SOC.
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10403 F
Pourvoi n° T 16-25.541
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société SNI APPT, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 8 septembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société SENI, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
2°/ à Mme Carla F... G... , domiciliée 18 avenue de Charles Y..., 77184 Emerainville,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 février 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la société SNI APPT ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société SNI APPT aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour la société SNI APPT.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le contrat de travail de Mme Carla F... G... conclu le 23 janvier 2014 avec la société Seni avait été transféré à la société Sni Appt à compter du 1er janvier 2015, pour la totalité du temps de travail effectué sur le site de la résidence "... ", soit 43,33 heures, ordonné à ce titre à la société Sni Appt de poursuivre le contrat de travail de Mme Carla F... G... , et n'y avoir lieu à référé pour le surplus des demandes,
AUX MOTIFS QUE
l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté et services associés, qui se substitue aux stipulations de son ancienne annexe VII, fixe les "conditions de garantie d'emploi et continuité du contrat de travail du personnel en cas de changement de prestataire",
Son article 7-2 met à la charge de l'entreprise entrante de se faire connaître auprès de l'entreprise sortante dès qu'elle obtient ses coordonnées. Il fixe les conditions que doivent remplir les salariés affectés au marché repris pour voir leur contrat transféré, à savoir notamment, pour le personnel appartenant à l'un des quatre premiers niveaux de la filière d'emplois "exploitation", "passer sur le marché concerné 30% de son temps de travail total effectué pour le compte de l'entreprise sortante" (les agents de maîtrise devant pour leur part être affectés exclusivement sur le marché concerné), "justifier d'une affectation sur le marché d'au moins 6 mois à la date d'expiration du contrat" , "ne pas être absent depuis 4 mois ou plus à la date d'expiration du contrat", que ce soit dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée ou d'un contrat de travail à durée déterminée conclu pour le remplacement d'un salarié absent et remplissant ces mêmes conditions, et être en situation régulière au regard de la législation du travail relative aux travailleurs étrangers. Il prévoit aussi que lorsque le marché initial est redistribué en plusieurs lots, la (ou les) entreprise(s) entrante(s) a (ont) l'obligation d'assurer la continuité des contrats de travail des personnes affectées sur le (ou les) lot(s) qu'elle(s) reprend (reprennent) dès lors que les conditions définies ci-dessus, appréciées alors à l'égard du marché initial détenu par l'entreprise sortante, sont remplies,
L'entreprise sortante doit, aux termes de l'article 7-3, établir une liste de tout le personnel affecté au marché, qui comporte les renseignements énumérés à l'annexe I, lesquels incluent notamment le nom et l'adresse du marché, la date d'affectation sur le marché et le nombre d'heures effectuées sur le marché avec horaire habituel,
À cette liste, doivent être notamment joints les six derniers bulletins de paie, la dernière fiche d'aptitude médicale, la copie du contrat de travail et, le cas échéant, de ses avenants et l'autorisation de travail des travailleurs étrangers,
L'article 7-2 précise que ces documents doivent être transmis à l'entreprise entrante au plus tard dans les huit jours ouvrables après que l'entreprise entrante se sera fait connaître, de sorte que cette dernière puisse remettre au salarié l'avenant à son contrat de travail au plus tard le jour du début effectif des travaux (cette remise pouvant être différée d'au plus tard huit jours ouvrables en cas d'annonce tardive de la décision de l'entreprise utilisatrice). L'entreprise entrante, à défaut de réponse de l'entreprise sortante dans le délai de huit jours, la met en demeure de lui communiquer les renseignements prévus par la convention, et ce par lettre recommandée avec demande d'avis de réception,
L'article 7-2 précise encore que "la carence de l'entreprise sortante dans la transmission des renseignements prévus [ ... ] ne peut empêcher le changement d'employeur que dans le seul cas où cette carence met l'entreprise entrante dans l'impossibilité d'organiser la reprise effective du marché",
La société Sni Appt soutient que les conditions conventionnelles du transfert du contrat de travail relatives au temps de présence de la salariée sur le site, à son affectation sur le marché d'au moins 6 mois à la date d'expiration du contrat et à la limitation de son temps d'absence à moins de 4 mois à la date d'expiration du contrat commercial ne sont pas remplies,
C'est néanmoins à la société sortante de rapporter la preuve que la salariée concernée remplissait les conditions exigées par les dispositions sus-rappelées,
Contrairement à l'argumentation de la société Sni Appt retenue à tort par les premiers juges, le temps de présence de 30% au moins consacré au marché considéré n'est pas calculé en fonction d'un plein temps théorique (151h67) mais en fonction du temps de travail total effectué au sein de l'entreprise sortante,
Or, il résulte du contrat de travail signé le 23 janvier 2014 que Mme Carla F... G... était affectée pour la totalité de ses heures (43h33 par mois) au marché de l'immeuble "... ", de sorte qu'elle y effectuait 100% de son temps de travail,
La condition du volume de temps de présence sur le site est donc remplie,
La société intimée relève certes à juste titre qu'à l'examen des bulletins de paie de la salariée, il apparaît qu'elle a travaillé un nombre d'heures beaucoup plus important que les 43h33 prévues dans son contrat de travail,
Mais si Mme Carla F... G... a accompli un nombre d'heures complémentaires considérable entre le 1er juillet et le 31 octobre 2014 de sorte que le total de ses heures sur la période de référence (le second trimestre 2014) s'élève à 613h77, celui des heures consacrées au site "..." s'élève à 259h98 (6 x 43h33), soit 42,35% du temps de travail total réellement effectué au sein de l'entreprise sortante,
Par ailleurs, au vu du contrat de travail et en l'absence d'éléments de preuve pertinents, la société Sni Appt ne saurait soutenir utilement que la condition d'affectation sur le marché d'au moins 6 mois à la date d'expiration du contrat n'était pas remplie,
Enfin, s'agissant du temps d'absence, Mmes A... et B..., membres du conseil syndical de la résidence "..." , attestent qu'à compter de mars ou avril 2014, elles n'ont plus vu Mme Carla F... G... laquelle aurait subitement réapparu sur le site pour travailler après la résiliation du contrat commercial, tandis que Mme C..., autre membre du conseil syndical, témoigne seulement de la circonstance que plusieurs représentants différents de la société Seni se sont succédé sur le site durant l'année 2014, "aucun d'eux n'étant resté durant une période significative" (pièces n° 1 de la société Sni Appt),
En outre, après avoir attesté que Mme Carla F... G... avait travaillé sur le site toute l'année 2014 de façon continue (pièce n° 14 de la société Seni), M. D..., copropriétaire dans la même résidence, s'est rétracté en affirmant cette fois-ci qu'il avait vu la salariée sur le site au début de l'année 2015 et non pendant toute l'année 2014 (pièces n° 20 et 21 de la société Sni Appt),
Ces témoignages insuffisamment circonstanciés sont toutefois contredits par la salariée elle-même, qui pourtant ne souhaite plus le transfert de son contrat de travail, et par la société Seni, qui justifie avoir été informée de la grossesse de sa salariée en octobre 2014 et avoir dès lors décidé de l'assister en affectant un second salarié sur le site,
En effet, si Mme Carla F... G... ne se trouvait pas en congé maternité à la date du transfert d'activité, la société Seni justifie par la production d'un certificat médical du 14 octobre 2014 que l'accouchement de sa salariée enceinte était prévu pour le 29 avril 2015 et que celle-ci a de ce fait été aidée sur le site par un autre salarié, M. E..., qui témoigne en ce sens, à l'instar de l'inspectrice du site Mme Esteves (pièces n° 11, 12 et 13 de l'appelante),
Dans ces conditions, la société Seni rapporte suffisamment la preuve que Mme Carla F... G.. remplissait les conditions prévues par la convention collective applicable pour que son contrat de travail soit transféré à la société Sni Appt à compter du 1er janvier 2015,
Mme Carla F... G... n'est pas fondée aujourd'hui à refuser le transfert de son contrat de travail après l'avoir accepté lors du changement de prestataire, en ne contestant pas la lettre de son employeur lui annonçant ce transfert puis en se rendant sur le site les premiers jours de janvier 2015 pour y poursuivre son travail,
Il convient en conséquence d'infirmer l'ordonnance entreprise et d'accueillir les demandes de la société Seni tendant au transfert du contrat de travail de Mme Carla F... G... à la société Sni Appt à compter du 1er janvier 2015 (43,33 heures) et à la poursuite par la société Sni Appt du dit contrat de travail, sur le fondement des articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail,
En revanche, la demande de la société Seni tendant à voir consacrer une obligation à la charge de la société Sni Appt de lui rembourser les salaires versés depuis le 1er janvier 2015 à la salariée est sérieusement contestable, le paiement des salaires n'étant pas sans cause si Mme Carla F... G... a continué à travailler au sein de la société Seni, laquelle n'allègue même pas le contraire et ne produit aucun bulletin de paie postérieur au transfert d'activité,
Par voie de conséquence, la Sni Appt sera déboutée de sa demande d'octroi de la somme de 10 000 €, présentée tant en réparation de divers préjudices qu'au titre de ses frais irrépétibles,
ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents de la cause ; que l'article 7 de la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés prévoit le transfert des salariés affectés à un marché ayant fait l'objet d'un changement de prestataire ; que cependant, l'absence d'un salarié depuis plus de quatre mois fait obstacle à sa reprise par l'entreprise entrante ; que la société Sni Appt démontrait par la production de plusieurs attestations de membres du conseil syndical que Mme F... G... était absente du site depuis plus de quatre mois ; que Mme A... relatait qu'à compter du mois de mars/avril 2014, à la suite d'un entretien téléphonique avec le responsable du site de la société Seni, il lui avait été indiqué que Mme Carla F... G... ne serait plus affectée sur ce site ; qu'elle attestait qu'à compter du mois de mars/avril 2014 elle n'avait plus constaté la présence de cette salariée sur le site ; qu'en décidant néanmoins qu'il y avait lieu de faire application des dispositions de l'article 7 de la convention collective précitée au motif que cette attestation n'était pas suffisamment circonstanciée, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'attestation de Mme A... et violé le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause,
ALORS QUE le juge ne peut pas dénaturer les documents qui lui sont soumis ; que la Sni Appt produisait aux débats une attestation de Mme B... qui relatait qu'à la suite des plaintes émises quant à la qualité des prestations auprès d'un responsable de site de la société Seni en mars et avril 2015, Mme Carla F...G... avait été remplacée par deux hommes sur le site de la résidence "... " et que la salariée était subitement réapparue après la résiliation du contrat de prestation, soit le 2 janvier 2015 ; qu'en considérant qu'il y avait lieu de faire application de l'article 7 de la convention collective applicable au motif que l'attestation précitée n'était pas suffisamment circonstanciée, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'attestation de Mme B... en violation du principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause,
ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer les termes clairs et précis des documents qui lui sont soumis ; que la société Sni Apt versait aux débats une attestation de M. D... qui, rétractant ses précédentes affirmations, faisait valoir que Mme Carla F... G... n'était pas présente sur le site en 2014, mais qu'elle était réapparue sur le site au tout début janvier 2015 ; qu'en écartant cette attestation au prétexte qu'elle n'était pas suffisamment circonstanciée, la cour d'appel a dénaturé l'attestation de M. D... et violé le principe susvisé.