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28/03/2018 | FRANCE | N°16-23683

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 mars 2018, 16-23683


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 6 juillet 2016), que M. Y... a été engagé comme cuisinier à compter du 1er août 2007 par la société Sodexo santé médico-social (ci-après Sodexo), dans le cadre d'une reprise de son contrat de travail ; qu'il a été affecté en qualité de chef de cuisine à l'IME Saint-Joseph appartenant à l'association Adèle C... ; que, le 18 décembre 2013, celle-ci a résilié le contrat de restauration la liant à la société Sodexo, pour reprendre e

lle-même l'activité à compter du 1er avril 2014 ; que la société Sodexo refusant de f...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 6 juillet 2016), que M. Y... a été engagé comme cuisinier à compter du 1er août 2007 par la société Sodexo santé médico-social (ci-après Sodexo), dans le cadre d'une reprise de son contrat de travail ; qu'il a été affecté en qualité de chef de cuisine à l'IME Saint-Joseph appartenant à l'association Adèle C... ; que, le 18 décembre 2013, celle-ci a résilié le contrat de restauration la liant à la société Sodexo, pour reprendre elle-même l'activité à compter du 1er avril 2014 ; que la société Sodexo refusant de fournir du travail et de régler ses salaires à compter de cette date, M. Y... a saisi la juridiction prud'homale ;

Attendu que la société Sodexo fait grief à l'arrêt de dire que M. Y... était resté son salarié, de le débouter de ses prétentions à l'encontre de l'association Adèle C... , de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Sodexo et de la condamner à lui verser diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail, d'ordonner le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite légale de six mois de salaire et la délivrance d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle emploi et de bulletins de salaires des mois de mars à septembre 2014 conformes à sa décision alors, selon le moyen :

1°/ que les contrats de travail sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert des moyens d'exploitation nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entité peut être indirect ; qu'en affirmant qu'aucun élément corporel ou incorporel attaché à l'activité de restauration n'aurait été transmis à l'association lorsqu'elle avait repris en gestion directe le marché jusqu'ici confié à la société Sodexo, sans avoir recherché si, comme la société Sodexo le faisait valoir dans ses conclusions d'appel, l'activité de restauration n'était pas exercée au moyen exclusivement du matériel mis à sa disposition par le donneur d'ordres, dans la cuisine créée à cette fin et mise à sa disposition dans les locaux de ce dernier, avec un personnel spécialement dédié composé de deux cuisiniers, M. Y... et M. A..., ce dont il résultait le transfert indirect de moyens d'exploitations exclusivement attachés à l'activité transférée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

2°/ que l'existence d'une entité économique autonome conservant son identité s'apprécie à la date du transfert d'entreprise ; qu'en écartant l'existence d'un transfert légal du contrat de travail de M. Y... vers l'association Adèle C... au jour de la résiliation du contrat de restauration à effet au 1er avril 2014, au motif que lorsque la société Sodexo avait, en 2008, obtenu le marché du service de restauration jusqu'ici assuré par l'association, il ne s'agissait pas alors d'une activité relevant d'une entité économique autonome, quand un tel constat était indifférent à l'appréciation de l'existence d'une telle entité, au jour de la rupture du contrat de restauration, la prestation s'exerçant alors dans la cuisine et avec l'ensemble du gros matériel mis à disposition du prestataire par l'association Adèle C... , la cour d'appel qui a statué suivant des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

3°/ que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont d'ordre public absolu de sorte qu'aucune des déclarations du cédant ou du cessionnaire, que ce soit antérieurement ou postérieurement au transfert d'activité ou au cours de la procédure, ne peut mettre obstacle à son application ; qu'en écartant l'existence d'un transfert de droit du contrat de travail de M. Y... vers l'association Adèle C... qui avait repris en exploitation directe le service de restauration, aux motifs qu'il aurait résulté d'un courrier de la société Sodexo qu'elle aurait admis « que le contrat de travail ne se trouvait pas, après la rupture des relations, transféré à l'association par application de l'article L. 1224-1 du code du travail » la cour d'appel, qui a statué par des motifs qui ne permettaient pas d'écarter le transfert automatique du contrat de travail de M. Y... si les condition légales en étaient réunies, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la prestation confiée par l'association à la société Sodexo ne concernait qu'une partie de l'activité de restauration de l'institution, la cour d'appel a pu décider, sans encourir les griefs du moyen, que le service exécuté par la société Sodexo ne constituait pas une entité économique autonome ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Sodexo santé médico-social aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... et rejette les autres demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit mars deux mille dix-huit.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Sodexo santé médico-social

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, d'AVOIR dit que M. Y... était resté le salarié de la société Sodexo, débouté MP. Y... de ses prétentions à l'encontre de l'association Adèle C... , prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la société Sodexo et condamné la société Sodexo à lui verser les sommes de 5.662,24 euros à titre d'indemnité de préavis, 566,22 euros au titre des congés payés sur préavis, 7.275,98 euros à titre d'indemnité légale de licenciement, 16.986,72 euros à titre de rappel de salaire d'avril à septembre 2014, 1.698,67 euros au titres des congés payés sur rappel de salaire, 1.415,56 euros à titre de reliquat de congés payés, ces sommes étant majorées au taux légal à compter du 28 mai 2014, 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement injustifié, 500 euros à titre de dommages-intérêts pour défaut d'information sur les droits individuels de formation et 2.000 euros d'indemnité au titre des frais irrépétibles, ainsi que d'AVOIR ordonné à la société Sodexo le remboursement à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à M. Y... dans la limite légale de six mois et la délivrance d'un certificat de travail, d'une attestation Pôle Emploi et de bulletins de salaires des mois de mars à septembre 2014 conformes à sa décision ;

AUX MOTIFS QU'à la date du 31 mars 2014, M. Roland Y... était employé par la société Sodexo en tant que chef de cuisine et affecté par son employeur, la société Sodexo Santé médico-social, à l'IME Saint-Joseph à Colmar, institution appartenant à l'association Adèle C... , ce en vertu d'un avenant en date du 26 juillet 2007 à son contrat de travail ; par lettre recommandée du 18 décembre 2013, l'association Adèle C... a confirmé à la société Sodexo Santé médico-social sa décision de résilier à effet du 31 mars 2014 le contrat de prestations de restauration qui la liait à la société afin de reprendre la gestion en direct de l'activité de restauration ; la société Sodexo Santé médico-social, considérant que la reprise par l'association Adèle C... de la gestion en direct de l'activité de restauration sur le site sur lequel M. Y... était affecté, emportait transfert du contrat de travail du salarié à l'association, a, par lettre recommandée avec avis de réception du 28 mars 2014, notifié à M. Y... que l'association deviendrait son employeur à compter du 1" avril 2014 ; l'association Adèle C... réfute cette analyse, et l'a fait savoir tant à la société Sodexo Santé médico-social par courrier du 19 mars 2014, qu'à M. Y... par courrier du 27 mars 2014 ; M. Y... qui n'a pas été repris par l'association, ni été réaffecté par son employeur Sodexo sur un autre site, s'est retrouvé à compter du 1er avril 2014, sans prestation de travail à effectuer et n'a plus été rémunéré ; dès lors qu'il soutient le prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail à l'encontre de l'association Adèle C... , subsidiairement de la société Sodexo Santé médico-social, il lui appartient d'établir le transfert de son contrat de travail à l'association ; l'article L. 1224-1 du code du travail dispose que "Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise" ; ce texte s'applique à tout transfert d'une entité économique conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; constitue une entité économique un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif propre ; par le contrat intitulé "contrat de restauration" conclu le 25 février 2008 et son avenant signé le 6 septembre 2012, l'association Adèle C... a confié à la société Sodexo les prestations de restauration des usagers, visiteurs et personnels de son établissement [...], puis de l'institut

Saint-Joseph de Colmar ; le contrat prévoyait la participation du personnel de l'association au service des repas (cf article 2.3), et fixait la composition des repas (cf article 2.4), tandis que la société Sodexo s'engageait à affecter une équipe (un responsable et des collaborateurs) à la réalisation des prestations (cf article 3) et que l'association garantissait à son prestataire Sodexo la mise à disposition paisible et sans défaillance de ses locaux, agencements, matériels et mobiliers, l'association restant libre de disposer desdits locaux en dehors des heures de service ; il était encore stipulé à l'article 3.5.1 du contrat que : "Pendant toute la durée du présent contrat, le CLIENT renonce expressément à embaucher à son service tout personnel de Sodexo Etablissements Médico-Sociaux participant ou ayant participé, à quelque titre que ce soit, à la réalisation de son objet. Cette renonciation demeurera en vigueur pendant une période de deux années suivant l'expiration du présent contrat, pour tout personnel d'encadrement, de quelque classification professionnelle qu'il soit, ayant été à un moment quelconque responsable de l'équipe Sodexo Etablissements Médico-Sociaux sur le lieu d'exécution des dispositions, objet des présentes" ; par l'effet de la résiliation du contrat de restauration à effet du 1er avril 2014, la société Sodexo Santé médico-social a perdu le marché qui la liait à l'association Adèle C... ; il n'en est pas résulté le transfert d'une entité économique autonome à l'association dès lors qu'antérieurement à la souscription du contrat l'association proposait directement, et parmi d'autres, des prestations de restauration pour ses pensionnaires et qu'elle a seulement pris en résiliant le contrat la "décision de retourner en autogestion" ; la société Sodexo, qui a contribué à cette activité préexistante avec son propre personnel, en l'occurrence M. Y... chef de cuisine et M. Sébastien A... cuisinier licencié le 14 mars 2014, et sans intégrer le personnel de l'association, en l'occurrence une salariée de l'association chargée de la plonge, ne lui a à l'issue du marché, transmis aucun élément corporel ou incorporel ; la société Sodexo a encore pris soin de préciser dans un courrier du 6 décembre 2013 à la directrice de l'institution Saint-Joseph que l'association ne pouvait s'opposer à une proposition de poste qu'elle ferait à M. Y..., la société Sodexo admettant par là même rechercher un reclassement pour son salarié et que le contrat de travail ne se trouvait pas, après la rupture des relations, transféré à l'association par application de l'article L. 1224-1 du code du travail dont les dispositions sont d'ordre public ; le contrat de travail de M. Y... n'a donc pas été transféré à l'association Adèle C... à compter du 1er avril 2014 ; M. Y... est resté salarié de la société Sodexo Santé médico-social laquelle ne lui a plus fourni de travail et ne l'a plus rémunéré ; il y a dès lors lieu d'infirmer le jugement entrepris quant au transfert du contrat à l'association Adèle C... et de débouter M. Y... de ses prétentions à l'encontre de l'association Adèle C... ; en revanche les premiers juges ont exactement retenu que l'employeur avait failli à ses obligations essentielles, en particulier à l'obligation de paiement du salaire à compter du 1er avril 2014, et ont exactement prononcé au visa de l'article 1184 du code civil, la résiliation judiciaire du contrat de travail à la date de leur décision soit le 29 septembre 2014 ; par infirmation du jugement, il sera dit que la résiliation du contrat est prononcé aux torts exclusifs de la société Sodexo Santé médico-social demeurée l'employeur ;

1°) ALORS QUE les contrats de travail sont maintenus entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise en cas de transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise ; que constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre ; que le transfert des moyens d'exploitation nécessaires à la poursuite de l'activité de l'entité peut être indirect ; qu'en affirmant qu'aucun élément corporel ou incorporel attaché à l'activité de restauration n'aurait été transmis à l'association lorsqu'elle avait repris en gestion directe le marché jusqu'ici confié à la société Sodexo, sans avoir recherché si, comme la société Sodexo le faisait valoir dans ses conclusions d'appel (pp.8 et 9), l'activité de restauration n'était pas exercée au moyen exclusivement du matériel mis à sa disposition par le donneur d'ordres, dans la cuisine créée à cette fin et mise à sa disposition dans les locaux de ce dernier, avec un personnel spécialement dédié composé de deux cuisiniers, M. Y... et M. A..., ce dont il résultait le transfert indirect de moyens d'exploitations exclusivement attachés à l'activité transférée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

2°) ALORS QUE l'existence d'une entité économique autonome conservant son identité s'apprécie à la date du transfert d'entreprise ; qu'en écartant l'existence d'un transfert légal du contrat de travail de M. Y... vers l'association Adèle C... au jour de la résiliation du contrat de restauration à effet au 1er avril 2014, au motif que lorsque la société Sodexo avait, en 2008, obtenu le marché du service de restauration jusqu'ici assuré par l'association, il ne s'agissait pas alors d'une activité relevant d'une entité économique autonome, quand un tel constat était indifférent à l'appréciation de l'existence d'une telle entité, au jour de la rupture du contrat de restauration, la prestation s'exerçant alors dans la cuisine et avec l'ensemble du gros matériel mis à disposition du prestataire par l'association Adèle C... , la cour d'appel qui a statué suivant des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 ;

3°) ALORS QUE les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail sont d'ordre public absolu de sorte qu'aucune des déclarations du cédant ou du cessionnaire, que ce soit antérieurement ou postérieurement au transfert d'activité ou au cours de la procédure, ne peut mettre obstacle à son application ; qu'en écartant l'existence d'un transfert de droit du contrat de travail de M. Y... vers l'association Adèle C... qui avait repris en exploitation directe le service de restauration, aux motifs qu'il aurait résulté d'un courrier de la société Sodexo qu'elle aurait admis « que le contrat de travail ne se trouvait pas, après la rupture des relations, transféré à l'association par application de l'article L. 1224-1 du code du travail » la cour d'appel qui a statué par des motifs qui ne permettaient pas d'écarter le transfert automatique du contrat de travail de M. Y... si les conditions légales en étaient réunies, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1224-1 du code du travail tel qu'interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-23683
Date de la décision : 28/03/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 06 juillet 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 mar. 2018, pourvoi n°16-23683


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, SCP Waquet, Farge et Hazan, SCP de Nervo et Poupet

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.23683
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