COMM.
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 14 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10140 F
Pourvoi n° H 16-24.036
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Cyrille X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 23 juin 2016 par la cour d'appel d'Orléans (chambre commerciale, économique et financière), dans le litige l'opposant à la société Banque populaire Val de France, société coopérative de banque populaire, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 janvier 2018, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme A..., conseiller référendaire rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Y..., avocat général référendaire, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. X..., de Me Z..., avocat de la société Banque populaire Val de France ;
Sur le rapport de Mme A..., conseiller référendaire, l'avis de Mme Y..., avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Banque populaire Val de France la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze mars deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demande tendant à ce qu'il soit dit et jugé que la BPVF avait manqué à son obligation d'information et de mise en garde, à ce qu'elle soit condamnée en conséquence à verser à M. X... la somme de 130.475 euros à titre de dommages et intérêts et celle de 15.000 euros en réparation de son préjudice moral, et à ce que soit ordonnée la mainlevée de l'inscription définitive inscrite par la BPVF aux frais de celle-ci et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, et d'AVOIR condamné M. X... à payer à la BPVF, avec intérêts à compter du 28 janvier 2012, la somme de 319,04 euros en vertu de son cautionnement de 2007, au titre du solde débiteur et la somme de 60.000 euros au titre de son cautionnement du prêt de 2009 ;
AUX MOTIFS QUE, sur le moyen tiré par M. X... d'un manquement au devoir de mise en garde, M. Cyrille X... était le gérant de la société X..., créée en 1997 ; qu'il avait dix d'expérience de la gestion de cette entreprise de taille moyenne lorsqu'il s'est engagé en 2007 en qualité de caution, et douze ans en 2009 (cf pièces n°4 et Ibis de l'intimée), et qu'il doit être regardé comme une caution avertie, envers laquelle la BPVF n'était donc pas tenue d'un devoir de mise en garde ; qu'il sera ajouté que l'intimée s'était, au demeurant, renseignée sur la situation de M. X..., lequel lui avait déclaré être marié sous le régime de la séparation des biens, percevoir des revenus annuels de 37.000 euros et être propriétaire à titre personnel de biens et droits immobiliers d'une valeur totale estimée à 558.000 euros dont deux maisons et un terrain libres de charge évalués à 333.000 euros, et être dans les liens d'emprunts totalisant 158.000 euros, de sorte que la souscription de l'un comme l'autre des deux cautionnements litigieux ne l'exposait à aucun risque d'endettement ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE Monsieur Cyrille X... a agi, de la création de son entreprise en novembre 1997 jusqu'à sa liquidation en janvier 2012, soit durant 15 années, en qualité de gérant unique ; qu'il est de jurisprudence constante que le dirigeant d'une entreprise ne saurait être considéré comme étant une «caution non avertie » ; qu'à l'évidence, la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE ne pouvait donc fournir à Monsieur Cyrille X... «caution», plus d'informations sur la situation financière de son entreprise qu'il n'en possédait déjà lui-même en sa qualité de gérant ; que c'est pourquoi la demande de Monsieur Cyrille X... du chef d'un manquement à l'obligation d'information de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE ou d'un manquement commis au visa des articles L341-1, L341-6 et L311-12 du Code de la Consommation ne saurait prospérer ; qu'en conséquence de quoi, le Tribunal dira mal fondé Monsieur Cyrille X... en sa demande reconventionnelle et l'en déboutera donc en toutes fins qu'elle comporte ;
1° ALORS QUE le statut de dirigeant de la société cautionnée ne suffit pas à caractériser la qualité de caution avertie et donc à exclure le devoir de mise en garde qui pèse sur les établissements de crédit au bénéfice des cautions non averties ; qu'en se fondant sur le seul fait que M. X... était gérant de la société débitrice depuis dix à douze ans, pour en déduire qu'il devait être regardé comme une caution avertie, sans rechercher, comme elle y était invitée, si M. X... n'était pas en réalité dépourvu des compétences et ne disposait pas des informations qui lui auraient permis d'apprécier la portée et les risques de son engagement, la cour d'appel s'est prononcée par des motifs impropres à établir sa qualité de caution avertie et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
2° ALORS QUE la banque est tenue de mettre en garde la caution non avertie contre le risque de défaillance du débiteur principal dans le remboursement du crédit garanti ; qu'en jugeant que la banque n'était pas tenue à un devoir de mise en garde, aux motifs que M. X... disposait d'un patrimoine lui permettant de faire face à ses engagements, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si les risques de défaillance de la société X..., débitrice principale, résultant notamment de sa situation financière obérée, ne justifiaient pas la délivrance d'une mise en garde, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... de ses demandes tendant à ce qu'il soit dit et jugé que la BPVF avait manqué à son obligation d'information et de mise en garde, à ce qu'elle soit condamnée en conséquence à verser à M. X... la somme de 130.475 € à titre de dommages et intérêts et celle de 15.000 euros en réparation de son préjudice moral, et à ce que soit ordonnée la mainlevée de l'inscription définitive inscrite par la BPVF aux frais de celle-ci et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir, et d'AVOIR condamné M. X... à payer à la BPVF, avec intérêts à compter du 28 janvier 2012, la somme de 319,04 euros en vertu de son cautionnement de 2007, au titre du solde débiteur et la somme de 60.000 euros au titre de son cautionnement du prêt de 2009 ;
AUX MOTIFS QUE, sur le moyen tiré par M. X... d'un défaut de conseil de la BPVF sur l'assurance, M. X... est recherché en qualité de caution, il ne peut invoquer que des moyens personnels et n'est pas recevable à reprocher à la banque d'avoir fait adhérer l'entreprise à une police prétendument peu claire, seule la société X..., qui n'est pas partie à l'instance, étant en droit d'invoquer un tel moyen ; qu'il est certes recevable à reprocher à la BPVF de ne pas lui avoir conseillé de souscrire personnellement une assurance en cette qualité de caution ; mais qu'il ressort des productions (cf pièce n°13 de l'intimée) que la société X... avait souscrit le 25 avril 2007 auprès de la société Assurances Banque Populaire Prévoyance une police "Fructi Homme Clé" couvrant le risque accident et maladie du chef d'entreprise, comme telle assise sur la tête de M. Cyrille X..., et celui-ci - qui verse en tout et pour tout un courrier du 18 octobre 2012 lui notifiant l'attribution d'une pension d'invalidité, et n'a pas déféré à la sommation adverse de produire les justificatifs requis sur sa situation médicale - n'explique pas pourquoi l'inaptitude médicale dont il argue sans s'en expliquer n'a pas été prise en charge au titre du risque ainsi couvert ; que, surtout, il ressort de la première page de ce contrat, signé par M. X..., qu'à la rubrique "situation assurance", il a indiqué en cochant deux cases "oui" être déjà personnellement assuré pour le risque décès et invalidité, et il n'explique pas quelle garantie différente ou complémentaire la BPVF aurait fautivement négligé de lui conseiller de souscrire, ni plus généralement ne prouve avoir perdu, du fait de la banque, une chance de ne pas régler tout ou partie des sommes dont il est aujourd'hui débiteur en ayant souscrit à titre personnel une autre police pour ce même risque d'invalidité qu'il affirme s'être réalisé ; que le jugement déféré sera donc également confirmé en son rejet de la demande de dommages et intérêts ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE l'article 1315 du code civil dispose que « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation » ; qu'en l'espèce, si la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE prouve bien l'existence du contrat d'assurance groupe «Fructi-H» pleinement accepté le 25 avril 2007 par Monsieur Cyrille X... es qualité de gérant de la B... , lequel est assorti de ses conditions générales, de même qu'elle produit les relances de l'assureur en date des 13 et 24 janvier 2011 évoquant la résiliation prévue par son article 14 pour défaut de paiement, cela sur le fondement de l'article L143 du Code des Assurances ; qu'en revanche Monsieur Cyrille X... ne prouve pas qu'il ait méconnu l'existence et les termes d'un contrat dont il a réglé durant 3 ans les cotisations, pas plus qu'il ne démontre une résiliation fautive de l'assureur qui, en tout état de cause, se révèle ne pas être le prêteur de deniers avec lequel il a contracté, voire même, étant désormais en invalidité, qu'il eut alors rempli clairement, le cas échéant, les conditions de catégorie auxquelles renvoie l'article 6 de ce contrat pour jouir de la couverture de cette police ; que c'est pourquoi la demande indemnitaire de Monsieur Cyrille X... du chef de la perte d'une couverture d'assurance efficiente du fait de la BANQUE POPULAIRE VAL DE FRANCE ne saurait prospérer ;
1° ALORS QUE le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel, dès lors que ce manquement lui a causé un dommage ; qu'en jugeant que M. X... ne pouvait invoquer le manquement contractuel de la banque résultant de ce qu'elle avait fait adhérer la société débitrice principale à une police d'assurance peu claire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause ;
2° ALORS QU'il résulte des conclusions d'appel de la Banque Populaire Val de France que l'assurance « Fructi Homme clé » souscrite le 25 avril 2007 n'avait pas couvert l'invalidité dont souffre M. X... en raison de la résiliation pour non-paiement des primes intervenue en 2011, et non parce que M. X... n'aurait pas justifié de cet état d'invalidité ; qu'en retenant cependant que M. X... n'expliquait pas pourquoi l'inaptitude médicale dont il se prévalait n'avait pas été prise en charge au titre du risque couvert par ladite police, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et ainsi violé l'article 4 du code de procédure civile ;
3° ALORS QUE, dans ses conclusions d'appel, M. X... reprochait à la Banque Populaire Val de France de ne pas lui avoir proposé de contrat d'assurance-caution couvrant le risque de son invalidité lors de la conclusion du contrat de cautionnement garantissant le prêt du 30 avril 2009 ; qu'en jugeant cependant que M. X... ne précisait pas quelle garantie différente et complémentaire de la garantie existante la BPVF aurait fautivement négligé de lui conseiller de souscrire, bien que la seule garantie existante ait été celle dite « homme clé » garantissant à la société le versement d'un capital en cas de décès de son gérant, de sorte que sa différence avec celle invoquée ne faisait aucun doute, la cour d'appel a dénaturé les conclusions d'appel de M. X... et ainsi violé le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ;
4° ALORS QUE le propre de la responsabilité civile est de rétablir, aussi exactement que possible, l'équilibre détruit par le dommage et de replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en retenant que M. X... n'établissait pas avoir perdu une chance d'être couvert pour le risque d'invalidité qu'il affirmait s'être réalisé, grâce à une assurance-caution que la BPVF avait négligé de lui proposer au motif qu'il n'établissait pas le risque d'invalidité qu'il affirmait s'être réalisé, sans rechercher si l'invalidité établie par la « notification d'attribution d'une pension invalidité » produite n'aurait pu être couverte par une assurance que la BPVF aurait dû lui conseiller, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.