COMM.
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 31 janvier 2018
Rejet non spécialement motivé
Mme MOUILLARD, président
Décision n° 10086 F
Pourvoi n° Z 16-24.098
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par la société Sporazur Morris sportswear, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                                            ,
contre l'arrêt rendu le 24 mai 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l'opposant :
1°/ à la société Puma SE, société de droit allemand, dont le siège est [...]                                   ,
2°/ à la société Puma France, société par actions simplifiée, dont le siège est [...]                                       ,
défenderesses à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 19 décembre 2017, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. X..., conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, M. Graveline, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Sporazur Morris sportswear, de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat des sociétés Puma SE et Puma France ;
Sur le rapport de M. X..., conseiller, l'avis de Mme Y..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l'article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sporazur Morris sportswear aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer aux sociétés Puma SE et Puma France la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision
Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Sporazur Morris sportswear.
Il est reproché à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir rejeté la demande de dommages et intérêts formée par la société Sporazur en réparation du préjudice subi du fait de la cessation de la commercialisation du modèle couleur « chocolate brown » ;
AUX MOTIFS QUE la demande en indemnisation de la société Sporazur fondée sur l'article 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC tend aux mêmes fins que celle soumise aux premiers juges sur le fondement des articles 1382 et 1383 du code civil, avec laquelle elle se confond en cause d'appel, ces fondements juridiques étant cumulativement invoquées ; qu'elle est donc recevable en application de l'article 565 du code de procédure civile ; Que sa demande de publication de l'arrêt à intervenir, qui n'est que le complément de la précédente, est également recevable en application de l'article 566 du même code ; qu'il convient donc de rejeter les exceptions d'irrecevabilité soulevées par les sociétés Puma ; Que ce que reproche en réalité la société Sporazur aux sociétés Puma, sous couvert d'abus du droit d'agir en justice, c'est en réalité le caractère comminatoire des correspondances de mise en demeure ayant précédé l'engagement de leur action en justice en contrefaçon de marques et concurrence déloyale, comme étant à l'origine de la cessation quasi-immédiate de la distribution d'articles jugés péremptoirement contrefaisants, ce qui était d'ailleurs l'objet de sa propre action en justice à leur encontre engagée préalablement ; que, de façon paradoxale, la société Sporazur présente comme inadmissible le comportement des sociétés Puma "qui ont considéré comme légitimes leurs protestations et certaine l'issue des procédures dont elles menaçaient leur concurrente" alors qu'à défaut d'intention de nuire ou de légèreté blâmable, un tel comportement est gage de la bonne foi des sociétés Puma ; que l'intention de nuire n'est pas invoquée ; que le ton comminatoire des correspondances incriminées, soit essentiellement la lettre du 17 octobre 2005 par laquelle le conseil des sociétés Puma a mis directement en demeure Yannick Z..., au motif d'une prétendue contrefaçon de marques par imitation de deux modèles de chaussures, d'avoir à retirer du marché tous les produits visés et de lui remettre certains documents lui permettant de chiffrer son préjudice, réitérée par lettre du 24 octobre 2005 à la société Le Coq Sportif, à la suite desquelles, par lettre du 29 octobre 2005, la société Sporazur dûment informée a demandé à la société Auchan de cesser la commercialisation des dits produits, est usuel pour ce type de lettre visant précisément à impressionner suffisamment la partie adverse pour qu'elle mette fin d'elle-même à des faits estimés illicites et obtenir d'elle réparation sans avoir à engager d'action en justice, ce qui engendre des frais supplémentaires ; qu'il en est de même de celui utilisé dans la lettre du 10 novembre 2005 par laquelle le conseil des sociétés Puma, après avoir pris connaissance des deux factures de vente des articles litigieux émis par la société Sporazur à l'attention des sociétés Auchan les 19 et 20 juillet, a mis en demeure M. Z... et la société Sporazur, par l'intermédiaire de leurs conseils, ainsi que la société Le Coq Sportif, d'avoir à payer la somme de 715 920 euros dans un délai impératif d'une semaine à défaut de quoi il saisirait les tribunaux, en sollicitant également la publication de la décision à intervenir ; qu'elles ne présentent pas le degré de gravité extrême et de violence que lui prête la société Sporazur qui a choisi librement, par mesure de prudence, de suspendre à titre conservatoire la commercialisation des modèles incriminés par les sociétés Puma ; que les sociétés Puma n'y ont aucunement présenté les contrefaçons reprochées comme des faits acquis selon décision de justice ; qu'aucune légèreté blâmable ne saurait être retenue à leur encontre, alors que leur action a été jugée recevable, tant en première instance qu'en cause d'appel et de surcroît reconnue partiellement bien fondée par le tribunal qui avait condamné, en raison de la commercialisation du modèle de chaussure "colour sky blue/white" la société Sporazur des chefs de contrefaçon de deux des marques invoquées par la société Puma et de concurrence déloyale à l'égard des sociétés Puma et Puma France ; que la société Sporazur échouant dans la démonstration d'une faute des sociétés Puma à l'origine de son préjudice, il convient, infirmant le jugement de ce chef, de rejeter sa demande en dommages et intérêts et en publication ; que le rejet de cette demande rend sans objet la demande des sociétés Puma tendant au rejet de certaines pièces produites par la société Sporazur pour caractériser son préjudice ; que l'appréciation erronée que la société Sporazur a fait de ses droits n'a pas dégénéré en abus du droit d'agir en justice et la demande de dommages et intérêts formée de ce chef par les sociétés Puma doit donc également être rejetée ;
1) ALORS QUE les dispositions de l'article 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC, dont l'application directe devait être envisagée ou qui devait à tout le moins guider l'interprétation donnée par le juge des règles gouvernant la responsabilité civile en pareille matière, n'exigent, pour caractériser l'utilisation abusive des procédures destinées à faire respecter les droits de propriété intellectuelle, ni intention de nuire ni légèreté blâmable, cet abus pouvant résulter de la multiplication et de la réitérations des procédures actions, mises en demeure et injonctions, fussent-elles non fautives ; qu'en rejetant la demande de la société Sporazur au seul motif de l'absence d'intention de nuire ou de légèreté blâmable, la cour d'appel a ajouté à 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC ainsi qu'à l'article 1241 (ancien article 1383) du code civil, des conditions qu'ils ne comportent pas; qu'elle a ainsi violé l'article 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC, ensemble l'article 1383 du code civil (article 1241 nouveau) ;
2) ALORS DE SURCROIT QUE le fait qu'une pratique soit usuelle ne suffit pas à exclure qu'elle soit abusive ; qu'en constatant le ton comminatoire des correspondances incriminées « visant à impressionner suffisamment la partie adversaire » et en rejetant néanmoins l'action engagée par la société Sporazur au motif que ces comportements étaient usuels et ne présentaient pas le degré de gravité extrême et de violence invoqué par la société Sporazur qui a choisi librement de suspendre la commercialisation des produits incriminés, sans rechercher si de telles manoeuvres et de pareilles menaces ne constituaient pas des moyens d'intimidation abusifs ayant eu pour effet de contraindre la société Sporazur à suspendre la commercialisation de ses produits, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard l'article 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC, ensemble l'article 1383 du code civil (article 1241 nouveau) ;
3) ALORS ENFIN QUE la cour d'appel ne pouvait déduire l'absence de légèreté blâmable du fait que l'action des sociétés Puma avait été jugée recevable et reconnue partiellement fondée en première instance sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de la société Sporazur, si, au-delà de l'action strictement engagée, l'abus ne résultait pas essentiellement de la multiplication des injonctions de faire et des diverses mesures de pression utilisées par les sociétés Puma ; qu'en statuant ainsi la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard l'article 48 alinéa 1e de l'accord ADPIC ainsi que de l'article 1383 du code civil (nouvel article 1241).