SOC.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 avril 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme A..., conseiller doyen faisant fonction de président
Décision n° 10443 F
Pourvoi n° F 17-11.412
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Hélène X..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2016 par la cour d'appel de Nancy (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Spidelor, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 mars 2018, où étaient présentes : Mme A..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme B... , conseiller rapporteur, Mme Capitaine, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme X..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Spidelor ;
Sur le rapport de Mme B... , conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt informatif attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1226-15 du code du travail, d'une indemnité spéciale de licenciement et d'une indemnité compensatrice de préavis et les congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE Helena X... soutient qu'au jour de son licenciement, une procédure de déclaration de maladie professionnelle était en cours, de sorte que l'employeur aurait dû, dans le cadre de la procédure de licenciement, recueillir l'avis des délégués du personnel et lui verser les indemnités légalement fixées au profit des salariés déclarés médicalement inaptes à l'issue d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, majorées au regard de son statut de travailleur handicapé ; que pourtant, pour seul justificatif de cette procédure qu'elle aurait engagée, Helena X... produit aux débats un certificat médical en date du 19 octobre 2012, soit avant l'intervention chirurgicale sur l'épaule droite qu'elle a subie en décembre 2012 visant effectivement qu'il s'agissait d'un certificat médical initial d'accident du travail ou maladie professionnelle ; que toutefois, elle ne produit aucun élément qui permettrait à la cour de s'assurer que la Caisse aurait pris en charge cette pathologie au titre de la législation professionnelle, dont l'employeur aurait pu être informé ; que dès lors, Helena X... revendique vainement l'application des règles légales relatives au licenciement d'un salarié déclaré inapte après un accident du travail ou une maladie professionnelle (articles L 1226-10 et suivants du code du travail) ; que quel que soit la solution apportée au litige quant au bien-fondé du licenciement dont elle a fait l'objet, elle ne pouvait donc prétendre au paiement d'une indemnité spéciale de licenciement, au surplus majorée, compte tenu de sa qualité de travailleur handicapé, qui n'est pas contestée ; que la décision déférée sera donc infirmée de ce chef et la salariée déboutée en ce chef de demande ;
1° ALORS QUE l'employeur qui envisage le licenciement d'un salarié devenu inapte en suite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est tenu de recueillir l'avis des délégués du personnel ; qu'en écartant l'obligation pour l'employeur de recueillir l'avis des délégués du personnel après avoir constaté que la salariée avait été déclarée inapte en suite d'un arrêt de travail visant l'accident du travail ou la maladie professionnelle, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L.1226-10 et L.1226-15 du code du travail ;
2° ET ALORS QUE les dispositions du code du travail sont autonomes par rapport au droit de la sécurité sociale et qu'il appartient aux juges du fond de rechercher eux-mêmes l'existence du lien de causalité entre l'origine professionnelle de l'affection et l'activité du salarié ; qu'en retenant, pour écarter l'application des dispositions applicables au salarié devenu inapte ensuite d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, que la salariée ne produisait « aucun élément qui permettrait à la cour de s'assurer que la Caisse aurait pris en charge cette pathologie au titre de la législation professionnelle », la cour d'appel a violé les articles L.1226-10 et suivants du code du travail, ensemble le principe de l'autonomie du droit du travail par rapport au droit de la sécurité sociale ;
3° ALORS en tout cas QUE la salariée imputait son inaptitude à ses conditions de travail ; qu'en excluant la cause professionnelle de l'inaptitude de la salariée sans se prononcer, ainsi qu'il le lui était demandée, au regard des conditions de travail de cette dernière, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L1226-10 et L.1226-15 du code du travail.
4° ALORS QU'en application des dispositions des articles L.1226-14 et L.1226-15 du code du travail, ensemble l'article 624 du code de procédure civile, la cassation s'étendra à l'intégralité des chefs du dispositif de l'arrêt attaqué ayant débouté la salariée de ses demandes au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de l'indemnité de licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés y afférents.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaireLe moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE lorsque le salarié est déclaré médicalement inapte à son poste de travail, l'employeur se trouve dans l'obligation de le licencier dès lors qu'il ne peut le reclasser, en dépit de loyales recherches de reclassement, tenant compte des préconisations du médecin du travail ; qu'en l'espèce, il est constant qu'Helena X... a été déclarée médicalement inapte à l'issue de 2 visites médicales réalisées par le médecin du travail, espacées de 2 semaines ; que dans le cadre de sa recherche de reclassement, l'employeur produit aux débats le courrier établi par le médecin du travail le 13 décembre 2013 qui, après étude de poste réalisée le 13 décembre 2013 énonce : « pas de poste adapté proposé dans l'atelier presse à injection, poste proposé à l'assemblage : contraintes au niveau des épaules en particulier l'épaule droite lorsque l'opératrice saisit les pièces dans les goulottes, contraintes en termes de préhensions répétées avec extension et flexion répétées des poignets et des doigts, le poste n'est pas adapté. » ; que l'employeur justifie ainsi, tenant compte des préconisations du médecin du travail avoir tenté de reclasser sa salariée dans l'entreprise ; qu'en produisant aux débats son registre du personnel, il justifie qu'aucun autre poste n'était disponible dans l'entreprise ; que dans ces conditions, la SA Spidelor ne pouvait que licencier Helena X..., sans que celle-ci puisse lui faire grief de ne pas avoir exploité les dispositifs d'aides financières existantes, en lien avec son statut de travailleur handicapé ; que la décision déférée sera donc infirmée qui a dit dénué de cause réelle et sérieuse le licenciement de la salariée ; qu'au contraire, Helena X... sera déboutée en sa demande en paiement d'indemnité de préavis, qu'elle n'a pu effectuer, ainsi qu'en sa demande en paiement de dommages-intérêts ;
ALORS QUE l'avis du médecin du travail sur l'aptitude du salarié à occuper un poste de travail s'impose aux parties et qu'il n'appartient pas aux juges du fond de substituer leur appréciation à celle du médecin du travail ; qu'en jugeant la société fondée à licencier la salariée pour inaptitude après avoir pourtant constaté que le médecin du travail avait conclu à son aptitude à son poste sous réserve, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé les articles L.1226-8, L.1226-10 et L.4624-1 du code du travail, ensemble la loi des 16-24 août 1790.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
, subsidiaireLe moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la salariée de ses demandes tendant au paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d'une indemnité compensatrice de préavis, et congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS cités du deuxième moyen ;
1° ALORS QUE l'employeur doit rechercher les possibilités de reclassement du salarié inapte par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de postes ou aménagement du temps de travail au sein de l'entreprise et le cas échéant du groupe auquel elle appartient ; qu'en se bornant à relever qu'aucun poste n'aurait été disponible dans l'entreprise quand cette circonstance ne dispensait pas l'employeur de son obligation d'avoir à rechercher les possibilités d'aménagement du poste de la salariée auquel elle avait été jugée apte après aménagement, la cour d'appel a violé les articles L.1226-2, L.1226-10 et L.1226-15 du code du travail ;
2° ET ALORS QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité ; qu'en affirmant que « l'employeur justifie ainsi, tenant compte des préconisations du médecin du travail avoir tenté de reclasser sa salariée dans l'entreprise » sans préciser les éléments dont elle entendait tirer une telle déduction, la cour d'appel a statué par voie de simple affirmation en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
3° ALORS en toute hypothèse QUE le licenciement du salarié inapte n'a une cause réelle et sérieuse qu'à la condition que soit établie l'impossibilité de reclasser le salarié ; que la recherche de reclassement doit être loyale, complète et sérieuse ; que méconnait cette obligation l'employeur qui, avant même d'avoir pu conclure à l'impossibilité de reclasser le salarié, manifeste son intention de rompre le contrat et de ne rien tenter pour le reclasser ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la suppression de la salariée des listes des employés de l'entreprise établies en vue des élections professionnelles, neuf jours avant son licenciement, ne caractérisait pas l'absence d'efforts de reclassement de l'employeur, la cour d'appel, qui ne s'est pas assurée que la recherche de reclassement avait été loyale, complète et sérieuse, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1226-10 du code du travail et 1134 alors en vigueur du code civil.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour préjudice moral ;
AUX MOTIFS QUE dans le corps de ses écritures, pour justifier du bienfondé de sa demande en paiement de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi, Helena X... évoque le choc qu'elle a reçu en constatant que le 7 janvier 2014, elle ne figurait pas dans la liste des élections professionnelles, en qualité d'électeur ou d'employé éligible ; qu'elle invoque également l'altération de sa santé physique et psychologique compte tenu des « agissements de la SA Spidelor, tant pendant la période contractuelle (harcèlement), que lors du licenciement » ; qu'il résulte de l'application combinée des dispositions de l'article L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail que si aucun salarié ne peut subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, il appartient à ce même salarié d'établir des faits qui, pris en leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement, sur la base desquels il incombera à l'employeur d'établir que les décisions qu'il a prises sont étrangères à toute notion de harcèlement ; qu'en l'espèce, Helena X... évoque pour seul fait son absence de la liste des employés figurant en qualité d'électeur ou de salarié éligible aux élections professionnelles, le 7 janvier 2013 ; que pour avéré qu'il soit, et en l'absence d'autres faits énoncés par la salariée, ce fait unique ne saurait caractériser les agissements répétés de harcèlement énoncés par les dispositions de l'article L.1152-1 du code du travail, précédemment énoncées ; que la décision déférée sera donc confirmée qui a débouté Helena X... en sa demande en paiement de dommages-intérêts ;
ET AUX MOTIFS éventuellement adoptés QUE Mme Hélène X... soutient qu'au regard de l'article 1382, il y a lieu de réparer le caractère vexatoire de son licenciement ; qu'au regard des pièces versées au dossier, Mme Hélène X... ne démontre pas le préjudice moral dont elle demande réparation ; que le conseil de prud'hommes d'Epinal ne pourra que la débouter de ce chef de demande ;
1° ALORS QUE saisis d'une demande tendant à voir reconnaître l'existence d'un harcèlement moral, les juges doivent se prononcer sur l'ensemble des éléments invoqués par le salarié et dire au terme de cet examen si les éléments matériellement établis pris en leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'au titre du harcèlement moral qu'elle dénonçait, la salariée faisait état non seulement de la brutalité de la rupture de son contrat de travail mais encore des conditions de travail qui lui était imposées ; qu'elle soutenait notamment avoir été fréquemment convoquée à des entretiens au cours desquels elle devait se tenir debout face à quatre cadres de l'entreprise pour répondre à des attaques violentes et avoir fait l'objet de remarques particulièrement humiliantes ; qu'en se bornant à retenir que l'absence de la salariée de la liste des employés figurant en qualité d'électeur ou de salarié éligible aux élections professionnelles, le 7 janvier 2013, « ne saurait caractériser les agissements répétés de harcèlement énoncés par les dispositions de l'article L.1152-1 du code du travail », la cour d'appel, qui a écarté le harcèlement moral sans examiner la matérialité de chacun des faits invoqués par la salariée, a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail.