La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

28/02/2018 | FRANCE | N°16-19824

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 28 février 2018, 16-19824


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 3 mai 2016), que M. Y... a été engagé en qualité de dépanneur service après vente par la société Conforama à compter du 4 septembre 1984 ; que par avenant du 7 septembre 2001, le salarié a été affecté à l'établissement de Saint-Priest au centre Saveo, en qualité de technicien ; que le 27 novembre 2009, il a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour faute grave, avec mise à pied conservatoire puis licencié pour faute grave par lettre du 11

décembre 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes a...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 3 mai 2016), que M. Y... a été engagé en qualité de dépanneur service après vente par la société Conforama à compter du 4 septembre 1984 ; que par avenant du 7 septembre 2001, le salarié a été affecté à l'établissement de Saint-Priest au centre Saveo, en qualité de technicien ; que le 27 novembre 2009, il a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement pour faute grave, avec mise à pied conservatoire puis licencié pour faute grave par lettre du 11 décembre 2009 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale de diverses demandes au titre de la rupture du contrat de travail et de rappel de salaires sur les heures supplémentaires ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire les faits reprochés non prescrits, de juger son licenciement justifié par une faute grave et de le débouter de ses demandes au titre de la rupture du contrat de travail alors, selon le moyen :

1°/ que l'employeur, dont la connaissance des faits fait partir le délai de prescription de deux mois de l'article L. 1332-4 du code du travail, s'entend du supérieur hiérarchique du salarié, qui peut à ce titre déclencher une action disciplinaire, et non pas de celui qui a le pouvoir de prendre les sanctions ; que la cour d'appel a elle-même relevé que la convocation à l'entretien préalable datait du 27 novembre 2009 et que, s'agissant des faits liés à l'intervention chez Mme A..., la société Conforama a été informée par mail du 28 septembre 2009 de la plainte de Mme A... auprès du responsable de dépôt le 26 septembre 2009 ; qu'en affirmant, pour juger que les faits n'étaient pas prescrits, que seul l'employeur avait un pouvoir de sanction et non le chef de dépôt, alors qu'il n'était pas contesté que ce dernier était le supérieur hiérarchique de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du code du travail ;

2°/ que s'agissant des faits du 23 janvier 2009 concernant l'intervention chez M. B..., que M. Y... demandait confirmation du jugement qui avait retenu que l'employeur avait connaissance des faits avant le 14 novembre, date de la lettre du client, puisque celle-ci commençait par les mots « suite à votre demande », ce dont il résultait qu'elle avait été sollicitée par la société, en sorte que la date à laquelle les faits avaient été connus de l'employeur ne pouvait être qu'antérieure et restait indéterminée ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'abord, qu'ayant rappelé que la lettre de licenciement reprochait au salarié des comportements inacceptables lors d'interventions auprès de clients et constaté que l'employeur en avait eu connaissance les 26 octobre 2009 et 14 novembre 2009, soit dans le délai de deux mois précédant l'engagement des poursuites, la cour d'appel en a exactement déduit, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la première branche et sans être tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation des parties, que les faits allégués au soutien de la sanction n'était pas prescrits ;

Et attendu, ensuite, qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les troisième, quatrième, cinquième, sixième, septième et huitième branches du moyen annexé qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen, ci-après annexé :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. Y...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué, d'AVOIR dit les faits reprochés non prescrits, et jugé le licenciement de M. Y... justifié par une faute grave et de l'avoir en conséquence débouté de ses demandes d'indemnité de préavis, d'indemnité conventionnelle de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement abusif, ainsi que de ses rappels de salaire sur mise à pied conservatoire.

AUX MOTIFS QUE, Sur le licenciement M. Y... a été licencié par courrier en date du 11 décembre 2009 pour faute grave. Au terme de la lettre de licenciement il lui est fait grief de comportements inacceptables dans le cadre de ses fonctions tant au regard de la relation client qu'au regard des incidences que ses attitudes emportent vis à vis de la responsabilité de l'entreprise notamment au point de vue légal. 11 est visé dans ce courrier : - une intervention en date du 18 septembre 2009 au domicile de M. C... au cours de laquelle il a cassé un câble qu'il s'est engagé à lui fournir ce qu'il n'a pas fait et de n'avoir pas réparé le téléviseur alors qu'un impact sur la dalle était visible. -une intervention en date du 10 septembre 2009 chez Mme A... à 22 heures alors que cette intervention était prévue au cours de l'après midi et avoir effectué un bon d'intervention selon lequel le téléviseur ne présentait aucun défaut, or la cliente a dû ramener ledit téléviseur et a fait part de son mécontentement - une intervention chez M B... le 23 janvier 2009 relatée par un courrier de la part du client en date du 14 novembre 2009, selon lequel à la suite d'une première intervention il serait intervenu une seconde fois chez ce client durant les heures de service avec le véhicule de l'entreprise, lui aurait réclamé 142 € pour ses interventions, et aurait emporté un poste radio CD jamais restitué. En application des dispositions de l'article L 1332-4 du code du travail aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à un engagement de poursuites disciplinaires au delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à des poursuites pénales. La faute grave, privative d'indemnités de licenciement, est une faute qui résulte d'un fait imputable au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise pendant la durée du préavis. Il convient de rappeler que la lettre de licenciement fixe les limites du litige et que la preuve de la faute grave incombe à l'employeur. En l'espèce les poursuites disciplinaires ont été engagées par le courrier de convocation à 1' entretien préalable daté du 27 novembre 2009. Il ressort des pièces produites que la société CONFORAMA a été informée - par mail du 26 octobre 2009 de l'intervention chez M. C... le 18 septembre 2009 - par courrier du 14 novembre 2009 de l'intervention chez M. B... - par mail du 28 septembre 2009 de la plainte de Mme A... auprès du responsable de dépôt le 26 septembre 2009. De ces éléments il ressort que l'employeur, et non le chef de dépôt, qui seul a un pouvoir de sanction, a été informé moins de deux mois avant l'introduction de la procédure disciplinaire, des divers manquements allégués à l'encontre de M. Y.... En conséquence les faits allégués à la base de la sanction ne sont pas prescrits.

1 /ALORS QUE l'employeur, dont la connaissance des faits fait partir le délai de prescription de deux mois de l'article L.1332-4 du code du travail, s'entend du supérieur hiérarchique du salarié, qui peut à ce titre déclencher une action disciplinaire, et non pas de celui qui a le pouvoir de prendre les sanctions ; que la cour d'appel a elle-même relevé que la convocation à l'entretien préalable datait du 27 novembre 2009 et que, s'agissant des faits liés à l'intervention chez Mme A..., la société Conforama a été informée par mail du 28 septembre 2009 de la plainte de Mme A... auprès du responsable de dépôt le 26 septembre 2009 ; qu'en affirmant, pour juger que les faits n'étaient pas prescrits, que seul l'employeur avait un pouvoir de sanction et non le chef de dépôt, alors qu'il n'était pas contesté que ce dernier était le supérieur hiérarchique de M. Y..., la cour d'appel a violé l'article L.1332-4 du code du travail.

2/ ALORS ENCORE s'agissant des faits du 23 janvier 2009 concernant l'intervention chez M. B..., QUE Monsieur Y... demandait confirmation, du jugement qui avait retenu que l'employeur avait connaissance des faits avant le 14 novembre, date de la lettre du client, puisque celle-ci commençait par les mots « suite à votre demande », ce dont il résultait qu'elle avait été sollicitée par la société, en sorte que la date à laquelle les faits avaient été connus de l'employeur ne pouvait être qu'antérieure et restait indéterminée ; qu'en ne répondant pas à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ET AUX MOTIFS ENCORE QUE M. Y... conteste aujourd'hui les faits qui lui sont reprochés. *Sur l'intervention du 18 septembre 2009 chez M. C.... Il ressort du mail de M. C... à la société CONFORAMA en date du 26 octobre 2009 que M. Y..., lors de son intervention, s'est engagé d'une part à lui fournir dans la boîte aux lettres le câble qu'il avait cassé et d'autre part à lui faire parvenir un devis de réparation. Il est précisé dans ce courrier que le câble ne lui a pas été fourni et qu'à la suite d'un appel adressé à CONFORAMA il a été informé qu'aucun devis n'avait été sollicité. Il convient de relever que selon la lettre de licenciement M. Y... a reconnu les faits relatifs au câble, prétendant dans ses écritures avoir remplacé la fiche par une autre afin que le téléviseur fonctionne. Dans la lettre de licenciement il est également fait grief à M. Y... d'une erreur de diagnostic. Or il ressort de la fiche d'intervention que qu'il est mentionné "vérification coup vitre extérieure", ce qui est conforme au diagnostic aujourd'hui retenu par l'employeur en l'occurrence une défectuosité de la dalle du téléviseur. En revanche il est constant que M. Y... n'a pas procédé à la réparation du téléviseur. 11 reconnaît que le client lui a effectivement demandé un devis mais ne justifie pas, ainsi qu'il l'indique, avoir sollicité l'entreprise pour l'établissement dudit devis de réparation afin de le transmettre au client. En outre il ressort de l'attestation de M. D..., dont il n'est pas justifié qu'elle serait mensongère, qu'aucune demande de devis n'a été formée au centre SAVEO avant le mail de M. C.... En conséquence le grief allégué par la société CONFORAMA est établi. *sur l'intervention en date du 10 septembre 2009 chez Mme A... : Il ressort du planning que l'intervention chez Mme A... était programmée le 10 septembre 2009 dans le courant de l'après-midi et que le jour des faits, M. Y... a, selon les fiches d'intervention, effectué un dépannage à BOUSSAC BOURG de Ilhl5 à 12h20 , un autre à GOUZON de 15h30 à 16 h, un autre également à GOUZON se terminant à 17h30, suivi d'une intervention à LA SOUTERRAINE de 18h30 à 19 h 15 et enfin une intervention chez Mme A... à, semble-t-il 20 heures selon la fiche, la fin d'intervention n'étant pas indiquée ou illisible et au cours de laquelle il a indiqué " Panne non constatée RAS". Il s'est avéré que Mme A... a ramené le téléviseur au dépôt ainsi qu'il ressort du mail de M. E... en date du 26 septembre 2009. S'il n'est pas justifié de l'heure exacte de l'intervention chez Mme A... il convient de relever que selon la lettre de licenciement M. Y... a reconnu les faits lors de l'entretien préalable (en l'occurrence l'intervention à 22 heures) en expliquant avoir rendu visite à sa belle-mère ce qui a été à l'origine de son arrivée tardive chez la cliente. Force est de constater que M. Y... n'a pas contesté cette version des faits à réception de la lettre de licenciement. Ainsi s'il demeure un doute sur l'heure exacte d'intervention chez Mme A..., celle-ci ne s'est pas effectuée en cours d'après-midi conformément au planning mais tardivement, et que cette intervention a été suivie d'une erreur de diagnostic dès lors que quelques jours plus tard la cliente a fait part de son mécontentement à la société CONFORAMA. En conséquence ce grief est également établi. *Sur l'intervention chez M B... le 23 janvier 2009 : Il est constant que M. Y... est intervenu chez M. B... le 23 janvier 2009 pour mise en service et vérification. M. Y... reconnaît avoir procédé à l'acquisition pour le compte de M. B..., d'une antenne et en avoir effectué la pose le 28 janvier suivant pour lesquelles il a perçu une somme de 142 €. Selon la lettre de licenciement, M. Y... a reconnu lors de l'entretien préalable avoir procédé à la pose de l'antenne "au noir" et encaissé le chèque sur le compte de sa compagne. Egalement il a emporté un poste chaîne HIFI qui ne fonctionnait pas. Selon la lettre de licenciement 1' intervention relative à la pose de l'antenne se serait opérée durant le temps de travail avec le véhicule de l'entreprise ce que ne conteste pas le salarié. Dès lors nonobstant l'absence de clause d'exclusivité dans le contrat de travail cette intervention de M. Y... pour laquelle il a perçu une rémunération ne saurait s'analyser en un simple service rendu. Ce comportement allié au fait que M. Y... n'a jamais répondu aux divers appels du client concernant la restitution de son poste radio retrouvé au sein du dépôt de CONFORAMA et pour lequel le "recel" allégué à son 'encontre n'est pas caractérisé, est constitutif d'une faute. Ainsi si les deux premiers manquements à eux seuls ne sauraient constituer une faute grave, en revanche associés à l'intervention de travail dissimulé pouvant engager la responsabilité de l'employeur, ils sont constitutifs de la faute grave alléguée à l'encontre de M. Y... ne permettant pas son maintien dans l'entreprise durant le préavis étant observé que M. Y... a été mis à pied le jour de l'envoi de la lettre de licenciement, peu important qu'il ait travaillé jusqu'au terme de cette journée . En conséquence le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse sera infirmé.

3/ ALORS QU'une erreur de diagnostic peut-être une insuffisance professionnelle ou une faute ; que pour juger que le grief lié à l'intervention chez Mme A... était établi, la cour d'appel s'est contentée d'affirmer que cette intervention a été suivie d'une erreur de diagnostic dès lors que quelques jours plus tard la cliente a fait part de son mécontentement à la société Conforama ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, comme elle y était expressément invitée par M. Y..., ce grief n'était pas relatif à ses compétences professionnelles et donc exclusif de toute faute, la cour d'appel a privé sa décisions de base légale au regard de l'article L.1232-1 et L.1234-1 du code du travail.

4/ ALORS, EN OUTRE, QUE, l'employeur doit faire la preuve de la faute grave et les juges du fond sont tenus de vérifier l'exactitude des griefs qui sont énoncés dans la lettre de licenciement avant de les qualifier ; que pour juger que l'intervention chez M. B... était du travail dissimulé et non un service rendu, la cour d'appel a relevé que « selon la lettre de licenciement, M. Y... a reconnu lors de l'entretien préalable avoir procédé à la pose de l'antenne « au noir » et encaissé le chèque sur le compte de sa compagne » et, aussi » que « selon la lettre de licenciement, l'intervention relative à la pose de l'antenne se serait opérée durant le temps de travail avec le véhicule de l'entreprise (
) » ; qu'en statuant ainsi, sans vérifier l'exactitude des faits énoncés dans la lettre de licenciement, alors qu'ils étaient contestés par M. Y..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.1232-1 et L.1234-1 du code du travail.

5/ ALORS, de surcroît, QUE les juges du fond doivent pas dénaturer les conclusions des parties ; que dans ses conclusions d'appel, M. Y... a fait valoir qu'il « est donc intervenue le 28 janvier 2009, en dehors de ses heures de travail et avec son véhicule personnel, après avoir acheté l'antenne pour ce client d'un montant de 101,99 euros » ; que pour juger que l'intervention chez M. B... était du travail dissimulé et non un service rendu, la cour d'appel a relevé que « selon la lettre de licenciement, l'intervention relative à la pose de l'antenne se serait opérée durant le temps de travail avec le véhicule de l'entreprise ce que ne conteste pas le salarié » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de M. Y... et violé l'article 4 du code de procédure civile.

6/ ALORS, également et en tout état de cause, QUE au terme de son examen des nombreux griefs, la cour d'appel a relevé qu'étaient seulement établis - au titre de l'intervention chez M. C... l'absence de demande de devis, - au titre de l'intervention chez Mme A..., une erreur de diagnostic, enfin - au titre de l'intervention chez M. B... une intervention de travail dissimulé ; que pour juger que le licenciement de M. Y... était justifié par une faute grave, la cour d'appel a affirmé que si les deux premiers manquements à eux seuls ne sauraient constituer une faute grave, en revanche associés à l'intervention de travail dissimulé, ils sont constitutifs d'une faute grave ne permettant pas le maintien de M. Y... dans l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée par M. Y..., si les seuls griefs qui subsistaient avaient pu rendre impossible le maintien de M. Y... dans l'entreprise compte-tenus de son ancienneté de près de 26 ans et de son passé professionnel irréprochable, la cour d'appel a, à tout le moins, privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1234-1 du code du travail.

7/ ALORS, en toute hypothèse QUE la procédure de licenciement doit être mise en oeuvre dans un délai restreint et non pas seulement dans le délai de deux mois quand l'employeur se prévaut d'une faute grave ; que la cour d'appel a elle-même relevé que la société Conforama a engagé la procédure de licenciement le 27 novembre 2009, alors qu'elle aurait été informée des différents griefs respectivement le 28 septembre 2009 (en fait le 26 septembre), le 26 octobre 2009 et le 14 novembre 2009 ; qu'en se contentant d'affirmer que le délai de deux mois avait été respecté, sans rechercher si, comme elle y était invitée par M. Y..., la procédure de licenciement avait été engagée dans un délai restreint, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.1234-1 et L.1234-5 du code du travail.

8/ ALORS, enfin QUE les juges doivent répondre aux conclusions des parties ; que dans ses conclusions d'appel, M. Y... a soutenu et démontré que le vrai motif de son licenciement était un motif économique et qu'il était programmé depuis longtemps à l'avance et s'inscrivait dans le cadre du plan de réduction des effectifs de la société Conforama ; qu'en s'abstenant de toute réponse sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif sur ce point, d'AVOIR jugé que Monsieur Y... pouvait prétendre au paiement des heures supplémentaires qu'il a effectuées entre juin 2009 et novembre 2009 pour un montant de 3 938,62 euros et les congés payés afférents, mais de l'avoir débouté de sa demande de paiement des heures supplémentaires qu'il a effectuées entre juillet 2005 à mai 2009 et d'avoir en conséquence refusé de condamner la société Conforama à lui payer 32 914,09 euros à ce titre.

AUX MOTIFS QUE, Sur les heures supplémentaires : Aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail « en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné en cas de besoin toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.»S'il résulte de ces dispositions que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande. En l'espèce, il est constant que pour l'exercice de ses fonctions, il est remis à M. Y... un planning d'intervention sur lequel est indiqué principalement le nom, adresse et numéro de téléphone du client, la nature de la panne et la demie journée durant laquelle doit s'effectuer l'intervention. A l'appui de sa demande M. Y... produit des tableaux récapitulatifs hebdomadaires et mensuels de juin 2005 à juin 2009 établis par lui accompagnés des plannings remis par l'employeur, et pour la période de juin à novembre 2009 outre ces documents les fiches d'intervention correspondant à ses journées de travail. Cependant force est de constater que les tableaux récapitulatifs établis par le salarié indiquent chaque semaine le nombre total d'heures travaillées et le nombre d'heures payées ainsi que le nombre d'heures supplémentaires restant dues et les plannings. De la lecture des tableaux il ressort qu'à l'exception de deux semaines sur l'année 2007, M. Y... n'a pas été rémunéré au titre d'heures supplémentaires. Toutefois documents ne comportent ni les heures d'embauché et de débauche ni les heures de coupures durant les repas. Ainsi en l'absence de tels éléments permettant tant à l'employeur d'apporter une réponse dans les conditions normales du débat contradictoire qu'à la cour d'apprécier la durée exacte de travail du salarié, il ne peut être considéré que M. Y... étaye ses prétentions quant à l'exécution des heures supplémentaires dont il réclame le paiement. En revanche pour la période comprise entre les mois de juin 2009 et novembre 2009 M. Y... produit, outre les documents précités, les fiches d'intervention chez les clients et signées par eux portant indication des heures d'arrivée et de départ permettant ainsi de connaître la durée quotidienne de travail du salarié. Il incombe, en conséquence, à l'employeur d'y répondre et d'apporter des éléments justificatifs des horaires effectués de manière à permettre à la juridiction d'apprécier la valeur probante des éléments apportés de part et d'autre, sans imposer au seul salarié la charge de la preuve. Or, alors que l'employeur doit être en mesure de fournir les documents de décompte du temps de travail qu'il a l'obligation de tenir ainsi qu'il lui a été rappelé par divers courriers de l'inspection du travail en date des 2 et 6 mars 2009 et 9 septembre 2009 l'invitant à mettre en place un décompte de la durée du travail conforme aux dispositions légales, il ne produit aucun document de cette nature ni aucun élément de nature à remettre en cause la durée des trajets et les temps d'intervention allégués par le salarié. En outre la société CONFORAMA pour s'exonérer des heures supplémentaires ainsi étayées oppose au salarié de ne pas produire toutes les fiches d'intervention ou de produire des fiches illisibles alors qu'elle ne justifie pas que M. Y... n'aurait pas exécuté les interventions qui lui avaient été fixées sur le planning. Egalement il convient de noter qu'il ressort de l'examen des documents produits que le salarié établit à tout le moins sa première heure d'intervention et sa dernière heure et indique les temps de trajets pour se rendre sur les lieux et en revenir. Il indique sans être contredit que tous les matins il passait au centre avant sa première intervention effectuer un travail administratif durant une demi heure. Certes certaines fiches d'interventions sont illisibles au niveau des heures d'arrivée ou de départ chez le client, ne sont pas intégralement renseignées car rédigées manuellement ou ne sont pas signées du client. Toutefois dès lors que les premières et dernières fiches d'intervention journalières sont lisibles et signées et qu'il n'est pas établi que le salarié n'aurait pas effectué les interventions énoncées au planning, nonobstant de ponctuelles erreurs d'horaires, ces pièces doivent être considérées comme probantes. Egalement les temps de trajet énoncés entre chaque client sont cohérents et il ne peut être fait grief au salarié du temps passé entre deux interventions, lié au trafic routier ou à la disponibilité des clients dès lors qu'il n'est pas établi que M. Y... n'était pas à la disposition de son employeur. Ainsi il y a lieu de considérer que M. Y... étaye sa demande laquelle n'est pas utilement contredite par le calcul opéré par l'employeur sur la base d'un temps moyen d'intervention et le temps de trajet retenu par Via Michelin. En conséquence il sera fait droit à la demande de M. Y... à ce titre à hauteur de 236h23 dont 165h52 majorées à 25% et 78h01 à 50% soit à lui revenir à ce titre la somme de 3.938,62 € outre 393,86 € à titre de congés payés afférents. Le jugement déféré sera infirmé en ce sens.

1/ ALORS, D'UNE PART, QUE le salarié ne doit pas prouver, mais étayer sa demande, c'est-à-dire produire des éléments suffisamment précis quant aux horaires effectivement réalisés pour permettre à l'employeur de répondre en fournissant ses propres éléments ; que pour débouter M. Y... de sa demande au titre des heures supplémentaires effectuées de juin 2005 à juin 2009, la cour d'appel a relevé que ses documents ne comportent ni les heures d'embauche et de débauche ni les heures de coupure durant les repas, ce qui ne permet pas à l'employeur d'apporter une réponse, ni à la cour d'apprécier la durée exacte de travail du salarié ; qu'en statuant ainsi, après avoir elle-même relevé que M. Y... produisait des tableaux récapitulatifs hebdomadaires et mensuels établis par lui accompagnés des planning remis par l'employeur, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a exigé du salarié qu'il prouve sa durée du travail et donc violé l'article L.3171-4 du code du travail.

2/ ALORS, D'AUTRE PART QUE l'employeur doit établir les documents nécessaires au décompte de la durée de travail de chacun des salariés qui ne travaillent pas selon un horaire collectif ; que pour juger que M. Y... n'avait pas étayé sa demande, la cour d'appel a affirmé que ses tableaux récapitulatifs hebdomadaires et mensuels et les plannings remis par l'employeur qu'il produisait ne comportaient pas les heures d'embauche et de débauche et les heures de coupure, ni – comme pour la période de juin 2009 à novembre 2009- des fiches d'intervention chez les clients portant indication des heures d'arrivées et de départ permettant ainsi de connaître la durée quotidienne de travail ; qu'en statuant ainsi, avant de relever elle-même que l'employeur n'avait pas mis en place, en tout cas jusqu'en juin 2009, de décompte de la durée du travail conforme aux dispositions légales, la cour d'appel a refusé de tirer les conséquences qui s'imposaient de ses propres constatations et violé les articles L.3171-2 et L.3171-4 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 16-19824
Date de la décision : 28/02/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Riom, 03 mai 2016


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 28 fév. 2018, pourvoi n°16-19824


Composition du Tribunal
Président : M. Chauvet (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.19824
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award