COMM.
JT
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 21 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10152 F
Pourvoi n° X 16-14.344
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ le GAEC du Limousin, dont le siège est [...]                              ,
2°/ M. Alexandre X..., domicilié [...]                                      ,
3°/ M. Philippe Y..., domicilié [...]                              ,
contre l'arrêt rendu le 21 janvier 2016 par la cour d'appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige les opposant à M. Guy Z..., domicilié [...]                      ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. A..., conseiller référendaire rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat du GAEC du Limousin et de MM. X... et Y..., de la SCP Gaschignard, avocat de M. Z... ;
Sur le rapport de M. A..., conseiller référendaire, l'avis de Mme B..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne le GAEC du Limousin et MM. X... et Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande ; les condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. Z... ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mars deux mille dix-huit.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour le GAEC du Limousin et MM. X... et Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir autorisé le retrait de M. Z... C... du Limousin ;
Aux motifs qu'« au soutien de sa demande de retrait du GAEC du Limousin, l'appelant se prévaut des dispositions de l'article 1851 alinéa 3 du code civil qui confèrent un droit de retrait au gérant associé révoqué, sans qu'il soit nécessaire de justifier d'un juste motif, et reproche au tribunal d'avoir fait une interprétation erronée du courrier qu'il a adressé le 12 décembre 2012 à ses associés, en considérant qu'il avait présenté sa démission de ses fonctions de gérant sans la conditionner à son retrait effectif du GAEC ou à la décision du tribunal en cas de refus des associés de le lui accorder, alors que sa demande de démission était nécessairement le pendant de son retrait du GAEC puisqu'en cas de retrait du GAEC, la démission des fonctions de gérant est obligatoire ; qu'il considère en conséquence que sa révocation de ses fonctions de gérant par l'assemblée générale extraordinaire du 10 ou 11 janvier 2013 lui confère un droit de retrait en application de l'article 1851 alinéa 3 du code civil ; que Messieurs Y... et X... et le GAEC du Limousin objectent que la démission de M. Z... de ses fonctions de gérant, donnée de manière indépendante du retrait, avait bien été acceptée et que le constat de cette démission par l'assemblée générale extraordinaire du 11 janvier 2013 ne constitue pas une destitution comme le prétend l'appelant, l'assemblée générale des associés s'étant contentée d'acter la décision de M. Z... de démissionner de ses fonctions de gérant ; qu'ils prétendent que leur associé n'ayant été ni destitué ni révoqué, l'article 1851 alinéa 3 du code civil ne peut trouver application de sorte que le retrait de M. Z... C... n'est pas de droit ; que selon l'article 1851 dernier alinéa du code civil, « sauf clause contraire, la révocation d'un gérant, qu'il soit associé ou non, n'entraîne pas la dissolution de la société. Si le gérant révoqué est un associé, il peut, à moins qu'il n'en soit autrement convenu dans les statuts, ou que les autres associés ne décident la dissolution anticipée de la société, se retirer de celle-ci dans les conditions prévues à l'article 1869 (2ème alinéa) » ; que l'article 1869 alinéa 2 prévoit qu'« à moins qu'il ne soit fait application de l'article 1844-9 (3ème alinéa), l'associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d'accord amiable, conformément à l'article 1843-4 », lequel prévoit que la valeur des droits sociaux est déterminée, en cas de contestation, par un expert ; qu'aux termes du courrier recommandé qu'il a adressé le 12 décembre 2012 à M. Alexandre X... et à M. Philippe Y..., M. Z... notifiait à ses associés la volonté de se retirer du GAEC en application des dispositions de l'article 21 des statuts, son état de santé constituant un motif grave et légitime de se retirer, et leur indiquait qu'en application de cet article 21, ils devaient lui faire part de leur position dans un délai de deux mois à compter de la réception de la présente, et, qu'à défaut d'accepter son retrait, il devrait saisir, passé ce délai, le tribunal de grande instance pour faire autoriser son retrait pour juste motif ; que M. Z... demandait ensuite à ses associés de lui faire des propositions de remboursement de ses droits dans le GAEC selon les modalités de l'article 25 des statuts, à savoir lui faire une proposition quant à la valeur de ses parts ; que, par ailleurs, il leur donnait également sa démission de sa fonction de gérant ; que les premiers juges ont considéré que la terminologie utilisée ainsi que les mots de transition entre les paragraphes de ce courrier ne permettaient pas de lier le retrait du GAEC à la démission des fonctions de gérant, tout à fait envisageable pour un associé, et que M. Z... avait présenté sa démission de ses fonctions de gérant sans la conditionner à son retrait effectif du GAEC ou à la décision du tribunal en cas de refus des associés de lui accorder ; mais que l'ordre des décisions notifiées par M. Z... à ses associés démontre au contraire que la démission des fonctions de gérant, qui était présentée comme une conséquence du retrait du GAEC et de la liquidation des droits sociaux demandée, puisque n'ayant plus la qualité d'associé il ne pouvait plus en être le gérant, était bien subordonnée à ce retrait ; que, comme l'admettent Messieurs X... et Y..., le retrait du GAEC de M. Z... n'avait pas été accepté à la date de l'assemblée générale extraordinaire du 10 janvier 2013 lors de laquelle il a été pris acte de la démission de M. Z... de la gérance de la société à compter du 1er janvier 2013 ; que cette résolution de l'assemblée générale des associés doit donc s'analyser comme une révocation de M. Z... de ses fonctions de gérant et c'est à tort que les premiers juges ont considéré que les dispositions de l'article 1851 du code civil n'étaient pas applicables au litige ; qu'au surplus, l'appelant justifie d'un motif grave et légitime au sens de l'article L. 323-4 du code rural et de l'article 21 des statuts du GAEC, pour se retirer de la société, le médecin du travail et de la prévention du MSA ayant certifié le 17 octobre 2012 que l'état de santé de M. Z... ne lui permettait plus de poursuivre son activité au sein du GAEC dans lequel il était associé et ayant confirmé cette inaptitude le 20 février 2013, après avoir constaté une dégradation marquée de l'état de santé de l'intéressé ; que le retrait de M. Z... C... du Limousin, exercé conformément aux dispositions de l'article 1851 alinéa 3 du code civil, sera donc autorisé et le jugement déféré infirmé en toutes ses dispositions » (arrêt attaqué, p. 5, dernier §, et p. 6).
1°) Alors que le retrait n'est de droit que pour l'associé révoqué de ses fonctions de gérant ; qu'en relevant qu'il résultait du courrier du 12 décembre 2012 (prod. n° 4) que, « par ailleurs », M. Z... donnait également sa démission de sa fonction de gérant, ce dont il résultait que cette démission était indépendante du retrait sollicité par M. Z..., et en retenant néanmoins que sa démission des ses fonctions de gérant était « présentée comme une conséquence du retrait du GAEC et de la liquidation des droits sociaux demandée, puisque n'ayant plus la qualité d'associé il ne pouvait plus en être le gérant, était bien subordonnée à ce retrait » (arrêt attaqué, p. 6, §5), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 1851 et 1869 du code civil, ensembles de l'article L. 323-4 du code rural et de l'article 21 des statuts du GAEC du Limousin ;
2°) Alors qu'en tout état de cause, en retenant qu'il ressortait du courrier du 12 décembre 2012 que M. Z... avait entendu subordonner la démission de ses fonctions de gérant à son retrait du GAEC, quand ce courrier énonçait que « par ailleurs, par la présente, je vous donne également ma démission de ma fonction de gérant » (prod. n° 4), ce dont il résultait que la démission de M. Z... prenait effet immédiatement, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du courrier du 12 décembre 2012, en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°) Alors ensuite qu'en relevant qu'il résultait du courrier du 12 décembre 2012 que, « par ailleurs », M. Z... donnait également sa démission de sa fonction de gérant, ce dont il résultait que cette démission était indépendante du retrait sollicité par M. Z..., et en retenant néanmoins que par l'assemblée générale extraordinaire du 11 janvier 2013, M. Z... avait été révoqué, dès lors que le retrait de celui-ci n'avait pas été accepté lors de cette assemblée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, en violation des articles 1851 et 1869 du code civil, ensemble de l'article L. 323-4 du code rural et de l'article 21 des statuts du GAEC du Limousin ;
4°) Alors qu'en tout état de cause, en retenant que par l'assemblée générale extraordinaire du 11 janvier 2013, M. Z... avait été révoqué, quand il résulte du procès-verbal de cette assemblée générale que le GAEC du Limousin a alors seulement pris acte de la démission de M. Z... de ses fonctions de gérant, sans intention de le révoquer, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du GAEC du Limousin du 11 janvier 2013 (prod. n° 5), en violation de l'article 1134 du code civil ;
5°) Alors encore que dans ses conclusions d'appel, le GAEC du Limousin faisait valoir que l'état de santé de M. Z... n'était pas de nature à justifier son retrait, dès lors que son incapacité de travail n'était que partielle (conclusions p. 20, 3°, §3 à §6) ; qu'en se fondant sur le certificat du médecin de la MSA du 17 octobre 2012 (prod. n°7) pour dire que M. Z... justifiait d'un motif grave et légitime de santé pour de se retirer du GAEC, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il ne résultait pas de ce certificat que l'incapacité de M. Z... n'était pas totale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1851 et 1869 du code civil, ensemble de l'article L. 323-4 du code rural et de l'article 21 des statuts du GAEC du Limousin ;
6°) Alors enfin qu'en se fondant sur l'attestation du médecin de la MSA en date du 20 février 2013 (prod. n°8) pour dire que M. Z... était inapte à continuer l'exercice de son activité au sein du GAEC du Limousin, quand cette attestation était postérieure à sa demande de retrait, ainsi qu'à la décision de ses associés de refuser ce retrait, la cour d'appel a violé les articles 1851 et 1869 du code civil, ensemble l'article L. 323-4 du code rural et l'article 21 des statuts du GAEC du Limousin.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir autorisé M. Z... à reprendre la jouissance des propriétés mises à disposition du GAEC du Limousin, puis d'avoir, avant-dire-droit sur la liquidation des droits sociaux de M. Z..., ordonné la réouverture des débats et invité les parties à présenter leurs observations sur la recevabilité de la demande de désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur des droits sociaux de M. Z... dans le GAEC du Limousin, avant le 18 février 2016 ;
Aux motifs qu'« en application de l'article L. 323-5 du code rural et des dispositions des conventions de mise à disposition signées le 30 décembre 2008 entre M. Z... et le GAEC du Limousin, l'appelant est bien fondé à solliciter la reprise des propriétés mises à la disposition du GAEC et il sera fait droit à cette demande ; que selon l'article 1843-4 du code civil, dans les cas où la loi renvoie au présent article pour fixer les conditions de rachat des droits sociaux d'un associé par la société, la valeur de ces droits est déterminée, en cas de contestation, par un expert désigné, soit par les parties, soit à défaut d'accord entre elles par ordonnance du président du Tribunal statuant en la forme des référés et sans recours possible ; qu'il existe en l'espèce un désaccord entre les parties sur la liquidation des droits sociaux de M. Z... et les parties sollicitent de la cour la désignation d'un expert ; qu'au regard des dispositions légales susvisées, il est nécessaire d'ordonner la réouverture des débats et d'inviter les parties à présenter leurs observations sur la recevabilité à hauteur de cour de la demande de désignation d'un expert au vu de la compétence exclusive attribuée au président du tribunal » (arrêt attaqué, p. 6, dernier §, et p. 7, §1).
Alors que l'associé retrayant a droit au remboursement de la valeur de ses droits dans le GAEC arrêtée à la date à laquelle il a décidé de se retirer ; que la détermination de la valeur des droits de l'associé retrayant doit tenir compte de ses dettes envers le GAEC ; que, dans la mesure de ses droits, il peut obtenir que lui soient attribués les biens qu'il a apportés en nature lorsqu'ils se retrouvent dans l'actif social ; qu'en autorisant M. Z... à reprendre la jouissance de ses propriétés mises à la disposition du GAEC du Limousin préalablement à la liquidation de ses droits dans le GAEC, de sorte que la reprise de ces apports n'a pas été effectuée dans la mesure de ses droits, la cour d'appel a violé l'article L. 323-5 du code rural.