SOC.
LG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme Goasguen, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10134 F
Pourvoi n° D 17-11.456
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par M. Y..., domicilié [...] ,
contre l'arrêt rendu le 30 novembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 10), dans le litige l'opposant à l'association Union de la jeunesse arménienne d'[...], dont le siège est [...] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 20 décembre 2017, où étaient présents : Mme Goasguen, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Z..., conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller, Mme A..., avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. Y..., de Me B..., avocat de l'association Union de la jeunesse arménienne d'[...] ;
Sur le rapport de M. Z..., conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette le demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par Mme Goasguen, conseiller doyen faisant fonction de président, et M. Schamber, conseiller, en ayant délibéré conformément à l'article 452 du code de procédure civile, en l'audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. Y...
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté M. Y... de ses demandes ;
Aux motifs que sur la modification unilatérale du contrat de travail, M. Y... fait valoir qu'à son retour de congés le 21 juin 2009, il a eu la surprise de constater que le club avait d'ores et déjà pris la décision de l'écarter de ses fonctions précédentes et ce, notamment dès le match amical du 21 juin 2009 pour lequel il a même été interdit de vestiaire ; que selon lui, le fait de l'avoir ainsi déchargé de ses fonctions d'entraîneur constitue un manquement grave de la part de l'employeur aux obligations contractuelles qui s'en trouvent ainsi modifiées dans ses conditions essentielles et l'autorise à considérer que le club a rompu prématurément et abusivement les relations contractuelles à durée déterminée ; que pour justifier la décision de l'employeur de rompre prématurément le contrat, il produit notamment une attestation de M. C... Richard, directeur sportif du club de [...]et organisateur du match amical
du 21 juin 2009, indiquant « J'ai accueilli Monsieur Y... vers 15h30 à l'entrée du stade. En l'accompagnant au vestiaire pour voir son équipe, nous avons aperçu Monsieur D.... Monsieur Y... s'est adressé à lui en disant « Bonjour Président, je descends aux vestiaires ». Monsieur D... lui a répondu « Pourquoi faire tu peux rester là-haut ». Alors gêné, Monsieur Y... a regardé le match des tribunes à mes côtés pendant que Monsieur E... dirigeait l'équipe avec d'autres dirigeants que je ne connais pas » ; que l'AJA [...] remarque que le salarié a fait état de cet argument très tardivement, estime qu'il n'apporte aucune précision sur une prétendue mise à l'écart, antérieure à la procédure de licenciement, précise qu'il s'agissait d'une rencontre amicale de fin de saison, sans le moindre enjeu sportif, qu'il n'existait aucune raison pour la direction du club d'empêcher M. Y... d'avoir accès aux vestiaires de l'équipe, ajoute que le salarié était en congés à la date de la rencontre comme en attestent le registre signé par M. Y... lui-même et deux salariés du club ; qu'il résulte des circonstances de l'espèce que M. Y... était en congés à la date de cette rencontre amicale, qu'il n'est pas contesté que l'entraînement et le suivi du match amical avaient été confiés au deuxième entraîneur M. E..., qui avait donc la responsabilité de ce match ;
que dans ce contexte, les propos tenus par M. D..., rapportés par M. C..., ne peuvent être interprétés comme une interdiction formelle donnée au salarié de rejoindre les vestiaires, de rencontrer les joueurs et donc comme un retrait de ses fonctions d'entraîneur ; qu'il ne peut en conséquence être retenu que la décision d'écarter M. Y... de ses fonctions a été prise et notifiée le 21 juin 2009 ; que le jugement sera infirmé sur ce point ; que sur le licenciement, selon l'article L. 1243-1 du code du travail, sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l'échéance du terme qu'en cas de faute grave, de force majeure ou d'inaptitude constatée par le médecin du travail ; que constitue une faute grave un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que l'employeur doit établir la réalité des griefs qu'il formule ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée : « Le 25 juin dernier, en violation des dispositions de l'article 4 §10 de votre contrat de travail, vous avez téléphoné à Monsieur F... G... X... sur
son portable alors que ce dernier se trouvait à mon domicile et que nous discutions des modalités afin que celui-ci évolue dans notre club lors de la saison 2009/2010, pour le dissuader de rester dans notre club. Dès que son téléphone a sonné, Monsieur F... G... X... a tout de suite activé le
haut-parleur de son portable de telle sorte que toutes les personnes présentes, Madame Claude D..., Monsieur H... D... et Monsieur Richard I... ont pu entendre ses propos à savoir : « Que c'était la guerre avec le président, que lui et Monsieur J... n'étaient pas capables de faire signer de bons joueurs, qu'ils n'étaient même pas capables de trouver un nouvel entraîneur » et que s'il voulait X... pouvait partir signer à [...]club voisin et concurrent car vous en aviez discuté avec l'entraîneur de ce club. Un tel dénigrement est totalement incompatible avec vos fonctions et est constitutif d'une faute grave. Cette démarche contribue à faire partir nos joueurs à la concurrence et affaiblir gravement notre club, la valeur de celui-ci étant liée à son potentiel de joueurs. Potentiel que nous avons mis 16 ans à construire et qu'il est inacceptable de vous laisser détruire d'autant que nous vous avions déjà mis en garde pour des faits analogues la saison dernière vous demandant de ne plus intervenir lorsque les accords avaient été conclus avec des joueurs » (
) Ces faits constituent des manquements intolérables, rendant impossible la poursuite de nos relations contractuelles, nous vous confirmons la rupture anticipée de votre contrat de travail pour faute grave » ; que sur les faits du 25 juin 2009, l'AJA [...] produit notamment : - une attestation du joueur M. F... G... X... indiquant « lors d'une visite chez le président D... H... de l'UJA [...] nous étions en train de discuter des modalités afin que je puisse prolonger mon contrat avec le club, lorsque mon téléphone a sonné c'était Monsieur Y... (l'entraîneur du club) qui m'a alors dit les choses suivantes que c'était la guerre avec le président, que nous étions incapables de faire signer les joueurs qu'il souhaitait et que nous n'étions pas capables de trouver un autre entraîneur et que je pouvais contacter le club de Choisy, c'est ce que j'ai fait »,
- une attestation de M. Richard I..., trésorier du club, indiquant « J'étais présent chez Monsieur et Madame D... le 25 juin 2009 en présence de Monsieur F... G... et j'ai clairement entendu, après que Monsieur F... ait actionné le haut-parleur de son téléphone portable, Monsieur Y... dire que c'était la guerre avec le président, qu'il était incapable de faire signer de bons joueurs ni même de trouver un autre entraîneur. Monsieur Y... l'a également informé qu'il avait parlé avec l'entraîneur de [...] qui était intéressé
par son profil de joueur et qu'il ferait même bien d'aller jouer là-bas plutôt que de rester à lUJA » ; que l'employeur constate que le salarié produit une attestation de l'entraîneur de l'équipe de [...]
qui indique « après avoir téléphoné au club de l'UJA et Monsieur D... H..., que je connais depuis quelques années de football, n'étant pas disponible, j'ai donc contacté l'entraîneur Monsieur Y... et lui ai fait part de mon intérêt envers les joueurs non concernés par le club dont F...
» ; qu'il estime que ce comportement est extrêmement grave puisque son contrat de travail lui interdit d'intervenir dans ce domaine ; que M. Y... explique qu'évoluant dans un championnat amateur, les joueurs n'ont pas de contrat de travail direct avec le club et sont totalement libres d'en partir à chaque intersaison, qu'on ne peut donc lui reprocher leur éventuel départ puisque seul un engagement contractuel avec les joueurs, prérogative du directeur du club, aurait permis de l''empêcher ; qu'il ajoute que les griefs relatifs au départ du joueur L.. M..., quand bien même ils seraient établis, sont prescrits ; que s'agissant du joueur F..., il fait valoir que l'attestation I... ne répond pas aux exigences de l'article 202 du code de procédure civile (pas de mention de sa qualité ni de ses liens avec le club) et doit être écartée, que l'attestation de M. F... n'est que la stricte reproduction de la lettre de licenciement et doit être écartée, d'autant que datée de juillet 2009, elle n'a été communiquée qu'en mars 2012 ; qu'il conteste être responsable du départ de ce joueur et produit des attestations de l'entraîneur et d'un joueur du club de [...] en ce sens, ajoute que l'AJA ne voulait pas conserver M. F..., qui avait déjà choisi de partir ; qu'aucun texte ne s'oppose à la mise en conformité des attestations avec l'article 202 et que l'AJA produit une seconde attestation de M. I... faisant expressément état de sa qualité de trésorier du club ; qu'en tout état de cause, les modes de preuve ne se limitent pas aux attestations et que la cour apprécie souverainement si l'attestation non conforme peut emporter sa conviction ; que l'AJA produit deux attestations concordantes permettant d'établir la réalité du grief invoqué dans la lettre de licenciement, que sans qu'il soit nécessaire de déterminer si M. Y... a convaincu M. F... de jouer dans un autre club, il a critiqué et remis en cause la direction de l'AJA et encouragé un joueur à quitter le club ; que dès lors, ce dénigrement, ces critiques et l'invitation faite à un joueur de rejoindre un club concurrent constituent à eux seuls un manquement grave à son obligation de loyauté rendant immédiatement impossible la poursuite du contrat de travail, sans même qu'il soit besoin d'évoquer les autres griefs ; que la rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée est justifiée ;
Alors 1°) que caractérise une rupture abusive du contrat de travail et à tout le moins une modification unilatérale du contrat, l'interdiction faite par le président du club de football à son entraîneur de rejoindre les vestiaires lors d'un match pour voir son équipe et le fait de lui imposer de regarder le match depuis les tribunes ; qu'en décidant que les propos tenus par le président du club le 21 juin 2009 lors d'un match amical qui, lorsque M. Y... avait indiqué qu'il descendait aux vestiaires, lui avait répondu « pourquoi faire, tu peux rester là-haut », ne caractérisaient pas un retrait de ses fonctions d'entraîneur, l'arrêt infirmatif a violé les articles L. 1221-1, L. 1243-1, L. 1243-3 du code du travail ;
Alors 2°) que l'écoute d'une communication téléphonique à l'insu de l'auteur de celle-ci constitue un procédé déloyal rendant irrecevable sa production à titre de preuve ; que l'arrêt constate que le président de l'AJA [...] reproche à son salarié, dans la lettre de licenciement, d'avoir téléphoné le 25 juin à un joueur « sur son portable alors que ce dernier se trouvait à mon domicile et que nous discutions des modalités afin que celui-ci évolue dans notre club lors de la saison 2009/2010, pour le dissuader de rester dans notre club. Dès que son téléphone a sonné, [il] a tout de suite activé le haut-parleur de son portable de telle sorte que toutes les personnes présentes, Madame Claude D..., Monsieur H... D... et Monsieur Richard I... ont pu entendre ses propos » ; que l'arrêt se fonde sur le témoignage de M. I..., trésorier du club, indiquant : « J'étais présent chez Monsieur et Madame D... le 25 juin 2009 en présence de Monsieur F... G... et j'ai clairement entendu, après que Monsieur F... ait actionné le haut-parleur de son téléphone portable, Monsieur Y... dire que c'était la guerre avec le président, qu'il était incapable de faire signer de bons joueurs ni même de trouver un autre entraîneur. Monsieur Y... l'a également informé qu'il avait parlé avec l'entraîneur de [...] qui était intéressé par son profil de joueur et qu'il ferait même bien d'aller jouer là-bas plutôt que de rester à l'UJA » ; qu'en n'ayant pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, dont il ressortait que le témoignage du trésorier du club, qui avait entendu, grâce à l'activation du haut-parleur du téléphone, à l'insu de M. Y..., sa conversation téléphonique avec le joueur, avait été obtenu de manière déloyale, de sorte qu'il devait être écarté des débats, la cour d'appel a violé les articles 9 du code civil, 9 du code de procédure civile, L. 1243-1, L. 1243-3 du code du travail et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Alors 3°) et en tout état de cause, que la faute grave permettant de rompre un contrat à durée déterminée avant l'échéance du terme implique un fait ou un ensemble de faits imputables au salarié constituant une violation de ses obligations d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; qu'en l'absence de tout antécédent disciplinaire et des bons résultats obtenus par l'entraîneur, l'unique conversation téléphonique du 25 juin 2009 entre le salarié et un joueur ne caractérisait pas une faute grave ; qu'en décidant du contraire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1243-1, L. 1243-3 du code du travail ;
Alors 4°) que M. Y... avait soutenu que la véritable raison de la rupture des relations contractuelles était « que la nouvelle co-présidence de Messieurs D... et J... avait sportivement fait le choix de remodeler leur équipe afin qu'elle ait des ambitions sportives supplémentaires, choix qui impliquait alors un changement d'entraîneur et le remplacement de nombreux joueurs » (conclusions p. 27) et qu'elle avait décidé de le remplacer, avant même de lui notifier la rupture de son contrat, par un nouveau duo d'entraîneurs, MM. K... et E... ; qu'en s'étant abstenue de vérifier la cause exacte du rupture comme le demandait le salarié, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et a violé les articles L. 1243-1 et L. 1243-3 du code du travail.