CIV. 1
IK
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 28 février 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme BATUT, président
Décision n° 10135 F
Pourvoi n° F 16-20.999
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Alfred X..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 9 mai 2016 par la cour d'appel de Cayenne (chambre civile), dans le litige l'opposant à M. Christian Y..., domicilié [...] ,
défendeur à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 janvier 2018, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Z..., conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller doyen, Mme Pecquenard, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de Me A..., avocat de M. X..., de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. Y... ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à M. Y... la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit. MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par Me A..., avocat aux Conseils, pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné M. X... à payer à M. Y... la somme de 35.000 euros au principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2014 et jusqu'à parfait paiement ;
AUX MOTIFS QUE, sur la recevabilité de l'action : M. X... a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour escroqueries au préjudice de 5 personnes, dont M. Y... et M. B... ; que le fait que M. X... ait été relaxé n'empêche pas M. Y... d'agir devant la juridiction civile en remboursement d'une créance et indemnisation d'un préjudice ; qu'en effet, d'une part, l'autorité de chose jugée ne s'attache qu'aux éléments constitutifs de l'infraction poursuivie et ne fait pas obstacle à ce que d'autres éléments étrangers à cette dernière soient soumis à l'appréciation de la juridiction civile ; que d'autre part les fautes civile et pénale sont en l'espèce de natures différentes ; qu'enfin, les fondements des deux actions ne sont pas identiques puisque fondée sur le délit d'escroquerie en ce qui concerne l'action devant le tribunal correctionnel (ce qui suppose la preuve de la remise d'une chose suite à des manoeuvres frauduleuses), et fondée sur des reconnaissances de dette en ce qui concerne l'action devant le tribunal de grande instance ; que l'action doit être déclarée recevable ; que, sur le remboursement de la somme de 35.000 euros : il résulte des articles 1892 et 1902 du code civil que celui qui a reçu un prêt argent est tenu d'une obligation de remboursement ; que l'existence d'un prêt peut être établie par une reconnaissance de dette établie unilatéralement par l'emprunteur aux termes de laquelle il s'engage à rembourser la somme prêtée ; qu'en l'espèce, il est produit aux débats trois reconnaissances de dette des 8 janvier 2010, 26 avril 2010 et 28 juillet 2010 ; que la formulation de ce document exclut toute intention libérale ; que M. X... ne conteste pas avoir reçu les sommes en question de M. Y... et d'ailleurs il s'est engagé à les rembourser ; que M. X... ne peut soutenir que ces versements correspondraient à une avance sur l'achat de la parcelle de terrain ; qu'en effet, cette argumentation est en contradiction totale avec l'existence de reconnaissances de dette ; que, de plus, la régularisation de la vente était impossible puisque la chose appartenait à autrui, de sorte qu'aucun acompte ne pouvait être versé ; qu'à supposer même que l'on puisse considérer qu'il s'agissait d'un "acompte", la vente ne s'est pas réalisée et la somme doit en tout état de cause être remboursée ; qu'il résulte de ce qui précède que la preuve du prêt d'une somme de 35.000 euros par M. Y... à M. X... est rapportée ; qu'il est constant que la somme de 35.000 euros n'a pas été remboursée par M. X..., étant précisé que M. Y... n'a pas pu acquérir la propriété de la parcelle, de sorte qu'il y a lieu de faire intégralement droit à la demande en paiement ; que les intérêts doivent courir à compter de l'assignation devant le tribunal de grande instance, faute de démonstration de l'existence d'une mise en demeure antérieure ;
ALORS QUE l'autorité de la chose jugée au pénal s'étend aux motifs qui sont le soutien nécessaire du chef de dispositif prononçant la décision ; que, pour relaxer M. X..., le tribunal correctionnel a jugé que les faits sur lesquels était fondée la poursuite pénale engagée à son encontre n'étaient pas établis, de sorte que la cour d'appel qui a condamné M. X... sur le fondement des mêmes faits a violé le principe de l'autorité de la chose jugée au pénal sur le civil, ensemble l'article 1351 du code civil.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il avait condamné M. X... à payer à M. Y... la somme de 35.000 euros au principal, assortie des intérêts au taux légal à compter du 30 janvier 2014 et jusqu'à parfait paiement ;
AUX MOTIFS QUE, sur le remboursement de la somme de 35.000 euros : il résulte des articles 1892 et 1902 du code civil que celui qui a reçu un prêt argent est tenu d'une obligation de remboursement ; que l'existence d'un prêt peut être établie par une reconnaissance de dette établie unilatéralement par l'emprunteur aux termes de laquelle il s'engage à rembourser la somme prêtée ; qu'en l'espèce, il est produit aux débats trois reconnaissances de dette des 8 janvier 2010, 26 avril 2010 et 28 juillet 2010 ; que la formulation de ce document exclut toute intention libérale ; que M. X... ne conteste pas avoir reçu les sommes en question de M. Y... et d'ailleurs il s'est engagé à les rembourser ; que M. X... ne peut soutenir que ces versements correspondraient à une avance sur l'achat de la parcelle de terrain ; qu'en effet, cette argumentation est en contradiction totale avec l'existence de reconnaissances de dette ; que, de plus, la régularisation de la vente était impossible puisque la chose appartenait à autrui, de sorte qu'aucun acompte ne pouvait être versé ; qu'à supposer même que l'on puisse considérer qu'il s'agissait d'un "acompte", la vente ne s'est pas réalisée et la somme doit en tout état de cause être remboursée ; qu'il résulte de ce qui précède que la preuve du prêt d'une somme de 35.000 euros par M. Y... à M. X... est rapportée ; qu'il est constant que la somme de 35.000 euros n'a pas été remboursée par M. X..., étant précisé que M. Y... n'a pas pu acquérir la propriété de la parcelle, de sorte qu'il y a lieu de faire intégralement droit à la demande en paiement ; que les intérêts doivent courir à compter de l'assignation devant le tribunal de grande instance, faute de démonstration de l'existence d'une mise en demeure antérieure ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'aux termes de l'article 1315 du code civil, le prêteur qui réclame le remboursement de la somme prêtée doit être en mesure d'apporter la preuve de l'existence du prêt, notamment par la production d'une reconnaissance de dette remplissant les conditions de l'article 1326 du même code ; qu'en l'espèce, M. Y... rapporte la preuve de l'existence du prêt et de l'obligation de remboursement à laquelle M. X... s'était engagé par la production de trois reconnaissances de dette, pour un montant total de 35.000 euros ; que faute par M. X... de rapporter la preuve qu'il s'est libéré de son obligation, celui-ci sera condamné à payer à M. Y... la somme de 35.000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation, soit au 30 janvier 2014 ;
1°) ALORS QUE les choses futures peuvent être l'objet d'une obligation ; que dans ses conclusions d'appel, M. X... avait fait valoir que les trois reconnaissances de dette établies en 2010 avaient pour cause son engagement de rembourser la somme de 35.000 euros versée par M. Y... à titre d'acompte sur la vente future de son terrain dans l'attente de l'accomplissement des formalités administratives, sa qualité d'attributaire dudit terrain ayant été attestée par le Centre spatial guyanais, en parfaite connaissance de cause de la part de M. Y... qui en avait attesté ; qu'en affirmant que la thèse défendue par M. X... serait en contradiction totale avec l'existence desdites reconnaissances de dette, pour le condamner au remboursement de cette somme la cour d'appel a méconnu le principe susvisé et violé les articles 1130, 1132, 1892 et 1902 du code civil ;
2°) ALORS QUE le juge est tenu d'examiner l'ensemble des éléments de preuve soumis à son examen par les parties au soutien de leurs prétentions respectives ; qu'à l'appui de sa demande, M. X... avait produit, d'une part, une attestation émanant du Centre spatial guyanais certifiant sa future qualité d'attributaire du terrain, objet de la vente à M. Y... et, d'autre part, un courrier de ce dernier confirmant sa parfaite connaissance de ce que toutes les conditions relatives à la vente devraient être réunies avant la conclusion de l'acte authentique de vente ; qu'en s'abstenant d'examiner ces éléments probatoires de nature à établir que les trois reconnaissances de dette avaient bien pour cause l'engagement pris par M. X... de rembourser à M. Y... les sommes versées à titre d'acompte en cas de non perfection de la vente du bien immobilier devant intervenir dans le futur dès régularisation de la situation par les autorités administratives, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné M. X... à verser à M. Y... la somme de 2.500 euros au titre du préjudice moral avec intérêts au taux légal ;
AUX MOTIFS QUE M. X... ne pouvait ignorer qu'il n'était pas propriétaire de la parcelle qu'il se proposait de vendre ; qu'il l'a d'ailleurs reconnu dans son audition devant les gendarmes arguant de prétendues lenteurs administratives imputables à la mairie de Kourou ; que, ce faisant, il a commis une faute ; que M. Y... a subi un incontestable préjudice moral (distinct du simple retard dans le remboursement) qui est constitué par le fait de n'avoir pu acquérir un terrain convoité, et le fait d'avoir subi une série de tracas administratifs et judiciaires, préjudice qui sera réparé par l'allocation d'une somme de 2.500 euros ;
ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le premier moyen reprochant à l'arrêt attaqué d'avoir condamné M. X... à rembourser à M. Y... la somme de 35.000 euros en exécution de trois reconnaissances de dette du fait de l'absence de vente du terrain, objet desdites reconnaissances de dette, entraînera en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de la disposition de l'arrêt le condamnant au paiement de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral, pour vente fautive d'un terrain ne lui appartenant pas.