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11/04/2018 | FRANCE | N°16-26556

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 avril 2018, 16-26556


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 28 septembre 2016), que M. Y... a été engagé le 26 février 1990 en qualité de gérant et de conducteur de véhicule sanitaire par la société Ambulances des Deux Sarre, aux droits de laquelle vient la société Le Groupement d'Ariane, qui a bénéficié d'une procédure de redressement judiciaire le 5 septembre 2012, puis d'une liquidation amiable le 31 décembre 2012 ; qu'il a été licencié pour motif économique le 19 octobre 2012 ;

Sur le premier moyen du pourvoi

principal :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de juger que M. Y... étai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 28 septembre 2016), que M. Y... a été engagé le 26 février 1990 en qualité de gérant et de conducteur de véhicule sanitaire par la société Ambulances des Deux Sarre, aux droits de laquelle vient la société Le Groupement d'Ariane, qui a bénéficié d'une procédure de redressement judiciaire le 5 septembre 2012, puis d'une liquidation amiable le 31 décembre 2012 ; qu'il a été licencié pour motif économique le 19 octobre 2012 ;

Sur le premier moyen du pourvoi principal :

Attendu que la société fait grief à l'arrêt de juger que M. Y... était titulaire d'un contrat de travail depuis le 26 février 1990 et de la condamner à lui payer différentes indemnités, alors, selon le moyen :

1°/ qu'un mandat social peut se cumuler avec un contrat de travail lorsque le mandataire exerce des fonctions techniques distinctes de celles de son mandat dans un lien de subordination juridique définit comme l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; que pour dire que M. Y... gérant et associé égalitaire de la société Ambulances des Deux Sarre pouvait se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail depuis le 26 février 1990, la cour d'appel a relevé que l'intéressé transportait régulièrement des patients en qualité d'ambulancier et qu'il n'était pas démontré que ce dernier prenait seul les décisions concernant la société Ambulances des Deux Sarre et les décisions relatives à la signature de contrats de travail, dont le sien, en qualité d'employeur de l'entreprise ; qu'en statuant par ces motifs impropres à caractériser l'existence de fonctions techniques distinctes du mandat social exercées dans un lien de subordination, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;

2°/ que la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a retenu l'existence d'un contrat de travail depuis le 26 février 1990 entraînera, par voie de conséquence, l'annulation des chefs de dispositif de l'arrêt qui ont condamné la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... les sommes de 26 160 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement, 5 917,75 euros bruts à titre de rappel de salaire et ordonné la remise de documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte en application des dispositions des articles 624 et 625 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté l'existence d'un contrat de travail écrit ainsi que l'exercice de fonctions techniques par l'intéressé qui percevait un salaire et retenu que la société n'établissait pas l'absence de lien de subordination, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le pourvoi incident éventuel du salarié :

Attendu que le rejet du pourvoi principal de la société rend sans objet le pourvoi incident éventuel du salarié ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Le Groupement d'Ariane aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits au pourvoi principal par Me C... , avocat aux Conseils, pour la société Le Groupement d'Ariane

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR jugé que M. Y... était lié à la société Ambulances des deux Sarre par un contrat de travail depuis le 26 février 1990 et condamné la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... les sommes de 26 160 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement, 5 917, 75 euros à titre de rappel de salaire et ordonné la remise de documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte;

AUX MOTIFS QU' «en application des dispositions des articles L.1221-1 du code du travail et 1315 du code civil, en présence d'un contrat de travail apparent, il incombe à celui qui en invoque le caractère fictif d'en rapporter la preuve. En l'espèce, l'employeur invoque l'impossibilité pour le gérant égalitaire de cumuler un contrat de travail avec son mandat social. Or, il est constant que, dans le cadre d'une SARL, ce cumul est possible, à condition que le contrat de travail soit effectif, c'est à dire qu'il se traduit par l'exercice de fonctions techniques, nettement différenciées de celles exercées dans le cadre de son mandat social, par la perception d'une rémunération distincte et par l'existence d'un véritable état de subordination. M. Y..., gérant égalitaire de la société reprise après en avoir été dans un premier temps seulement minoritaire, et ce jusqu'au 28 mai 2011, établit par la production de trois attestations, celles de MM. Guy Z..., Joël A... et de Mme Mariette B... épouse A..., qu'il transportait régulièrement des patients en qualité d'ambulancier, conformément à la qualification du contrat de travail litigieux, ce en quoi il démontre avoir exercé des fonctions techniques nettement différenciées de celle qu'il exerçait dans le cadre de son mandat social. Il a signé un contrat de travail le 26 février 1990 et a régulièrement perçu un salaire, fixé au moment de la reprise au montant de 4000 €. L'employeur, qui ne peut renverser la charge de la preuve en exigeant du salarié qu'il établisse l'existence d'un lien de subordination le liant à la société reprise, ne verse aux débats aucun élément permettant de contredire les assertions de M. Y... lorsque celui-ci affirme qu'il ne prenait pas seul les décisions concernant la société mais au contraire avec ses trois autres associés. S'il n'est pas contesté que M. Y... a signé certains contrats de travail pour le compte de l'employeur, dont le sien ainsi que celui de son épouse, ni qu'il s'est porté fort pour ses associés lors des négociations précédant la cession de la société, il n'est pas démontré pour autant qu'il aurait pris seul les décisions relatives à la formation de ces divers contrats. Le jugement sera infirmé de ce chef. M. Y... verse notamment aux débats des factures de transports en ambulance qui ont été signés par son épouse pour le compte de l'employeur. Il importe peu que M. Y... ait perçu la somme de 122 500 € du produit de la cession dans la mesure où cette somme, qui représente comme l'observe l'employeur 50 % du prix de vente de la société, n'est que la juste rétribution des parts de l'associé égalitaire. En conséquence, il convient de rejeter l'exception de nullité du contrat de travail signé le 26 février 1990 soulevée par l'employeur. Le jugement sera infirmé de ce chef. Sur les conséquences du transfert du contrat de travail. Sur le rappel des salaires : par application des articles L.1224-1 et L.1224-2 du code du travail, l'employeur faute d'être parvenu à faire signer le contrat de travail qui prévoyait une baisse de sa rémunération, se devait d'assurer à celui-ci le maintien du salaire que celui-ci percevait avant la reprise. En l'espèce, M. Y..., qui invoque une rémunération brute d'un montant de 4000 € qui aurait dû lui être maintenue, verse aux débats les bulletins de salaire du 1er janvier au 19 octobre 2012 qui mentionnent une rémunération brute de 3 653,58 €. M. Y... ne détaille pas l'évaluation qui est le sienne à ce titre et qui le conduit à solliciter un montant brut de 7 830 €. La cour estime disposer des éléments pour fonder sa créance de rappel de salaire, préavis de 3 mois inclus, au montant brut de 4 369,36 € (4 000 - 3 653,58) * 12 + (4 000 - 3 653,58) /31*19). L'employeur sera en conséquence condamné au paiement de cette somme, avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2013, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation. - Sur les congés payés : L'article L.3174-4 du code du travail dispose que : "En cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles". M. Y... soutient avoir travaillé pendant la période du 1er au 12 octobre 2012, alors que l'employeur lui a imputé 10 jours de congés payés pour cette même période, ainsi que mentionné sur le bulletin de salaire correspondant. Ce n'est pas au salarié de rapporter la preuve qu'il a travaillé pendant cette période, mais à l'employeur d'établir que M. Y... était alors en congés annuels, que ce soit à sa demande ou qu'il y ait été contraint. En conséquence, l'employeur sera condamné à payer au salarié à ce titre la somme brute de 1 548,39 € (4 000 / 31* 12), avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2013. Sur l'indemnité de licenciement : Aux termes des articles L.1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, le salarié titulaire d'un contrat à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte une année d'ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement calculée en fonction de la rémunération brute dont il bénéficiait avant la rupture du contrat de travail et qui ne peut être inférieure à un cinquième du mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté. En l'espèce, M. Y... peut se prévaloir d'une ancienneté de 21 années, 6 mois et 18 jours (du 2 avril 1990 au 19 octobre 2012). L'employeur ne critique pas l'évaluation de sa créance faite à ce titre par le salarié. En conséquence, il convient de condamner l'employeur à verser au salarié la somme de 26 160 € nets à ce titre, conformément à la demande du salarié. - Sur la remise des documents : Il convient de condamner l'employeur à remettre au salarié le bulletin de paie 2012, l'attestation employeur, le certificat de travail ainsi que l'attestation de solde de tout compte modifiés en application du présent arrêt, sous astreinte de 10 € par document et par jour de retard, à compter du 30ème jour suivant la notification de la présente décision et pendant 100 jours. Le jugement sera infirmé de ces quatre chefs».

ALORS QU' un mandat social peut se cumuler avec un contrat de travail lorsque le mandataire exerce des fonctions techniques distinctes de celles de son mandat dans un lien de subordination juridique définit comme l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné ; que l'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs ; que pour dire que M. Y... gérant et associé égalitaire de la société Ambulances des deux Sarre pouvait se prévaloir de l'existence d'un contrat de travail depuis le 26 février 1990, la cour d'appel a relevé que l'intéressé transportait régulièrement des patients en qualité d'ambulancier et qu'il n'était pas démontré que ce dernier prenait seul les décisions concernant la société Ambulances des deux Sarre et les décisions relatives à la signature de contrats de travail, dont le sien, en qualité d'employeur de l'entreprise ; qu'en statuant par ces motifs impropres à caractériser l'existence de fonctions techniques distinctes du mandat social exercées dans un lien de subordination, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail.

ET ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de dispositif de l'arrêt qui a retenu l'existence d'un contrat de travail depuis le 26 février 1990 entraînera, par voie de conséquence, l'annulation des chefs de dispositif de l'arrêt qui ont condamné la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... les sommes de 26 160 euros nets à titre d'indemnité légale de licenciement, 5 917,75 euros bruts à titre de rappel de salaire et ordonné la remise de documents de fin de contrat rectifiés sous astreinte en application des dispositions des articles 624 et 625 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen reproche à l'arrêt attaqué ;

D'AVOIR condamné la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... les sommes de 5 917,75 euros à titre de rappels de salaire avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2013 pour la période du 1er janvier au 31 octobre 2012 et à l'AG2R Mondiale des cotisations de retraite ;

AUX MOTIFS QUE « en l'espèce, M. Y..., qui invoque une rémunération brute d'un montant de 4 000 € qui aurait dû lui être maintenue, verse aux débats les bulletins de salaire du 1er janvier au 19 octobre 2012 qui mentionnent une rémunération brute de 3 653,58 €. M. Y... ne détaille pas l'évaluation qui est le sienne à ce titre et qui le conduit à solliciter un montant brut de 7 830 €. La cour estime disposer des éléments pour fonder sa créance de rappel de salaire, préavis de 3 mois inclus, au montant brut de 4 369,36 € (4 000 - 3 653,58) * 12 + (4 000 - 3 653,58) /31*19). L'employeur sera en conséquence condamné au paiement de cette somme, avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2013, date de la convocation de l'employeur devant le bureau de conciliation. - Sur les congés payés : L'article L. 3174-4 du code du travail dispose que : "en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles". M. Y... soutient avoir travaillé pendant la période du 1er au 12 octobre 2012, alors que l'employeur lui a imputé 10 jours de congés payés pour cette même période, ainsi que mentionné sur le bulletin de salaire correspondant. Ce n'est pas au salarié de rapporter la preuve qu'il a travaillé pendant cette période, mais à l'employeur d'établir que M. Y... était alors en congés annuels, que ce soit à sa demande ou qu'il y ait été contraint. En conséquence, l'employeur sera condamné à payer au salarié à ce titre la somme brute de 1 548,39 € (4 000 / 31* 12), avec intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2013. Sur les cotisations AG2R M. Y... produit à l'appui de sa demande les bulletins de salaire de janvier à octobre 2012, sur lesquels sont mentionnées, pour chaque mois concerné, des retenues au titre de la "RETRAITE - AGG CADRE Tr A" et "Tr B" pour des montants respectifs de 36,37 € et 13,73 €, ainsi qu'un relevé de la société AG2R MONDIALE, adressé au salarié, intitulé "Votre Relevé de Situation au 31/12/2012", et qui mentionne que "le cumul de vos versements effectués au titre de l'année 2012" est de "0,00 EUR" L'employeur ne fournit aucune explication en réponse au salarié. Il convient en conséquence de faire droit à la demande de M. Y... formée à ce titre ».

ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité et que la cour d'appel doit mettre la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle; que pour condamner la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... la somme de 4 369, 36 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 1er janvier au 31 octobre 2012, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'elle estimait disposer des éléments suffisants pour fonder la créance de rappel de salaire, préavis de trois mois inclus à la somme de 4 369,36 euros ; qu'en statuant par ces motifs qui ne permettent pas à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, alors qu'elle constatait que M. Y... produisait des bulletins de salaire mentionnant une rémunération brute de 3 653,58 euros que l'intéressé reconnaissait avoir perçue, la cour d'appel a entaché sa décision d'un vice de motivation et a violé l'article 455 du code de procédure civile.

ALORS, en toute hypothèse, QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité; que pour condamner la société Le Groupement d'Ariane à verser à M. Y... la somme de 1 548,39 euros à titre de rappel congés payés pour la période du 1er octobre au 12 octobre 2012, la cour d'appel s'est bornée à affirmer qu'il appartenait à l'employeur qui produisait des bulletins de salaire mentionnant que pour la période considérée l'intéressé se trouvait en congé, de démontrer que M. Y... était en congé durant cette période et qu'en conséquence, il convenait de faire droit à la demande de l'intéressé de ce chef ; qu'en statuant ainsi, sans préciser si l'intéressé se trouvait effectivement en congé durant la période du 1er au 12 octobre 2012, la cour d'appel qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a entaché sa décision d'un vice de motivation et a violé l'article 455 du code de procédure civile.

Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils pour M. Y...

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré recevable l'exception de nullité du contrat de travail souscrit le 26 février 1990 soulevée par la société Le Groupement d'Ariane ;

AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité de l'exception de nullité du contrat ; Le Groupement d'Ariane conteste la validité du contrat de travail souscrit le 26 février 1990 entre la société Ambulances des deux Sarre et M. Y... ; à ce titre, M. Y... n'est pas fondé à demander application des dispositions des articles 1355 et 1356 du code civil relatifs à l'aveu judiciaire au motif que le contrat dont l'existence est querellée par l'employeur aurait été exécuté préalablement à sa mise en cause, dans la mesure où il n'est pas établi que cette exécution aurait été reconnue dans le cadre d'une instance distincte ; au demeurant, le fait que l'administrateur judiciaire de la société cessionnaire ait notifié son licenciement économique à M. Y... le 19 octobre 2012 dans le cadre de la procédure de redressement dont celle-ci a fait l'objet ne vaut pas reconnaissance par l'employeur de la qualité de salarié pour la période antérieure à la reprise, le solde de tout compte, notamment, ne portant que sur l'année 2012 ; par ailleurs, le principe d'estoppel ne saurait trouver en l'espèce application puisqu'il n'est pas avéré que l'employeur aurait développé dans une instance distincte des arguments contradictoires avec ceux qu'il invoque dans le cadre de la présente ; ensuite, l'exception de nullité est un moyen de défense opposé par le créancier à une action en exécution d'un contrat ; la règle selon laquelle l'exception de nullité est perpétuelle ne s'applique que si l'action en exécution de l'obligation est introduite après l'expiration du délai de prescription ; en l'espèce, le contrat litigieux a été formé le 26 février 1990 et M. Y... a saisi le conseil de prud'hommes le 2 septembre 2013, soit bien après le délai de cinq ans prévu par l'article 1304 du code civil relatif à la prescription de l'action en nullité d'un contrat ; enfin, il n'existe aucune obligation légale pour celui qui se prévaut de la nullité d'un contrat de travail de soulever l'incompétence du juge prud'homal, moyen n'étant qu'une faculté qui lui est offerte ; il résulte de ce qui précède que l'exception de nullité du contrat de travail soulevée par l'employeur est recevable ;

1°) ALORS QUE les juges du fond doivent répondre aux moyens formulés par les parties ; qu'en l'espèce, M. Y... faisait valoir que « le moyen est une seconde fois irrecevable, dès lors que l'exception de nullité ne peut être soulevée à l'encontre d'un contrat qui a déjà fait l'objet d'une exécution, même partielle » (conclusions p. 9) ; qu'en déclarant recevable l'exception de nullité soulevée par l'employeur, sans répondre au chef de conclusions susvisées, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE l'exception de nullité ne peut être invoquée que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté totalement ou en partie ; qu'en l'espèce, M. Y... faisait valoir que « le moyen est une seconde fois irrecevable, dès lors que l'exception de nullité ne peut être soulevée à l'encontre d'un contrat qui a déjà fait l'objet d'une exécution, même partielle » (conclusions p. 9) ; qu'en affirmant, pour déclarer recevable l'exception de nullité soulevée par l'employeur, que la règle selon laquelle l'exception de nullité est perpétuelle ne s'applique que si l'action en exécution de l'obligation litigieuse est introduite après l'expiration du délai de prescription et qu'en l'espèce, le contrat litigieux a été formé le 26 février 1990 et M. Y... a saisi le conseil de prud'hommes le 2 septembre 2013, soit bien après le délai de cinq ans prévu par l'article 1304 du code civil relatif à la prescription de l'action en nullité d'un contrat, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si le contrat litigieux avait été exécuté, même partiellement, ce qui rendait irrecevable l'exception de nullité soulevée à son encontre, la cour d'appel a violé l'adage « quae temporalia ad agendum perpetua sunt ad excipiendum », ensemble l'article 1185 (nouveau) du code civil ;

3°) ET ALORS QUE l'exception de nullité ne peut être invoquée que pour faire échec à la demande d'exécution d'un acte juridique qui n'a pas encore été exécuté totalement ou en partie ; qu'en déclarant recevable l'exception de nullité du contrat de travail souscrit le 26 février 1990 entre la société Ambulances des deux Sarre et M. Y..., au motif inopérant que la règle selon laquelle l'exception de nullité est perpétuelle ne s'applique que si l'action en exécution de l'obligation litigieuse est introduite après l'expiration du délai de prescription et qu'en l'espèce, le contrat litigieux a été formé le 26 février 1990 et M. Y... a saisi le conseil de prud'hommes le 2 septembre 2013, soit bien après le délai de cinq ans prévu par l'article 1304 du code civil relatif à la prescription de l'action en nullité d'un contrat, tout en constatant par ailleurs que M. Y... transportait régulièrement des patients en qualité d'ambulancier, conformément à la qualification de contrat de travail litigieux, qu'il exerçait des fonctions techniques nettement différenciées de son mandat social, qu'il percevait régulièrement un salaire, fixé au moment de la reprise au montant de 4.000 euros et qu'il versait aux débats des factures de transports en ambulance qui ont été signés par son épouse pour le compte de l'employeur, ce dont il s'évinçait que le contrat de travail litigieux avait été exécuté, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation de l'adage « quae temporalia ad agendum perpetua sunt ad excipiendum », ensemble l'article 1185 (nouveau) du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-26556
Date de la décision : 11/04/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Metz, 28 septembre 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 avr. 2018, pourvoi n°16-26556


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.26556
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