CIV. 1
CGA
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10190 F
Pourvoi n° M 17-15.442
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Adrien H... , domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 29 novembre 2016 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :
1°/ à M. I... Z... H... ,
2°/ à Mme Marie H... ,
tous deux domiciliés [...] ,
3°/ à Mme Roselyne J... , épouse K... , domiciliée [...] , prise en qualité de légataire universelle de Thérèse H... ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 6 février 2018, où étaient présentes : Mme Batut, président, Mme X..., conseiller rapporteur, Mme Wallon, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de M. Adrien H... , de la SCP Alain Bénabent , avocat de M. I... Z... H... ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Adrien H... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. I... Z... H... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. Adrien H...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession d'Adrienne H... en en excluant l'actif immobilier, partagé par l'effet de donations-partages et de donations du vivant d'Adrienne H... , et d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de sa demande tendant à la désignation d'un expert judiciaire spécialisé dans l'évaluation des biens immobiliers avec pour mission, essentiellement, d'établir un inventaire exhaustif des biens et droits immobiliers devant être rapportés à la succession d'Adrienne H... , cette expertise devant porter sur les biens et droits immobiliers donnés par les actes suivants : acte de donation au profit de Mlles H... du 6 juin 1981 en ce compris la valeur de l'usufruit donné à M. I... Z... H... , acte de donation d'usufruit au profit de I... Z... H... du 22 octobre 1994, acte de donation au profit des héritiers du 12 août 1999, acte de vente du 2 novembre 1969 au profit de M. I... Z... H... (donation déguisée), s'adjoindre un sapiteur spécialisé pour l'évaluation des biens agricoles, établir une évaluation à la valeur au jour du décès de l'intégralité des actifs immobiliers, plus généralement de tous droits et créances devant être rapportés à la succession d'Adrienne H... ,
AUX MOTIFS QUE
« Sur l'ouverture des opérations de compte liquidation partage
Adrien H... plaide la nécessité d'une ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession maternelle dès lors, d'une part, que subsistent des biens à partager (valeur des parts sociales de la SCEA du domaine [...] qu'il a préemptées en sa qualité d'associé unique, revenus tirés des titres Wendel participations détenus par Adrienne H... sur un compte auprès de la banque Worms), d'autre part que l'article 922 du code civil impose de reconstituer fictivement la masse à partager en tenant compte de l'ensemble des donations consenties par Adrienne H... de 1946 à 1999, les estimations entreprises laissant supposer un non-respect des réserves individuelles et une réduction prévisible des donations excédant la quotité disponible, enfin que doivent être intégrées à la masse les donations directes ou [in]directes, déguisées ou non, dont a bénéficié l'aîné des enfants, lequel s'est approprié nombre d'objets à caractère historique de grand valeur (pistolets de l'empereur Napoléon, lettre de l'intéressé à Marie-Louise d'Autriche , mémoires du général M... , portrait de la reine Hortense par Gérard, sabre de Napoléon I).
Il estime ainsi que constituent des donations déguisées, rapportables à la succession:
- la vente, à un prix dérisoire, révélateur d'une intention libérale, par Adrienne H... le 2 novembre 1969 à Louis Z... de 150 hectares de terres situées sur la commune de [...] à défaut de preuve du paiement du prix,
- les dations en paiement intervenues les 12 mars 1988 et 21 décembre 1984 pour de prétendues dettes d'Adrienne H... dont la réalité n'est pas démontrée et qui ont permis à son frère de s'approprier des biens de grande valeur manifestement sous évalués (par exemple la toile du peintre Gérard déjà citée)
Il revendique le rapport à succession de l'ensemble des meubles et objets mobiliers qui meublaient l'appartement de l'avenue [...] dont Adrienne H... s'était réservée pour partie l'usufruit et, contestant la qualification de souvenirs de famille opposée par son frère, en revendique l'inclusion dans la masse à partager et dénonce un recel successoral commis par son frère.
Louis Z... H... , qui, rappelle que l'action initiée devant le Tribunal tendait uniquement à l'ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession maternelle et plaide à titre principal l'irrecevabilité des demandes relatives aux donations déguisées et recel successoral formées pour la première fois en cause d'appel, sollicite la confirmation du jugement dès lors qu'il ne subsiste plus de biens indivis à partager dans la mesure où le patrimoine immobilier a fait l'objet de donations-partage, non soumises à rapport, et de donations aux petits-enfants, également non rapportables, où le patrimoine mobilier a, pour partie, été partagé du vivant de Mme Adrienne H... , pour partie attribué à Louis Z... H... par l'effet de dations en paiement, le reste étant composé de souvenirs de famille, dont Louis Z... H... est dépositaire et qui échappent à la dévolution successorale, le sabre du duc de Vicence, donné à Louis Z... H... par son grand-père, étant devenu propriété de l'Etat.
La cour constate tout d'abord que l'intégralité de l'actif immobilier a été partagé du vivant d'Adrienne H... par l'effet de donations-partage et d'une donation à ses petites filles qui ne sont pas partie à la présente procédure. »
(
) sur les expertises immobilières
il est constant et non contesté que l'ensemble du patrimoine immobilier d'Adrienne H... a été partagé de son vivant entre ses enfants et petits-enfants entre 1946 et 1999 par le biais de donations-partages et de donations.
Il n'est aucun élément qui justifie, à ce stade alors que le notaire n'a pas entrepris ses opérations, une expertise du patrimoine immobilier que ne peuvent justifier les doutes émis par Adrien H... sur une éventuelle atteinte à sa réserve héréditaire » (arrêt, p. 4 et 5 et 10) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
« L'ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Madame Veuve Adrienne H...
L'article 815 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de demeurer dans l'indivision et que le partage peut toujours être provoqué.
Ces dispositions supposent en préalable l'existence d'une masse indivise à partager.
L'article 9 du code de procédure civile dispose qu'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions. II appartient donc à Monsieur Adrien H... de prouver qu'il existe une masse à partager.
Monsieur Adrien H... note dans ses écritures que le patrimoine immobilier de la défunte a été partagé avant son décès. Ce point est confirmé par une lettre de Maître A... au centre des impôts, en date du 10 mars 2009, dont il ressort que la défunte avait organisé sa succession et transmis tous ses biens en sorte qu'il est inutile de déposer une déclaration de succession. Ce point est aussi confirmé par une déclaration de succession ou un projet de déclaration (le document - pièce n° 1 du demandeur - n'est ni daté ni signé), rédigé par Monsieur Adrien H... , dont il ressort que l'actif de succession est nul.
Il n'existe donc pas de biens immobiliers indivis. » (jugement, p. 3) ;
1°) ALORS QUE ce n'est qu'au cours des opérations de compte, liquidation, partage de la succession que pourra être déterminée, par l'établissement de la masse de calcul, la valeur de la part de réserve à laquelle chaque héritier peut prétendre et que pourra être vérifié que chacun d'eux sera pourvu de ses parts ; que le descendant qui n'a pas concouru à la donation-partage, ou qui a reçu un lot inférieur à sa part de réserve, pourra alors exercer l'action en réduction, s'il n'existe pas à l'ouverture de la succession des biens non compris dans le partage et suffisants pour composer ou compléter sa réserve, compte tenu des libéralités dont il a pu bénéficier ; qu'en excluant les immeubles des opérations de compte, liquidation, partage de la succession d'Adrienne H... par la considération que l'intégralité de l'actif immobilier a été partagé du vivant d'Adrienne H... par l'effet de donations-partage, la cour d'appel a violé les articles 922, 1077 et 1077-1 du code civil, dans leur rédaction applicable en la cause ;
2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que M. Adrien H... faisait valoir dans ses conclusions qu'outre les donations-partages intervenues entre Adrienne H... et ses enfants, il convenait de réunir fictivement au sein de la masse de calcul diverses donations simples, celles du 6 septembre 1982 et du 22 octobre 1994 (au profit de I... Z... H... ), du 12 août 1999 (au profit de Thérèse, Marie et Adrien H... ) (v. conclusions d'appel, p. 10 à 12) ; qu'en se bornant à énoncer que l'intégralité de l'actif immobilier a été partagé du vivant d'Adrienne H... par l'effet de donations-partages, la Cour d'appel n'a pas répondu à ses conclusions opérantes et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE M. Adrien H... faisait valoir dans ses conclusions que la donation du 6 juin 1981 faite aux filles de I... Z... H... était en réalité une donation au profit de ce dernier de sorte qu'il convenait de l'intégrer à la masse de calcul (v. conclusions d'appel, p. 4, al. 2 et p. 10 à 12) ; qu'en se bornant à énoncer que l'intégralité de l'actif immobilier a été partagé du vivant d'Adrienne H... par l'effet de donations-partages et d'une donation à ses petites filles qui ne sont pas partie à la présente procédure, la cour d'appel n'a pas répondu à ses conclusions opérantes et a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS QUE M. Adrien H... faisait valoir dans ses conclusions qu'il n'était pas nécessaire de mettre dans la cause les filles de M. I... Z... H... puisque la masse de calcul n'avait pas encore été formée et que ce n'était qu'une fois que cette masse aura été identifiée par le notaire liquidateur qu'il pourra être question de solliciter la réduction des donations (conclusions d'appel, p. 12, al. 10) ; qu'en se bornant à énoncer que l'intégralité de l'actif immobilier a été partagé du vivant d'Adrienne H... par l'effet de donations-partages et d'une donation à ses petites filles qui ne sont pas partie à la présente procédure , la cour d'appel n'a pas répondu à ses conclusions opérantes et a violé l'article 455 du code de procédure civile.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de ses demandes tendant à voir dire et juger, d'une part, que les actes de dations en paiement réalisées au profit de M. I... Z... H... constituent des donations déguisées et que les biens objets de ces dations devront être rapportés à la succession pour leur valeur au jour du décès, d'autre part, qu'en omettant sciemment de rapporter à la succession les biens ayant fait l'objet des dations en paiement, M. I... Z... H... a commis un recel de succession et que par conséquent il sera privé de tout droit sur ces biens en application des dispositions de l'article 778 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur le sort des meubles et objets mobiliers
Adrien H... fait valoir qu'à son décès, Adrienne H... disposait d'un important mobilier, de grande valeur en raison de son caractère historique pour provenir de son ancêtre le général M... , notamment dans l'appartement qu'elle occupait [...] , qu'il reproche à son frère de s'être approprié à son décès sans effectuer aucun inventaire.
Louis Z... H... prétend qu'il ne subsiste aucun mobilier à partager dès lors que :
- au terme de son testament olographe du 6 décembre 1969, Adrienne H... léguait à chacun de ses fils l'un de ses deux châteaux avec tous les meubles, objets mobiliers, argenterie, souvenirs s'y trouvant, considérés par elle dépourvus de valeur vénale mais venant de la famille et devant rester là où ils se trouvent, leur interdisant pendant 20 ans de s'en défaire si ce n'est au profit de leurs descendants ou frère et soeurs,
- au terme d'un écrit établi le 28 août 1981, elle disposait que pour les "meubles de Paris", sa fille Marie recevrait en priorité les "Quatre saisons", Adrien les "deux buveurs d'Orlowsky", Louis Z... les "meubles et tableaux Caulaincourt", les "deux chevaux espagnols" et le "retour en traineau", enfin que Thérèse prendrait ce qu'elle voudrait des autres tableaux de famille, ajoutant qu'elle désirait que chacun conserve les meubles "qu'il a chez lui". Il fait observer que depuis 1981 l'appartement du 5ème étage n'était plus la propriété de sa mère qui conservait un droit d'usage sur une partie de l‘appartement,
- au terme de 2 dations en paiement des 21 décembre 1984 et 12 mars 1988, reçues par acte authentique, régulières et connues des héritiers, un certain nombre de meubles et objets mobiliers lui ont été affectés par Adrienne H... :
* le 21 décembre 1984 pour une valeur de 830 000 francs en paiement d'avances consenties
* le 12 mars 1988 pour une valeur de 840 000 francs en paiement d'une dette d'Adrienne H... de 678 652 francs envers la société civile d'exploitation du Domaine de CB... moyennant soulte à la charge de Louis Z... H... de 161 348 €
S'agissant des meubles objet de dations en paiement :
Adrien H... en dénonce le caractère fictif dès lors qu'aucune preuve des dettes imputées à Adrienne H... ne sont justifiées, que les objets attribués ont manifestement été sous-évalués (ainsi l'estimation à 50000 francs du tableau "L... Hortense" d'une valeur actuelle de plusieurs centaines de milliers d'euros) et revêtent le caractère de donations déguisées qui commandent le rapport de leur valeur à la succession.
Louis Z... H... objecte que ces dations en paiement ont été formalisées devant notaire, par actes authentiques dûment enregistrés et publiés, en toute transparence à l'égard des cohéritiers auxquels il incombe de faire la preuve d'une intention libérale d'Adrienne H... . Il ajoute que ces dations en paiement n'intéressent pas les opérations successorales.
La cour observe qu'Adrien H... , à qui incombe la preuve de donations déguisées ce qui suppose la démonstration, soit d'une remise sans cause du mobilier en l'absence d'une dette d'Adrienne H... envers son fils Louis Z..., soit d'une sous évaluation manifeste des biens objet des dations, propres à caractériser l'intention libérale de sa mère, ne fournit aucune estimation de ce que devait être, selon lui, la valeur des biens à l'époque de la dation ni aucun élément de nature à établir l'absence de dette d'Adrienne H... envers son fils alors que celui-ci fournit des éléments laissant supposer un train de vie dispendieux d'Adrienne H... durant les années passées au château M... , rendant vraisemblable les avances financières conséquentes évoquées par Louis Z... H... .
La demande d'Adrien H... tendant à voir requalifier en donations déguisées ces dations en paiement et retenir un recel successoral à l'encontre de Louis Z... H... sera rejetée. » ;
1°) ALORS QUE les héritiers réservataires sont admis à rapporter la preuve d'une donation déguisée de nature à porter atteinte à leur réserve par tous moyens et même à l'aide de présomptions ; qu'à cet égard la déclaration, relatée par le notaire dans un acte de dation en paiement, selon laquelle la débitrice, mère du créancier, a de nombreuses dettes à l'égard du bénéficiaire de la dation sans qu'il ne soit nullement justifié de telles dettes, est de nature à établir l'existence d'une donation déguisée au profit du créancier ; que dès lors en retenant, pour écarter l'existence d'une donation déguisée, que M. Adrien H... n'apportait aucun élément de nature à établir l'absence de dette d'Adrienne H... envers son fils, I... Z..., quand l'absence de justificatifs annexés aux minutes des dations en paiement du 21 décembre 1984 et du 12 mars 1988 établissant qu'Adrienne H... aurait bénéficié d'avances faites par M. I... Z... H... et qu'elle aurait été détentrice d'un compte courant débiteur dans la société de son fils, I... Z..., révélait le caractère fictif des dations, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
2°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que M. Adrien H... faisait valoir dans ses conclusions que le caractère fictif des dations en paiement ressortait de la clause de l'acte du 12 mars 1988 prévoyant que « si par force majeure, une vente autrement qu'à un musée national, s'avérait nécessaire, les prix de vente seront répartis entre les quatre enfants de Madame H... ou leurs ayants droit, par parts égales, mais après prélèvement par le vendeur de la valeur indiquée ci-dessus, actualisée par accord amiable ou par expert » (conclusions d'appel, p. 19, al. 3 et s.), clause qui ne pouvait se justifier que si M. I... Z... H... s'était approprié indûment les biens objet des dations en paiement ; qu'en ne répondant pas à ses conclusions opérantes, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de ses demandes tendant à voir dire et juger que les actes de dations en paiement réalisées au profit de M. I... Z... H... constituent des donations déguisées et que les biens objets de ces dations devront être rapportés à la succession pour leur valeur au jour du décès et qu'en omettant sciemment de rapporter à la succession les biens ayant fait l'objet des dations en paiement M. I... Z... H... a commis un recel de succession et que par conséquent il sera privé de tout droit sur ces biens en application des dispositions de l'article 778 du code civil, et d'avoir débouté M. Adrien H... de sa demande tendant à voir désigner un expert commissaire-priseur spécialisé en objet à valeur historique avec pour mission, essentiellement, de faire une prisée des meubles de l'appartement du 5e étage du [...] , donner une estimation des biens meubles dépendant de la succession d'Adrienne H... , lesquels sont en principe toujours présents au domicile parisien de M. Louis Z... H... ([...] ) ou en tout autre lieu auquel ils pourraient se trouver, donner une estimation du sabre de Campo-Formio vendu par M. I... Z... H... au musée de Fontainebleau le 19 février 1996 dans le cadre d'une dation en paiement, lequel sabre se trouve audit musée et dresser rapport du tout ;
AUX MOTIFS QUE
« S'agissant des dispositions testamentaires :
Plus généralement, les dispositions testamentaires des 6 décembre 1969 et 28 août 1981 établissent que, dès avant les dations en paiement, Adrienne H... avait réglé le sort de l'ensemble des meubles et mobilier meublant dont elle était propriétaire, notamment les "meubles et tableaux Caulaincourt" visés par Adrien H... , qui meublaient l'appartement du 5eme étage, devenu la propriété de Louis Z... H... et qui constituait son "chez lui" au sens des dispositions testamentaires du 28 août 1981.
La demande d'Adrien H... tendant à voir ordonner un inventaire et la prisée de l'ensemble des meubles et mobilier de l'appartement sis au [...] sera, par suite, rejetée. » (arrêt, p. 8, al. 1 à 3) ;
ALORS QUE tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision ; que l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence ; qu'en retenant que les dispositions testamentaires des 6 décembre 1969 et 28 août 1981, mentionnant le souhait d'Adrienne H... que chacun conserve les meubles « qu'il a chez lui », établiraient qu'elle avait réglé le sort de l'ensemble des meubles et mobilier meublant dont elle était propriétaire, qui se trouvaient dans l'appartement du 5e étage, devenu la propriété de Louis Z... H... et qui constituait son "chez lui" au sens des dispositions testamentaires du 28 août 1981, sans expliquer en quoi, malgré le droit d'usage et d'habitation conservé par Adrienne H... sur une partie de l'appartement du 5e étage, celle-ci n'y était pas « chez elle », la Cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision et violé l'article 455 du code de procédure civile.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de sa demande tendant, pour parvenir au partage des biens de la succession de sa mère, à voir désigner un expert commissaire-priseur spécialisé en objet à valeur historique avec pour mission, essentiellement, de faire une prisée des meubles de l'appartement du 5e étage du [...] , donner une estimation des biens meubles dépendant de la succession d'Adrienne H... , lesquels sont en principe toujours présents au domicile parisien de M. Louis Z... H... ([...] ) ou en tout autre lieu auquel ils pourraient se trouver, donner une estimation du sabre de Campo-Formio vendu par M. I... Z... H... au musée de Fontainebleau le 19 février 1996 dans le cadre d'une dation en paiement, lequel sabre se trouve audit musée et dresser rapport du tout ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur les pistolets de l'Empereur, la lettre à Marie-Louise et les mémoires du général M... :
Louis Z... H... fait valoir que les pistolets, offerts par l'Empereur à leur aïeul, en récompense de sa bravoure et de son courage, constituent des souvenirs de famille au même titre que la lettre de l'Empereur à Marie-Louise lors de son abdication et que le manuscrit original des mémoires du général M... , échappant comme tels à la dévolution successorale, et qu'il en a été constitué dépositaire par la défunte en tant que fils aîné et propriétaire du château de [...] .
Adrien H... le conteste dans la mesure où la notion de souvenirs de famille, qui doit s'entendre restrictivement en ce qu'elle constitue une exception au mécanisme de dévolution successorale, ne peut s'appliquer à des documents ou objets émanant de tiers.
La cour considère que les pistolets offerts par Napoléon au général M... en ce qu'ils viennent illustrer la reconnaissance du courage et de la bravoure de l‘ancêtre des parties ont une valeur affective et morale essentielle pour la famille M... et, comme le souligne Louis Z... H... , participent du "récit fondateur" de la famille. Ils revêtent indéniablement le caractère de souvenirs de famille au même titre d'ailleurs que le manuscrit original des mémoires du général M... , aïeul des parties. » ; (arrêt, p. 8, antépénultième al. à p. 9, al. 1 à 3) ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
« Monsieur Adrien H... fait ensuite état de pistolets ayant appartenu à Napoléon d'une lettre adressée par celui-ci à son épouse lors de l'abdication de 1815 et de mémoires rédigés par le général M... .
Les souvenirs de famille sont les biens qui présentent pour les membres d'une famille une valeur affective et morale qui prévaut sur leur valeur vénale quelle que soit son importance. Selon la définition qu'en donnent Messieurs C... et D..., ce sont des objets quasi historiques qui constituent la mémoire ou le musée de la famille et qui contribuent à l'honneur de celle-ci
Les pistolets ayant appartenu à Napoléon et la lettre adressée par celui-ci à son épouse lors de l'abdication de 1815 et les mémoires rédigés par le général M... répondent précisément à ces définitions. Ce sont des souvenirs de famille.
Les souvenirs de famille échappent aux règles de dévolution successorale et de partage établies par le code civil, Ils sont exclus de tout partage.
Il peut être noté surabondamment que Monsieur Louis Z... H... n'a pas sur eux un droit de propriété mais seulement de dépôt et de garde. » ; (jugement p.3)
ALORS QUE des biens ne peuvent être qualifiés de souvenirs de familles, par nature indisponibles, que s'ils ont été et sont encore considérés comme tels par les membres de celle-ci ; qu'en considérant que les pistolets offerts par Napoléon 1er au général M... et le manuscrit original des mémoires du général M... , revêtaient le caractère de souvenirs de famille sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel, p. 20, dernier al., p. 24, al. 8 et s., p. 25 al. 2 et 5 et s.) si ces biens étaient toujours considérés comme des souvenirs de famille par la famille H... , notamment par M. I... Z... lui-même, qui non seulement avait vendu le sabre dit de Campo Formio remis par l'Empereur à leur aïeul, le général M... , mais avait également proposé à M. Adrien H... , dans une lettre du 1er décembre 2008, de se servir de la lettre de l'Empereur ainsi que du manuscrit original des mémoires du général M... dans le cadre d'une dation au paiement au profit de l'Etat, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des principes régissant les souvenirs de famille.
CINQUIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de ses demandes tendant à voir dire et juger qu'en procédant à la vente du sabre de Campo-Formio et en omettant de le rapporter à la succession de sa mère, M. I... Z... H... a commis un recel successoral au préjudice de ses cohéritiers, qu'il devra rapporter la valeur du sabre de Campo-Formio à la succession et sera privé de tout droit sur ce bien en application des dispositions de l'article 778 du code civil ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur le sabre de Campo Formio :
Adrien H... dénonce encore l'appropriation par son frère de ce sabre ayant appartenu à l'Empereur Napoléon 1 er, remis à leur aïeul le général M... et transmis à Adrienne H... de la succession de laquelle il dépend.
Il conteste la validité de l'attestation produite par son frère, prétendument établie par Adrienne H... , alors âgée de 93 ans, affirmant que ce sabre aurait été donné par son grand-père à Louis Z... au jour de sa naissance alors que l'appartenance de ce sabre à leur mère est notoire.
Louis Z... H... le conteste, affirme que ce sabre était la propriété de son grand-père qui, selon la tradition familiale, l'a offert à son petit-fils en cadeau de naissance en sorte qu'il n'a jamais fait partie de la succession de sa mère Adrienne H... ainsi que l'a confirmé cette dernière, de sorte qu'il était en droit d'en faire donation aux Musées de France en 1994 ainsi qu'il en justifie.
La cour n'a pas de raison de douter de la force probante de la déclaration établie le 22 octobre 1994 sous la signature d'Adrienne H... (dont l'authenticité n'est pas contestée, pas plus que la mention manuscrite "mon fils aîné" ajoutée au texte dactylographié) lorsqu'il n'est pas soutenu, par ailleurs, qu'Adrienne H... n'avait plus toutes ses facultés mentales à l'époque de cette attestation et où aucun membre de la famille ne vient contredire le don du grand-père à son petit-fils.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il considère que ce sabre ne faisait pas partie de la succession d'Adrienne H... . » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE
« S'agissant des biens mobiliers, Monsieur Adrien H... fait d'abord état d'un sabre dit de Campo Formio. Or, ce sabre n'est pas en possession de Monsieur Louis Z... H... puisque le demandeur indique dans ses écritures qu'il aurait fait l'objet d'une dation en paiement.
Ce sabre ne fait donc pas partie du patrimoine du défunt et il n'est pas en possession de Monsieur Louis Z... H... . »,(jugement p.3 in medio)
1°) ALORS QU'afin de bénéficier de la présomption de don manuel, le prétendu donataire doit établir qu'il a la possession du bien litigieux ; qu'en se bornant à retenir qu'elle n'avait pas de raison de douter de la force probante de la déclaration établie le 22 octobre 1994 sous la signature d'Adrienne H... , sans nullement caractériser la possession du sabre de Campio Formio par M. I... Z... H... avant que celui-ci ne le vende, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2279 ancien du code civil ;
2°) ALORS, à supposer que la cour d'appel ait considéré que la déclaration d'Adrienne H... constituait la preuve écrite de l'existence du don manuel, QUE l'intention libérale nécessaire à la preuve de l'existence d'un don manuel se fait, en principe, selon les exigences propres aux actes juridiques, soit par un écrit si la valeur du bien litigieux excède la valeur fixée par décret ; qu'en se bornant à relever que la preuve de la donation manuelle était établie par la déclaration d'Adrienne H... qui attestait de la tradition du sabre de Campo Formio à son fils sans relever l'existence d'un écrit démontrant l'intention libérale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1341 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016.
SIXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, débouté M. Adrien H... de sa demande tendant à voir dire et juger que l'acte de vente du 2 novembre 1969 constitue une donation déguisée au profit de M. I... Z... H... et que les biens donnés devront être rapportés à la succession pour leur valeur au jour du décès ;
AUX MOTIFS QUE
« Sur la vente du 2 novembre 1969
Adrien H... conteste encore la licéité de la vente consentie le 2 novembre 1969 par Adrienne H... à son fils Louis Z..., portant sur 150 hectares dc terres situées sur la commune M... et ses environs, au prix de 1 050 000 francs payable en trois échéances dont il affirme qu'elles n'ont pas été réglées, ce dont il déduit que la vente était fictive et constituait en réalité une donation déguisée qui justifie un rapport en valeur à la succession. II dénonce encore un prix de vente "particulièrement bas" démontrant l'intention libérale d'Adrienne H... .
Louis Z... H... , qui rappelle que la charge de la preuve de la donation déguisée pèse sur celui qui l'invoque, le conteste et fait valoir que cette vente, vieille de plus de 40 ans, est régulière sur la forme et sur le fond, définitive et couverte par la prescription.
(
)
La cour constate que le prix de 1 050 000 francs était payable à raison de trois échéances de 350 000 francs, que Louis Z... H... justifie de la réception par Maître F... notaire à [...] d'un chèque de 700 000 francs le 15 octobre 1970 puis d'un chèque de 350 000 francs le 6 janvier 1972 en règlement de ces échéances, ces courriers étant corroborés par les extraits des journaux comptables du Groupement foncier Agricole relatant les paiements.
Adrien H... ne fournit aucun élément permettant de considérer que le prix des parcelles objet de la vente était à l'époque sous-évalué.
Enfin, la cour considère que l'étude établie par un bureau d'études agricoles représenté par M. G... le 29 novembre 1974 qui, à la faveur de l'analyse d'un projet de donation-partage, évoquait une répartition apparemment équitable des biens entre les héritiers mais soulignait les difficultés engendrées par un mode de donation variable (donation de 1945, vente fictive, donation de 1974 etc...), sans de plus amples précisions sur la "vente fictive" visée n'est pas suffisante pour contredire les règlements attestés par Maître F... en 1970 et 1971 en paiement des parcelles cédées par Adrienne H... et caractériser la vente fictive dénoncée.
La demande formée par Adrien H... tendant à voir requalifier cette vente en donation déguisée sera, en conséquence, rejetée. » ;
1°) ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les écrits clairs et précis qui leurs sont soumis ; qu'en jugeant, pour écarter la qualification de donation déguisée, que Louis Z... H... justifiait la réception par Maître F... notaire à [...] d'un chèque de 700 000 francs le 15 octobre 1970 alors que la lettre datée du 15 octobre 1970, non signée, ne contient aucun entête, de sorte que rien ne permettait de dire que Me F... en serait l'auteur, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, en méconnaissance de l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ;
2°) ALORS QUE les héritiers réservataires sont admis à rapporter la preuve d'une donation déguisée de nature à porter atteinte à leur réserve par tous moyens et même à l'aide de présomptions ; que dès lors, en retenant, pour refuser de qualifier la vente du 2 novembre 1969 de donation déguisée, que l'étude de M. G... du 29 novembre 1974 qui, à la faveur de l'analyse d'un projet de donation-partage, soulignait les difficultés engendrées par un mode de donation variable (donation de 1945, vente fictive, donation de 1974 etc...), n'est pas suffisante, en l'absence de précision sur cette vente fictive, pour contredire les règlements attestés par Maître F... en 1970 et 1971 en paiement des parcelles cédées par Adrienne H... sans expliquer en quoi il ne pouvait s'agir de la vente du 2 novembre 1969 quand, comme le soulignait M. André H... , le nombre d'hectares visés par M. G... comme appartenant à M. Louis Z... H... correspondait précisément à la surface reçue par ce dernier dans une donation-partage du 15 février 1946 et dans la prétendue vente du 2 novembre 1969, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1353 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;
3°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en considérant, pour écarter la qualification de donation déguisée, que M. Adrien H... ne fournissait aucun élément permettant de considérer que le prix des parcelles objet de la vente était à l'époque sous-évalué sans examiner la lettre du 29 novembre 1974 de M. G..., du bureau d'étude agricole de Saint-Quentin, dans laquelle ce dernier indiquait la valeur d'un hectare de terre à [...], et permettait de déterminer le prix des parcelles à l'époque de la donation, la cour d'appel a violé les articles 455 du code de procédure civile.