SOC.
IK
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 14 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10333 F
Pourvoi n° C 16-28.356
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Gilles Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2016 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre, section 2, chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Prodware, société anonyme, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
La société Prodware a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 7 février 2018, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Pécaut-Rivolier, conseiller rapporteur, Mme Slove, conseiller, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Y..., de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Prodware ;
Sur le rapport de Mme Pécaut-Rivolier, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation du pourvoi principal et celui du pourvoi incident annexés, invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;
Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits, au pourvoi principal, par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. Y...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Gilles Y... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamnation de son employeur au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement nul ;
AUX MOTIFS QUE " La cour examinera successivement les manquements dénoncés par Monsieur Y... au soutien de sa demande de prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à la société Prodware, étant rappelé que, conformément à l'article 1184 du code civil, le prononcé de la résiliation du contrat ne peut intervenir qu'en cas de manquement grave et concomitant à l'époque de la rupture de l'employeur à ses obligations ;
QUE Monsieur Y... prétend, en premier lieu, avoir été victime de faits de harcèlement moral de la part de son employeur, la cour rappelant qu'en application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque survient un litige relatif à des faits de harcèlement au sens de l'article L.1152 - 1 du code du travail, le salarié établit, conformément à l'article L.1154 - 1 du code du travail, des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
QUE la cour estime, comme le conseil de prud'hommes, que les pièces versées aux débats par Monsieur Y... à savoir, pour l'essentiel, des courriels échangés avec son supérieur hiérarchique Monsieur Z..., ne peuvent être considérées comme des pièces permettant de présumer l'existence d'un harcèlement au sens de l'article précité ; qu'en effet les échanges entre ces deux salariés sont principalement constitués par des demandes d'informations formulées par Monsieur Z... à Monsieur Y... auxquelles Monsieur Y... répond de façon particulièrement complète et au vu desquelles le supérieur hiérarchique forme, pour certaines, de nouvelles demandes entraînant des réponses en suivant de Monsieur Y... ; qu'il s'agit d'expressions du pouvoir hiérarchique de Monsieur Z... sur Monsieur Y... qui ne peuvent être considérées comme des agissements faisant présumer l'existence de faits de harcèlement ; que les prétendus griefs non fondés devant témoins ne sont pas plus établis, s'agissant de conversations téléphoniques alléguées sans preuve et sans production d'attestation de témoins confirmant les prétentions de Monsieur Y... ; que le paiement tardif du complément de salaire pendant sa maladie ne peut pas plus être considéré comme une présomption de faits de harcèlement alors que le complément n'est payé que sur production des relevés de la caisse d'assurance maladie et que la cour ne possède pas d'éléments suffisants pour connaître la date à laquelle Monsieur Y... a envoyé à son employeur les justificatifs permettant de s'acquitter des sommes dues par lui ; que la cour ne peut pas plus considérer comme constitutif de présomption de harcèlement moral le paiement tardif de certaines notes de frais par la société Prodware dans la mesure où elle ne connaît pas les dates exactes auxquelles Monsieur Y... a effectivement envoyé au service concerné les justificatifs sollicités, le fait que ses demandes en paiement aient été renouvelées étant insuffisant à caractériser cette présomption de harcèlement moral ;
QU'il est établi par Monsieur Y... qu'il a, par mail du 6 février 2013, alerté le directeur des ressources humaines, Monsieur A..., sur des actes commis par son supérieur hiérarchique Monsieur Z..., constitutifs, selon Monsieur Y..., de faits de harcèlement moral et qu'il appartient à la société Prodware de rapporter la preuve qu'elle a respecté son obligation de sécurité à l'égard de son salarié qui faisait état de faits compromettant sa santé et sollicitait l'aide de la direction des ressources humaines ; qu'il indiquait qu'il avait le sentiment profond d'être délibérément mis en situation d'échec par son supérieur hiérarchique et indiquait être sous antidépresseurs depuis 3 mois, son entourage voyant sa santé morale et psychologique décliner ;
QUE contrairement à ce que soutient Monsieur Y..., le directeur des ressources humaines de la société Prodware n'est pas resté sans réaction face à ce mail d'alerte puisqu'il lui a répondu par mail envoyé moins de 40 mn après l'envoi du mail d'alerte en faisant référence à une communication téléphonique ayant suivi la réception du mail d'alerte par Monsieur A... proposant à Monsieur Y... une rencontre à Paris le lundi ou le mercredi suivant, étant rappelé que Monsieur Y... travaillait 3 jours par semaine au siège parisien de la société Prodware ; qu'il a indiqué qu'il aurait un entretien avec Monsieur Z... la semaine suivante, destiné à échanger avec lui au sujet des faits dénoncés dans le mail d'alerte et, qu'en fin de journée, Monsieur Y... proposait que la rencontre avec Monsieur A... soit organisée le mercredi suivant à 8 heures à Paris ;
QUE comme il a été indiqué dans l'exposé du litige, Monsieur Y... a été placé en arrêt maladie le jour même de l'envoi de son mail d'alerte de sorte que le contrat de travail était suspendu et que le licenciement est intervenu sans reprise du travail ;
QUE pendant l'arrêt maladie, sur nouvelle demande de Monsieur Y..., une rencontre est intervenue entre Monsieur Y... et le directeur des ressources humaines Monsieur A..., le 25 avril 2013, rencontre que Monsieur Y... juge sans conséquence positive sur l'évolution de sa situation professionnelle ; qu'à la suite de cette rencontre, Monsieur A..., directeur des ressources humaines a, sans succès, proposé par courriel du 13 mai d'organiser une rencontre dite tripartite entre lui même, Monsieur Y... et Monsieur Z... ;
QUE la cour estime, comme le conseil de prud'hommes, que la société Prodware justifie ainsi avoir exécuté son obligation de sécurité à l'égard de son salarié qui l'avait alertée de sa situation de souffrance au travail le 6 février 2013 (
)" ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE "les objectifs illogiques et la pression permanente évoquée par Monsieur Y... ne sont que le résultat d'une mauvaise organisation et d'une communication aléatoire de l'entreprise qui, bien évidemment, a pour conséquence de compliquer la tâche de tous les salariés ; que cette situation a une répercussion sur les relations entre hiérarchie et les salariés, appuyée par un management contestable de Monsieur Z..., hiérarchie directe de Monsieur Y... ; que ces faits ne justifient pas le harcèlement moral soulevé par Monsieur Y... ;
QUE la SA Prodware a pris en compte immédiatement dès l'alerte de Monsieur Y... les mesures nécessaires à sa sécurité en lui proposant deux possibilités de rencontre ; que cela n'a pas été possible compte tenu de la mise en arrêt de maladie de Monsieur Y... ; que Monsieur A... a proposé à Monsieur Y... le 11/04/2013 de le rencontrer à nouveau afin de discuter des reproches faits à la Société Prodware ; que par mail du 13 mai 2013, Monsieur A... a proposé une réunion tripartite à Monsieur Y... avec Monsieur Z... afin de renouer le dialogue et d'envisager une reprise du travail ; que Monsieur Y... n'a pas accepté cette rencontre (
)" ;
1°) ALORS QU'aux termes de l'article L.1154-1 du Code du travail dans sa rédaction, issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, applicable aux instances en cours à compter du 10 août 2016, lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L.1152-1 à L.1152-3 et L.1153-1 à L.1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en mettant à la charge de Monsieur Y... l'obligation "[d']établir, conformément à l'article L.1154-1 du Code du travail, des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement" quand il lui appartenait uniquement de présenter de tels faits, la Cour d'appel a violé par refus d'application l'article L.1154-1 du Code du travail dans sa rédaction applicable au litige, issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, ensemble l'article 2 du Code civil ;
2°) ALORS subsidiairement QUE pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L.1152-1 du code du travail ; que, dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que, sous réserve d'exercer son office dans les conditions qui précèdent, le juge apprécie souverainement si le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et si l'employeur prouve que les agissements invoqués sont étrangers à tout harcèlement ; qu'en se déterminant aux termes de motifs dont résulte un examen et une réfutation séparés de chaque élément établi par le salarié, et l'absence de prise en compte des documents médicaux produits, la Cour d'appel a violé les articles L.1152-1 et L.1154-1 du Code du travail, ce dernier dans sa rédaction, envisagée comme applicable au litige, antérieure à l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du août 2016.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Gilles Y... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamnation de son employeur au paiement d'indemnités de rupture et de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS QUE " La cour examinera successivement les manquements dénoncés par Monsieur Y... au soutien de sa demande de prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail le liant à la société Prodware, étant rappelé que, conformément à l'article 1184 du code civil, le prononcé de la résiliation du contrat ne peut intervenir qu'en cas de manquement grave et concomitant à l'époque de la rupture de l'employeur à ses obligations ;
QUE Monsieur Y... prétend, en premier lieu, avoir été victime de faits de harcèlement moral de la part de son employeur, la cour rappelant qu'en application de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que lorsque survient un litige relatif à des faits de harcèlement au sens de l'article L.1152 - 1 du code du travail, le salarié établit, conformément à l'article L.1154 - 1 du code du travail, des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement ; qu'au vu de ces éléments, il appartient à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; que le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;
QUE la cour estime, comme le conseil de prud'hommes, que les pièces versées aux débats par Monsieur Y... à savoir, pour l'essentiel, des courriels échangés avec son supérieur hiérarchique Monsieur Z..., ne peuvent être considérées comme des pièces permettant de présumer l'existence d'un harcèlement au sens de l'article précité ; qu'en effet les échanges entre ces deux salariés sont principalement constitués par des demandes d'informations formulées par Monsieur Z... à Monsieur Y... auxquelles Monsieur Y... répond de façon particulièrement complète et au vu desquelles le supérieur hiérarchique forme, pour certaines, de nouvelles demandes entraînant des réponses en suivant de Monsieur Y... ; qu'il s'agit d'expressions du pouvoir hiérarchique de Monsieur Z... sur Monsieur Y... qui ne peuvent être considérées comme des agissements faisant présumer l'existence de faits de harcèlement ; que les prétendus griefs non fondés devant témoins ne sont pas plus établis, s'agissant de conversations téléphoniques alléguées sans preuve et sans production d'attestation de témoins confirmant les prétentions de Monsieur Y... ; que le paiement tardif du complément de salaire pendant sa maladie ne peut pas plus être considéré comme une présomption de faits de harcèlement alors que le complément n'est payé que sur production des relevés de la caisse d'assurance maladie et que la cour ne possède pas d'éléments suffisants pour connaître la date à laquelle Monsieur Y... a envoyé à son employeur les justificatifs permettant de s'acquitter des sommes dues par lui ; que la cour ne peut pas plus considérer comme constitutif de présomption de harcèlement moral le paiement tardif de certaines notes de frais par la société Prodware dans la mesure où elle ne connaît pas les dates exactes auxquelles Monsieur Y... a effectivement envoyé au service concerné les justificatifs sollicités, le fait que ses demandes en paiement aient été renouvelées étant insuffisant à caractériser cette présomption de harcèlement moral ;
QU'il est établi par Monsieur Y... qu'il a, par mail du 6 février 2013, alerté le directeur des ressources humaines, Monsieur A..., sur des actes commis par son supérieur hiérarchique Monsieur Z..., constitutifs, selon Monsieur Y..., de faits de harcèlement moral et il appartient à la société Prodware de rapporter la preuve qu'elle a respecté son obligation de sécurité à l'égard de son salarié qui faisait état de faits compromettant sa santé et sollicitait l'aide de la direction des ressources humaines ; qu'il indiquait qu'il avait le sentiment profond d'être délibérément mis en situation d'échec par son supérieur hiérarchique et indiquait être sous antidépresseurs depuis 3 mois, son entourage voyant sa santé morale et psychologique décliner ;
QUE contrairement à ce que soutient Monsieur Y..., le directeur des ressources humaines de la société Prodware n'est pas resté sans réaction face à ce mail d'alerte puisqu'il lui a répondu par mail envoyé moins de 40 mn après l'envoi du mail d'alerte en faisant référence à une communication téléphonique ayant suivi la réception du mail d'alerte par Monsieur A... proposant à Monsieur Y... une rencontre à Paris le lundi ou le mercredi suivant, étant rappelé que Monsieur Y... travaillait 3 jours par semaine au siège parisien de la société Prodware ; qu'il a indiqué qu'il aurait un entretien avec Monsieur Z... la semaine suivante, destiné à échanger avec lui au sujet des faits dénoncés dans le mail d'alerte et, qu'en fin de journée, Monsieur Y... proposait que la rencontre avec Monsieur A... soit organisée le mercredi suivant à 8 heures à Paris ;
QUE comme il a été indiqué dans l'exposé du litige, Monsieur Y... a été placé en arrêt maladie le jour même de l'envoi de son mail d'alerte de sorte que le contrat de travail était suspendu et que le licenciement est intervenu sans reprise du travail ;
QUE pendant l'arrêt maladie, sur nouvelle demande de Monsieur Y..., une rencontre est intervenue entre Monsieur Y... et le directeur des ressources humaines Monsieur A..., le 25 avril 2013, rencontre que Monsieur Y... juge sans conséquence positive sur l'évolution de sa situation professionnelle ; qu'à la suite de cette rencontre, Monsieur A..., directeur des ressources humaines a, sans succès, proposé par courriel du 13 mai d'organiser une rencontre dite tripartite entre lui même, Monsieur Y... et Monsieur Z... ;
QUE la cour estime, comme le conseil de prud'hommes, que la société Prodware justifie ainsi avoir exécuté son obligation de sécurité à l'égard de son salarié qui l'avait alertée de sa situation de souffrance au travail le 6 février 2013 (
)" ;
ET AUX MOTIFS adoptés QUE "les objectifs illogiques et la pression permanente évoquée par Monsieur Y... ne sont que le résultat d'une mauvaise organisation et d'une communication aléatoire de l'entreprise qui, bien évidemment, a pour conséquence de compliquer la tâche de tous les salariés ; que cette situation a une répercussion sur les relations entre hiérarchie et les salariés, appuyée par un management contestable de Monsieur Z..., hiérarchie directe de Monsieur Y... ; que ces faits ne justifient pas le harcèlement moral soulevé par Monsieur Y... ;
QUE la SA Prodware a pris en compte immédiatement dès l'alerte de Monsieur Y... les mesures nécessaires à sa sécurité en lui proposant deux possibilités de rencontre ; que cela n'a pas été possible compte tenu de la mise en arrêt de maladie de Monsieur Y... ; que Monsieur A... a proposé à Monsieur Y... le 11/04/2013 de le rencontrer à nouveau afin de discuter des reproches faits à la Société Prodware ; que par mail du 13 mai 2013, Monsieur A... a proposé une réunion tripartite à Monsieur Y... avec Monsieur Z... afin de renouer le dialogue et d'envisager une reprise du travail ; que Monsieur Y... n'a pas accepté cette rencontre (
)" ;
1°) ALORS QUE ne méconnaît pas l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs l'employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du Code du travail, et qui, informé de l'existence de faits susceptibles de constituer une situation de souffrance morale, a pris les mesures immédiates propres à la faire cesser ; qu'en se déterminant aux termes de motifs dont il ne résulte pas que la Société Prodware avait pris toutes les mesures de prévention visées aux articles L.4121-1 et L.4121-2 du code du travail et, notamment, avait mis en oeuvre des actions d'information et de formation propres à préserver les salariés de risques psychosociaux, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°) ALORS en outre QU'en exonérant la Société Prodware de tout manquement à son obligation de sécurité dans le traitement de l'alerte de souffrance morale dont l'avait saisie Monsieur Y... le 6 février 2013 sur la simple constatation de l'organisation, par le directeur des ressources humaines, d'une rencontre avec Monsieur Y... le 25 avril 2013 pendant son arrêt de maladie et de la proposition d'une rencontre tripartite le 13 mai suivant entre le salarié, lui-même et le supérieur hiérarchique accusé de harcèlement, Monsieur Z..., sans rechercher, ainsi que l'y invitait le salarié, si la Société Prodware avait mis en place le "processus de suivi entre le service RH et le CHSCT lors d'une suspicions de souffrance morale" prescrit par le document unique du CHSCT concernant les risques psychosociaux en vigueur dans l'entreprise à compter de février 2013, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.4121-1 et L.4121-2 du Code du travail.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Gilles Y... de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail et de condamnation de son employeur au paiement de dommages et intérêts, indemnités de rupture, ainsi que d'un rappel de salaires pour heures supplémentaires et congés payés y afférents ;
AUX MOTIFS QUE "comme le soutient Monsieur Y..., aux termes de l'article L.3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties, et si l'employeur doit être en mesure de fournir les éléments de nature à justifier les horaire effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ;
QUE la cour constate que Monsieur Y... ne verse aux débats au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires que des tableaux qu'il prétend avoir réalisés sur la base des mails envoyés pendant la relation de travail ; que la cour considère, comme le conseil de prud'hommes, qu'en l'absence de toute autre pièce objectivant la réalisation par lui d'heures supplémentaires, Monsieur Y... n'étaye pas suffisamment sa demande de rappel de salaire de sorte que ce dernier manquement contractuel dénoncé par l'appelant n'est pas établi et que la demande de rappel de salaire et de congés payés y afférents sera rejetée ;
QU'il en résulte que Monsieur Y... ne fait pas la preuve qui lui incombe de la réalité et de la gravité de manquement contractuels de la société Prodware justifiant le prononcé de la résiliation du contrat de travail de sorte que cette demande sera rejetée par confirmation du jugement entrepris" ;
ALORS QU' en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié d'étayer sa demande par la production de tous éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre en apportant les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; que constituent des éléments suffisamment précis les tableaux récapitulatifs établis par le salarié pour chaque année de sa réclamation, détaillant par semaine les heures supplémentaires prétendument accomplies, accompagnées de récapitulatifs des courriels envoyés démontrant la fourniture d'une prestation de travail en dehors de l'horaire collectif pour ces mêmes semaines ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué "
que Monsieur Y... [a versé] aux débats au soutien de sa demande en paiement d'heures supplémentaires [
] des tableaux qu'il prétend avoir réalisés sur la base des mails envoyés pendant la relation de travail
" récapitulant pour chaque semaine de sa réclamation les heures supplémentaires accomplies ; que ces tableaux étaient suffisamment précis pour permettre à l'employeur d'y répondre ; qu'en le déboutant cependant de sa demande, motif pris "que la cour considère, comme le conseil de prud'hommes, qu'en l'absence de toute autre pièce objectivant la réalisation par lui d'heures supplémentaires, Monsieur Y... n'étaye pas suffisamment sa demande de rappel de salaire", la Cour d'appel, qui n'a pas déduit les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L.3171-4 du Code du travail.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté Monsieur Gilles Y... de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et de congés payés y afférents et d'une indemnité conventionnelle de licenciement ;
AUX MOTIFS QUE "par conclusions déposées le 4 février 2016 et développées à l'audience, Monsieur Y... demande à la Cour de réformer le jugement dans toutes ses dispositions et de, à titre principal :
- prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la Société Prodware et condamner cette dernière à lui payer les sommes suivantes ;
- 260 000 € à titre de rappel de salaires,
- 26 000 € au titre des congés payés afférents,
- 103 450 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse
A titre subsidiaire :
- dire et juger que le licenciement est nul, sinon sans cause réelle et sérieuse et condamner la Société Prodware à lui payer la somme de 103 450 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (
)" ;
QUE "
la lettre de licenciement de Monsieur Y... ne précise pas la Société Prodware était tenue de procéder à son remplacement définitif et que cette absence de mention prive son licenciement de cause réelle et sérieuse ;
QUE Monsieur Y... qui comptait 6 ans et demi d'ancienneté dans l'entreprise qui occupait plus de dix salariés est bien fondé à se voir allouer par infirmation du jugement, des dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse par application de l'article L.1235-3 du Code du travail ; qu'âgé de 54 ans au moment de son licenciement, Monsieur Y... justifie de son indemnisation par Pôle Emploi jusqu'en août 2016 ; qu'il percevait avant son arrêt de maladie un salaire moyen mensuel variant entre 6 527 et 6 627 € ; que la société Prodware sera condamnée à lui payer la somme de 70 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (
)" ;
ALORS QUE dans ses conclusions du 4 février 2016, oralement reprises, Monsieur Y... avait prié la Cour d'appel, à titre subsidiaire, de "dire et juger que le licenciement est nul, sinon sans cause réelle et sérieuse ;
Condamner la société employeur à lui verser :
Indemnité compensatrice de préavis : 20 692 €,
Congés payés sur préavis : 2 069 €,
Indemnité conventionnelle de licenciement : 15 000 € sauf à parfaire" ; qu'en limitant sa demande à l'allocation de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse la Cour d'appel, qui a dénaturé les termes du litige tels que fixés par ses conclusions oralement reprises, a violé les articles 4 et 5 du Code de procédure civile. Moyen produit, au pourvoi incident, par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils pour la société Prodware
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que le licenciement de Monsieur Y... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et, en conséquence, d'avoir condamné la société Prodware à lui verser la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et ordonné à la société Prodware le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage versées dans la limite de 6 mois d'indemnités ;
AUX MOTIFS QU'il est constant que la lettre de licenciement d'un salarié pour absence prolongée désorganisant l'entreprise, lettre qui fixe les limites du litige doit contenir la mention selon laquelle l'employeur est tenu de procéder à son remplacement définitif et que cette absence de mention prive le licenciement de cause réelle et sérieuse. Force est de constater que, comme le soutient justement Monsieur Y..., et contrairement à ce qu'allègue la société Prodware, la lettre de licenciement de l'appelant, ne précise pas que la société Prodware était tenue de procéder au remplacement définitif de Monsieur Y... de sorte que le licenciement de ce dernier est sans cause réelle et sérieuse. Monsieur Y... qui comptait 6 ans et demi d'ancienneté dans l'entreprise qui occupait plus de 10 salariés est bien fondé à se voir allouer, par infirmation du jugement déféré, des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse par application de l'article L. 1235-3 du code du travail. Agé de 54 ans au moment du licenciement Monsieur Y... justifie de son indemnisation par pôle emploi jusqu'en août 2016. Il percevait avant son arrêt maladie un salaire moyen mensuel variant entre 6527 et 6627 euros. La société Prodware sera condamnée à lui payer la somme de 70 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens. Il sera également fait application de l'article L. 1235-4 du code du travail dans la limite de 6 mois d'allocations chômage ;
1°) ALORS QU' en affirmant que la lettre de licenciement de Monsieur Y... ne précise pas que la société Prodwarre était tenue de procéder au remplacement définitif de Monsieur Y..., quand cette lettre du 29 octobre 2013 énonce que « la vacance de votre poste de travail a été palliée dans un premier temps par le report de la charge de travail qui vous incombait sur un autre collaborateur de la société Prodware. Toutefois, à ce jour, il nous est impossible de maintenir plus longtemps ce mode de fonctionnement. Cette situation temporaire ne peut plus perdurer compte tenu de votre poste de travail, le rôle de Ressource Manager étant d'être le garant de la bonne compétence des collaborateurs et de la bonne occupation des ressources dont il a la responsabilité (
). Lors de l'entretien (
) vous nous avez informés que vous « n'aviez pas de réponse à la question sur votre date prévisible de retour », la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, en méconnaissance de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
2°) ALORS QUE la lettre de licenciement comporte l'énoncé du ou des motifs invoqués par l'employeur ; que la lettre de licenciement qui s'appuie sur l'absence prolongée d'un salarié malade entraînant une perturbation du fonctionnement de l'entreprise et nécessitant son remplacement définitif doit mentionner outre l'absence prolongée du salarié, la perturbation dans l'entreprise et la nécessité de ce remplacement ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement adressée à Monsieur Y... mentionnait outre son absence prolongée de huit mois et la désorganisation du fonctionnement de l'entreprise, l'impossibilité pour la société Prodware de continuer à pallier son absence par un transfert provisoire de ses tâches à un autre salarié de l'entreprise et qu'en raison de ses missions et de son niveau de responsabilité, une solution temporaire ou extérieure à l'entreprise n'était pas envisageable, impliquant la nécessité d'un recrutement exclusivement sous un contrat à durée indéterminée ;qu'en affirmant toutefois que cette motivation pourtant très explicite ne constituait pas la référence à la nécessité de remplacer définitivement le salarié, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail.