CIV.3
CH.B
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 février 2018
Rejet non spécialement motivé
M. CHAUVIN, président
Décision n° 10112 F
Pourvoi n° V 17-15.450
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Francelot, société par actions simplifiée, venant aux droits de la société Khor immobilier, dont le siège est [...] ,
contre l'arrêt rendu le 31 janvier 2017 par la cour d'appel de Metz (chambre des urgences), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Bativia, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Lotibat, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] ,
3°/ à M. Mickael X..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme Audrey Y..., domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 janvier 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Z..., conseiller rapporteur, M. Jardel, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Francelot, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat des sociétés Bativia et Lotibat ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Francelot aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision.
Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Francelot.
IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE d'avoir confirmé l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné la SAS FRANCELOT à payer aux consorts X... Y... une provision de 25.000 € à valoir sur leur préjudice en lien avec le défaut d'achèvement de l'immeuble imputable à la venderesse,
AUX MOTIFS QUE :
« Sur le bien fondé du refus de Monsieur X... et de Madame Y... de prendre possession des lieux
Monsieur X... et Madame Y... font grief à l'immeuble de ne pas être conforme aux plans, par suite de ne pas être habitable en l'état.
Aux termes de l'article 1601-3 du code civil, « La vente en l'état futur d'achèvement est le contrat par lequel le vendeur transfère immédiatement à l'acquéreur ses droits sur le sol ainsi que la propriété des constructions existantes. Les ouvrages à venir deviennent la propriété de l'acquéreur au fur et à mesure de leur exécution ; l'acquéreur est tenu d'en payer le prix à mesure de l'avancement des travaux. »
L'article R. 621-1 [en réalité R. 261-l] du code de la construction et de l'habitation dispose que « L'immeuble vendu à terme ou en l'état futur d'achèvement est réputé achevé au sens de l'article 1601-2 du code civil, reproduit à l'article L. 261-2 du présent code, et de l'article L. 261-11 du présent code lorsque sont exécutés les ouvrages et sont installés les éléments d'équipement qui sont indispensables à l'utilisation, conformément à sa destination, de l'immeuble faisant l'objet du contrat. Pour l'appréciation de cet achèvement, les défauts de conformité avec les prévisions du contrat ne sont pas pris en considération lorsqu'ils n'ont pas un caractère substantiel, ni les malfaçons qui ne rendent pas les ouvrages ou éléments ci-dessus précisés impropres à leur utilisation.
« La constatation de l'achèvement n'emporte par elle-même ni reconnaissance de la conformité aux prévisions du contrat, ni renonciation aux droits que l'acquéreur tient de l'article 1642-1 du code civil... »
En l'espèce, il n'est pas contesté que la maison type F4 acquise par Monsieur X... et Madame Y... devait comprendre un garage d'environ 5,3 m sur 2,62 met, à l'étage, au-dessus dudit garage, une chambre mansardée d'environ 2,82 m sur 3,3 m, soit une surface habitable de 9,01 m1 (pièce 2 X.../Y...).
Il résulte du pré-rapport de Madame A..., expert judiciaire commis pour l'accomplissement d'une expertise sur les malfaçons alléguées par les consorts X... Y..., que la réservation de la cage d'escalier dans la dalle de l'étage n'a pas été positionnée au bon endroit, de sorte que « la dimension du garage est donc ramenée à 4,06 par 2,70 » empêchant le stationnement d'une voiture.
Par ailleurs, l'expert relève que le mauvais positionnement de la cage d'escalier a entraîné une translation de 54 cm, d'où il se déduit que les dimensions de la chambre mansardée au-dessus du garage ne sont plus que de 2,15 m sur 3,3 m.
En conséquence, alors même que la référence à une surface minimale de 9 m1 pour une pièce ne s'appliquerait qu'aux logements ne disposant que d'une pièce habitable, il apparaît clairement que le redimensionnement de la chambre mansardée de l'habitation acquise par Monsieur X... et Madame Y... a pour effet de restreindre considérablement les usages possibles de cette pièce, nonobstant l'absence de modification de la surface globale de l'immeuble.
Enfin, le fait que, par constat du 3 juin 2014, un huissier ait constaté l'état des lieux de l'immeuble acquis par Monsieur X... et Madame Y... et relevé que le bâtiment présentait les éléments d'équipement indispensables à son utilisation est insuffisant à établir que celui-ci pouvait être réputé achevé au sens de l'article R. 621-1 [R. 261-1] précité compte tenu du défaut de conformité présentant un caractère substantiel.
En l'espèce, eu égard aux éléments relevés par l'expert, à savoir l'existence d'un garage ne pouvant, par ses dimensions, accueillir de voiture, et d'une pièce dont la surface a été considérablement réduite, compromettant son usage comme chambre, le moyen tiré de ce que ces défauts de conformité ne présenteraient pas un caractère substantiel ne constitue pas une contestation sérieuse de nature à écarter la compétence du juge des référés.
Il se déduit de ce qui précède que la légitimité du refus de Monsieur X... et de Madame Y... de prendre possession de l'immeuble ne se heurte pas davantage à une contestation sérieuse.
Sur le montant de la provision
Comme l'a relevé le premier juge, la privation de jouissance de Monsieur X... et Madame Y... a commencé en août 2013, date normale de livraison, emportant la nécessité de rembourser des mensualités d'un prêt de 1.093 (, à tout le moins jusqu'à la date de l'ordonnance entreprise ayant suspendu ces échéances, outre le paiement d'un loyer de 630 (par mois, dont il est justifié, depuis cette date à ce jour.
À la date où la cour statue, les préjudices invoqués par Monsieur X... et Madame Y..., en lien avec le défaut d'achèvement de l'immeuble imputable à la SAS FRANCELOT, peuvent être évalués sans contestation sérieuse à la somme de 25.000 € qu'ils sollicitent. »
1- ALORS QUE, même sur le fondement de l'article 809 alinéa 2 du code civil, le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que s'il ne tranche pas une contestation sérieuse pour dire que l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; Qu'en décidant que les défauts de conformité de l'ouvrage invoqués à l'appui du refus des acquéreurs d'un immeuble en état futur d'achèvement d'en prendre possession et de leur demande de provision à valoir sur leur préjudice sont substantiels au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation qui définit la notion d'achèvement d'un immeuble vendu en état futur d'achèvement, le juge des référés tranche une contestation sérieuse ; Qu'en confirmant l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a accordé aux consorts X... Y... une provision à valoir sur leur préjudice en estimant que le constat du 3 juin 2014 par lequel un huissier de justice avait constaté l'état des lieux de l'immeuble et relevé que le bâtiment présentait les éléments d'équipement Indispensables à son utilisation était insuffisant à établir que celui-ci pouvait être réputé achevé au sens de l'article R. 261-1 du code de la construction et de l'habitation compte tenu du défaut de conformité présentant un caractère substantiel dès lors que, eu égard aux éléments relevés par l'expert, le moyen tiré de ce que les défauts de conformité ne présenteraient pas un caractère substantiel ne constitue pas une contestation sérieuse de nature à écarter la compétence du juge des référés, la cour d'appel a violé les articles 808 et 809 alinéa 2 du code de procédure civile ;
2- ALORS QUE le défaut de réponse aux conclusions équivaut au défaut de motifs ; Que la SAS FRANCELOT invoquait en page 9 de ses conclusions signifiées le 18 mai 2016 (prod. 2) les dispositions de l'article R. lll-2 du code de la construction et de l'habitation relatives aux normes minimales d'habitabilité pour conclure que, nonobstant les défauts de conformité dénoncés par les consorts X... Y..., c'était à tort que ces derniers refusaient la réception de l'ouvrage ; Qu'en s'abstenant totalement de s'expliquer sur la conformité de l'immeuble litigieux aux normes minimales d'habitabilité définies à l'article R. llI-2 du code de la construction et de l'habitation expressément invoquée par la SAS FRANCELOT pour conclure à l'existence de contestations sérieuses, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.