SOC.
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COUR DE CASSATION
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Audience publique du 7 mars 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10247 F
Pourvoi n° T 15-27.860
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Eurapharma, société anonyme, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 15 octobre 2015 par la cour d'appel de Versailles (17e chambre), dans le litige l'opposant à M. Juan-Antonio A... , domicilié [...] , [...] (Espagne),
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 30 janvier 2018, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président et rapporteur, M. Ricour, M. Pion, conseillers, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Eurapharma, de la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat de M. A... ;
Sur le rapport de Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Eurapharma aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Eurapharma et condamne celle-ci à payer à M. A... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Eurapharma
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. A... aux torts de la société Eurapharma avec les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR fixé la date de rupture du contrat à la date de l'arrêt, soit au 15 octobre 2015 et d'AVOIR en conséquence condamné la société Eurapharma à payer à M. A... , en raison d'une ancienneté d'au moins deux ans, la somme de 50.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, au moins égale à six mois de salaire, la somme de 6.881,80 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ainsi qu'à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois ;
AUX MOTIFS QUE sur la rupture, M. A... soutient que quand ses contrats de travail ont été rompus avec les sociétés Gokals Laborex Ltd et Capstone Corporation Ldtd, la société Eurapharma aurait dû lui proposer un autre poste, en application de l'article L. 1231-5 du code du travail ou engager une procédure de licenciement ; que la société Eurapharma rétorque que M. A... n'a jamais entendu se maintenir à la disposition de la société Eurapharma et n'a jamais travaillé pour elle ; que l'article 16 du contrat de travail conclu entre M. A... et la société Capstone Corporation Ltd intitulé « résiliation du contrat » prévoyait que le contrat prendra automatiquement fin et sans délai, sans qu'il soit besoin d'engager quelque procédure que ce soit et sans indemnité d'aucune sorte, qu'en cas de cessation du contrat conclu avec la société d'affectation consécutive soit à une faute, soit à un manquement grave par le salarié à ses obligations, non allégué en l'espèce par la société Eurapharma ; que M. A... a sollicité dans plusieurs mails des explications sur la rupture de ses contrats de travail ; que, si dans des mails relatifs à la rupture et aux difficultés qu'il a rencontrées face aux divers organismes qui ont refusé de l'indemniser, M. A... a revendiqué être salarié de la société Capstone Corporation Ltd puis de la société Continental Pharmaceutique qui avait cotisé pour lui aux divers organismes de retraite et de prévoyance, il a été démontré que son employeur était dans les faits la société Eurapharma ; que le courrier envoyé par MM. X... et Y... le 14 novembre 2008 à M. A... précise qu'ils lui confirment que « sa mission en qualité de Directeur Général Adjoint en charge des finances au sein de la société Gokals Laborex Ghana-Accra qui a débuté le 15 juillet 2008 est prévue pour une durée limitée à trois années » et « qu'au- delà, son développement professionnel s'inscrira dans le cadre d'une mobilité géographique et/ou professionnelle » ; que cette même société qui a proposé à M. A... de l'embaucher en qualité d'expatrié et en lui confiant une mission au Ghana pour une durée de trois ans ne lui a pas confié de mission ou de poste à la fin de la période de collaboration avec la société ghanéenne, et ce en violation de l'article L. 1231-5 du code du travail qui prévoit que « lorsqu'un salarié engagé par une société mère a été mis à la disposition d'une filiale étrangère et qu'un contrat de travail a été conclu avec cette dernière, la société mère assure son rapatriement en cas de licenciement par la filiale et lui procure un nouvel emploi compatible avec l'importance de ses précédentes fonctions en son sein. Si la société mère entend néanmoins licencier ce salarié, les dispositions du présent titre sont applicables » ; que la société Eurapharma n'a donc pas donné de travail à M. A... à son retour du Ghana ; que ce manquement grave de la société Eurapharma a perduré de telle sorte qu'il a empêché toute poursuite de la relation contractuelle ; qu'il convient de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. A... aux torts de la société Eurapharma ; que cette rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, en l'espèce à la date de son prononcé par le juge ; que sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. A... qui, à la date du licenciement, comptait au moins deux ans d'ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés a droit, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, à une indemnité qui ne saurait être inférieure aux salaires bruts perçus au cours des six derniers mois précédant son licenciement ; qu'au vu des bulletins de paye produits aux débats, il convient de retenir comme salaire de référence le calcul de l'employeur, soit la somme de 7.244 euros brut mensuel ; qu'au regard de son âge au moment du licenciement, de son ancienneté dans l'entreprise, du montant de la rémunération qui lui était versée et du fait qu'il ait créé des sociétés en 2013, il convient de lui allouer, en réparation du préjudice matériel et moral subi la somme de 50.000 euros ; qu'en application de l'article L. 1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur, à l'organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt dans la limite de trois mois d'indemnités ; que sur l'indemnité de licenciement, que l'article R. 1234-2 du code du travail prévoit que l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d'ancienneté, auquel s'ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d'ancienneté ; que les parties sont en litige uniquement sur la base du calcul; que le salaire de référence a été fixé à la somme mensuelle brute de 7.244 euros ; que la société Eurapharma sera condamnée à payer à M. A... la somme de 6.881,80 euros ;
1°- ALORS QUE l'entreprise, fût-elle la société mère, qui ignore être l'employeur de celui qui revendique être salarié ne commet aucune faute en ne lui fournissant pas de travail après son licenciement au sein d'une société filiale ; qu'en jugeant que la société Eurapharma avait commis un manquement grave en ne donnant pas de travail à M. A... à son retour du Ghana, lequel de surcroît n'a revendiqué la qualité d'employeur de la société Eurapharma après son licenciement par les sociétés Gokals Laborex Ghana-Accra et Capstone Corporation que dans le cadre de la procédure prud'homale en résiliation judiciaire de son contrat et cette qualité n'ayant été conférée que par l'arrêt du 15 octobre 2015, la cour d'appel a violé l'article 1184 du code civil ensemble l'article L.1231-1 du code du travail ;
2°- ALORS qu'en tout état de cause, le refus par la société mère de procurer un nouvel emploi au salarié au terme de sa mise à disposition au sein d'une filiale étrangère qui a elle-même procédé au licenciement du salarié s'analyse en un licenciement et emporte la rupture immédiate du contrat ; qu'ayant retenu que la société Eurapharma n'avait pas donné de travail à M. A... à son retour du Ghana après avoir été licencié par la société africaine Gokals Laborex Ghana-Accra et la société mauricienne Capstone Corporation à effet au 15 septembre 2009 et ayant considéré que ce comportement avait empêché toute poursuite de la relation contractuelle, la cour d'appel ne pouvait fixer la date de rupture du contrat à la date du prononcé de l'arrêt ayant fait droit à la demande de résiliation judiciaire du contrat le 15 octobre 2015 quand le contrat avait été rompu le 15 septembre 2009 ; que la cour a violé l'article 1184 du code civil ensemble l'article L.1231-1 du code du travail;
3°- ALORS en outre, qu'en toute hypothèse, la résiliation judiciaire du contrat produit effet au jour où le juge se prononce si le salarié est toujours au service de l'employeur ; que la société Eurapharma a fait valoir dans ses conclusions d'appel que M. A... avait créé sa société en Espagne dès le mois d'août 2009 alors qu'il était encore en préavis et qu'il en était toujours le dirigeant, qu'en complément de cette activité, il avait repris deux emplois de « managing director » et de « corporate dévelopment director »
dès le mois d'août 2010, ce dont il s'induisait qu'à date du prononcé de l'arrêt, M. A... n'était pas au service de la société Eurapharma ; qu'en prononçant la résiliation judiciaire, avec les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, à la date du prononcé de l'arrêt, sans rechercher si M. A... était, à cette date, au service de la société Eurapharma, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1184 du code civil et de l'article L.1231-1 du code du travail ;
4°- ALORS QUE l'indemnité minimale égale aux salaires des six derniers mois pour licenciement sans cause réelle et sérieuse exige que l'entreprise emploie au moins onze salariés et que le salarié ait au moins deux ans d'ancienneté ; que la société Eurapharma a fait valoir (conclusions p.17) qu'elle est une société holding qui emploie 9 salariés ; qu'en allouant à M. A... une indemnité au moins égale à six mois de salaire sur le fondement L.1235-3 du code du travail en affirmant qu' à la date du licenciement, il travaillait dans une entreprise employant au moins onze salariés sans justifier de l'élément de preuve sur lequel elle s'est fondée pour procéder à une telle affirmation alors que l'effectif était contesté par la société Eurapharma, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1235-3 du code du travail :
5°- ALORS enfin qu'une cassation à intervenir sur la deuxième ou la troisième branche dont il ressortira que la rupture du contrat ne peut être fixée au-delà du 15 septembre 2009 et dont il s'ensuivra que M. A... embauché le 15 juillet 2008 ne bénéficiait pas d'une ancienneté d'au moins deux ans, emportera par voie de conséquence la cassation des chefs de dispositif qui ont condamné la société Eurapharma à lui payer une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse sur le fondement de l'article L.1235-3 du code du travail, une indemnité légale calculée sur la base erronée d'une ancienneté de 4 ans et 9 mois ainsi qu'à rembourser à Pôle emploi des indemnités de chômage dans la limite de trois mois en application de l'article L.1235-4 du code du travail.