SOC.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 5 avril 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président
Décision n° 10454 F
Pourvoi n° V 16-28.763
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Danièle X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 28 octobre 2016 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société FEP investissements, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 mars 2018, où étaient présentes : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Van Ruymbeke, conseiller, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme Y..., de la SCP Capron, avocat de la société FEP investissements ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR dit que le harcèlement moral n'est pas établi et que le licenciement pour inaptitude est justifié et en conséquence d'avoir débouté l'exposante de ses demandes à ce titre notamment tendant à la nullité de son licenciement et au paiement de diverses sommes à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés y afférents, de dommages et intérêts pour nullité du licenciement ;
AUX MOTIFS QUE, Sur le harcèlement moral : qu'il appartient au salarié de fournir les éléments qui font présumer l'existence d'un harcèlement moral et à l'employeur de prouver que le harcèlement n'est pas constitué et que sa décision était justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en l'espèce, Madame Y... fait valoir qu'à compter du changement de direction de la société Fep Investissements elle aurait subi de 2006 à 2013 des actes répétés de harcèlement moral consistant en un dépouillement de ses fonctions d'attachée de direction avec transfert systématique de ses dossiers aux conseils extérieurs de la société notamment cabinets d'avocats, comptables, notaires ou autres conseils, en une rétention d'information à son égard sur ce qui se passait dans la société (décision, réduction de capital, etc...), les ventes immobilières envisagées et l'expertise de l'exploitation forestière de Ferrière, en une absence de réponse à ses demandes et mails pour des questions matérielles, en un dénigrement de son statut en la privant de toute initiative et en la reléguant dans des locaux à la limite de l'insalubrité à un rôle exclusif de secrétaire, la société ayant écrit les 20 et 22 septembre 2006 à ses interlocuteurs habituels que tout courrier ne devait plus être adressé au nom de Madame Y... mais aux noms des gérants, en tentant de la déstabiliser en lui proposant de procéder à sa mise à la retraite, puis en lui proposant de réduire son temps de travail et enfin en lui imposant un changement de lieu de travail sans la moindre concertation ; qu'elle fait valoir que l'avertissement du 15 mai 2012 constituerait un acte de harcèlement moral dans la mesure où cette sanction serait injustifiée ; qu'elle fait valoir enfin qu'il aurait relevé de sa responsabilité de cadre d'appeler l'attention de l'employeur sur le fait que la société dépensait des montants très importants en conseils extérieurs à qui il était demandé de faire un travail relevant en réalité de ses compétences ; qu'elle fait état d'arrêts de travail répétés de novembre 2007 à mars 2013 pour syndrome dépressif qu'elle attribue à la situation de harcèlement moral qu'elle aurait subie sur son lieu de travail à compter de l'année 2006 ; que l'employeur s'oppose à ces prétentions ; qu'il fait valoir qu'après le décès de Monsieur Bernard A... [...] , Madame Y... n'aurait eu de cesse d'adopter une attitude contestataire, d'insubordination et d'opposition systématique à l'égard notamment de sa veuve, Madame Y... prétendant s'immiscer dans la direction de l'entreprise et se permettant à ce titre de critiquer ouvertement les orientations prises et les choix stratégiques arrêtés par la direction ; qu'il réfute tout acte de harcèlement moral à l'encontre de Madame Y... ayant pour objet ou pour effet une prétendue « mise au placard » ou de la dépouiller de ses responsabilités, faisant valoir qu'en réalité l'entreprise aurait subi de profondes mutations depuis 25 ans qui auraient notamment emporté une diminution du volume des activités de Madame Y... et un besoin accru de conseils extérieurs, tels que avocat, expert-comptable et notaire ; qu'il fait valoir qu'il aurait toujours été soucieux du respect des droits de Madame Y... dans le contexte compliqué et déstabilisant que traversait l'entreprise ; qu'il fait valoir qu'à compter du 31 août 2012, Madame Sylvie A... B... ayant été nommée co-gérante au lieu et place de son père Gaston A... compte tenu de l'aggravation de l'état de santé de ce dernier, Madame Y... aurait dès le 11 septembre suivant adressé un mail à Madame B... croyant pouvoir là encore stigmatiser un agissement prétendument caractéristique de harcèlement moral, ces accusations sans fondement ayant fortement choqué Madame B... ainsi que cela ressortirait de sa réponse audit mail ; que Madame Y... poursuivrait une stratégie de victimisation à des fins purement indemnitaires ; Sur les fonctions occupées par la salariée, le dénigrement et la mise à l'écart allégués : que suivant avenant au contrat de travail signé entre la société Fep Investissements et Madame Y... le 22 octobre 2002, les fonctions d'attachée de direction au coefficient 470 de la salariée sont décrites ainsi que suit : « Madame Y... aura pour mission générale de s'occuper des activités immobilières tout comme des activités agricoles et forestières de la société Fep Investissements ainsi que le suivi d'autres dossiers des dirigeants de Fep Investissements. Toute intervention au sein de la filiale EMP sera exclue sauf instruction expresse et qui lui sera donné par la direction, et ce pour des missions très ponctuelles », Madame Y... ayant accepté d'englober dans ses fonctions à partir de septembre 2006, en contrepartie d'une augmentation de salaire, les tâches précédemment confiées au salarié C... qui avait quitté l'entreprise ; que, par lettre RAR du 27 mai 2009, Madame Y... avait écrit à Madame A... : « C'est ma responsabilité de cadre de votre société Fep plus spécialement en charge des questions juridiques, administratives, financières et fiscales de l'entreprise, que j'assume seule et dans l'intégralité depuis le départ de Monsieur C..., d'attirer votre attention sur les inquiétudes que je peux ressentir dans la marche de cette société... » ; que, par lettre RAR du 26 mars 2010, Madame Y... lui écrivait : « Je suis obligée de relever les termes de notre conversation téléphonique d'hier, puisque cela n'est pas la première fois que vous me dites que je ne suis qu'une secrétaire. J'attire votre attention sur le fait que depuis plus de 20 ans je suis attachée de direction, cadre, avec la responsabilité d'assurer la régularité des opérations de la société, d'autant plus que je suis maintenant la seule salariée de l'entreprise et la seule personne présente dans la société. Je me dois d'attirer votre attention sur les faits ci-après qui me paraissent particulièrement anormaux pour la bonne gestion d'une société comme la nôtre : depuis le décès de Monsieur Bernard A..., il est dépensé des montants très importants en honoraires de conseils extérieurs et avocats à qui il est demandé de faire un travail qui relève de mes compétences. De la même manière, alors que l'on salarie Monsieur D... pour la gestion de la propriété de Ferrière, l'on paie en doublon. Tout cela peut expliquer une situation plus que préoccupante de la société et de son avenir. Sur le plan de la régularité des opérations sociales, j 'ai à tenir le registre des délibérations de la société alors que je ne suis même pas informée des réunions qui s 'y tiennent... » ; que, par mail du 31 mars 2010, Madame Y... lui écrivait : « J'ai noté que selon votre volonté, Me E... prenait en charge toutes les affaires de la société. J'attire cependant votre attention sur le fait que cette initiative de votre part me met dans l'impossibilité de remplir les tâches qui sont les miennes en vertu de mon statut et de mon rôle d'attachée de direction cadre, et constitue par ailleurs une modification substantielle et unilatérale et caractérisée de ce contrat » ; que Madame A... répondait à Madame Y... notamment le 2 avril 2010 « Une remise au point me paraît devoir s'imposer après votre mail d'hier dont la teneur, comme le ton, n'ont pas manqué de me surprendre... Il n'a jamais été question que le cabinet de Me E... prenne en charge toutes les affaires de la société. Comme vous le savez, Me E... n'a vocation qu'à assurer le suivi juridique de la société, ce qu'il fait déjà depuis maintenant plusieurs années à l'exception de l'assemblée générale ordinaire annuelle qui entre désormais dans sa mission. Je ne peux en conséquence vous laisser écrire que confier au cabinet de Me E... le suivi juridique de la société vous mettrait dans l'impossibilité de remplir les tâches qui sont les vôtres et constituerait une modification substantielle de votre contrat de travail. Il s'agit là d'une contrevérité qui me conduit à vous rappeler la nature des tâches principales qui vous incombent, lesquelles ne sont en rien impactées par l'assistance de notre avocat : - gestion locative des locaux situés à Villeneuve d'Ascq, - supervision des locaux de Villeneuve d'Ascq non loués, - s'agissant de la forêt [...], gestion des salaires versés à Monsieur D... et interface entre la gérance et Messieurs D... et F..., ce dernier ayant reçu mandat pour exploiter la forêt. En réalité, c'est la situation de la société que vous connaissez parfaitement qui a une incidence sensible non sur la nature de vos attributions mais sur le volume des tâches à accomplir, notre société n'ayant aujourd'hui pour toute activité que la gestion locative des locaux de Villeneuve d'Ascq, outre l'exploitation de [...]. Quant à votre assertion s 'agissant de la circulation des informations et documents, celle-ci ne repose pas plus sur un constat objectif. Jamais vous n'avez été écartée ou tenue dans l'ignorance d'informations ou documents nécessaires à la conduite de vos missions... » ; que Madame Y... ne peut pas valablement soutenir qu'elle aurait été dépouillée de ses fonctions d'attachée de direction avec transfert systématique de ses dossiers à des conseils extérieurs de la société, notamment cabinet d'avocat, d'expert-comptable ou notaire, alors que le recours à ces professionnels, dont les compétences et missions sont autres que celles d'une attachée de direction, n'ont pu emporter transfert des tâches de Madame Y... à leur profit et vider son poste de toute substance comme elle le soutient à tort, l'employeur lui ayant rappelé par courrier du 2 avril 2010 ses attributions et les tâches principales lui incombant, lesquelles ne sont en rien impactées par les missions dévolues à ces professionnels extérieurs à l'entreprise ; que Madame Y... ne peut pas valablement soutenir qu'étant chargée des activités immobilières, il y aurait eu une rétention d'information à son égard et une absence de réponse à ses demandes en faisant état notamment des mails échangés en 2011 et 2012 pour la vente de terrains ou d'un ensemble immobilier par lesquels l'employeur lui aurait demandé d'adresser les éventuels acquéreurs à l'étude du notaire et, pour l'un des biens, au cabinet de l'avocat, alors qu'il appert de l'examen des pièces produites que ses attributions portaient sur la gestion immobilière et non sur la vente desdits biens qui nécessite une technicité ne relevant pas de ses attributions, l'employeur lui ayant rappelé par courrier du 2 avril 2010 qu'elle n'avait jamais été écartée ou tenue dans l'ignorance d'informations ou documents nécessaires à la conduite de ses missions, ce qui n'est pas contredit par les éléments produits ; que Madame Y... se plaint de ce qu'il a été demandé, en 2006, aux interlocuteurs habituels de la société de ne plus adresser les courriers à l'attention de Madame Y... mais au nom des gérants de la société, ce qui constituerait selon elle une rétention d'information à son égard, mais tel n'est pas le cas, les courriers destinés à la société devant normalement être adressés formellement aux gérants de la société, qui en l'espèce venaient de prendre leurs fonctions, et non à l'attachée de direction, sans qu'il y ait lieu de ce chef rétention d'information à l'égard de Madame Y... ; que Madame Y... soutient qu'elle aurait fait l'objet de propos humiliants et agressifs de la part de la direction, en particulier de Madame Marie-Hélène A..., la reléguant au rang de simple secrétaire après plus de 20 ans de carrière au service de l'entreprise et du groupe ; que ces faits, non seulement ne sont pas objectivement établis, mais encore lorsque Madame Y... s'en est plainte dans sa lettre du 26 mars 2010 précitée, par courrier en réponse du 7 avril 2010, Madame A... a contesté les propos qui lui étaient ainsi prêtés et réaffirmé qu'elle avait toujours fait preuve de délicatesse et de courtoisie à son égard ; qu'en outre, il appert de l'examen du procès-verbal de constat de l'huissier I... du 6 février 2013 qui, à la requête de Madame Y..., a retranscrit le message laissé par Madame A... sur le répondeur de son téléphone mobile, que cette dernière a déclaré « ... Ecoutez, faites votre boulot de secrétaire de direction et puis c'est tout... »,ce qui contredit l'affirmation de Madame Y... selon laquelle la cogérante l'aurait traitée de simple secrétaire ; que Madame Y... invoque des brimades quotidiennes, mais elle n'étaye ce grief par aucun élément et sans même décrire précisément les brimades alléguées ; que l'employeur fait valoir que Madame Y... exerçait ses fonctions avec une très grande autonomie et une large liberté, qu'elle bénéficiait de beaucoup de souplesse dans son organisation et qu'elle ne subissait en aucune manière les assauts quotidiens des gérants qui n'étaient pas dans les bureaux ; que Madame Y... ne peut pas valablement soutenir que l'objectif de la société aurait été de « se débarrasser » à moindre frais d'une salariée ayant 20 ans d'ancienneté au motif de la consultation d'un avocat sur le licenciement facturé en septembre 2007, époque où elle aurait été la seule salariée de l'entreprise, alors que l'employeur établit que la société Fep Investissements comptait en 2007 un autre salarié, Monsieur D... qui bénéficiait d'un logement de fonction dans l'exploitation et occupait le poste de responsable forestier chargé de l'entretien de l'exploitation forestière de [...]s avec mission de procéder aux coupes de bois et à la vente de bois de chauffage et qu'à compter de l'année 2006, les coupes de bois ayant été arrêtées, sa fonction se trouvait cantonnée à un rôle de surveillance de l'exploitation de telle sorte qu'en 2007, il a été envisagé et évoqué à plusieurs reprises le projet de rupture du contrat de travail de Monsieur D..., ce qui a amené la consultation d'avocat facturée en septembre 2007 puis une autre consultation d'avocat en 2010, projet de licenciement pour motif économique que Madame Y... n'ignorait pas et qu'elle avait elle-même suggéré en 2010 en écrivant « ...alors que l'on salarie Monsieur D... pour la gestion de la propriété de Ferrière, l'on paie en doublon » ; que Madame Y... fait grief à l'employeur d'avoir en son absence fouillé dans ses affaires et en d'avoir extrait des documents ; qu'elle produit l'écrit qu'elle adressait à ce titre le 4 octobre 2012 à Madame Sylvie B... ainsi rédigé : « Je viens par contre de constater qu'après mon départ à 17h, mes tiroirs ont été fouillés et que 2 classeurs (1 bleu, 1 vert) situés à côté de ma bibliothèque ont disparu » ; que Madame B... lui répondait en ces termes : « Je suis interloquée par votre email d'hier. Je suis venue vous rencontrer avec Marie-Hélène A... comme vous le souhaitiez et je suis très choquée par vos accusations tout autant graves qu'infondées. Nous avons pris connaissance des dossiers et examiné à ce titre un certain nombre de documents. Je crois à cet égard pouvoir affirmer que non seulement nous sommes en droit de le faire mais encore il nous incombe de le faire en nos qualités de cogérantes. Votre reproche est donc particulièrement déplacé et incongru. Surtout, nous n'avons absolument pas fouillé vos tiroirs comme vous le prétendez. Concernant les classeurs bleu et vert, Marie-Hélène A... les a effectivement pris dès lors qu'il s 'agit de documents portant sur des activités personnelles de mon oncle Bernard décédé sans rapport avec l'activité de la société. Il est donc absolument faux de prétendre que vous seriez harcelée alors qu'au contraire, vous disposez d'une grande liberté dans l'organisation de votre travail
»; qu'il ressort de cet échange de mails, que les cogérantes sont venues rencontrer Madame Y..., qu'elles ont consulté sur place des documents et qu'après le départ de la salariée à 17h, elles ont emporté les classeurs bleu et vert afférents à des activités privées de Monsieur Bernard A..., mais qu'elles n'ont pas fouillé les tiroirs personnels de Madame Y... ; Sur le désintérêt allégué du sort de Madame Y... et le changement de lieu de travail : que Madame Y... soutient que sur le plan matériel, la direction aurait volontairement laissé se dégrader les locaux dans lesquels elle travaillait jusqu'à à la limite de l'insalubrité, tels qu'absence d'éclairage suffisant par le néon hors de service, l'abattant des WC cassé, la moquette usagée, l'absence de papier-toilette, constatés par le contrôleur du travail en date du 2 octobre 2012 ; qu'elle soutient également que s'acharnant contre elle,1'employeur lui aurait imposée, sans la moindre concertation, un changement de lieu de travail de Lille à Roubaix à compter du 1er novembre 2012, ce qui constituerait une modification substantielle de son contrat de travail ; que l'employeur s'oppose à ces prétentions et fait valoir qu'il aurait toujours donné tous moyens à Madame Y... pour se procurer toutes fournitures utiles et que celle-ci aurait acheté des dosettes de café prises en charge par Fep tout en se plaignant d'une absence de papiertoilette que Fep aurait tout aussi bien pris en charge ; qu'il fait valoir qu'à la suite du contrôle fait le 2 octobre 2012 par le contrôleur du travail en présence de Madame Y... et de sa lettre d'observation avec mise en demeure du 15 octobre 2012, la situation économique obérée de la société ne lui permettant pas d'effectuer les travaux électriques et autres préconisés et la société s'orientant vers la vente de ses actifs dont l'immeuble dont s'agit, il aurait été pris en location un bureau dans un centre d'affaires de Roubaix permettant de mettre à la disposition de Madame Y... un bureau conforme aux exigences de l'inspection du travail, ce dont Madame Y... aurait été informée ; qu'il fait valoir que ce changement de lieu de travail se situant à l'intérieur d'une même couronne urbaine, il ne s'agirait pas d'une modification substantielle du contrat de travail, mais d'un simple changement des conditions de travail relevant de son pouvoir de direction ; qu'il appert de l'examen des pièces produites, notamment les éléments constatés par l'inspecteur du travail lors de son contrôle du 2 octobre 2012, que si les locaux dans lesquels Madame Y... travaillait nécessitaient des travaux d'entretien et de mise en conformité, rien en revanche ne permet d'en déduire une volonté de l'employeur de laisser se dégrader lesdits locaux pour nuire à la salariée ; qu'au contraire, dès réception de la lettre d'observation de l'inspection du travail, l'employeur, dont la situation obérée ne permettait pas d'entreprendre les travaux préconisés et qui préférait faire le choix de vendre lesdits locaux, a recherché des locaux en location permettant de mettre à la disposition de la salariée un bureau conforme aux exigences de l'inspection du travail, ce dont l'employeur justifie par les pièces produites ; que le changement de lieu de travail intervenu dans les circonstances précitées, à l'intérieur d'une même couronne urbaine, constitue un simple changement des conditions de travail de Madame Y... qui relève du pouvoir de direction de l'employeur, étant observé au demeurant que Madame Y... bénéficiait d'un véhicule de fonction lui permettant de se rendre aisément à son nouveau bureau ; Sur la proposition de mise à la retraite : que Madame Y... fait grief à l'employeur de lui avoir écrit le 10 juillet 2012 pour lui demander si elle comptait quitter volontairement l'entreprise dans le cadre d'un départ à la retraite et ce juste avant son départ en vacances ; qu'il appert de l'examen des pièces produites que l'employeur a effectivement écrit à Madame par lettre RAR du 10 juillet 2012 : « Vous atteindrez l'âge de 65 ans le 15 novembre 2012. Vous pourrez à cette date bénéficier d'une pension de retraite à taux plein. Ainsi que nous y autorise l'article L.1237-5 du Code du travail, nous envisageons de procéder à votre mise à la retraite. La rupture de votre contrat de travail étant subordonnée à votre accord, nous vous prions de bien vouloir nous faire savoir dans un délai d'un mois si vous souhaitez quitter volontairement l'entreprise... » ; que Madame Y... a répondu par lettre RAR du 6 août 2012 : « ... je n'ai absolument pas l'intention de mettre fin à mon emploi au cours de l'année qui vient ni d'ailleurs davantage avant ma 69ème année» ; que Madame Y... ne peut pas utilement soutenir que ce courrier aurait été adressé par l'employeur aux fins de la déstabiliser en lui signifiant que sa présence n'était plus souhaitée dans l'entreprise et au surplus juste avant ses vacances en espérant qu'elle ne pourrait répondre dans le délai d'un mois, ce qui vaudrait acceptation de sa mise à la retraite, alors que l'employeur a agi loyalement dans le cadre des dispositions de l'article L.1237-5 du Code du travail et que rien ne permet d'étayer l'affirmation de manoeuvres que lui prête la salariée ; Sur la proposition de réduction du temps de travail : que Madame Y... soutient que la proposition de modification de la durée du travail, qui lui a été faite par lettre du 9 octobre 2012, dissimulerait une volonté de lui nuire et constituerait un agissement caractéristique de harcèlement moral ; que l'employeur fait valoir que cette proposition serait uniquement motivée par la situation économique de l'entreprise ; qu'il appert de l'analyse des pièces produites que la lettre du 9 octobre 2012 est rédigée ainsi que suit : « Nous vous indiquons par le présent courrier que nous sommes dans l'obligation de modifier votre contrat de travail pour les raisons économiques suivantes : comme vous le savez, la société ne dégage pratiquement plus aucun revenu. Compte tenu des charges que la société supporte, le résultat d'exploitation, largement déficitaire, ne cesse de se dégrader. Comme vous le savez, la perte d'exploitation s'est établie à -343.458 euros à la clôture du dernier exercice (29 février 2012) alors même que cet exercice enregistrait encore 179.260 euros de produits d'exploitation (contre 369.176 euros au titre de l'exercice précédent). Cette situation est notamment la conséquence du départ du locataire du bâtiment de Villeneuve d'Ascq, la société Tifany Industries, acté le 31 août 2011. Depuis cette date, la société ne perçoit plus de loyer et l'état des locaux et les projets d'urbanisme sur le secteur interdisent toute relocation. En effet, une relocation nécessiterait préalablement un important investissement pour la remise en état des locaux. Or, la situation économique de la société ne permet pas la prise en charge du coût de tels travaux. C'est pourquoi nous nous orientons vers la vente du bâtiment... Au-delà de la situation économique obérée de la société, l'absence d'activité depuis le départ de notre locataire ne permet pas de vous donner du travail pour la durée du travail actuellement en vigueur ce qui nous contraint à modifier votre contrat... » ; que l'employeur justifie de la réalité des difficultés économiques qu'il rencontrait et de l'impact en découlant sur la charge de travail de Madame Y... de telle sorte que la proposition de modification de la durée de travail s'inscrivait dans un cadre légal régulier, exempt de tout harcèlement moral, étant observé au demeurant que Madame Y... a refusé cette proposition qui n'a pas été suivie d'effet, la salariée ayant arrêtée suite à son accident survenu le 21 mars 2013 ; Sur l'avertissement du 15 mai 2012 : que Madame Y... soutient que l'avertissement qui lui a été notifié le 15 mai 2012, qu'elle a immédiatement contesté par lettre du 24 mai 2012, serait totalement injustifié et caractériserait un acte de harcèlement moral ; elle demande qu'il soit annulé ; que l'employeur soutient que cet avertissement était justifié et qu'après la lettre de contestation de la salariée, il a maintenu sa décision par un courrier circonstancié ; qu'il appert de l'examen des pièces produites qu'un avertissement a été notifié à Madame Y... en date du 15 mai 2012, que Madame Y... l'a contesté par courrier du 24 mai 2012 et que par courrier du 28 juin 2012, l'employeur a maintenu sa décision ; que, dans l'avertissement précité, l'employeur reproche à Madame Y... d'une part de ne pas avoir été informée que l'administration fiscale avait adressé en octobre 2011 deux courriers recommandés de mise en recouvrement dont un pour un montant de 270.236 € et de ne pas avoir retiré les plis à la poste si elle était absente lors du passage du facteur ; d'autre part d'avoir le 18 avril 2012 inutilement retardé l'exécution d'un virement de 88.200€ au trésor public ; que, pour ce qui concerne le premier reproche, il porte sur des faits dont l'employeur a eu connaissance en novembre 2011 lors de la réception de la mise en demeure par l'administration fiscale de telle sorte que cette connaissance étant antérieure de plus de deux mois à l'avertissement du 15 mai 2012, le fait reproché, même fautif, ne peut donner lieu à une sanction disciplinaire ; que, pour ce qui concerne le second reproche, il appert des explications des parties que le virement querellé a été effectué le 19 avril 2012 à 16h 33 sans préjudice pour la société de telle sorte que l'avertissement du 15 mai 2012 de ce chef n'était pas justifié ; que, dans ces conditions, par infirmation, l'avertissement du 15 mai 2012 sera annulé, sans ce qu'il y ait lieu cependant d'allouer de ce chef des dommages et intérêts à Mme Y..., aucun préjudice n'étant démontré ; Sur la synthèse : qu'il résulte de ce qui précède que les éléments fournis par Madame Y..., pris ensemble, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, mais les éléments fournis par l'employeur démontrent que le harcèlement n'est pas constitué, chacune de ses décisions, sauf l'avertissement du 15 mai 2012, reposant sur des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que l'annulation de l'avertissement non justifié du 15 mai 2012 ne peut à lui seul constituer du harcèlement moral dès lors que celui-ci suppose des agissements répétés, donc au moins deux faits établis et non un seul ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de Madame Y... tendant à voir dire qu'elle a été victime d'un harcèlement moral de la part de la société Fep Investissements ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé de ce chef ;
ET AUX MOTIFS QUE, sur la nullité du licenciement consécutif au harcèlement moral : Madame Y... ne peut pas utilement soutenir que le licenciement serait nul au motif que son inaptitude physique résulterait du harcèlement moral qu'elle aurait subi alors qu'est établie l'absence de harcèlement moral et que dans ces conditions, l'inaptitude n'étant pas la conséquence du harcèlement moral, le licenciement n'est pas entaché de nullité ;
ALORS D'UNE PART QUE le juge doit se prononcer sur l'ensemble des faits et agissements invoqués par le salarié au soutien du harcèlement moral; qu'au titre des faits et agissements caractérisant le harcèlement moral dont elle avait été victime, l'exposante avait fait valoir que l'employeur non seulement l'avait rabaissée en lui signifiant à plusieurs reprises qu'elle n'était qu'une « simple secrétaire » mais encore qu'il s'adressait à elle de manière agressive et humiliante, ce qui ressortait notamment du procès-verbal de constat d'huissier relatant les propos et le ton employés par Madame Marie-Hélène A... le 2 décembre 2011 en s'adressant à l'exposante, selon lesquels notamment « Vous pourrez me faire toutes les menaces que vous allez me faire, j'en ai rien à cirer. Voila. Et je vous dis que moi j'en ai marre d'entendre tout le temps tout le monde qui se plaint, alors moi j'en ai assez. Vous pourrez m'insulter, faire tout ce que vous voulez, moi je vous le dis, j'en ai marre de tout ce que j'entends. Alors faites-le. Au revoir Madame » ; qu'en se bornant à relever qu'il appert de l'examen du procès-verbal de constat de l'huissier du 6 février 2013 qui, à la requête de Madame Y..., a retranscrit le message laissé par Madame A... sur le répondeur de son téléphone mobile, que cette dernière a déclaré « (
) Ecoutez, faites votre boulot de secrétaire de direction et puis c'est tout », ce qui contredit l'affirmation de Madame Y... selon laquelle la cogérante l'aurait traitée de simple secrétaire, la Cour d'appel, qui n'a pas recherché ni apprécié, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si les autres propos tenus par Madame A..., tels que précisément rapportés dans le procès-verbal d'huissier, ne démontraient pas qu'elle s'était adressée à l'exposante de manière agressive et humiliante, a délaissé une partie des faits invoqués par l'exposante à l'appui de la qualification de harcèlement moral et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail ;
ALORS D'AUTRE PART QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits; qu'en retenant que les éléments fournis par Madame Y..., pris ensemble, laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, mais que les éléments fournis par l'employeur démontrent que le harcèlement n'est pas constitué, chacune de ses décisions, sauf l'avertissement du 15 mai 2012, reposant sur des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement, sans nullement prendre en compte l'ensemble des éléments établis par la salariée parmi lesquels les documents médicaux relatifs à l'altération de son état de santé, soit les nombreux arrêts de travail produits pour « syndrome dépressif sévère » ou « surmenage et hypotension » ainsi que l'attestation du docteur G... qui suivait l'exposante « pour un état dépressif lié à son travail », la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE le motif hypothétique équivaut à son absence ; qu'en énonçant que l'état dépressif de Madame Y... « a pu éventuellement être alimenté pour partie par sa propre attitude au travail », la Cour d'appel s'est prononcée par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS ENFIN QUE le harcèlement moral peut être constitué indépendamment de l'intention de son auteur et de sa volonté de nuire à la salariée; que l'exposante avait fait valoir que, sur le plan matériel, elle avait été reléguée dans des locaux à la limite de l'insalubrité et produit à cet égard les nombreux courriels qu'elle avait été contrainte d'adresser à son employeur à compter du 19 janvier 2011 puis tout au long de l'année 2012 pour se plaindre de ce que l'employeur laissait se dégrader les locaux dans lesquels elle travaillait, ajoutant que, le 2 octobre 2012, le contrôleur du travail avait écrit à l'employeur en lui indiquant qu'il avait été observé que Madame Y... ne travaillait pas dans des conditions d'hygiène adaptées (conclusions d'appel pp.22 et 23) ;qu'en énonçant que si les locaux dans lesquels Madame Y... travaillait nécessitaient des travaux d'entretien et de mise en conformité, « rien en revanche ne permet d'en déduire une volonté de l'employeur de laisser se dégrader lesdits locaux pour nuire à la salariée », la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail ;
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR débouté l'exposante de sa demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail et en conséquence de l'avoir déboutée de ses demandes à ce titre notamment tendant au paiement de diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés y afférents, de dommages et intérêts pour nullité de la rupture et d'AVOIR jugé que le licenciement pour inaptitude est justifié;
AUX MOTIFS QUE, Sur la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; que Madame Y... demande que soit prononcée la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison du harcèlement moral qu'elle aurait subi et de l'absence de visites médicales ; qu'elle demande qu'il lui soit alloué en conséquence une indemnité compensatrice de préavis avec les congés payés afférents ainsi que des dommages et intérêts pour nullité du licenciement ; qu'elle précise avoir formulé cette prétention auprès du Conseil de Prud'hommes dès le 9 novembre 2012 ; qu'elle indique que cette demande de résiliation devrait être examinée en premier et que c'est seulement dans le cas où elle ne serait pas retenue que le juge aurait à se prononcer sur le licenciement notifié par l'employeur ; que l'employeur fait valoir que pour la première fois devant la Cour, Madame Y... formerait une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail alors que cette demande n'aurait pas été soutenue devant le Conseil de Prud'hommes, la salariée l'ayant abandonnée ainsi qu'il ressortirait de ses conclusions de première instance et du jugement déféré en date du 13 février 2015 ; que le licenciement de Madame Y..., motivé par l'inaptitude physique médicalement constatée de cette dernière, ayant été prononcé par lettre du octobre 2013, la demande de résiliation judiciaire soutenue tardivement serait dépourvue d'objet et devrait être rejetée ; qu'à titre subsidiaire, il demande de rejeter cette prétention de Madame Y..., les prétendus agissements de harcèlement moral n'étant absolument pas établis ; qu'il appert de l'examen des éléments de la procédure rappelés dans le jugement déféré et des dernières conclusions soutenues par la salariée en première instance, que si Madame Y... a saisi le Conseil de Prud'hommes le novembre 2012 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, elle a ensuite modifié sa demande, sollicitant à titre principal de voir juger nul le licenciement pour inaptitude comme étant la conséquence du harcèlement moral et à titre subsidiaire de voir juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse pour absence de reclassement ; qu'ainsi, lors de l'audience du bureau de jugement tenue le 18 avril 2014, postérieure au licenciement notifié par lettre du 23 octobre 2013, Madame Y... n'a pas soutenu la demande de résiliation judiciaire qu'elle avait initialement formée, ce qu'elle ne conteste pas ; que Madame Y... ne peut pas valablement demander que soit examinée en premier la demande de résolution judiciaire qu'elle formule à nouveau devant la Cour alors qu'elle avait abandonné cette prétention en première instance lors de l'audience postérieure au licenciement ; que la demande de Madame Y... ce chef ne peut donc prospérer, étant observé au demeurant que la Cour a précédemment examiné les griefs invoqués par la salariée ;
ALORS QUE lorsqu'un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur, tout en continuant à travailler à son service, et que ce dernier le licencie, le juge doit d'abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée, peu important que celle-ci n'ait pas été soutenue en première instance devant le Conseil de Prud'hommes dès lors que le salarié n'avait pas expressément renoncé à sa demande de résiliation judiciaire ; qu'en relevant que si Madame Y... avait saisi le Conseil de Prud'hommes le 9 novembre 2012 d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail, elle a ensuite modifié sa demande sollicitant à titre principal de voir juger nul le licenciement pour inaptitude et à titre subsidiaire de voir juger le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et que, lors de l'audience du bureau de jugement tenu le 18 avril 2014, postérieur au licenciement notifié le 23 octobre 2013, Madame Y... n'avait pas soutenu la demande de résiliation judiciaire qu'elle avait initialement formée, pour en déduire qu'elle ne peut valablement demander que soit examinée en premier la demande de résolution judiciaire qu'elle formule à nouveau devant la Cour, sans nullement constater que la salariée avait expressément renoncé à sa demande de résiliation judiciaire devant le Conseil de Prud'hommes, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1231-1 du Code du travail ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR dit que le licenciement pour inaptitude est justifié et débouté l'exposante de l'ensemble de ses demandes à ce titre tendant notamment à la condamnation de l'employeur à lui payer diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés y afférents et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE Sur l'inaptitude et l'obligation de reclassement ; qu'à l'issue de l'arrêt de travail de Madame Y... consécutif à l'accident du 21 mars 2013, lors de la visite médicale de reprise du 16 juillet 2013, le médecin du travail indiquait : « Inapte temporaire à la reprise du poste de travail. Inaptitude à prévoir pour raison médicale : pas de préconisation à ce jour d'aménagement ou mutation ou reclassement. Etude du poste et conditions de travail à prévoir (art. R.462-31 du code du travail). La salariée sera revue en 2eme visite dans deux semaines » ; que, lors de la seconde visite de reprise du 30 juillet 2013, le médecin du travail a indiqué : « Inapte à tous les postes (art. R.4624-31 du CT). Pour raison médicale pas de préconisation à ce jour d'aménagement ou mutation ou reclassement. Etude du poste et conditions de travail en date du 25 juillet 2013 » ; que ; malgré cet avis d'inaptitude, l'employeur, qui avait subi des pertes économiques importantes et dont Madame Y... restait la seule salariée depuis 2010 non seulement dans l'entreprise mais également au sein du groupe, a cependant procédé à une recherche sérieuse afin de proposer à Madame Y... un éventuel reclassement ; qu'il écrivait dans ce sens le août 2013 au médecin du travail : «...compte tenu de votre connaissance de notre entreprise, compte tenu de votre visite de notre bureau le 25 juillet dernier, nous vous saurions gré de bien vouloir nous indiquer vos éventuelles propositions et recommandations en vue du reclassement de Madame Y...... » ; que le médecin du travail répondait le 5 août 2013 à l'employeur : « vous disposez en principe sur la fiche d'aptitude du 30 juillet 2013 des éléments nécessaires et suffisants ; en l'occurrence compte tenu de l'état de santé de Madame Y..., il n'est pas formulé de préconisations d'aménagement, mutation de poste ou reclassement » ; que l'employeur a convoqué Madame Y... a un entretien préalable le 9 octobre 2013 et lui a notifié le 23 octobre 2013 la lettre de licenciement rédigée ainsi que suit : « ... en dépit de nos recherches, nous ne voyons malheureusement aucun poste de reclassement sur lequel vous pourriez être affectée étant précisé que l'entreprise n'est pas en mesure de créer un poste susceptible de vous convenir remplissant une réelle fonction ou ayant une vraie finalité pour l'entreprise. Ainsi, compte tenu de la taille de l'entreprise, de l'absence de poste disponible et de l'avis du médecin du travail, votre reclassement s'avère impossible. Nous nous voyons donc dans l'obligation de vous licencier compte tenu de votre inaptitude physique et de l'impossibilité de reclassement... » ; que, dans ces conditions, la procédure a été respectée de même que l'employeur a respecté l'obligation de reclassement, ce dernier justifiant avoir recherché sérieusement dans l'entreprise et dans le groupe familial auquel elle appartient, avec l'aide du médecin du travail, un poste de reclassement pour Madame Y..., étant observé que Madame Y... restait la seule salariée dans l'entreprise et dans le groupe et que l'employeur n'était pas tenu de créer un nouveau poste pour y affecter la salariée ; qu'en conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a dit le licenciement pour inaptitude justifié ; Sur les sommes réclamées par la salariée : que, s'agissant des indemnités de rupture, Madame Y... fait valoir que le licenciement faisant suite à une inaptitude consécutive à un accident du travail ouvrirait droit pour le salarié à une indemnité spéciale de licenciement et à une indemnité compensatrice de préavis ; qu'elle réclame la somme de 23.874 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents et la somme de 78.889 € au titre de rappel de l'indemnité spéciale de licenciement en revendiquant l'accord d'entreprise EMP du 24 novembre 1993 ; que l'employeur fait valoir que Madame Y... aurait été remplie de ses droits, s'agissant d'un accident de trajet, et que l'accord d'entreprise conclu le novembre 1993 entre la société EMP et trois organisations syndicales n'aurait pas vocation à s'appliquer à la société Fep Investissements qui n'en était pas signataire ; que, par application de l'article L.1226-14 du Code du travail, en matière d'accident du travail, la rupture du contrat de travail ouvre droit pour le salarié à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L.1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L.1234-9 ; qu'en l'espèce, s'agissant d'un accident de trajet comme dit précédemment, Madame Y... ne peut pas revendiquer l'application de la disposition précitée qui ne trouve à s'appliquer qu'en cas d'accident de travail ou de maladie professionnelle ; que ses demandes en paiement d'une indemnité compensatrice et d'une indemnité spéciale de licenciement seront donc rejetées ; que Madame Y... a perçu la somme 55.401,14 € à titre d'indemnité de licenciement, son salaire moyen mensuel étant de 7.048,49 € ; qu'elle demande un rappel à hauteur de 78.889 € en application de l'accord d'entreprise EMP du 24 novembre 1993, en faisant valoir que cet accord d'entreprise lui serait plus favorable ; que l'employeur ne peut pas valablement soutenir que l'accord d'entreprise revendiqué ne lui serait pas applicable alors que l'avenant au contrat de travail de Madame Y... du 22 octobre 2002 stipule expressément « le présent contrat est régi par la convention collective nationale des industries de cartonnage suivant les modalités résultant des accords d'entreprise EMP, applicables entrés en fonction avant le 31/12/93 » ; que ce moyen ne peut donc prospérer ; qu'en application de l'accord d'entreprise revendiqué, l'indemnité conventionnelle de licenciement, plus favorable à la salariée, s'établit à la somme de 59.471,63 ; que le rappel du de ce chef à Madame Y... s'établit donc à la somme de 4.070,49€ (59.471,63-55.401,14) ; qu'en conséquence, par infirmation, il sera alloué à Madame Y... la somme de 4.070,49 € à titre de rappel sur l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
ALORS QUE l'avis d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise délivré par le médecin du travail ne dispense pas l'employeur de rechercher les possibilités de reclassement par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations ou transformations de poste de travail au sein de l'entreprise et, le cas échéant, du groupe auquel elle appartient parmi les entreprises dont l'activité, l'organisation ou le lieu d'exploitation autorise la permutation de tout ou partie du personnel ; que l'exposante avait fait valoir que l'employeur s'était contenté d'interroger le médecin du travail sur ses éventuelles propositions et recommandations sans démontrer avoir effectué une quelconque démarche pour tenter de reclasser l'exposante dans le groupe, lequel devait s'entendre notamment de la société Lambast exerçant une activité similaire et dont la gérante était Madame Sylvie B... A..., cogérante par ailleurs de la société employeur ainsi que des différentes sociétés dirigées par Messieurs Guillaume et Bertrand A..., tous deux actionnaires de la société employeur (conclusions d'appel p.40) ; qu'en se bornant à relever que Madame Y... restait la seule salariée dans l'entreprise et dans le groupe et que l'employeur justifiait avoir recherché sérieusement dans l'entreprise et dans le groupe familial auquel elle appartient un poste de reclassement, sans nullement répondre au moyen pertinent des conclusions d'appel dont elle était saisie, tiré de ce que l'étendue du périmètre de reclassement s'étendait, au-delà du « groupe familial », à la société Lambast et aux autres sociétés visées dans ses conclusions, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR limité la condamnation de la société employeur à payer à l'exposante la somme de 4.070,49 euros à titre de rappel d'indemnité conventionnelle de licenciement et débouté l'exposante du surplus de ses demandes à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE Madame Y... a perçu la somme 55.401,14 € à titre d'indemnité de licenciement, son salaire moyen mensuel étant de 7.048,49 € ; qu'elle demande un rappel à hauteur de 78.889 € en application de l'accord d'entreprise EMP du 24 novembre 1993, en faisant valoir que cet accord d'entreprise lui serait plus favorable ; que l'employeur ne peut pas valablement soutenir que l'accord d'entreprise revendiqué ne lui serait pas applicable alors que l'avenant au contrat de travail de Madame Y... du 22 octobre 2002 stipule expressément « le présent contrat est régi par la convention collective nationale des industries de cartonnage suivant les modalités résultant des accords d'entreprise EMP, applicables entrés en fonction avant le 31/12/93 » ; que ce moyen ne peut donc prospérer ; qu'en application de l'accord d'entreprise revendiqué, l'indemnité conventionnelle de licenciement, plus favorable à la salariée, s'établit à la somme de 59.471,63 ; que le rappel du de ce chef à Madame Y... s'établit donc à la somme de 4.070,49€ (59.471,63-55.401,14) ; qu'en conséquence, par infirmation, il sera alloué à Madame Y... la somme de 4.070,49 € à titre de rappel sur l'indemnité conventionnelle de licenciement ;
ALORS QUE l'exposante avait fait valoir que le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement s'établissait à la somme de 134.291 euros, calculé en application de l'accord d'entreprise EMP du 24 novembre 1993 en ses dispositions particulières aux cadres, lequel prévoyait que « les cadres ayant plus de cinq ans d'ancienneté auront droit à une indemnité de congédiement de 10/20ème de mois par année de présence. L'indemnité ainsi calculée ne pourra dépasser quinze mois. L'indemnité visée ci-dessus sera majorée en fonction de l'âge de l'intéressé de (
), - 25 % si l'intéressé a plus de cinquante-cinq ans et moins de soixante-cinq ans » (conclusions d'appel pp.41 et 42) ; qu'en défense, l'employeur se bornait à soutenir que l'exposante ne pouvait prétendre au paiement d'une indemnité de licenciement calculée en application de cet accord d'entreprise EMP, lequel lui était inopposable, sans pour autant contester, même à titre subsidiaire, le montant de l'indemnité réclamée à ce titre par l'exposante ; qu'après avoir retenu que l'employeur ne peut valablement soutenir que l'accord d'entreprise revendiqué ne lui serait pas applicable, la Cour d'appel qui se borne à affirmer péremptoirement qu' « en application de l'accord d'entreprise revendiqué, l'indemnité conventionnelle de licenciement, plus favorable à la salariée, s'établit à la somme de 59.471,63 euros, » sans assortir sa décision d'aucun motif justifiant ainsi le montant retenu , a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;