SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10419 F
Pourvoi n° W 17-14.255
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Y... Z..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 17 mars 2015 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l'opposant à la société JSA, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , prise en qualité de liquidateur de la société Matervia, venant aux droits de la société Matervia,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 28 février 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme C..., conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, M. A..., avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me B..., avocat de M. Z... ;
Sur le rapport de Mme C..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me Ricard, avocat aux Conseils, pour M. Z...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande du salarié de requalification de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement nul et les demandes afférentes à la nullité du licenciement ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le salarié a pris acte de la rupture de son contrat de travail le 18 avril 2011 alors qu'il était absent depuis le mois d'octobre 2010 en invoquant « des harcèlements » ; qu'il fait valoir qu'âgé à l'époque des faits de 60 ans et près de la retraite, son employeur aurait entrepris des changements unilatéraux de ses conditions de travail, qu'il aurait été affecté à des tâches de manoeuvre, qu'il a fait l'objet de remarques injustifiées et que sa qualification sur ses fiches de paie avait été modifiée ce qui a entraîné un état dépressif l'obligeant à s'arrêter ; que Monsieur Z... Y... en arrêt de travail depuis octobre 2010 ne verse aux débats aucun document médical antérieur à cette date ni témoignage justifiant qu'il aurait fait l'objet de la part de son employeur d'agissements répétés susceptibles de laisser supposer l'existence d'un harcèlement ; qu'il n'est pas justifié que le salarié ait réclamé antérieurement à son courrier d'octobre 2010, le paiement d'heures supplémentaires ; que l'employeur a répondu à son courrier ; un différent entre employeur et salarié au sujet du règlement d'heures supplémentaires n'est pas assimilable à un fait de harcèlement en l'absence d'autres éléments probants ; que l'employeur justifie que c'est seulement par courrier du 17 novembre 2010 que le salarié a fait état d'une erreur sur ses bulletins de paie quant à sa qualification ; qu'il a été répondu au salarié dès le 26 novembre 2010 qu'il y avait eu une erreur et que l'erreur allait être rectifiée par le comptable, étant observé que l'erreur ne portait que sur quatre bulletins sans que la rémunération du salarié ait été affectée et il est attesté par la société d'expertise comptable in Extenso qu'elle a dû rééditer tous les bulletins de salaire sur le nouveau logiciel qu'elle mettait en oeuvre ; qu'il n'est pas justifié que Monsieur Z... Y... ait fait l'objet de remarques répétées injustifiées, et il n'est pas davantage justifié que Monsieur Z... Y... ait été affecté à des tâches ne faisant pas partie de ses missions de chauffeur, fonction qu'il continuait à exercer ou encore que l'employeur ait fait courir un risque particulier à son salarié en lui demandant l'exécution d'une tâche quelconque qui aurait nécessité des garanties spéciales pour la sécurité ou la santé du salarié et il n'est pas établi un lien direct avec la situation professionnelle de Monsieur Z... Y... ; que la cour considère que c'est à bon droit que le Conseil des Prud'hommes a retenu que les faits considérés avancés par le salarié ne sont pas constitutifs de harcèlement ; il s'ensuit que Monsieur Z... Y... doit être débouté de ses demandes afférentes à la nullité du licenciement ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES QUE selon l'article L. 1152-1 du Code du Travail le salarié doit établir la matérialité des faits qu'il évoque et l'employeur doit prouver que ces faits ne caractérisent pas une situation de harcèlement ; que M. Z... Y... embauché le 18/03002 en qualité de chauffeur a écrit le 18/04/11 « je prends acte de la résolution de mon contrat de travail à partir de mon dernier bulletin de salaire, suite aux harcèlements » ; qu'il prétend que sa décision est la conséquence de différentes actes de l'employeur qui refuse de lui régler des heures supplémentaires (courriers des 11/10 et 17/11/11), qui lui fait exécuter des taches de manutention qui ne sont pas du ressort de celle d'un chauffeur, avec modification momentanée de son libellé de fonction dans ses bulletins de paie ; que depuis le 5/10/10 il est en arrêt pour raison médicale (état dépressif selon la médecine du travail) ; que la Société Marterna réplique que le demandeur a été rémunéré pour les heures supplémentaires effectuées (état présenté de 243 H effectuées de mars 2003 à juillet 2008 ) ; que des taches de manutention font partie de l'activité d'un chauffeur et particulièrement dans une entreprise de moins de 10, en fonction de l'activité ; que le libellé de sa fonction momentanément modifié par erreur a été rectifiée sans qu'ait été modifiée sa rémunération ; que la lettre de prise d'acte intervient alors que le demandeur est absent depuis plusieurs mois et qu'il s'agit donc d'un acte délibéré et réfléchi du demandeur quant à ses conséquences ; que les faits avancés ne peuvent être considérés comme des actes répétés d'harcèlement de l'employeur destinés à nuire au salarié ; que le Conseil après avoir écouté les débats et pris connaissance des pièces, juge non fondée la demande de requalification de la prise d'acte en raison de harcèlements en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; qu'en conséquence il déboutera ainsi que des demandes de 3 222 € de dommages et intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse et 22 870 pour harcèlement moral ;
ALORS QU'en application des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail, lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que la cour d'appel a constaté que la société Matervia n'avait pas payé à M. Z... des heures supplémentaires pour les années 2006 à 2009 pour un montant de 13 923,51 € et qu'une mention erronée de sa qualification avait été portée sur quelques bulletins de paie du salarié ; qu'en se contentant d'examiner un par un les faits avancés par le salarié pour les écarter, sans examiner, si, pris dans leur ensemble, ces éléments matériellement établis laissaient présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
ALORS QUE caractérise un harcèlement moral l'absence de règlement sur plusieurs années d'heures supplémentaires pour un montant conséquent ;
qu'en affirmant qu'un différent entre employeur et salarié au sujet du règlement d'heures supplémentaires n'est pas assimilable à un fait de harcèlement quand, au regard du nombre d'années considéré et du montant en litige, cette situation a entrainé chez le salarié un état dépressif l'obligeant à s'arrêter de travailler, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
ALORS QU'enfin, M. Z... soutenait s'être vu imposer un changement de poste de manière unilatérale et sans préavis, ni concertation (conclusions p.25) ; qu'ayant constaté que certains bulletins de salaire mentionnaient effectivement une qualification erronée, la cour d'appel, qui a omis de rechercher si cette « erreur » de mention quant au poste occupé par le salarié ne traduisait effectivement pas une modification de son poste relevant d'un harcèlement moral, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande du salarié de requalification de la prise d'acte de la rupture du contrat de travail en licenciement et de l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes excepté celle fondée au titre des frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS QUE s'il n'est pas interdit à un salarié de prendre acte de la rupture de son contrat de travail alors même qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'un litige l'opposant à son employeur, en l'espèce la divergence des parties dont il n'est pas justifié que le salarié avait fait part à son employeur avant sa lettre du mois d'octobre 2010 et dont il avait saisi la justice dès le 29 novembre 2010 ne justifiait pas la prise d'acte de rupture ce d'autant que le salarié se trouvait en arrêt maladie, la cour considère qu'elle s'analyse en une démission de sorte que le salarié sera débouté de l'ensemble de ses demandes excepté de celle fondée au titre des frais irrépétibles ;
ALORS QUE justifie la prise d'acte par le salarié de son contrat de travail qui produit alors les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse le défaut de règlement d'un nombre important d'heures supplémentaires ; qu'en retenant, pour qualifier de démission la prise d'acte de la rupture de son contrat de travail par M. Z..., le fait que le salarié ne s'était pas manifesté auprès de son employeur pour réclamer le paiement de l'intégralité de ses heures supplémentaires avant octobre 2010, à un moment où il se trouvait en arrêt maladie, la cour d'appel, qui a pourtant jugé qu'un nombre conséquent d'heures supplémentaires n'avait pas été payé, s'est déterminée par un motif inopérant et a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1237-2 et L. 1235-3 du code du travail.