait par le couple pendant leur vie commune ; qu'il convient dès lors de condamner M. Y... au versement d'une prestation compensatoire destinée à compenser autant qu'il est possible la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives des époux ; que l'article 276 du code civil dispose qu' 'à titre exceptionnel, le juge peut par décision spécialement motivée lorsque l'âge ou l'état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins de fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ; qu'il prend en considération les éléments d'appréciation prévus à l'article 271 du code civil ; que le montant de la rente peut être minoré lorsque les circonstances l'imposent par l'attribution d'une fraction en capital parmi les formes prévues à l'article 274 du code civil ; que si la loi n'interdit pas qu'une prestation compensatoire soit allouée sous la double forme d'une rente viagère et d'un capital versé dans les formes prévues à l'article 274 du code civil, il appartient à Mme X... de motiver sa demande ; qu'elle fait état de ce qu'elle n'a jamais travaillé et n'a aucun revenu, étant âgée de 68 ans et étant mariée depuis 48 ans ; qu'il ressort de l'avis d'imposition versé qu'elle perçoit des retraites d'un montant annuel de 2.006 € ; que sa situation, comme elle le soutient, ne lui permet pas, dès lors, de subvenir à ses besoins et il convient en conséquence de fixer la prestation compensatoire sous forme d'une rente viagère ; qu'elle déclare que ses charges courantes s'élèvent à 1000 € par mois sans pour autant les détailler dans ses conclusions ; qu'elle vit dans l'ancien domicile conjugal dont elle sollicite l'attribution en usufruit et un capital ; que le couple est propriétaire de deux immeubles l'un situé à [...] occupé par Mme X..., et l'autre situé à [...] ; qu'il ressort qu'à la date du jugement entrepris M. Y... percevait des revenus mensuels de 11.412 € et devait s'acquitter d'un loyer d'un montant de 1.158 € par mois, que sa retraite s'élèverait à 6.005 € par mois ; qu'eu égard à ces éléments, et au fait que Mme X... ne peut subvenir à ses besoins il convient de fixer à 2.500 € par mois le montant de la rente viagère à la charge de M. Y... ; qu'en revanche, les autres demandes de Mme X... en complément du versement de la rente viagère sous forme de capital en part d'usufruit sur l'immeuble de [...] et en numéraire sont rejetées faute pour l'appelante d'expliciter quelles sont les circonstances qui lui imposeraient de solliciter un montant de rente viagère minoré par l'attribution d'une fraction en capital sous les formes prévues à l'article 274 du code civil ;
1°) Alors que seul le créancier d'une prestation compensatoire peut demander l'allocation de la prestation compensatoire sous la forme exclusive d'une rente viagère ; qu'en l'espèce, Mme Y... avait demandé la condamnation de M. Y... à paiement d'une prestation compensatoire sous la forme mixte d'un capital et d'une rente viagère ; qu'en condamnant ce dernier à paiement d'une prestation sous la forme unique d'une rente viagère, la cour d'appel a violé les articles 270, 274 et 276 du code civil ;
2°) Alors qu'en ne justifiant pas des circonstances exceptionnelles qui auraient justifié qu'aucun capital ne soit alloué à Mme Y..., la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 270, 274 et 276 du code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Mme X... épouse Y... de sa demande d'usage du nom de son conjoint ;
Aux motifs propres que, sur l'usage du nom, l'article 264 du code civil dispose que « à la suite du divorce, chacun des époux perd l'usage du nom de son conjoint. L'un des époux peut néanmoins conserver l'usage du nom de l'autre soit avec l'accord de celui-ci, soit avec l'autorisation du juge, s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants » ; que Mme X... invoque la durée du mariage de quarante-quatre années, sa foi et son engagement dans l'église pour justifier de l'intérêt particulier de sa demande ; que la durée du mariage, sachant que la vie commune a cessé depuis plus de dix ans et l'attachement à des convictions religieuses ne caractérisent pas un intérêt particulier au sens de l'article 264 du code civil qui justifierait de permettre à Mme X... de conserver l'usage de son nom d'épouse ; que le jugement est confirmé sur ce point, qui a rejeté la demande de Mme X... ;
Et aux motifs adoptés que, dans la mesure où M. Y... s'oppose à cette demande et que Mme X... ne justifie pas d'un intérêt particulier au sens de l'article 264 du code civil, la demande de ce chef sera rejetée ;
Alors que l'un des époux peut, à la suite du divorce, conserver le nom de l'autre s'il justifie d'un intérêt particulier pour lui ou pour les enfants ; qu'en affirmant de façon générale que ni la durée du mariage ni l'attachement à des convictions religieuses ne caractérisaient un intérêt particulier à conserver l'usage du nom d'un époux sans examiner si en l'espèce, les 49 années de mariage et les croyance et engagement chrétiens de Mme Y... ne révélaient pas un intérêt personnel particulier à conserver le nom de son ancien époux, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 264 alinéa 2 du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir débouté Mme X... épouse Y... de sa demande de dommages-intérêts fondée sur l'article 266 du code civil ;
Aux motifs que, il convient de confirmer le jugement entrepris qui a débouté Mme X... de sa demande de dommages-intérêts fondée sur l'article 266 du code civil dont les conditions d'application ne sont pas réunies ;
Alors que, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif par lequel la cour d'appel a décidé que le divorce des époux serait prononcé pour altération de leur vie commune entrainera, par voie de conséquence, celle du chef de dispositif attaqué par le quatrième moyen dès lors que c'est en considération de ce que le divorce était prononcé sur ce terrain que la cour, constatant que Mme Y... avait formé une demande reconventionnelle en divorce pour faute, a considéré que les conditions d'application de l'article 266 du code civil n'étaient pas réunies.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir débouté Mme X... ép. Y... de sa demande de dommages-intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil ;
Aux motifs que Mme X... forme également en appel une demande en dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1382 du code civil sans pour autant établir la faute et le préjudice en découlant ; que la demande sera en conséquence rejetée ;
Alors que, les juges du fond sont tenus de répondre aux conclusions des parties ; qu'en affirmant péremptoirement que Mme Y... n'établit pas la faute et le préjudice découlant d'une méconnaissance de l'article 1382 du code civil sans répondre à ses écritures (p.8) faisant état de la rupture brutale du lien conjugal après 39 années de vie commune, ce qui, compte tenu de son engagement dans l'Eglise et sa foi, était gravement préjudiciable, la cour a violé l'article 455 du code de procédure civile.