SOC.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10269 F
Pourvoi n° S 16-26.552
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Roselyne E... , domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 28 septembre 2016 par la cour d'appel de Rennes (7e chambre prud'homale), dans le litige l'opposant à la société NCH France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 31 janvier 2018, où étaient présents : Mme X..., conseiller doyen faisant fonction de président, Mme F..., conseiller rapporteur, Mme Cavrois, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de Mme E... , de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société NCH France ;
Sur le rapport de Mme F..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme E... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour Mme E... .
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Mme E... a une cause réelle et sérieuse et, en conséquence, débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QU'il n'est pas discuté que la lettre de licenciement visant l'insuffisance professionnelle de Mme E... est comme telle suffisamment motivée ; que la société observe, dans la lettre de licenciement, qu'en dépit de ses avertissements oraux relayés par ses courriers des 13 décembre 2011 et 6 lévrier 2012, Mme E... n'a pas respecté le chiffre d'affaires minimum de 7.000 euros par mois et n'a pas remédié à la situation puisqu'elle n'a jamais atteint ce seuil depuis décembre 2011, comme en atteste selon elle les chiffres réalisés : - 4 867 euros en décembre 2011, -1.534 euros en janvier 2012, -754 euros en février 2012, - 5.738 € en mars 2012, - 2 370 euros en avril 2012, - 2.319 euros en mai 2012, - 580 euros en juin 2012 ; que Mme E... soutient que le quota de 7.000 euros mensuel n'était pas réaliste au regard à la fois de l'étendue réduite du secteur géographique et de son temps partiel, rendant inopérante toute comparaison avec le cas des représentants cités par la société ; qu'elle tient par ailleurs à préciser que depuis son embauche, la société ne lui a jamais fait d'observation, ce qu'elle n'aurait pourtant pas manqué de faire si elle avait sérieusement considéré l'objectif réalisable ; que la société n'a jamais révisé ce quota ni étendu son secteur ni même augmenté son temps de travail ; qu'elle ne lui a pas d'avantage proposé une formation pour lui permettre d'exécuter ses missions dans des conditions satisfaisantes, ni même fait bénéficier d'entretiens d'évaluation ; que si elle ne méconnaît pas une certaine démotivation résultant de cette situation et de l'impossibilité de dégager des revenus d'activité décents en présence d'objectifs irréalisables, pour autant elle conteste avoir voulu provoquer son licenciement comme le soutient la société ; qu'il n'est pas discuté que Mme E... n'a pas atteint ses objectifs depuis décembre 2011 ; que les chiffres cités dans la lettre de licenciement ne sont pas remis en cause, pas plus que ceux indiqués dans la pièce 8 versée par la société afférente aux douze mois précédents : - 4 .429,43 euros en novembre 2010, - 190,80 euros en décembre 2010, 216,60 euros en janvier 2011, - 410,40 euros en février 2011, - 1.411,85 euros en mars 2011, - 1.606 euros en avril 2011, - 2.469,68 euros en mai 2011, - 1.181,86 euros en juin.2011, - 7.987 euros en juillet 2011, - 325 euros en août 2011, - 7.016 euros en septembre 2011, - 2.545,98 euros en octobre 2011, - 410,60 euros en novembre 2011, C'est en vain que, pour caractériser l'insuffisance professionnelle de résultats de Mme E... , la société verse aux débats les objectif et les résultats d'autres représentants, Mme Y..., Mme Z..., M. A..., Mme B... et M. C..., dont les secteurs se situent tous dans la moitié Est du territoire national (Côte d'Or, Jura, Doubs, Aube, Vosges), avec un bassin économique différent de celui de la région de Fougères et de Saint-Malo ; en outre, pour trois d'entre eux, il s'agissait de temps plein ; qu'il n'en demeure pas moins, à la lecture des chiffres d'affaires réalisés par Mme E... que : - les résultats obtenus par celle-ci étaient objectivement mauvais, ne dépassant pas certains mois quelques centaines d'euros ; - les hiatus observés parfois entre les mois ne s'expliquent pas, ainsi entre janvier, février et mars 2012 et entre mai et juin 2012, pour ne prendre que les plus récents ; - Mme E... a montré qu'elle était en mesure d'augmenter ses résultats d'un mois à l'autre, ainsi à compter de février 2011 après réception d'un courrier de l'employeur la convoquant à un entretien préalable, ce qui ne manque pas d'interroger sur les résultats particulièrement faibles obtenus certains mois ; que ces mauvais résultats, indépendamment du seuil contractuel de 7 000 €, révèlent un manque d'investissement professionnel caractérisant une insuffisance professionnelle, à rapprocher, au demeurant, du non-respect de l'obligation de transmettre un rapport quotidien d'activité, non-respect rappelé à l'intéressée par l'employeur au terme de son courrier du 6 février 2012 et confirmé par son ancien supérieur, M. D..., dans un courriel daté du 29 avril 2014 indiquant que Mme E... ne transmettait pas ses rapports en dépit de ses rappels réguliers lors de leurs échanges téléphoniques hebdomadaires et qu'elle était même parfois injoignable ce qui, couplé à l'absence de résultats laissait penser qu'elle n'allait pas travailler ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de considérer que le licenciement de Mme E... avait une cause réelle et sérieuse ; que par voie d'infirmation, Mme E... sera en conséquence déboutée de ses demandes s'y rapportant ;
1°) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la lettre de licenciement énonçait comme motif de la rupture le fait que la salariée n'avait pas atteint le chiffre d'affaires mensuel minimal de 7000 euros inscrit au contrat ; qu'en retenant dès lors, pour dire le licenciement pour insuffisance professionnelle justifié, que les mauvais résultats de la salariée révélaient, indépendamment du seuil contractuel de 7000 euros, un manque d'investissement professionnel caractérisant une insuffisance professionnelle, quand la lettre de licenciement lui reprochait seulement de ne pas avoir atteint le chiffre d'affaires minimum mensuelle de 7000 € fixé contractuellement, la cour d'appel a méconnu les termes du litige fixés par la lettre de licenciement, et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2°) ALORS QUE les objectifs fixés au salarié doivent être réalistes ; qu'à défaut, l'employeur ne peut opposer au salarié une insuffisance professionnelle au prétexte qu'il n'atteint pas de tels objectifs irréalistes ; qu'en l'espèce, Mme E... a souligné le caractère irréaliste de l'objectif mensuel de 7000 euros inscrit dans le contrat de travail, ce que dénotait du reste la satisfaction affichée par l'employeur en mars 2011, alors même qu'elle n'avait pas atteint ce seuil ; qu'en disant le licenciement de Mme E... , prononcé pour non-atteinte du quota contractuel de 7000 euros, fondé sur une cause réelle et sérieuse, sans faire ressortir le caractère réaliste de l'objectif fixé à la salariée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1235-1 du code du travail ;
3°) ALORS QUE Mme E... soutenait qu'elle avait été félicitée pour ses résultats au mois de mars 2011, ce qui était incompatible avec l'allégation d'une insuffisance professionnelle un an plus tard sur la base de résultats commerciaux parfaitement comparables (cf. conclusions d'appel p. 3 et 14) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen de nature à réfuter la réalité de l'insuffisance professionnelle qui lui était imputée, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
4°) ALORS, subsidiairement, QUE l'insuffisance de résultats n'est une cause de licenciement qu'à la condition de procéder de l'insuffisance professionnelle du salarié, laquelle doit résulter d'éléments objectifs et matériellement vérifiables ; qu'en déduisant de la seule lecture des résultats de Mme E... , et notamment des écarts des chiffres d'affaires réalisés sur tels ou tels mois, son insuffisance professionnelle, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ;
5°) ALORS, très-subsidiairement, QU'en se bornant à affirmer que les mauvais résultats de la salariée « révèlent un manque d'investissement professionnel caractérisant une insuffisance professionnelle », la cour d'appel a statué par un motif d'ordre général et violé l'article 455 du code de procédure civile ;
6°) ET ALORS, plus-subsidiairement, QUE si le salarié ne peut être licencié à titre disciplinaire pour des faits relevant de l'insuffisance professionnelle -
sauf, mauvaise volonté délibérée ou abstention volontaire -, il ne saurait l'être au motif de prétendues insuffisances cependant que les faits qui lui sont imputés appartiennent au registre de la faute pour procéder de manquements volontaires de sa part ; qu'en l'espèce, pour dire le licenciement de Mme E... justifié, la cour d'appel a retenu, d'une part, que ses mauvais résultats révélaient un manque d'investissement professionnel, d'autre part, que la salariée ne transmettait pas ses rapports quotidiens d'activité, et ce, en dépit des rappels réguliers qui lui avaient été faits par sa hiérarchie ; qu'en se déterminant ainsi, sur le fondement de manquements dont elle estimait qu'ils présentaient un caractère volontaire, ce dont il résultait qu'ils constituaient, non pas des négligences ou des carences relevant comme telles de l'insuffisance professionnelle, mais des manquements volontaires appartenant au registre de la faute professionnelle et soumis à la procédure disciplinaire d'ordre public absolu prévue par le législateur, la cour d'appel a violé les articles L. 1232-1, L. 1235-1 et L. 1331-1 et suivants du code du travail, ensemble l'article 12 du code de procédure civile.