CIV. 1
CGA
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 février 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10132 F
Pourvoi n° W 17-11.955
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Mireille X..., épouse Y..., domiciliée [...] ,
contre l'arrêt rendu le 3 novembre 2016 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (1re chambre C), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme Marie Z... X..., épouse A...,
2°/ à Mme Thérèse X..., épouse Y...,
toutes deux domiciliées [...] ,
3°/ à M. B... X..., domicilié [...] ,
4°/ à Mme Jacqueline X..., épouse C... ,
domiciliée [...] ,
5°/ à M. Gérard X..., domicilié [...] ,
6°/ à M. Robert X..., domicilié [...] ,
7°/ à Mme Martine X..., épouse D..., domiciliée [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 janvier 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, Mme E..., conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me G... , avocat de Mme Mireille X..., et de la SCP Didier et Pinet, avocat de Mmes Marie Z..., Thérèse, Jacqueline et Martine X..., et de MM. B..., Gérard et Robert X... ;
Sur le rapport de Mme E..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Mireille X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à Mmes Marie Z..., Thérèse, Jacqueline et Martine X... et à MM. B..., Gérard, et Robert X... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me G... , avocat aux Conseils, pour Mme Mireille X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué
D'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir soulevée par Mme Y... tendant à ce que les demandes formulées par les consorts X... soient déclarées irrecevables, autorisé les consorts X... à conclure la vente de l'ensemble immobilier en indivision situé avenue des Poilus dans le 12ème arrondissement de Marseille à la société Urbat sans le concours de Mme Y... conformément au projet de la promesse de vente dressé par Me F... et ordonné l'exécution provisoire ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE si le président du tribunal de grande instance de Marseille ait été saisi en référé, il ressort des termes de l'assignation que la demande des consorts X... est fondée sur les dispositions de l'article 815-6 et que c'est sur ce fondement que le premier juge, statuant en la forme des référés, a autorisé la mesure demandée ; qu'il s'ensuit que la fin de non-recevoir soulevée par l'appelante sera rejetée ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE Mme Mireille Y... soulève l'irrecevabilité des demandes formulées en vertu de l'article 815-6 du code civil devant le juge des référés ; que si les demandeurs ont effectivement formulé leur demande devant le juge des référés, il convient en application de l'article 12 du code de procédure civile de restituer leur exacte qualification aux demandes nonobstant leur formulation erronée ; que le juge des référés de ce tribunal est spécialement habilité à statuer en qualité de président du TGI de Marseille statuant "en la forme des référés" en vertu de l'article 815-6 du code civil suivant la formule combinant sa saisine suivant les modalités du référé avec le prononcé d'une décision rendue au fond et disposant de l'autorité de la chose jugée ; qu'il convient donc de préciser que la présente décision n'est pas une ordonnance de référé mais un jugement rendu au fond et en premier ressort ;
ALORS QUE le président du tribunal de grande instance, saisi en référé, n'est pas compétent pour statuer sur une demande fondée sur l'article 815-6 du code civil et ne peut requalifier l'acte de saisine qui fonde sa compétence ; qu'en énonçant que le président du tribunal de grande instance de Marseille, saisi en sa qualité de juge des référés, avait la faculté de restituer son exacte qualification à l'acte le saisissant et formulant des demandes fondées sur l'article 815-6 du code civil et pouvait statuer au fond en la seule forme des référés, la cour d'appel a méconnu ensemble les articles 815-6 du code civil et 12 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué
D'AVOIR autorisé les consorts X... à conclure la vente de l'ensemble immobilier en indivision situé [...] arrondissement de Marseille à la société Urbat sans le concours de Mme Y... conformément au projet de la promesse de vente dressé par Me F... et ordonné l'exécution provisoire ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en vertu de l'article 815-6 du code civil, le président du tribunal de grande instance statuant en la forme des référés peut autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun des indivisaires ; que les articles 816 à 819 du Code civil qui prévoient le régime général des demandes en partage ne trouvent pas à s'appliquer à la demande d'autorisation judiciaire présentée par la majorité des nus propriétaires indivis, avec l'accord de Madame Marie-Z... X..., usufruitière du bien, qui se joint à l'action de six de ses sept enfants ; que contrairement à ce que soutient l'appelante l'autorisation requise sur le fondement des dispositions de l'article 815-6 du code civil ne requiert pas que l'opposition de l'un des indivisaires mette en péril l'intérêt commun, mais seulement que l'urgence soit démontrée et que la vente soit justifiée par ce même intérêt commun ; que ces conditions sont réunies en l'espèce dès lors, ainsi que relevé par le premier juge, que l'offre d'achat de l'ensemble immobilier présentée par la société URBAT pour le prix de 2.500.000 euros dépend d'une constructibilité de 4918 m2 calculée sur la base du PLU actuel, et que le projet en cours de modification de ce PLU vise un coefficient d'emprise au sol pour la zone UR2 concernée, de 30% réduisant la surface constructible à 1564 m2 et la diminution du prix de vente à la somme de 1.625.000 euros ; que l'urgence est caractérisée par le projet de modification du PLU de Marseille, avéré par le rapport d'enquête publique du 9 avril 2015 produit aux débats, qui réduira l'emprise au sol des constructions réalisés dans la zone UR2 et une décote de 900.000 euros sur le prix de vente de l'ensemble immobilier ; que la circonstance que la promesse unilatérale de vente prévoit en outre paiement à la charge de l'acquéreur d'une indemnité d'éviction de 100.000 euros au profit de la S.A.R.L X... et de 25.000 euros au profit de Madame Thérèse Y..., indemnités que l'appelante conteste au motif qu'aucun bail n'a été signé avec l'usufruitière et qu'aucun loyer n'a été payé, ne permet pas de conclure, comme elle l'affirme, que ces indemnités constituent un détournement d'une partie du prix de vente, notamment à son préjudice, dès lors que l'offre de la société URBAT est en tout état de cause égale (proposition de la SAS AKERYS en date du 10 octobre 2014 produite par l'appelante) ou supérieure aux autres propositions d'achat pour des montants de 1.700.000 euros (SA ALTEREA COGEDIM) 1.400.000 euros (S.A.R.L AIC PROVENCE) et 2.200.000 euros. (SAS AKERYS en date du 2 décembre 2014) ; qu'il s'en suit la confirmation de la décision déférée dans toutes ses dispositions ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'il entre dans les pouvoirs du président du TGI d'autoriser certains indivisaires à conclure seuls un acte de vente d'un bien indivis pourvu qu'une telle mesure soit justifiée par l'urgence et l'intérêt commun ; que la vente du bien indivis (situé [...] ) projetée comporte un prix de 2 500 000 euros ; qu'elle porte sur deux maisons et un garage ; que la demande est formulée par 7 indivisaires sur les 8 ; Attendu qu'il est fait valoir que l'usufruitière doit disposer d'un autre logement adapté à son grand âge ; que l'acheteur, la société URBAT maintiendra son offre tant que le règlement d'urbanisme de la zone UR2 du PLU de la ville Marseille reste applicable ; qu'il existe un risque de forte diminution du prix de vente en cas de diminution du niveau de constructibilité de la zone consécutive à des modifications relatives au coefficient d'emprise au sol envisagées par l'autorité municipale ; que Mme Mireille Y... fait valoir que l'acte de vente projetée implique des versements à hauteur de 125 000 € au profit du garage X... et de Mme Thérèse Y... au titre d'indemnité d'éviction ; que Mme Mireille Y... fait valoir que ces indemnités correspondent à une ventilation du prix de vente et qu'il faut en déduire que le prix de vente à revenir à l'indivision devrait être de 2 625 000 euros ; que cependant l'éviction des occupants des lieux peut légitimement induire leur indemnisation ; que dans l'hypothèse où l'acheteur ne les prendrait pas à sa charge, celles-ci incomberait alors à l'indivision ; qu'il résulte des débats et de l'examen des pièces produites, qu'il existe un risque grave de dépréciation à hauteur de 900 000 € du bien indivis en raison d'éventuelles modifications de la réglementation de l'urbanisme envisagées dans la zone ; que l'offre formulée par la société URBAT est très supérieure aux autres ; que Mme Mireille Y... est dans l'incapacité de démontrer que le prix de vente à revenir à l'indivision serait inférieur à sa valeur au regard des prix du marché immobilier ; que Mme Mireille Y... est dans l'incapacité de démontrer que le prix de vente à revenir à l'indivision serait inférieur à celui qu'offrirait un autre acheteur ; que l'intérêt commun requiert à l'évidence d'autoriser la vente nonobstant l'opposition de Mme Mireille Y... ;
1/ ALORS QUE le président du tribunal de grande instance saisi sur le fondement de l'article 815-6 du code civil qui n'est pas compétent pour autoriser, sur le fondement de l'urgence et de l'intérêt commun, certains indivisaires à procéder à la liquidation de l'indivision ne peut pas autoriser ces mêmes indivisaires à disposer de l'intégralité des biens composant une indivision ; qu'en autorisant, sur le fondement de l'article 815-6 du code civil, les consorts X... à disposer de l'ensemble immobilier situé [...] , sans rechercher si cet ensemble ne constituait pas à lui tout seul l'intégralité des biens composant l'indivision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-6 du code civil ;
2/ ALORS QUE le juge ne peut prescrire ou autoriser une mesure sur le fondement de l'article 815-6 du code civil que si l'intérêt commun de l'indivision la justifie, que Mme Y... faisait valoir dans ses conclusions d'appel que la condition d'intérêt commun qui justifierait la vente de l'ensemble immobilier indivis à la société URBAT faisait défaut en l'état de la proposition équivalente de la société Akerys ; qu'en autorisant les consorts X... à conclure la vente du bien indivis sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3/ ALORS QUE le juge ne peut prescrire ou autoriser une mesure sur le fondement de l'article 815-6 du code civil que si l'urgence la justifie ; qu'en jugeant que l'urgence était caractérisée dès lors que l'offre d'achat de la société URBAT d'un montant de 2 500 000 euros était calculée sur la base du PLU actuel et de la constructibilité du terrain et que le PLU était en cours de modification avec pour conséquence une réduction de l'emprise au sol des constructions et une décote de 900 000 euros du prix de vente proposé par la société URBAT, sans rechercher si l'offre équivalente proposée par la société Akerys dépendait elle aussi de l'absence de modification du PLU, bien que l'absence d'une telle condition soit de nature à priver de toute urgence la cession du bien indivis, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 815-6 du code civil.