CIV. 1
MY1
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 28 février 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10134 F
Pourvoi n° T 17-14.528
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Michel X..., domicilié chez Mme Nathalie X...[...] ,
contre l'arrêt rendu le 13 janvier 2017 par la cour d'appel de Reims (1re chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant à Mme Florence Y..., épouse X..., domiciliée [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 janvier 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme Z..., conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Ghestin, avocat de M. X... ;
Sur le rapport de Mme Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que l'acceptation du divorce n'est pas susceptible de rétractation et que M. X... ne peut plus réclamer le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son épouse et d'AVOIR en conséquence confirmé le jugement entrepris sur le fondement juridique du divorce ;
AUX MOTIFS QUE par application de l'article 233 du code civil, le divorce des époux peut être demandé par l'un ou l'autre des époux ou par les deux lorsqu'ils acceptent le principe de la rupture du mariage sans considération des faits à l'origine de celle-ci ;
que cette acceptation n'est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l'appel ;
que le magistrat conciliateur dans son ordonnance de non conciliation du 22 janvier 2015 a constaté que « chacune des parties, dûment assistée de son conseil, a accepté le principe de la rupture du mariage, sans considération des faits à l'origine de celle-ci, en application des dispositions de l'article 233 du code civil, ladite acceptation ayant été constatée par le procès-verbal annexé à la présente ordonnance » ;
que M. Michel X... ne peut donc plus réclamer le prononcé du divorce aux torts exclusifs de son épouse ;
que le jugement est confirmé s'agissant du fondement juridique du divorce ;
ALORS QUE le juge aux affaires familiales ne peut prononcer le divorce sur le fondement du divorce accepté s'il s'est assuré de la volonté réelle et du libre accord persistant des époux ; que M. X... n'a pas constitué avocat devant le juge aux affaires familiales, n'a pas conclu et n'a pas comparu à l'audience et en cause d'appel n'a plus donné son accord à un divorce accepté ; qu'en énonçant que M. X... ne pouvait plus réclamer le divorce aux torts exclusifs de son épouse, au motif inopérant que l'acceptation de celui-ci n'est pas susceptible de rétractation, même par la voie de l'appel, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que le juge a prononcé le divorce sans s'assurer du libre accord persistant de M. X..., violant les articles 233 et 234 du code civil.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif de ce chef attaqué d'AVOIR condamné M. X... à payer à Mme Y... la somme de 12 000 euros à titre de prestation compensatoire ;
AUX MOTIFS QUE selon les articles 270 et suivants du code civil, l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage créé dans les conditions de vie respectives ;
que cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d'un capital ;
que toutefois, lorsque le débiteur n'est pas en mesure de verser un capital, le règlement peut prendre la forme de versements périodiques indexés dans la limite de huit années ;
que la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;
qu'à cet effet, le juge prend en considération, notamment :
- la durée du mariage
- l'âge et l'état de santé des époux
- leur qualification et leur situation professionnelle
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial
- leurs droits existants et prévisibles
- leur situation respective en matière de pension de retraite.
que les époux se sont mariés en 1992 ; que le mariage a donc duré 24 années étant précisé que l'ordonnance de non conciliation a été rendue le 22 janvier 2015 ;
que M. Michel X..., employé depuis 2003 en qualité d'agent logistique nucléaire chez Gdf Suez produit notamment aux débats :
- son avis d'impôt 2014 mentionnant en 2013 un revenu de 24 641 euros (2 053,42 euros en moyenne par mois),
- son bulletin de salaire du mois de novembre 2015 mentionnant un cumul annuel net imposable de 29 452,69 euros soit une moyenne mensuelle de 2 677,52 euros,
- son bulletin de salaire du mois de septembre 2016 mentionnant un revenu net imposable cumulé de 23 260,47 euros soit par mois 2 584,50 euros,
- une attestation de son employeur en date du 3 février 2016 mentionnant que son salaire de base brut mensuel est de 1 717,80 euros (s'y ajoutant toutefois diverses indemnités comme en témoignent ses bulletins de salaires) ;
qu'il vit chez sa soeur qui serait sans emploi et dépourvue de tout revenu et dit lui verser une somme mensuelle de 400 euros sans qu'il n'en soit justifié ;
qu'il mentionnent dans ses écritures un certain nombre d'autres charges pour lesquelles aucun justificatif n'est produit comme par exemple des frais de téléphonie pour lui et sa fille de 90 euros, un prêt véhicule pour 250 euros par mois, un prêt personnel pour 400 euros par mois, des frais d'assurances auto de 66,66 euros par mois ;
que seuls sont versés aux débats : un extrait de compte Crédit Mutuel mentionnant des prélèvements mensuels pour l'année 2014 pour des montants variables de 50 euros à 200 euros selon les mois et un solde au 25 septembre 2015 de 1 962,20 euros et des quittances de loyers hebdomadaires de l'ordre de 165 euros par semaine correspondant manifestement à des frais d'hébergement lorsqu'il est en déplacement professionnel ;
que Mme Florence Y... est âgée de 42 ans ;
qu'elle a perçu en 2013 un revenu de 17 274 euros (soit par mois 1 439,50 euros), et en 2014 de 17 650 euros soit par mois 1 470,83 euros ; qu'elle perçoit une allocation logement de 198 euros ;
qu'il n'est pas démontré, contrairement aux assertions de M. Michel X..., qu'elle vivrait en concubinage ;
que son loyer de 640 euros est partiellement pris en charge par l'allocation logement susvisée ; qu'elle justifie en outre de ses autres charges courantes : taxe d'habitation 386 euros, assurance, téléphonie, fuel notamment ; que s'y ajoutent les frais spécifiques aux enfants détaillés ci-dessous ;
que la cour relève en outre que l'ordonnance de non conciliation avait, sur accord des époux, prévu la prise en charge par moitié des emprunts immobiliers Bnp ; que l'ordonnance précise d'ailleurs que ce bien immobilier a été vendu, sans que les parties ne donnent d'indications à ce propos ; que Mme Florence Y... indique toutefois sans être contredite que M. Michel X... n'a pas respecté cette ordonnance que ce soit au titre des crédit ou des contributions alimentaires ; qu'il s'évince effectivement des relevés de comptes de Mme Florence Y... qu'à tout le moins, en avril 2016, lui sont toujours prélevés les sommes de 561,74 euros + 199,47 euros au titre des échéances du crédit Bnp sans que l'on ne sache quel est le terme de ce prêt compte tenu de la vente du logement susmentionnée ;
que compte tenu de l'ensemble de ces éléments, la rupture du lien conjugal entraîne effectivement une disparité dans les conditions de vie des époux au détriment de Mme Y... compte tenu essentiellement du différentiel de salaire et de la charge que représentent pour elle les deux enfants ;
que le premier juge a pertinemment fixé à 12 000 euros la prestation compensatoire devant revenir à l'épouse ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur le principe et le montant de la prestation compensatoire
que l'article 270 dispose que le divorce met fin au devoir de secours entre époux ; que l'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ;
qu'en application des dispositions de l'article 271 du code civil, la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ;
qu'à cet effet, le juge prend en considération, notamment :
- la durée du mariage
- l'âge et l'état de santé des époux
- leur qualification et leur situation professionnelle
- les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne
- le patrimoine estimé ou prévisible des époux tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial
- leurs droits existants et prévisibles
- leur situation respective en matière de pension de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa
qu'en l'espèce, Mme Florence Y... est âgée de 41 ans et M. Michel X... de 43 ans ; que le mariage aura duré 23 ans ;
que la situation des parties est la suivante :
que Mme Y... exerce une activité salariée à plein temps au sein de la société Techman Industrie ; que le cumul de ses revenus nets imposables s'est élevé à 19 925 euros en 2013 et à 17 650 euros en 2014 ; qu'elle indique bénéficier des allocations familiales pour un montant de 129,35 euros par mois et de l'aide personnalisée au logement à hauteur de 145 euros par mois ;que ces prestations familiales ne sont pas prises en considération pour l'appréciation de la disparité de niveaux de vie mais uniquement dans le cadre de la fixation de la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants ; qu'outre les charges de la vie courante (charges locatives, énergie, assurances, téléphonie, taxes et impôts
), elle s'acquitte de 640 euros de loyer ; qu'elle supporte en outre les frais de demi-pension concernant Line, d'un montant de 453,60 euros par an, et d'internat concernant Solène, d'un montant d'environ 1 000 euros par an ;
que M. Michel X... est agent logistique nucléaire au sein de la société Endel ; que selon l'avis d'impôt 2014, il a perçu en 2013 un cumul net imposable de 24 641 euros ; que son salaire est cependant complété par de nombreuses indemnités forfaitaires, en particulier des indemnités de « grand déplacement » ; qu'ainsi, le revenu net à payer de M. X... varie selon les mois entre 3 000 et 4 700 euros par mois ; qu'il convient cependant de prendre en considération le fait que les indemnités perçues correspondent, au moins pour partie, à des frais professionnels supportés par M. X... ; qu'il ressort de l'ordonnance de non conciliation qu'il supportait un loyer de 140 euros par mois ; qu'il s'acquitte également de la contribution à l'entretien et à l'éducation des enfants prévue ci-après ;
que le couple devait supporter par ailleurs le remboursement d'un certain nombre de crédits communs ; que l'état actualisé du remboursement de ces crédits n'a pas été produit ;
qu'au regard de l'ensemble des éléments qui précèdent, il convient de constater l'existence d'une disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions de vie respectives des époux, au détriment de Mme Florence Y...;
que celle-ci sera compensée par la condamnation de M. Michel X... à verser à Mme Florence Y... la somme de 12 000 euros ;
1)) ALORS QUE la cassation de l'arrêt sur le premier moyen entraînera par voie de conséquence celle du chef de l'arrêt ayant alloué une prestation compensatoire à Mme Y..., celle-ci ne pouvant être fixée qu'au moment de la dissolution du mariage, ce en application de l'article 624 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QUE M. X... faisait valoir que la prestation compensatoire est fixée en fonction des situations respectives des époux mais également de l'évolution de celles-ci dans un avenir prévisible et il soutenait que vivant provisoirement chez sa soeur, il était contraint de rechercher un autre logement et de réorganiser sa vie personnelle ; qu'en s'abstenant totalement de répondre à ces conclusions faisant valoir que ses charges normales allaient sensiblement augmenter dans un avenir prévisible, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la prestation compensatoire est fixée notamment en fonction des ressources et des charges du débiteur ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. X... est débiteur d'une contribution à l'entretien et l'éducation des deux enfants à charge de 600 euros par mois indexée ; qu'en fixant les ressources disponibles de M. X... sans tenir compte de cette charge, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant les articles 270 et 271 du code civil ;
4°) ALORS QUE la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux qui en réclame le bénéfice ; que les frais d'entretien et d'éducation des enfants ne constituent pas une charge de l'époux prétendument créancier pour apprécier la disparité créée par la rupture du mariage dans les conditions respectives de vie des époux mais une obligation légale à la charge des deux parents à laquelle l'époux qui n'en a pas la garde habituelle contribue par ailleurs, selon le quantum et les modalités fixés par les juges du fond ; qu'en énonçant que la charge pour Mme Y... constituait un élément essentiel de l'appréciation de la disparité dans les conditions de vie des époux au détriment de Mme Y..., la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil ;
5°) ALORS QUE le prétendu non paiement par M. X... de la part lui incombant au titre de l'ordonnance de non conciliation exécutoire au titre des emprunts et ou de ses contributions alimentaires ne peut représenter une charge pour Mme Y... dès lors qu'elle est créancière de ces sommes, en vertu d'un titre exécutoire dont l'arrêt constate qu'elles ont fait l'objet de mesures d'exécution forcée (p. 6 al. dernier) ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.