CIV. 2
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 février 2018
Rejet non spécialement motivé
M. X..., conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10103 F
Pourvoi n° R 17-13.606
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Jean-Marc Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 8 décembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 12), dans le litige l'opposant :
1°/ à la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne- division du contentieux, dont le siège est [...] ,
2°/ à la société Chubb A, dont le siège est [...] , anciennement dénommée ACE Europe,
3°/ à la société Jean-Pierre Perney, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , prise en qualité de mandataire judiciaire de la société Imprimerie du Roule,
4°/ à la société Z..., société civile professionnelle, dont le siège est [...] , représentée par M. Z..., pris en qualité de mandataire ad hoc de la société Imprimerie du Roule,
5°/ au ministre chargé de la sécurité sociale, domicilié [...] ,
défendeurs à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 janvier 2018, où étaient présents : M. X..., conseiller doyen faisant fonction de président, M. A..., conseiller rapporteur, M. Poirotte, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Y..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Val-de-Marne et de la société Chubb A ;
Sur le rapport de M. A..., conseiller, l'avis de Mme B..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour M. Y...
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable le recours de M. Y..., comme se heurtant à l'autorité de la chose jugée que revêt la décision de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008 et d'avoir dit que la demande de majoration de la rente est irrecevable ;
AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions de l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision 2010–8 QPC du 18 juin 2010 qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale et que l'affaire n'ait pas déjà été jugée définitivement à la date de la publication de la décision du conseil ; l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008 reconnaissant la faute inexcusable de la société imprimerie du Roule étant définitif et antérieur au 19 juin 2010 date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, M. Y... ne peut demander l'indemnisation des préjudices complémentaires non prévus par le livre IV du code de la sécurité sociale ; en ce qui concerne l'indemnisation des postes de préjudices complémentaires d'aggravation prévus à l'article L.452-3 du code de la sécurité sociale, il est constant que cette demande est recevable lorsqu'il n'a pas encore été statué sur la réparation de ce préjudice complémentaire et lorsque ce préjudice n'était pas inclus dans la demande initiale de la victime ; la cour d'appel d'Amiens, dans son arrêt du 22 mai 2008, a statué définitivement sur les souffrance endurées, le préjudice esthétique et le préjudice d'agrément ; la cour l'a par ailleurs débouté de sa demande présentée au titre du préjudice lié à la perte ou à la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle ; ainsi, les demandes d'indemnisation de M. Y... sur ces postes de préjudices étaient déjà comprises dans sa demande initiale de sorte qu'elles sont irrecevables ; concernant la demande d'indemnisation du préjudice sexuel, ce préjudice n'étant pas couvert par le livre IV, elle ne peut donner lieu à indemnisation ; la cour d'appel d'Amiens ayant, par arrêt du 22 mai 2008, fixé au maximum la majoration de la rente devant lui revenir et la majoration ayant par ailleurs suivi l'évolution de son taux d'incapacité ainsi que la caisse en justifie, M. Y... est irrecevable à présenter de nouveau une demande de majoration de rente ;
ET AUX MOTIFS A LES SUPPOSER ADOPTES QUE la cour d'appel a définitivement statué sur le litige opposant M. Y... au mandataire liquidateur de la société Imprimerie du Roule dans son arrêt du 22 mai 2008 ; l'action engagée par M. Y... sous couvert d'une aggravation de son état de santé pour tenter de faire rouvrir un dossier plus de six ans après une décision définitive l'ayant indemnisé, se heurte à l'autorité de la chose jugée que revêt cette décision ; M. Y... a été déjà indemnisé par l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens le 22 mai 2008 au titre des souffrances physiques et morales, au titre du préjudice esthétique et au titre du préjudice d'agrément ; la demande d'expertise porte sur ces mêmes préjudices et par suite se heurte à l'autorité de la chose jugée ; par ailleurs, le fait que son taux d'IPP soit passé de 15% à 67% permet à M. Y... de bénéficier de facto d'une indemnisation complémentaire tant, bien entendu au regard de la rente d'IPP qui lui est versée que pour ce qui concerne la majoration de rente ; il est de jurisprudence constante que la majoration de la rente ou le capital alloué à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle consécutif à la faute inexcusable de l'employeur est calculée en fonction de la réduction de capacité dont celle-ci reste atteinte et qu'en conséquence cette majoration doit suivre l'évolution du taux d'incapacité de la victime ;
1. ALORS QUE la victime d'un dommage imputable à la faute inexcusable de son employeur est recevable à exercer une nouvelle action en réparation du préjudice résultant de l'aggravation de son état, dès lors qu'il n'a pas déjà été statué sur la réparation de ce préjudice complémentaire qui n'était pas inclus dans la demande initiale ; que l'arrêt attaqué constate que postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008, la caisse, par décision du 10 avril 2014, a notifié à M. Y... un nouveau taux d'incapacité permanente de 67% alors que le taux antérieur était fixé à 15%, ce qui constituait une aggravation de l'état de l'intéressé imputable à la maladie professionnelle ; qu'en déclarant irrecevable la demande d'indemnisation des préjudices fondés sur cette aggravation, quand il résultait de ses propres constatations que cette aggravation, intervenue postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008, n'avait pas été réparée par cette décision, la cour d'appel a violé les article L.452-3 du code de la sécurité sociale ;
2. ALORS QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement ; que l'action portant sur l'indemnisation de préjudices nés d'une aggravation de l'état de santé de M. Y... caractérisée par la notification, postérieurement à l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008, d'un taux d'IPP de 67 %, n'a pas le même objet que celle ayant donné lieu à cet arrêt, qui portait sur un taux d'IPP de 15% ; qu'en jugeant néanmoins que cette action se heurtait à l'autorité de la chose jugée le 22 mai 2008, la cour d'appel a violé les articles 1351 du code civil dans sa rédaction applicable au litige et 480 du code de procédure civile ;
3. ALORS QU'il résulte de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu'en cas de faute inexcusable, la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle peut demander à l'employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d'autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale et que l'affaire n'ait pas été jugée définitivement à la date de publication de la décision du Conseil; que l'autorité de chose jugée ne peut être opposée, lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; que l'arrêt attaqué constate que l'aggravation de l'état de santé de M. Y... caractérisée par la notification le 10 avril 2014 d'un nouveau taux d'IPP de 67% est survenue postérieurement tant à l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens du 22 mai 2008 qu'à la publication de la décision du Conseil constitutionnel le 19 juin 2010, ce dont il résulte que la demande tendant à la réparation de ces préjudices n'a pas été jugée définitivement avant cette date ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L 452-3 du code de la sécurité sociale tel qu'interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, et les articles 1351 du code civil dans sa rédaction applicable au litige et 480 du code de procédure civile.