COMM.
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10084 F
Pourvoi n° D 17-10.007
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Charal, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [...]                      ,
contre l'arrêt rendu le 31 octobre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant à la société Serviand, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                   ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme X..., conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Richard, avocat de la société Charal, de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de la société Serviand ;
Sur le rapport de Mme X..., conseiller, l'avis de Mme Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Charal aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Serviand la somme de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Charal
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la Société CHARAL à payer à la Société SERVIAND la somme de 467.092,32 euros au titre de l'indemnité contractuelle de non-respect de préavis ;
AUX MOTIFS PROPRES que la société Charal ne conteste pas que le contrat conclu le 25 juin 2013 entre la société Serviand et elle-même s'inscrivait dans la globalité de relations commerciales établies ayant débuté le 2 février 2009 avec le contrat conclu avec la société Desoss, filiale du groupe NK Finances au même titre que la société Serviand ; que le contrat « de prestation de travail à façon des viandes » conclu le 25 juin 2013 entre la société Charal et la société Serviand a pris effet à compter de sa signature pour une durée de 1 an renouvelable par tacite reconduction ; qu'il comporte un article 12 b) relatif à la résiliation ainsi rédigé :
« Le contrat pourra être résilié par l'une ou l'autre des parties sous réserve d'une notification par lettre recommandée avec accusé de réception et du respect d'un préavis de trois mois augmenté de un mois par année d'ancienneté du contrat (limité à 6 mois maximum).
Le non-respect de ce préavis permet à la partie qui le subit de réclamer à l'autre une indemnité forfaitaire par mois de préavis non respecté, équivalente à la valeur moyenne des 2 facturations totales mensuelles TTC les plus élevées sur les 12 derniers mois d'activité ou sur la période d'exécution du contrat si la période d'activité était inférieure à 12 mois.
Tout manquement de l'une ou l'autre des parties aux obligations qu'elle a en charge, aux termes des articles de ce contrat, entraînera la résiliation de plein droit du présent contrat, moyennant un préavis de trois mois notifié par lettre recommandée avec accusé de réception demeurée sans effet, sans préjudice de tout dommages et intérêts » ;
que, par courrier recommandé daté du 25 novembre 2013, la société Charal a informé la société Serviand qu'elle résiliait le contrat de prestation, cette décision intervenant « dans le cadre de notre stratégie en matière d'activité de désossage » ; qu'il est mentionné que le préavis de trois mois prévu à l'article 12 du contrat sera respecté, « ce qui entraînera une fin de nos relations contractuelles au 28 février 2014 » ; que, par de justes motifs que la Cour adopte, les premiers juges ont retenu, s'agissant d'un contrat à durée déterminée et en dehors de tout comportement fautif, que la société Charal ne pouvait pas le résilier avant l'échéance du premier terme annuel soit le 25 juin 2014 ; que la date de prise d'effet de la lettre de résiliation du 25 novembre 2013 doit ainsi être fixée au 25 juin 2014 ; que la société Charal a appliqué un préavis de 3 mois expirant le 28 février 2014 ; que la société Serviand est ainsi fondée sur 3 mois écoulés (du 1er mars 2014 au 25 juin 2014) à réclamer l'indemnité forfaitaire prévue à l'article 12 du contrat dont le contenu a été ci-dessus rappelé ; que la société Serviand verse aux débats une pièce n° 16 comprenant son chiffre d'affaires mensuel avec la société Charal de décembre 2012 à février 2014 ; que la moyenne des 2 factures les plus élevées se chiffre à 155.697,44 euros ; que sur la base d'un préavis non respecté de 3 mois, la société Serviand est ainsi créancière de la somme de 467.092,32 euros ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE l'article 1134 du Code civil dispose : « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que ici loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi » ; que le contrat signé entre les sociétés CHARAL et SERVIAND a été proposé par la société CHARAL et qu'il semble qu'il y ait eu discussion et échanges entre les parties qui ont débattu de certaines clauses, notamment les modalités d'application du « label social » ; qu'ainsi, cette convention librement régularisée est devenue « la loi des parties », respectant la liberté contractuelle et a acquis dès lors la force obligatoire des conventions, même si de jurisprudence constante, le juge doit rechercher la volonté réelle des parties ; que le contrat prévoit en son article 12 : durée du contrat et résiliation, en son alinéa a, « Le présent contrat prend effet à compter de sa signature pour une durée de 1 an renouvelable par tacite reconduction » ; que celui-ci a été signé par les parties le 25 juin 2013 et connaissait donc selon la volonté des cocontractants un premier terme ou 24 juin 2014 puis se renouvelait tacitement ensuite ; qu'un second alinéa (b) intitulé résiliation stipule : « Le contrat pourra être résilié par l'une ou l'autre des parties sous réserve d'une notification par lettre recommandée avec accusé de réception et du respect d'un préavis de trois mois augmenté de un mois par année d'ancienneté du contrat (limité à 6 mois maximum) » ; que les parties s'opposent sur leur faculté respective de résilier durant la première année du contrat, la société SERVIAND considérant qu'il n'était possible d'y mettre un terme qu'à la date anniversaire de sa signature soit le 24 juin 2014 à condition d'avoir respecté le délai de préavis de trois mois, la société CHARAL estimant que si le contrat ne prévoit pas expressément une faculté de résiliation « à tout moment », il ne prévoit pas, non plus, de limiter l'exercice de cette faculté à la fin de chaque période annuelle ; que l'article 1156 du Code civil dispose : « On doit dans les conventions rechercher quelle a été la commune intention des parties contractantes, plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes » ; que selon l'article 1162 du Code civil : « Dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation » ; que de jurisprudence constante, l'interprétation rendue nécessaire par l'obscurité d'une clause est vainement reprochée à une cour d'appel qui a décidé que dans le doute, il convenait d'interpréter la convention contre la partie qui l'a rédigée (Civ. 1ère, 22 oct. 1974) ; que la clause contractuelle de durée proposée par la société CHARAL à la société SERVIAND qui a affirmé dans ses écritures que le contrat signé par elle était en fait un contrat proposé par CHARAL à l'ensemble des sous-traitants sans qu'elle soit démentie par cette dernière, est ainsi rédigée ; « Le présent contrat prend effet à compter de sa signature pour une durée de 1 an renouvelable par tacite reconduction » ; que l'on comprend mal dès lors, si l'intention des parties et notamment de CHARAL qui l'a rédigée n'avait pas été de prévoir une première période ferme de un an, pourquoi cette formulation aurait été retenue, étant aisé de prévoir une durée indéterminée avec des modalités identiques de résiliation et de préavis comme c'était d'ailleurs le cas dans le premier contrat SOS DESOSS – CHARAL ; que les parties ont bien encadré leur convention dons une durée déterminée qui, après une première période
renouvellerait tacitement ; que dès lors, on ne peut qu'en déduire qu'il n'était pas possible à l'une ou l'outre partie de résilier avant la date anniversaire du contrat mais à cette date seulement, une rupture notifiée 3 mois avant le terme étant possible, donnant tout son sens à l'ajout d'un mois par année d'ancienneté du contrat contrairement à ce qu'affirme la société CHARAL dans des écritures ; que le Tribunal dira que la société CHARAL a violé les dispositions de résiliation contractuelle et de respect du préavis du contrat conclu avec la société SERVIAND ;
ALORS QUE l'article 12 du contrat du 25 juin 2013 stipulait que s'il prenait effet à compter de sa signature pour une durée de un an renouvelable par tacite reconduction, « le contrat pourra être résilié par l'une ou l'autre des parties sous réserve d'une notification par lettre recommandée avec accusé de réception et du respect d'un préavis de trois mois augmenté de un mois par année d'ancienneté du contrat » ; qu'il était également stipulé qu'en cas de non-respect de ce délai de préavis, la partie n'ayant pas pris l'initiative de la rupture pourrait réclamer à l'auteur de celle-ci une indemnité forfaitaire équivalente à la valeur moyenne mensuelle des deux facturations totales mensuelles les plus élevées sur les douze derniers mois d'activité « ou sur la période d'exécution du contrat si la période d'activité était inférieure à douze mois » ; qu'il en résultait que chaque partie était en droit de prononcer la résiliation unilatérale du contrat, moyennant un délai de préavis de trois mois, avant même la tacite reconduction du contrat ; qu'en affirmant néanmoins qu'il résultait des termes du contrat que la Société CHARAL ne pouvait pas le résilier avant l'échéance du premier terme annuel, bien que le contrat n'ait comporté nulle disposition en ce sens, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'article 12 du contrat du 25 juin 2013, en violation de l'article 1134 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.