COMM.
JT
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10147 F
Pourvoi n° V 17-11.655
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Michèle X... épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 8 novembre 2016 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. Laurent Z..., domicilié [...] , pris en qualité de séquestre du prix du fonds de commerce d'officine de pharmacie sis [...] ,
2°/ à la société Groupe Welcoop, dont le siège est [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme A..., conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de Mme X... épouse Y..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Z..., ès qualités, de Me B..., avocat de la société Groupe Welcoop ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller, l'avis de Mme C..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... épouse Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Z... en qualité de séquestre et la somme de 3 000 euros à la société Groupe Welcoop ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour Mme X... épouse Y...
Il est reproché à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir ordonné à Me Z..., ès-qualités de séquestre du prix de vente du fonds de commerce de Mme Y..., de verser à la société Groupe Welcoop, la somme de 74 067, 21 euros et d'avoir débouté Mme Y... de sa demande de dommages-intérêts ;
Aux motifs propres que, dans son arrêt rendu le 19 juillet 2011, la cour d'appel de Reims a déclaré sans objet la demande de délais de paiement de Mme X... épouse Y... qui n'avait pas contesté le montant de sa créance ; que dans les motifs de cet arrêt, il était indiqué que l'appelante demandait à la cour la possibilité d'apurer sa dette par acomptes de 8 000 euros par mois sur 24 mois et de dire que le solde sera versé immédiatement lors de la vente de l'officine ; qu'il n'était pas fait état de sommes réglées sur le montant de la dette venant la diminuer, alors que les paiements allégués dans le cadre de la présente instance, de 2009 et 2010, ont une date antérieure aux débats devant la cour qui avait évoqué l'affaire à son audience du 28 juin 2011 ; que la SA Groupe Welcoop produit un décompte détaillé et actualisé de sa créance en principal, intérêts et frais au 21 juillet 2015 qui mentionne l'intégralité des sommes dues en vertu des décisions susvisées qui s'élevaient à la somme totale de 384 576,44 euros de laquelle il convenait de déduire les sommes réglées par la débitrice ; qu'aux termes des dispositions de l'article 1315 du code civil, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver, et c'est à celui qui se prétend libéré d'apporter la preuve de sa libération ; que Mme X... épouse Y... produit devant la cour des bordereaux émanant d'organismes sociaux qui portent sur une période antérieure à l'arrêt rendu par la cour en 2011 ; qu'elle soutient que certaines sommes ne se retrouvent pas dans le décompte de l'huissier ; que cependant ces comptes et rapprochements ne sont pas authentifiés, notamment par un expert-comptable ; comme l'a justement considéré le premier juge, il n'est pas justifié que l'ensemble des sommes alléguées aient été versées à l'huissier de la SA Groupe Welcoop et les justificatifs de leur éventuel encaissement par ce dernier ne sont pas produits ; que les observations des premiers juges apparaissent d'autre part pertinentes au vu de l'examen détaillé des pièces produites ; qu'il résulte de cet examen détaillé et des motifs susvisés de l'arrêt rendu par la cour d'appel de céans en juillet 2011 que l'appelante ne justifie pas suffisamment avoir payé le montant de la somme réclamée par l'intimée ; qu'elle sera donc déboutée de ses demandes et le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions aux termes desquelles il a ordonné à Maître Z..., és qualités de séquestre du prix de vente du fonds de commerce de Mme X... épouse Y... à verser à la SA Groupe Welcoop Ia somme de 74 067,21 euros ; que la SA Groupe Welcoop triomphant en ses demandes, la procédure introduite n'apparaît pas abusive, et la décision entreprise sera également confirmée en ce qu'elle a débouté Mme X... épouse Y... de ses demandes de dommages intérêts et en toutes ses dispositions ; qu'y ajoutant, Mme X... épouse Y... sera déboutée de ses autres demandes formulées en appel, notamment de restitution, et concernant les dépens de la procédure d'appel et ses frais irrépétibles ;
Et aux motifs adoptés que, suivant acte authentique en date du 31 août 2010 dressé par Me Z..., notaire à Aix en Othe, Mme X... épouse Y... a cédé à la Sarl Pharmacie Benkaddour son fonds de commerce d'officine de pharmacie sis à la [...] moyennant le prix de 1 600 000 euros ; qu'il est fait état dans l'acte de plusieurs inscriptions de nantissement : sur le fonds de commerce de pharmacie, inscription du 23 janvier 2003 au profit de la Société générale pour un montant de 97 500 euros, inscription du 20 février 2003 au profit de Cerp Lorraine, devenue le Groupe Welcoop, pour un montant de 250 000 euros ; inscription du 18 juin 2003 au profit de Cerp Lorraine pour un montant de 50 000 euros, inscription du 27 mai 2009 au profit de la CRCA pour un montant de 9 044 euros, inscription du 5 novembre 2009 au profit de Alliance health care, pour un montant de 327 000 euros ; sur le matériel de vidéosurveillance, inscription du 18 novembre 2005 au profit de GE Capital ; qu'il est encore indiqué dans l'acte au chapitre « constitution de séquestre » :
« Pendant le temps nécessaire à l'accomplissement des formalités à remplir sur la vente, les parties conviennent de remettre la somme de 1 600 000 euros, que vient de verser le cessionnaire, à Mademoiselle Nathalie D... , secrétaire notariale, domiciliée [...] , ci-après dénommée le séquestre. Cette remise a eu lieu, à l'instant même, ainsi qu'il résulte de la comptabilité du notaire soussigné. La somme séquestrée sera ensuite remise à AXA Banque, [...] . Le séquestre, présent et intervenant, accepte la mission de tiers convenu qui lui est confiée, dans les termes des articles 2074 et 2076 du code civil. La somme remise au séquestre demeurera affectée à titre de gage au profit de l'acquéreur pour lui garantir le rapport des mainlevées et radiation de toutes inscriptions, oppositions et autres empêchements quelconques. Le séquestre ne pourra remettre le prix de la cession au cédant que sur justification qu'il n'existe plus aucune inscription sur le fonds, que les oppositions ont été levées, et que tous les impôts, cotisations et loyers dus par le cédant auront été réglés. Pour obtenir la mainlevée des inscriptions ou oppositions, le séquestre est autorisé à utiliser la somme dont il est dépositaire au paiement des créanciers inscrits ou opposants, hors la présence et sans le concours du cédant. En cas de difficultés, il pourra verser les fonds à la Caisse des dépôts et consignations. La totalité du prix, s'il n'y a ni inscription ni opposition, ou ce qui restera après paiement des créanciers et des frais, pourra être remis au cédant hors la présence et sans le concours du cessionnaire » ; que suivant exploits d'huissier en date des 7 octobre et 4 novembre 2010, la société Le Groupe Welcoop a, en vertu du jugement du tribunal de commerce de Troyes du 19 janvier 2009, des jugements du juge de l'exécution de Troyes du 2 mars 2010 et du 26 avril 2010, et des inscriptions de nantissement du 20 février et du 18 juin 2003, a fait opposition au paiement du prix de vente du fonds de commerce en suite de la publicité de la vente au Bodacc le 26 octobre 2010, pour garantie du paiement de la somme de 321 259, 43 euros ; qu'il résulte de la comptabilité du notaire que ce dernier a désintéressé un certain nombre de créanciers, dont le Groupe Welcoop à hauteur de 250 000 euros le 3 décembre 2010, et qu'il a été donné mainlevée d'un certain nombre de nantissements, dont les nantissements au profit de la Société générale et de la CRCA, et que la somme de 72 000 euros a été consignée à la Caisse des dépôts et consignations le 15 septembre 2011 ; qu'à la date du 2 octobre 2012, le solde du compte s'élevait à la somme de 75 327, 45 euros ; que Mme Y... ne conteste pas le montant de la créance, tant en principal, qu'intérêts et frais, mais reproche à l'huissier de la société Le Groupe Welcoop de ne pas avoir comptabilisé un certain nombre de versements résultant d'actes d'exécution qu'il a réalisés ; qu'elle se borne à affirmer, sans donner de précisions, que se pose la question de « l'imputation des règlements en principal, intérêts ou frais » ; qu'en application de l'article 1315 du code civil, « Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation » ; qu'il appartient en conséquence à Mme Y... de prouver la réalité des paiements opérés entre les mains de l'huissier, et qui auraient été omis par ce dernier ; qu'elle verse aux débats les impressions de consultation d'un site Internet retraçant les versements mensuels effectués par les organismes payeurs ; qu'elle expose que certaines des sommes figurant dans la colonne « retours de l'organisme payeur » n'apparaissent pas dans le décompte de l'huissier ; qu'outre le fait que les versements de la plupart des mutuelles semblent être regroupés dans le décompte de l'huissier sous le vocable acompte Prevedies, les documents produits ne sont pas de nature à apporter la preuve que les sommes litigieuses ont été versées à l'huissier ; qu'en effet, à supposer que le fait qu'elles ne figurent pas la colonne « rapprochement bancaire » indique qu'elles n'ont pas été virées sur le compte de Mme Y..., rien n'établit qu'elles ont été encaissées par l'huissier du groupe Welcoop ; que, quant aux sommes figurant sur les bordereaux récapitulatifs de virements établis par SP Santé au nom de la SCP Gobet clément Fery, Mme Y... confirme pour l'essentiel les avoir vues sur le décompte de l'huissier mais relève au 18 mars 2010 une différence de 406,08 euros entre le total des virements répertoriés sur le bordereau de février 2010 et le montant des prélèvements figurant sur le décompte de l'huissier ; que cependant elle ne produit pas le bordereau de mars 2010 et il s'avère en conséquence impossible de comparer le total des sommes figurant sur l'ensemble des bordereaux et le total des sommes figurant sur le décompte de l'huissier au titre de ces prélèvements ; qu'à noter enfin que certaines des sommes dont Mme Y... indique qu'elles ont été omises par l'huissier figurent cependant sur le décompte de l'officier ministériel ; qu'en conséquence, Mme Y... ne rapporte pas la preuve qui lui incombe des paiements allégués ; que le décompte de la SCP Gobet Clement Fery au 30 avril 2014 fait apparaître après déduction des versements un solde débiteur de 74 067, 21 euros ;
Alors 1°) que, l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en relevant, pour considérer que Mme Y... ne pouvait utilement se prévaloir de règlements intervenus en 2009 et 2010, que les motifs de l'arrêt de la cour d'appel de Reims en date du 19 juillet 2011, ayant déclaré sans objet sa demande de délais et confirmé le jugement l'ayant condamnée à paiement de la somme de 327 749, 47 euros, ne faisaient pas état de sommes réglées par elle, venant en diminution de la dette, la cour a violé les articles 1351, devenu 1355, du code civil et 480 du code de procédure civile ;
Alors 2°) que, si c'est à celui qui se prétend libéré d'apporter la preuve de sa libération, la preuve d'un paiement, qui est un fait, est libre ; qu'en relevant, pour dénier toute portée aux bordereaux d'organismes sociaux produits par Mme Y..., que ces comptes et rapprochements n'étaient pas authentifiés par un expert-comptable, la cour, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé les articles 1315, alinéa 2, devenu 1353, et 1341, ancien, du code civil ;
Alors 3°) que, les juges du fond doivent motiver leur décision ; qu'en se bornant à énoncer qu'au vu de l'examen détaillé des pièces produites, les observations des premiers juges apparaissent pertinentes et qu'il convient de confirmer le jugement, la cour d'appel, qui s'est bornée à faire référence aux pièces versées aux débats, a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors 4°) que, les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; que, pour établir qu'elle s'était libérée de ses paiements à hauteur de 27 058, 02 euros supplémentaires et que la demande en paiement de la société Groupe Welcoop ne pouvait prospérer que dans la limite de 37 009, 19 euros, Mme Y... se fondait expressément sur des pièces regroupées dans un classeur, régulièrement communiqué aux débats (cf. bordereau de communication de pièces, pièces n° 19 ; ses conclusions, p. 4) ; qu'en accueillant la demande de la société Groupe Welcoop sans procéder à l'examen de ce document, la cour a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 455 du code de procédure civile ;
Alors 5°) que, la cour a expressément relevé que certaines des sommes, dont Mme Y... indiquait qu'elles avaient été omises par l'huissier, figuraient sur le décompte de l'officier ministériel ; qu'il en résulte que l'ensemble des sommes invoquées par elle n'avaient pas été prises en considération par le décompte de l'huissier ; qu'en arrêtant néanmoins à la somme de 74 067, 21 euros le montant de la créance de la société Groupe Welcoop, la cour, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 1315, alinéa 2, devenu 1353, du code civil.