CIV. 2
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 8 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10168 F
Pourvoi n° F 17-10.998
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Marie-José Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (10e chambre ), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Gan assurances, société anonyme, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Les Ardennes, société civile immobilière, dont le siège est [...] ,
3°/ à la commune d'[...], représentée par son maire en exercice, domicilié [...] ,
4°/ à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, dont le siège est [...] ,
5°/ à la société Mutuelle du soleil, dont le siège est [...] ,
6°/ à la société compagnie d'assurances Générali, dont le siège est [...] ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 31 janvier 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Besson, conseiller, Mme Mainardi, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme Y..., de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la commune d'[...], de la SCP Lévis, avocat de la société Gan assurances et de la société Les Ardennes ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller référendaire, l'avis de M. A..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la SCP Marlange et de La Burgade du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société compagnie d'assurances Générali ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour Mme Y....
Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté Mme Y... de ses demandes,
AUX MOTIFS QUE « (
) il ressort du procès-verbal établi par les services de police et il n'est pas contesté que la zone dans laquelle l'incendie a pris naissance, a atteint la parcelle appartenant à la SCI Les Ardennes puis s'est propagé jusqu'au terrain sur lequel se situe le garage Dépannage du Golf est soumise à l'arrêté préfectoral n° 2002-343 du 19 juin 2002 portant réglementation en vue de prévenir les incendies de forêt dans le département des Alpes-Maritimes imposant le débroussaillement et le maintien en état débroussaillé c'est à dire de débroussailler de nouveau dès que la végétation dense dépasse 0,50 cm de hauteur par rapport au sol ; le même procès-verbal fait état de ce que plusieurs témoins, notamment des propriétaires riverains, ont déclaré que divers terrains dont celui appartenant à la SCI Les Ardennes, soit n'étaient pas entretenus avec soin, soit n'avaient pas fait l'objet d'un débroussaillement ; la SCI Les Ardennes ne dénie pas que, malgré des sommations d'avoir à communiquer en première instance et en cause d'appel les factures et justificatifs de paiement des travaux de débroussaillement de ses parcelles, elle s'est abstenue de produire ces pièces ; il résulte de l'ensemble de ces éléments des indices graves, précis et concordants de ce que la SCI Les Ardennes n'a pas procédé au débroussaillement du terrain jouxtant celui sur lequel est exploité le garage Dépannage du Golfe ; cette société a ainsi commis une faute ; il doit cependant être démontré que cette faute est à l'origine ou a contribué à la communication de l'incendie au terrain sur lequel se trouve le garage Dépannage du Golfe ; l'enquête de police et les photographies qui y sont jointes démontrent que la zone de feu était fortement boisée, que le feu a pris dans divers oliviers, palmiers, arbres et jardins, s'est propagé même à travers des terrains débroussaillés depuis peu de temps (une quinzaine de jours pour le terrain appartenant à "EDF") et que ce feu a été attisé par le vent ; les conclusions du rapport en date du 12 mars 2008 de l'expert, M. B..., désigné dans le cadre de la procédure pénale, qui peuvent être retenues comme pertinentes bien que l' intégralité du rapport n'ait pas été produit dans le cadre de la présente procédure et qui ont été communiquées à toutes les parties le 10 novembre 2015, soit dans un délai suffisant pour leur permettre de faire valoir leurs observations, la clôture de la procédure étant intervenue le 7 mars 2016, la circonstance que ce document n'ait pas été communiqué en même temps que les conclusions d'intimé étant indifférente, font état de ce que le feu s'est propagé rapidement et avec violence en raison des conditions météorologiques particulièrement propices au développement de toute mise à feu, notamment un fort vent d'ouest aggravé par l'effet de col, que la cause accidentelle ou fortuite ne peut être retenue et que la cause de l'incendie ou procédé technique ayant provoqué ce dernier ne peut être lié qu'à un acte délibéré avec usage d'une flamme (allumette ou briquet) portée au contact des végétaux ; que l'expertise établie par ce même expert le 21 juillet 2015, dans une instance civile et à laquelle Mme Y... qui n'était pas concernée n'a pas participé, peut cependant être retenue comme élément de preuve valable parmi les précédents ci-dessus analysés, étant précisé que cette expertise a été communiquée dans le cadre de la présente procédure et que Mme Y... a pu en discuter le contenu ; que ce document conforte les points ci-dessus quant aux circonstances dans lesquelles le feu s'est propagé et a blessé Mme Y..., car il y est précisé que : - le 4 juillet 2007 toutes les conditions sont réunies pour que tout départ de feu non traité dans les toutes premières minutes dégénère en "grand feu" dévorant à très grande vitesse tout ce qui est facilement inflammable, produisant une énergie colossale d'auto-inflammation ( vent d'ouest violent, rafales à 70 km/h, hygrométrie de 11 %, température proche de 30°, géographie des lieux), - la colonne de fumée portée par le vent contient des gaz combustibles imbrûlés et transporte en outre une grande quantité de matériaux incandescents véritables brandons, - ces derniers retombent plus ou moins loin, dont certains encore en ignition, au contact de matériaux inflammables, ce qui va provoquer leur mise à feu et générer un nouveau foyer, - l'incendie est alors entré dans un cycle "infernal" où le vent apporte l'oxygène nécessaire à la combustion mais aussi "poussé" "projette" le feu et tend à le rabattre au sol..., - l'influence des conditions climatiques très sévères prend une place prépondérante alors que l'influence de la hauteur de la végétation devient quasiment secondaire et du simple fait de sa hauteur n'est pas en mesure de modifier de façon significative le déroulement et les conséquences de l'incendie, - le feu a parcouru l'espace commune d'[...] traité il y a plus de trois mois puis l'espace Veolia traité il y a peine 15 jours, manifestement avec les mêmes facilités, ce qui a permis la communication aux arbres, - ce constat met en évidence que quelque soit la hauteur des végétaux, objet du débroussaillement, fût-elle inférieure ou supérieure à 0,50 m, compte tenu des conditions météo climatiques du moment, particulièrement sévères, le processus de déroulement de l'incendie aurait été sensiblement le même. « L'ensemble de ces considérations démontre que la faute de la SCI Les Ardennes qui n'a pas débroussaillé son terrain n'est pas en relation de cause à effet, ne fût-ce qu'en partie, avec l'incendie qui s'est communiqué sur la parcelle sur laquelle se trouve le garage Dépannage du Golfe et qui a blessé Mme Y... ; cette dernière doit en conséquence être déboutée de ses demandes dirigées contre cette société, ce qui sans objet l'appel en garantie formé contre la Commune d'[...]. Les dispositions du jugement relatives aux dépens doivent être infirmées » (arrêt attaqué pp.7 in fine, 8 et 9) ;
ALORS QUE 1°), dans ses conclusions d'appel (p. 18), Mme Y... faisait valoir qu'« il est incontestable qu'(elle) aurait pu s'échapper de cet incendie si le feu ne s'était pas trouvé aggravé par l'absence de débroussaillage de la parcelle, ce qui aurait évité que des flammèches liées à la combustion des végétaux des parcelles de la SCI Les Ardennes ne lui soient projetées à l'arrière et ne l'enflamment » ; qu'en affirmant que « la faute de la SCI Les Ardennes qui n'a pas débroussaillé son terrain n'est pas en relation de cause à effet, ne fût-ce qu'en partie, avec l'incendie qui s'est communiqué sur la parcelle sur laquelle se trouve le garage Dépannage du Golfe et qui a blessé Mme Y... », sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'absence de débroussaillage avait aggravé l'incendie en provoquant des flammèches et brandons qui avaient gravement brulé Mme Y..., ce qui caractérisait le lien de causalité entre la faute de la SCI Les Ardennes et le préjudice de l'exposante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil (dans sa rédaction applicable au litige),
ALORS QUE 2°), au surplus, dans ses conclusions d'appel (pp. 7 et 14), Mme Y... faisait valoir que « le feu » ne s'était pas « propagé » et n'avait « pas poursuivi sa course dans la voie [...], parce que les autres propriétés avaient été entretenues et donc débrousaillées », « tel que confirmé par les procès-verbaux de police versés aux débats (pièces 7 à 9 et n°11) », et « de surcroît, comme le relève les procès-verbaux de police, il a pu être rapidement circonscrit par les pompiers au niveau des parcelles qui avaient été entretenues et débroussaillées par leurs propriétaires (
) » ; qu'en affirmant que « la faute de la SCI Les Ardennes qui n'a pas débroussaillé son terrain n'est pas en relation de cause à effet, ne fût-ce qu'en partie, avec l'incendie qui s'est communiqué sur la parcelle sur laquelle se trouve le garage Dépannage du Golfe et qui a blessé Mme Y... », sans s'expliquer sur les éléments qui précèdent, et qui démontraient que l'absence de débroussaillage de la parcelle de la SCI Les Ardennes avait entrainé la propagation de l'incendie et sa difficulté à le circonscrire, contrairement aux parcelles suivantes qui avaient été entretenues, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1384 alinéa 2 du code civil (dans sa rédaction applicable au litige).