CIV. 1
MF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10175 F
Pourvoi n° F 17-15.529
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par :
1°/ la société Axa corporate solutions assurance, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ la société Easydis, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , venant aux droits de la société Casino France,
contre l'arrêt rendu le 2 février 2017 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige les opposant à la société Compagnie nationale du Rhône, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. X..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat des sociétés Axa corporate solutions assurance et Easydis, de Me Y... , avocat de la société Compagnie nationale du Rhône ;
Sur le rapport de M. X..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Axa corporate solutions assurance et Easydis aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Compagnie nationale du Rhône la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour les sociétés Axa corporate solutions assurance et Easydis.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré la SAS Easydis venant aux droits de la SNC Casino France et la Compagnie AXA Corporate Solutions Assurance irrecevables en leurs demandes d'indemnisation des conséquences du sinistre à l'encontre de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné in solidum la SAS EASYDIS venant aux droits de la SNC Casino France et la compagnie AXA Corporate Solutions Assurance aux entiers dépens.
AUX MOTIFS QUE « la convention "d'occupation de dépendances immobilières de la concession de la Compagnie Nationale du Rhône" en date du 14 septembre 1993, conclue entre la CNR et la SNC Casino France a pour objet un bien immobilier appartenant au domaine public ; que le contrat relatif à ce bien domanial est dès lors un contrat administratif, comme soutenu à juste titre par l'ensemble des parties à la présente procédure ; que la seule mention de l'article 606 du code civil par cette convention comme indiqué à l'article 5.3 ne peut suffire à justifier de la volonté des parties de se soumettre aux dispositions du code civil, et ce malgré le caractère administratif du contrat, s'agissant d'une simple référence à la définition des grosses réparations prévues par cet article et alors qu'il est au contraire prévu à l'article 2 alinéa 5 de cette même convention que la domanialité publique du terrain s'oppose à ce que Casino France puisse invoquer l'application des dispositions législatives et réglementaires régissant les baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage industriel ou commercial et donc mentionnant la non application des dispositions du code civil au contrat administratif conclu entre les parties y compris en ses articles 1719 et 1147 du code civil invoqués par la SAS EASYDIS venant aux droits de la SNC Casino France et la compagnie AXA Corporate Solutions Assurance ; que la convention initiale conclue entre la CNR et la SNC Casino France le 14 septembre 1993 prévoit en son article 6.3 une clause de renonciation à recours, soit "Casino France et ses assureurs renoncent à tout recours à l'encontre de CNR et de ses assureurs du fait de la destruction ou détérioration totale ou partielle de tous matériels, objets mobiliers, valeurs quelconques et marchandises, du fait de la privation ou trouble de jouissance des lieux loués" ; que par courrier en date du 28 juillet 1995 versé aux débats de la société CASINO adressé à la CNR, cette dernière sollicite l'extension de la renonciation à recours susvisée à la société Sud Est Entrepôt, en sa qualité de société en charge de la prestation logistique et pour le compte de Casino ; que la SAS EASYDIS venant aux droits de la SNC Casino France ne peut dès lors valablement prétendre que la convention de renonciation à recours de février 1996 conclue entre Sud Est Entrepôt, le groupe Casino et la CNR vient remplacer celle conclue en 1993 par l'effet de la novation, cette dernière ayant elle-même sollicité non pas une substitution mais une extension et aucune disposition de la convention de 1996 ne prévoyant cette substitution prétendue ; que la clause de renonciation à recours résultant de la convention initiale de 1993 est par conséquent toujours applicable entre Casino, soit la SAS EASYDIS venant à ses droits et son assureur et CNR ; que les dispositions du code civil n'étant pas applicables à cette convention comme préalablement expliqué, la SAS EASYDIS ne peut dès lors valablement prétendre à la nullité de cette clause en application de ces dispositions, étant précisé que la clause de renonciation litigieuse au profit de la CNR a pour contrepartie une renonciation à tout recours au profit de la société Casino, qui est assurée et a d'ailleurs été indemnisée par son assureur, partie à la présente procédure des conséquences du sinistre ; que la clause de renonciation à tout recours mentionnée dans le contrat initial entre CNR et Casino, toujours applicable et valablement contractée prévoit clairement une renonciation par Casino et ses assureurs à tout recours du fait de la destruction ou détérioration totale ou partielle de tous matériels, objets mobiliers, valeurs quelconques et marchandises du fait de la privation ou trouble de jouissance des lieux loués, et ce de façon générale et donc quelle que soit l'origine du sinistre y compris suite à de fortes chutes de neige comme soutenu d'ailleurs par la SAS EASYDIS elle-même ; que le présent recours de la SAS EASYDIS venant aux droits de Casino et de son assureur en indemnisation des conséquences du sinistre de 1999, suite à la détérioration d'un entrepôt par de fortes chutes de neige est par conséquent irrecevable ; que le jugement contesté faisant droit à ces demandes d'indemnisation sera par conséquent infirmé et ces demandes déclarées irrecevables ; qu'aucune considération d'équité ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de quiconque » ;
ALORS QUE la convention de renonciation à recours signée par la CNR le 9 février 1996 stipulait clairement que « les parties signataires à la présente convention s'engagent à renoncer à tous recours qu'elles seraient fondées à exercer entre elles à l'occasion de sinistres survenant dans le bien désigné ci-après (
) résultant des évènements suivants : INCENDIE, EXPLOSIONS, DEGATS DES EAUX » et qu'« il est convenu d'un commun accord entre les parties que le présent document déroge en tant que de besoin à toute convention contraire qui aurait pu être passée antérieurement » (production) ; que cette convention énonçait donc expressément qu'elle constituait un avenant à la convention antérieurement conclue entre la CNR et la Société Casino le 14 septembre 1993, qui prévoyait en son article 6.3 une clause de renonciation à recours « du fait de la destruction ou détérioration totale ou partielle de tous matériels, objets mobiliers, valeurs quelconques et marchandises, du fait de la privation ou trouble de jouissance des lieux loués » (production) ; qu'en retenant néanmoins, pour considérer que la convention de renonciation à recours signée en 1996 ne s'était pas substituée à la clause de renonciation à recours établie en 1993, que cette dernière restait donc seule applicable, et pour déclarer le recours de la Société Casino irrecevable, qu'« aucune disposition de la convention de 1996 ne [prévoyait] cette substitution prétendue » (arrêt p. 6 alinéa 5), la Cour d'appel a dénaturé la clause claire et précise de la convention signée en 1996, en violation de l'article 1192 nouveau du Code civil, anciennement 1134 du Code civil.
ET ALORS QUE les juges du fond ne peuvent interpréter les conventions que si celles-ci sont obscures ou ambiguës ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a retenu que « par courrier en date du 28 juillet 1995 versé aux débats de la société CASINO adressé à la CNR, cette dernière sollicite l'extension de la renonciation à recours susvisée à la société Sud Est Entrepôt, en sa qualité de société en charge de la prestation logistique et pour le compte de Casino » (arrêt p. 6 alinéa 4) pour estimer que « La SAS EASYDIS venant aux droits de la SNC Casino France ne peut dès lors valablement prétendre que la convention de renonciation à recours de février 1996 conclue entre Sud Est Entrepôt, le groupe Casino et la CNR vient remplacer celle conclue en 1993 par l'effet de la novation, cette dernière ayant elle-même sollicité non pas une substitution mais une extension (
) » (arrêt p. 6 alinéa 5) ; qu'en statuant ainsi, en procédant à la recherche de la commune intention des parties, quand la convention de renonciation à recours signée par la CNR le 9 février 1996 stipulait clairement qu'« il est convenu d'un commun accord entre les parties que le présent document déroge en tant que de besoin à toute convention contraire qui aurait pu être passée antérieurement » (production), mention claire et précise qui n'était pas sujette à interprétation, la Cour d'appel a violé derechef l'article 1192 nouveau du Code civil, anciennement 1134 du Code civil.