COMM.
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 21 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10154 F
Pourvoi n° H 16-21.805
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société SD France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 28 avril 2016 par la cour d'appel de [...] chambre A), dans le litige l'opposant à la société Wedg, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme X..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société SD France, de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Wedg ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller référendaire, l'avis de Mme Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société SD France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Wedg ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société SD France
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société SD France à payer à la société WEDG la somme de 28.000 euros en réparation du préjudice résultant de l'inexécution du contrat d'approvisionnement et celle de 6.000 euros en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à son image suite à des faits de dénigrement
AUX MOTIFS QUE l'article 2 prévoit que les produits livrés seront payés par la société WEDG en totalité et en un seul versement dans un délai de 50 jours à compter de la date de la facture, celle-ci étant émise le jour de la livraison ; que l'article 5 précise que la livraison sera effectuée à l'entrepôt de la société WEDG ; que la société WEDG prétend que, de mauvaise foi, la société SD FRANCE a invoqué les délais légaux de 60 jours prévus par la loi LME pour contourner l'application de la clause contractuelle alors que le délai de 50 jours prévu par celle-ci respectait les dispositions légales, que par la suite elle a émis les factures à une date antérieure à celle prévue au contrat et qu'enfin, elle a exigé le paiement comptant des marchandises ; que la société SD FRANCE réplique que c'est la société WEDG qui ne respectait pas les délais de paiement en interprétant à sa façon le sens de « livraison » utilisé dans la profession ; qu'il résulte des mails invoqués par la société WEDG, que la société SD FRANCE lui reprochait de ne pas payer dans le délai contractuel alors que de son côté, elle avait l'obligation légale de payer les fournisseurs dans le délai de 60 jours à compter de la facture ce qui avait pour effet de l'obliger à avancer le montant des factures ; qu'un mail du 26 novembre 2012 précise que la société WEDG calcule la date d'échéance des factures à compter de la réception "ce qu'elle disait être "faux et illégal" ; que dans une note contenant les "explications de monsieur Z... sur la teneur du contrat d'approvisionnement" et à laquelle les conclusions de la société SD FRANCE renvoient pour défendre son allégation relative à la bonne exécution du contrat, son auteur expose que la facture est éditée le jour du départ de la marchandise "ce qui est dans notre vocabulaire la livraison" et que les règles et usages de la profession ont été explicitées à la société WEDG ce qui est acté par l'article 10 du contrat ; que cet article porte engagement de la société WEDG de respecter la réglementation applicable à ses activités, notamment le droit économique, ainsi que les règles et les usages de sa profession ; que ni cet article ni aucun autre ne prouve d'une part, que dans la "profession de soldeurs" la livraison s'entend du départ de la marchandise et d'autre part, que la société WEDG a été informée de ce sens particulier du mot 'livraison" ; que la société SD FRANCE ne pouvait donc calculer le délai contractuel de paiement des factures à compter du départ des marchandises et la société WEDG était fondée à payer 50 jours à compter de la livraison dans ses entrepôts date à laquelle devait être émise la facture, comme stipulé clairement par le contrat ; que par ailleurs, par mail du 22 novembre 2012, la société SD FRANCE a informé la société WEDG qu'elle attendrait le règlement de ses factures, notamment du stock, avant de procéder à d'autres commandes auprès de ses fournisseurs, à moins d'un règlement anticipé de celle-ci ou de l'assurance donnée à leurs conseils de leur paiement intégral à leur échéance ; que par mail du 28 février 2013, alors que le tribunal de commerce venait d'être saisi, qu'elle avait proposé des affaires qualifiées d'intéressantes à la société WEDG qui lui a indiqué qu'elles ne pouvaient plus travailler ensemble en raison du non-respect des conditions de règlement, la société SD FRANCE a confirmé que les commandes étaient soumises à leur paiement "avec de la vraie monnaie » ; que par mail du 9 juin 2013, lui proposant de passer les commandes de fin d'année, la société SD FRANCE a soumis celles-ci à la régularisation du compte (factures palettes, factures EDF, déductions unilatérales et somme d'environ 32.000 € restant toujours impayée), même si devant les protestations de la société WEDG, elle a répondu que les manquements de cette dernière, qui feraient l'objet d'un jugement, n'avaient rien à voir avec l'objet de son courrier qui concernait l'exécution du contrat d'approvisionnement ; que la société SD FRANCE a donc modifié unilatéralement les clauses du contrat, d'abord, en modifiant le point de départ du délai de paiement et ensuite, en exigeant un paiement anticipé des commandes ; que les violations par la société SD FRANCE du contrat ont eu pour effet d'interdire à la société WEDG de s'approvisionner par l'intermédiaire de la société SD FRANCE auprès des fournisseurs référencés par la centrale Centrakor et ce, aux prix intéressants dont la société SD FRANCE bénéficiait (selon les termes du contrat) et de limiter fortement les possibilités pour la société WEDG de passer des commandes directement auprès des fournisseurs ; qu'en effet, il résulte des explications des parties, que la plupart des fournisseurs en question n'acceptaient pas les commandes des sociétés n'ayant pas de crédibilité financière ou de cotation à la SFAC et c'est d'ailleurs pourquoi, le contrat d'approvisionnement a été conclu ; que le but du contrat, tel qu'annoncé par celui-ci était de permettre à la société WEDG de démarrer son activité dans de bonnes conditions en la faisant bénéficier de la logistique d'approvisionnement de la société SD FRANCE et de son assistance et il lui permettait de bénéficier des prix intéressants dont bénéficiait la société SD FRANCE qui lui revendait les produits, commandés par son intermédiaire, à prix coûtant ; que la société WEDG a donc subi un préjudice en ne pouvant bénéficier de l'avantage contractuel que lui octroyait le contrat ; que de plus, par mails du 26 novembre 2012, la société SD FRANCE a informé douze fournisseurs qu'ayant de sérieuses difficultés pour se faire rembourser par la société WEDG à laquelle elle avait vendu la société Ajaxdis, elle ne servirait plus d'intermédiaire pour les futures commandes de la société WEDG jusqu'à nouvel ordre et complet paiement des sommes dues et elle les a invités à prendre leurs dispositions ; que dans un mail adressé le même jour à la société WEDG, elle lui à indiqué que six fournisseurs l'avaient déjà remerciée de l'information ; qu'ainsi, alors que le contrat ne donnait aucune exclusivité à la société SD FRANCE et permettait à la société WEDG de s'approvisionner directement auprès des fournisseurs référencés par la centrale Centrakor et acceptant de le faire sans exiger de garantie particulière, le comportement de la société SD FRANCE a limité cette possibilité ; qu'il résulte toutefois de divers mails de la société SD FRANCE reprochant à la société WEDG d'avoir passé des commandes sans son intermédiaire, que la société WEDG a pu s'approvisionner auprès de certains fournisseurs de la Centrale ; que de plus, rien ne l'empêchait de s'approvisionner auprès d'autres fournisseurs, le contrat lui procurant des avantages, mais ne créant pas, contrairement à ce qu'elle dit, une dépendance économique envers la société SD France ; que la violation par la société SD FRANCE de ses obligations contractuelles ajoutée à son intervention auprès des fournisseurs a donc causé un préjudice à la société WEDG mais ce préjudice n'est pas égal à la différence entre la marge prévue par le prévisionnel et celle qui a été réalisée d'un montant de 127.007 € que la société WEDG réclame ; qu'en effet, même si le prévisionnel a été construit sur la base d'un fonctionnement normal du contrat d'approvisionnement, comme le précise l'expert-comptable qui l'a élaboré, les prévisions sont par nature de caractère incertain et même si le contrat avait été exécuté par la société SD FRANCE, la société WEDG ne pouvait être assurée de réaliser le chiffre d'affaires et la marge prévus par le prévisionnel, d'autant plus, que la société WEDG a été créée pour exploiter le site Art Cooking et que les éléments pris en compte pour élaborer le prévisionnel, qui n'est pas produit, ne sont pas précisés ; que la société WEDG inclut également dans sa demande, des dépenses d'approvisionnement d'un montant de 17.905€ et des frais de stockage de palettes de marchandises pour un montant de 2.084 € ; que selon le calcul de son expert-comptable, les dépenses précitées sont celles engagées afin de développer le site ; que celles-ci n'ont pas, en soi, un lien de causalité avec les manquements de la société SD France ; que quant aux frais de stockage de palettes, la société WEDG ne précise, ni en droit ni en fait en quoi ils sont imputables à la société SD FRANCE propriétaire de ces palettes, selon les différents courriers des parties, et dont elle réclame la restitution depuis la fin de l'année 2012 ; qu'en définitive, le préjudice de la société WEDG résultat de la violation du contrat par la société SD FRANCE se limite à une perte de chance de réaliser, à compter du 26 novembre 2012 et jusqu'au 31 décembre 2013, date d'expiration du contrat, une marge plus importante que celle qu'elle pouvait réaliser sans l'aide de la société SD FRANCE; qu'au vu, de l'ensemble des éléments d'appréciation dont dispose la cour, ce préjudice doit être évalué à 28.000 € ; que comme déjà indiqué, par mails du 26 novembre 2012, la société SD FRANCE a informé douze fournisseurs qu'ayant de sérieuses difficultés pour se faire rembourser par la société WEDG à laquelle elle avait vendu la société Ajaxdis, elle ne servirait plus d'intermédiaire pour les futures commandes de la société WEDG jusqu'à nouvel ordre et complet paiement des sommes dues et en les invitant à prendre leurs dispositions ; qu'en ne se contenant pas d'informer les fournisseurs que les commandes de la société WEDG ne pouvaient pas lui être facturées et en donnant des explications mettant en cause la seule responsabilité de la société WEDG, la société SD FRANCE a dénigré celle-ci ; que de plus, ce dénigrement résultait d'une volonté de nuire à la société WEDG ainsi qu'il résulte du mail en date du 26 novembre 2012 adressée à la société WEDG par la société SD FRANCE et dans lequel elle a écrit que, dans l'univers très particulier des soldeurs "tout se sait, tout se dit, surtout les problèmes de paiement", qu'il était normal de divulguer les informations sur les mauvais payeurs et elle a insisté sur le fait qu'il serait très difficile de retrouver une crédibilité auprès des importateurs ; que ce dénigrement a porté atteinte à l'image de la société WEDG dont six fournisseurs au moins, selon les dires de la société SD FRANCE dans le mail précité, l'ont remerciée de l'information donnée, et a eu pour conséquence de lui interdire de passer des commandes directement auprès de certains fournisseurs ; que ce dernier préjudice étant pris en compte dans l'indemnisation des conséquences de la violation du contrat d'exclusivité, le préjudice résultant de l'atteinte à l'image, doit être évalué à 6.000 €,
1) ALORS QUE pour retenir que la société SD France avait méconnu ses obligations au titre du contrat d'approvisionnement, la cour d'appel a considéré qu'elle ne pouvait exiger de la société WEDG un règlement qu'à 50 jours de la réception de la marchandise dans ses entrepôts; qu'en ne recherchant pas si la réduction du délai de règlement de 10 jours au regard de celui prévu par l'article L441-6 du code de commerce, auquel était tenue la société SD France vis-à-vis des fournisseurs, n'avait pas pour objectif de créer un décalage afin d'éviter que la société SD France ait à avancer les fonds avant d'avoir été payée par la société WEDG de la marchandise rétrocédée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 applicable en la cause (devenu 1103 du code civil) ;
2) ALORS QUE le contrat d'approvisionnement stipulait qu'il n'avait vocation à s'appliquer qu'à concurrence d'un encours fournisseur de 15.000 euros (article 2) ; qu'en fixant le préjudice à la somme de 28.000 euros, au titre de la perte de chance de réaliser la marge escomptée, sans tenir compte de la limite prévue au contrat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de 1147 du code civil dans sa rédaction applicable (devenu 1231-1 du code civil) ;
3) ALORS QUE la cour d'appel a retenu que « le dénigrement avait porté atteinte à l'image de la société WEDG dont six fournisseurs au moins, selon les dires de la société SD France, l'ont remerciée de l'information donnée et a eu pour conséquence de lui interdire de passer des commandes directement auprès de certains fournisseurs, ce dernier préjudice étant pris en compte dans l'indemnisation des conséquences de la violation du contrat d'exclusivité » ; qu'en condamnant la société SD France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, dont il résultait que le dénigrement n'était à l'origine d'aucune perte de marge supplémentaire au regard de celle qui était déjà indemnisée au titre de l'inexécution du contrat d'approvisionnement ; que la cour d'appel a ainsi violé le principe selon lequel la réparation est égale au préjudice subi, sans perte ni gain pour la victime, ensemble l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause (devenu l'article 1231-1 du code civil).